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You are here: BAILII >> Databases >> European Court of Human Rights >> BAKA v. GREECE - 24891/10 (Judgment (Merits and Just Satisfaction) : Court (First Section)) French Text [2016] ECHR 196 (18 February 2016) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/ECHR/2016/196.html Cite as: [2016] ECHR 196 |
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PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE BAKA c. GRÈCE
(Requête no 24891/10)
ARRÊT
STRASBOURG
18 février 2016
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Baka c. Grèce,
La Cour européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une chambre composée de :
Mirjana Lazarova Trajkovska,
présidente,
Kristina Pardalos,
Linos-Alexandre Sicilianos,
Paul Mahoney,
Aleš Pejchal,
Robert Spano,
Pauliine Koskelo, juges,
et de André Wampach, greffier adjoint de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 26 janvier 2016,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 24891/10) dirigée contre la République hellénique et dont une ressortissante de cet État, Mme Dimitra Baka (« la requérante »), a saisi la Cour le 28 avril 2010 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).
2. La requérante a été représentée par Me C. Kollokas, avocat à Athènes. Le gouvernement grec (« le Gouvernement ») a été représenté par les délégués de son agent, Mme K. Paraskevopoulou, conseillère au Conseil juridique de l’Etat, et M. D. Kalogiros, auditeur au Conseil juridique de l’Etat.
3. La requérante allègue une violation de son droit à un procès équitable (article 6 § 1 de la Convention).
4. Le 3 novembre 2011, la requête a été communiquée au Gouvernement.
EN FAIT
I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE
5. La requérante est née en 1940 et réside à Athènes.
A. La plainte portée contre la requérante par A.S. le 5 janvier 2003
6. Le 5 janvier 2003, A.S. porta plainte auprès du procureur près le tribunal correctionnel d’Ilia contre la requérante, qui était son avocate, pour détournement de fonds, fraude et abus de confiance. Plus particulièrement, A.S. alléguait qu’il avait confié à la requérante un litige contre une compagnie d’assurance au sujet d’un accident de la route et que la première avait conclu avec la deuxième pour le compte d’A.S. un règlement amiable pour une somme de 17 millions de drachmes (49 889 euros) qu’elle aurait détournée. Par la suite, la requérante lui aurait déclaré qu’elle avait reçu 7 millions de drachmes et qu’elle aurait détourné 10 millions. Enfin, A.S. soutenait que la requérante lui avait montré un reçu mais qui ne mentionnait aucun montant.
7. En 2004, le procureur décida de ne pas donner suite à la plainte. A.S. en appela alors contre cette décision et le procureur près la cour d’appel de Patras ordonna l’ouverture de poursuites contre la requérante pour « détournement d’objet de grande valeur » et pour faux et usage de faux.
8. Par une décision du 26 juillet 2006, la chambre d’accusation du tribunal correctionnel d’Ilia renvoya la requérante en jugement devant la cour d’appel criminelle de Patras, composée de trois juges. Le recours de la requérante contre ce renvoi fut rejeté.
9. Par un jugement no 17-20/2010 du 25 janvier 2010, la cour d’appel criminelle de Patras condamna la requérante à une peine d’emprisonnement de trois ans et six mois pour détournement et usage de faux. Par un arrêt no 583-584/2010 du 7 décembre 2010, la cour d’appel criminelle de Patras, composée de cinq juges, confirma la condamnation mais réduisit la peine à trois ans et quatre mois d’emprisonnement. Le 25 janvier 2011, la requérante se pourvut en cassation contre cet arrêt mais, le 12 janvier 2012, la Cour de cassation la débouta.
B. La plainte de la requérante du 20 février 2004
10. Le 20 février 2004, la requérante porta plainte auprès du procureur près le tribunal correctionnel d’Ilia contre trois personnes, dont A.S., pour fausse dénonciation, parjure et diffamation à répétition. Elle se constitua partie civile en réclamant la somme de 33 euros.
11. Le 3 juin 2004, la requérante fut convoquée à déposer dans le cadre de l’enquête préliminaire. Le 28 juin 2005, l’enquêteur convoqua aussi les trois personnes contre lesquelles la plainte était dirigée. La requérante avait porté à la connaissance des autorités qu’une procédure suite à une plainte d’A.S. était pendante contre elle.
12. Le 23 janvier 2006, le procureur près le tribunal correctionnel d’Ilia ajourna, sur le fondement de l’article 59 du code de procédure pénale, l’examen de la plainte jusqu’à ce que la procédure pénale à l’encontre de la requérante soit terminée, car l’issue de cette procédure aurait une incidence déterminante sur le sort de la plainte contre A.S. Le 20 mars 2006, le procureur près la cour d’appel de Patras entérina l’ajournement.
13. Le 10 mai 2009, le procureur près le tribunal d’Ilia rejeta la plainte au motif que les infractions qui y étaient mentionnées et commises en 2002 et 2003 étaient couvertes par la prescription quinquennale. Le procureur releva que l’article 59 constituait une loi plus sévère pour l’accusé en ce qui concernait la suspension du délai de prescription et ne pouvait pas être appliqué de manière rétroactive, c’est-à-dire pour des actes commis avant l’entrée en vigueur de la loi no 3346/2005. Par conséquent, pour ces actes-là le délai de la prescription courait normalement et ne pouvait pas être suspendu. S’il en allait autrement, la situation de l’accusé serait aggravée car au moment où ces actes avaient été commis, il n’existait pas de loi prévoyant la suspension du délai de prescription.
14. Le 8 juillet 2009, la requérante interjeta appel contre la décision du 10 mai 2009 devant le parquet près la cour d’appel de Patras.
15. Le 18 février 2010, ce dernier rejeta l’appel et confirma la prescription des infractions reprochées à A.S.
II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS
16. L’article 59 du code de procédure pénale (questions préjudicielles dans le procès pénal), tel qu’amendé par la loi no 3346/2005 relative à l’accélération des procédures devant les juridictions civiles et pénales, dispose :
« 1. Lorsque la décision dans un procès pénal dépend d’une autre affaire dans laquelle des poursuites ont été engagées, la première est ajournée jusqu’à ce qu’une décision définitive soit rendue dans le deuxième procès. »
2. Dans le cas des articles (...) lorsque des poursuites pénales sont engagées quant au fait étant l’objet litigieux du serment prêté, de la plainte déposée ou de la divulgation, le procureur près le tribunal correctionnel suspend la procédure par son propre acte, après l’instruction préliminaire de l’affaire et avec l’avis conforme du procureur près la cour d’appel, jusqu’à la fin des poursuites pénales. »
17. Le rapport explicatif de la loi no 3346/2005 précisait que la suspension de la prescription sans limite temporelle, prévue par l’article 59, était jugée nécessaire car le procès principal, dont dépendait l’issue d’un procès subsidiaire (παρεπόμενη), ainsi que la question de savoir si des poursuites pénales devaient être ou non engagées, durait d’habitude trop longtemps.
EN DROIT
I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION
18. La requérante se plaint d’une violation de son droit à un procès équitable car sa plainte avec constitution de partie civile a été rejetée pour cause de prescription des infractions dénoncées. Elle allègue une violation de l’article 6 § 1 qui dans sa partie pertinente se lit ainsi :
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal (...) qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »
A. Sur la recevabilité
19. Le Gouvernement soutient que la procédure litigieuse ne rentre pas dans le champ d’application de l’article 6 : la jurisprudence Sigalas c. Grèce (19754/02, §§ 25-29, 22 septembre 2005) trouve à s’appliquer en l’espèce parce que la plainte de la requérante ne visait pas à protéger ou à réparer ses droits à caractère civil nés des infractions qui y étaient dénoncées, mais s’inscrivait dans le cadre de sa défense contre les accusations de détournement et de faux.
20. La requérante rétorque qu’en portant plainte le 20 février 2004, elle ne visait pas seulement la réparation de ses droits à caractère civil mais aussi la réparation morale de l’atteinte portée à son honneur et à sa réputation en tant qu’individu mais aussi en tant que professionnelle. La simple plainte ne suffisant pas à cet égard, elle s’est aussi constituée partie civile pour obtenir réparation.
21. La Cour rappelle que le système juridique grec prévoit que l’intéressé qui dépose une plainte avec constitution de partie civile entame en principe des poursuites judiciaires afin d’obtenir des juridictions pénales une déclaration de culpabilité et, en même temps, une réparation, fût-elle minime (voir Perez c. France [GC], no 47287/99, §§ 70-71, CEDH 2004-I, et Diamantides c. Grèce (déc.), no 71563/01, 20 novembre 2003). Dans la présente affaire, il est à noter que la somme pour laquelle la requérante s’est constituée partie civile confirme le caractère indemnitaire de sa démarche. Il s’ensuit que l’article 6 est applicable en l’occurrence dans son volet civil. Il convient donc de rejeter l’exception d’irrecevabilité pour incompatibilité ratione materiae soulevée par le Gouvernement.
22. La Cour constate par ailleurs que la requête n’est pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’elle ne se heurte par ailleurs à aucun autre motif d’irrecevabilité. Elle la déclare donc recevable.
B. Sur le fond
23. Le Gouvernement soutient que l’issue de la plainte de la requérante en l’espèce était « prédéterminée » indépendamment de la prescription des actes dénoncés dans celle-ci et aucun droit de caractère civil n’était né à son bénéfice. Il souligne que la qualification des infractions reprochées à la requérante (détournement de fonds et altération de document) a été établie de manière définitive par la cour d’appel criminelle et n’est pas soumise au contrôle de la Cour de cassation. Les actes pour lesquels elle était donc condamnée resteraient inchangés quelle qu’ait été la décision de la Cour de cassation. Par conséquent, l’allégation de la requérante dans sa plainte du 2 février 2004, selon laquelle les actes qui lui sont reprochés sont mensongers, est non-fondée. Même s’il n’y avait pas prescription des infractions reprochées par la requérante aux trois personnes visées dans sa plainte, ses prétentions civiles auraient été jugées non fondées.
24. Le Gouvernement soutient qu’en raison de la nature du procès pénal, l’examen des prétentions civiles de la partie civile dans ce procès ne dépend pas de celle-ci. Le but du procès pénal consiste surtout à répondre à l’action publique engagée par l’Etat. La requérante, en tant que partie civile et avocate, avait la possibilité d’interrompre la prescription en introduisant une action devant les juridictions civiles. Pour que les infractions dénoncées par la requérante échappent à la prescription, il aurait fallu soit qu’une décision définitive dans la procédure à l’encontre de la requérante soit prise jusqu’au 15 janvier 2008, soit que l’article 59 ait été interprété de manière à ne pas aggraver la situation de l’accusé. Or, l’adoption d’une décision définitive dans un délai de cinq ans dans la procédure contre la requérante était impossible car il y avait deux décisions des procureurs (une de celui près le tribunal correctionnel et une de celui près la cour d’appel), deux décisions en matière de renvoi en jugement et deux arrêts (cour d’appel criminelle statuant en première et deuxième instance).
25. La requérante affirme que l’issue de sa plainte n’était pas du tout « prédéterminée » car si la Cour de cassation avait infirmé l’arrêt de la cour d’appel criminelle, elle lui aurait renvoyé l’affaire pour un nouvel examen ayant pu aboutir à un résultat opposé au précédent. Les autorités judiciaires ont interprété de manière erronée l’article 59 précité, tel que modifié par la loi no 3346/2005 et ont ajourné l’examen de sa plainte, ce qui a eu pour conséquence la prescription des infractions mentionnées dans sa plainte et le rejet ultérieur de celle-ci, éléments qui ont conduit à l’issue favorable de la plainte d’A.S contre elle. Cette prescription l’a privée de la possibilité d’invoquer devant les tribunaux qui examinaient la plainte d’A.S. les arguments et témoignages sur lesquels s’appuyait sa propre plainte, ce qui a entrainé une rupture de l’égalité des armes entre elle et A.S.
26. La requérante souligne, en outre, qu’elle n’est aucunement responsable du fait que les tribunaux ont mis si longtemps pour statuer sur la plainte d’A.S., alors qu’ils savaient que le caractère punissable des actes mentionnés dans sa propre plainte risquait d’être prescrit. Comme dans les deux plaintes, il y avait identité de sujets et connexité de délits, les autorités judiciaires auraient dû les examiner ensemble après les avoir jointes.
27. La Cour rappelle que chaque justiciable possède le droit à ce qu’un tribunal connaisse toute contestation relative à ses droits et obligations de caractère civil. C’est ainsi que l’article 6 § 1 consacre le « droit à un tribunal », dont le droit d’accès, à savoir le droit de saisir le tribunal en matière civile, ne constitue qu’un aspect (Prince Hans-Adam II de Liechtenstein c. Allemagne [GC], no 42527/98, § 43, CEDH 2001-VIII). Le droit d’accès à un tribunal n’est cependant pas absolu ; appelant de par sa nature même une réglementation par l’État, il peut donner lieu à des limitations, lesquelles ne sauraient cependant restreindre l’accès d’une manière ou à un point tels que le droit s’en trouve atteint dans sa substance même (Gousis c. Grèce, no 8863/03, § 33, 29 mars 2007).
28. La Cour note qu’elle a déjà eu l’occasion de se prononcer sur une question similaire à celle posée en l’occurrence, dans son arrêt Anagnostopoulos c. Grèce (no 54589/00, § 32, 3 avril 2003). En particulier, la Cour a considéré que :
« (...) lorsque l’ordre juridique interne offre un recours au justiciable, tel le dépôt d’une plainte avec une constitution de partie civile, l’État a l’obligation de veiller à ce que celui-ci jouisse des garanties fondamentales de l’article 6. En l’espèce, le requérant avait introduit une demande d’indemnisation pour un montant de GRD 15 000, ce qui constitue une [demande ] que les juridictions pénales examinent dans tous les cas sans être obligées de renvoyer aux juridictions civiles. Le requérant avait donc une espérance légitime d’attendre que les tribunaux statuent sur cette demande d’indemnisation, que ce soit de manière favorable ou défavorable. Le retard avec lequel les autorités des poursuites ont traité le dossier, ce qui a entraîné la prescription des infractions incriminées et, par conséquent, l’impossibilité pour le requérant de voir statuer sur sa demande d’indemnisation, a privé ce dernier d’un droit d’accès à un tribunal. »
29. En outre, la Cour a constaté une violation de l’article 6 § 1 (droit d’accès à un tribunal) dans plusieurs affaires dans lesquelles l’abandon des poursuites et le non examen d’une constitution de partie civile en résultant étaient dues à l’absence de diligence des autorités (Gousis, précité, §§ 34-35 ; Atanasova c. Bulgarie, no 72001/01, §§ 35-47, 2 octobre 2008 ; Dinchev c. Bulgarie, no 23057/03, §§ 40-52, 22 janvier 2009; Tonchev c. Bulgarie, no 18527/02, §§ 50-53, 19 novembre 2009 et Boris Stojanovski c. l’ex-République Yougoslave de Macédoine, no 41916/06, §§ 56-57, 6 mai 2010).
30. En l’espèce, la Cour observe que l’action civile introduite par la requérante en même temps que sa plainte le 20 février 2004 est restée pendante devant les instances judiciaires compétentes jusqu’au 10 mai 2009 avant que le procureur près le tribunal correctionnel d’Ilia ne constate, en vertu de la législation pertinente, la prescription des infractions mentionnées dans la plainte. En particulier, la Cour relève que, le 23 janvier 2006, le procureur près la cour d’appel de Patras a décidé d’ajourner, sur le fondement de l’article 59 du code de procédure pénale, l’examen de la plainte de la requérante jusqu’à ce que la procédure pénale engagée contre elle, suite à la plainte d’A.S., soit terminée par une décision définitive car l’issue de cette procédure aurait une incidence déterminante sur le sort de ladite plainte.
31. Le 10 mai 2009, en rejetant la plainte pour cause de prescription, le procureur a affirmé que l’article 59 constituait une loi plus sévère pour l’accusé en ce qui concernait la suspension du délai de prescription et ne pouvait pas être appliqué de manière rétroactive, c’est-à-dire pour des actes commis avant l’entrée en vigueur de la loi no 3346/2005 qui avait amendé cet article (paragraphes 16-17 ci-dessus). Le procureur a souligné que pour ces actes-là, comme c’était le cas des infractions mentionnées par la requérante dans sa plainte, le délai de la prescription courait normalement et ne pouvait pas être suspendu comme le prévoyait l’article 59 dans sa version amendée.
32. La Cour relève que l’article 59 prévoit que lorsque la décision dans un procès pénal dépend d’une autre affaire dans laquelle des poursuites ont été engagées, la première est ajournée jusqu’à ce qu’une décision définitive soit rendue dans le deuxième procès. Si le procureur près le tribunal correctionnel d’Ilia a décidé d’ajourner l’examen de la plainte de la requérante, il a pourtant au bout de cinq ans décidé de ne pas poursuivre l’examen de cette plainte pour cause de prescription, en donnant les motifs pour étayer sa décision. La Cour réitère qu’il incombe au premier chef aux autorités nationales, et notamment aux tribunaux, d’interpréter et d’appliquer le droit interne. Son rôle se limite à vérifier la compatibilité avec la Convention des effets de pareille interprétation et, excepté lorsque l’appréciation par les autorités est révélatrice d’un arbitraire évident, elle n’est pas compétente pour mettre en cause l’interprétation faite de la législation interne par ces juridictions (Ferreira Santos Pardal c. Portugal, no 30123/10, § 42, 30 juillet 2015). Il s’ensuit que la Cour ne peut pas contrôler la manière dont le procureur a interprété et appliqué l’article 59 dans le cas d’espèce le 10 mai 2009, d’autant plus que cette interprétation n’était pas arbitraire ou déraisonnable.
33. À cet égard, la Cour note que l’article 59 ne prévoit pas de limite temporelle quant à la suspension de la prescription. Toutefois, en déclarant prescrites les infractions dénoncées par la requérante dans sa plainte, le procureur n’a pas transgressé les dispositions de cet article. Il a seulement motivé sa décision par le fait qu’il ne trouvait pas à s’appliquer aux faits incriminés car commis avant l’entrée en vigueur de la loi no 3346/2005 amendant cet article.
34. La Cour considère de toute manière que la décision sur la plainte introduite le 5 janvier 2003 par A.S. contre la requérante aurait des conséquences déterminantes sur la plainte introduite par la requérante le 20 février 2004 contre A.S. La requérante a été renvoyée en jugement le 26 juillet 2006 et sa condamnation pour les faits dénoncés dans la plainte d’A.S. n’aurait pas manqué d’avoir des conséquences quant à la plainte de celle-ci, notamment en enlevant toute crédibilité aux faits dénoncés par elle. Par ailleurs, les allégations de la requérante dans sa plainte contre A.S., relatives à la fausse dénonciation, au parjure et à la diffamation, faisaient sans doute partie de ses arguments en défense présentés dans la première procédure introduite par ce dernier contre elle. La requérante a eu alors l’opportunité dans le cadre de cette première procédure de faire valoir ces arguments qui apparemment n’ont pas convaincu la cour d’appel criminelle de Patras qui l’a condamnée par son arrêt du 25 janvier 2010.
35. La Cour conclut qu’en rejetant la plainte avec constitution de partie civile de la requérante, les autorités compétentes n’ont pas violé en l’espèce l’article 6 § 1 de la Convention.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,
1. Déclare la requête recevable ;
2. Dit qu’il n’y a pas eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 18 février 2016, en application de l’article 77§§2 et 3 du règlement de la Cour.
André Wampach Mirjana
Lazarova Trajkovska
Greffier adjoint Présidente