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You are here: BAILII >> Databases >> European Court of Human Rights >> ROZALIA AVRAM v. ROMANIA - 19037/07 (Judgment (Just Satisfaction) : Court (Third Section)) French Text [2016] ECHR 337 (05 April 2016) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/ECHR/2016/337.html Cite as: [2016] ECHR 337 |
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TROISIÈME SECTION
AFFAIRE ROZALIA AVRAM c. ROUMANIE
(Requête no 19037/07)
ARRÊT
(Satisfaction équitable)
STRASBOURG
5 avril 2016
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.
En l’affaire Rozalia Avram c. Roumanie,
La Cour européenne des droits de l’homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :
Luis López Guerra,
président,
Helena Jäderblom,
George Nicolaou,
Helen Keller,
Johannes Silvis,
Valeriu Griţco,
Iulia Antoanella Motoc, juges,
et de Marialena Tsirli, greffière adjointe de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 15 mars 2016,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 19037/07) dirigée contre la Roumanie et dont une ressortissante de cet État, Mme Rozalia Avram (« la requérante »), a saisi la Cour le 11 avril 2007 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).
2. Par un arrêt du 16 septembre 2014 (« l’arrêt au principal »), la Cour a conclu à la violation de l’article 6 § 1 de la Convention au motif qu’en revenant sur la question de la legalité de la vente par l’État d’un appartement à la requérante, question qui avait été déjà tranchée et qui avait fait l’objet d’une décision définitive, la cour d’appel de Timisoara a enfreint le principe de la sécurité des rapports juridiques. Compte tenu de la conclusion à laquelle elle est arrivée sur le terrain de l’article 6 § 1 de la Convention, la Cour a estimé qu’il n’y avait lieu d’examiner ni la recevabilité ni le bien-fondé du grief présenté par la requérante sous l’angle de l’article 1 du Protocole no 1 à la Convention (Rozalia Avram c. Roumanie, no 19037/07, §§ 43 et 46, 16 septembre 2014).
3. En s’appuyant sur l’article 41 de la Convention, la requérante réclamait 70 000 euros (EUR) au titre du dommage matériel et 5 000 EUR pour le dommage moral.
4. La question de l’application de l’article 41 de la Convention ne se trouvant pas en état, la Cour l’a réservée et a invité le Gouvernement et la requérante à lui soumettre par écrit, dans les six mois, leurs observations sur ladite question et notamment à lui donner connaissance de tout accord auquel ils pourraient aboutir (ibidem, § 50 et point 5 du dispositif).
5. Tant la requérante que le Gouvernement ont déposé des observations.
EN DROIT
6. Aux termes de l’article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A. Dommage
7. La requérante allègue avoir subi un dommage tant matériel que moral. Pour le préjudice matériel, elle réclame la restitution de l’appartement litigieux. A défaut d’une telle restitution, elle sollicite l’octroi de la somme de 70 000 EUR qui représenterait la valeur marchande de l’appartement. Elle précise qu’elle ne dispose pas de moyens financiers pour réaliser une expertise de la valeur exacte de l’appartement.
8. Par ailleurs, au titre du dommage moral, elle réclame la somme de 5 000 EUR, en raison notamment du sentiment de désarroi dû au fait de devoir subir à un âge avancé les litiges concernant l’appartement.
9. La requérante expose, en outre, que le 18 mars 2015, elle a demandé la révision de l’arrêt de la cour d’appel de Timisoara qui avait prononcé l’annulation de la vente de l’appartement. Par un arrêt définitif rendu le 13 octobre 2015 par la même cour d’appel, sa demande a été rejetée au motif que la réouverture de cette procédure porterait atteinte à l’autorité de chose jugée de l’arrêt qui l’avait clôturée. Par ailleurs, la cour d’appel a estimé que le Gouvernement pouvait effacer les conséquences de la violation constatée en concluant un accord avec la requérante.
10. Le Gouvernement conteste les prétentions de la requérante. Pour le préjudice matériel, en se fondant sur les informations fournies par la chambre locale des notaires, il indique que la valeur de l’appartement litigieux serait évaluée à 33 903 EUR. Il précise que, par une décision du 25 novembre 2014, la Commission spéciale de restitution des immeubles ayant appartenu aux cultes religieux a restitué l’appartement litigieux à l’évêché catholique d’Oradea qui en réclamait la propriété.
11. Quant au préjudice moral, il considère excessif le montant réclamé par la requérante.
12. La Cour rappelle qu’elle a conclu en l’espèce à la violation de l’article 6 § 1 de la Convention en raison du non-respect du droit de la requérante à un procès équitable.
13. La Cour rappelle également que, lorsqu’elle constate la violation des droits d’un requérant sous cet angle, le nouveau code de procédure civile roumain permet la révision d’un procès sur le plan interne. Par conséquent, elle n’accorde pas d’indemnité au titre du dommage matériel (voir, mutatis mutandis, Sfrijan c. Roumanie, no 20366/04, § 48, 22 novembre 2007 et S.C. IMH Suceava S.R.L. c. Roumanie, no 24935/04, § 56, 29 octobre 2013).
14. Cependant, en l’espèce, la Cour ne saurait ignorer qu’après l’arrêt au principal, la demande de révision introduite par la requérante sur le fondement de l’arrêt de la Cour a été définitivement rejetée et que l’appartement litigieux a été restitué à l’évêché catholique.
15. Par conséquent, la Cour doit tenir compte du fait que la requérante n’a désormais plus aucune possibilité pratique de faire redresser au niveau interne la violation constatée en l’espèce.
16. Dès lors, statuant en équité, la Cour juge raisonnable d’allouer à la requérante 34 000 EUR tous dommages confondus, plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt sur cette somme.
B. Frais et dépens
17. La requérante, qui a bénéficié de l’aide juridictionnelle versée par le Conseil de l’Europe pour la présentation de ses observations et commentaires, ne demande pas le remboursement d’autres frais et dépens.
C. Intérêts moratoires
18. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,
1. Dit
a) que l’État défendeur doit verser à la requérante, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, 34 000 EUR (trente-quatre mille euros) pour dommages matériel et moral, plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt sur cette somme, à convertir dans la monnaie de l’État défendeur au taux applicable à la date du règlement ;
b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ce montant sera à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;
2. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 5 avril 2016, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement de la Cour.
Marialena
Tsirli Luis
López Guerra
Greffière adjointe Président