C40805 Groupe d'Information et de Soutien des Immigres (GISTI) v Commission of the European Communities [2006] EUECJ C-408/05 (6 April 2006)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2006/C40805.html
Cite as: [2006] EUECJ C-408/5, [2006] EUECJ C-408/05, [2006] ECR I-52

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AVIS JURIDIQUE IMPORTANT: IMPORTANT LEGAL NOTICE - The source of this judgment is the web site of the Court of Justice of the European Communities. The information in this database has been provided free of charge and is subject to a Court of Justice of the European Communities disclaimer and a copyright notice. This electronic version is not authentic and is subject to amendment.


ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)
6 avril 2006 (*)

«Pourvoi -" Refus de la Commission des Communautés européennes d'examiner une plainte contre les autorités italiennes -" Pourvoi manifestement non fondé»

Dans l'affaire C-408/05 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l'article 56 du statut de la Cour de justice, introduit le 18 novembre 2005,
Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI), établi à Paris (France), représenté par Mes H. Gacon et S. Foreman, avocats,

partie requérante,

l'autre partie à la procédure étant:
Commission des Communautés européennes,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (sixième chambre),
composée de M. J. Malenovský (rapporteur), président de chambre, et MM. S. von Bahr et A. Borg Barthet, juges,
avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,
greffier: M. R. Grass,
l'avocat général entendu,
rend la présente
Ordonnance
  1. Par son pourvoi, le groupe d'information et de soutien des immigrés (ci-après le «GISTI») demande l'annulation de l'ordonnance du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 6 septembre 2005, GISTI/Commission (T-209/05, non publiée au Recueil, ci-après «l'ordonnance attaquée»), par laquelle celui-ci a rejeté comme irrecevable son recours tendant à l'annulation d'une décision de la Commission des Communautés européennes, du 18 mars 2005, portant refus d'engager une procédure en constatation de manquement à l'encontre de la République italienne (ci-après la «décision attaquée»).
  2. Les faits à l'origine du litige

  3. Les faits à l'origine du litige sont énoncés au point 1 de l'ordonnance attaquée, dans les termes suivants:
  4. «[Le GISTI], ensemble avec neuf autres associations européennes de défense des droits des migrants et demandeurs d'asile, a déposé, le 25 janvier 2005, une plainte, datée du 20 janvier 2005, auprès de la Commission concernant 'les agissements des autorités italiennes qui ont, entre le 1er et le 7 octobre 2004, organisé l'expulsion de plus de 1 500 personnes migrants et potentiels demandeurs d'asile, depuis l'île de Lampedusa, au sud de la Sicile, vers la Libye'. D'après les plaignants, ces expulsions se seraient déroulées en violation d'un certain nombre de prescriptions du droit international et communautaire. Ils ont demandé, en conséquence, qu'une procédure en manquement soit engagée à l'encontre de la République italienne. Par [la décision attaquée], la Commission a refusé d'examiner cette plainte.»

    Le recours devant le Tribunal et l'ordonnance attaquée

  5. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 mai 2005, le GISTI a introduit un recours tendant à l'annulation de la décision attaquée.
  6. Aux points 7 à 11 de l'ordonnance attaquée, le Tribunal a motivé sa décision comme suit:
  7. «7 Selon une jurisprudence constante, les particuliers ne sont pas recevables à attaquer un refus de la Commission d'engager une procédure en constatation de manquement à l'encontre d'un État membre (ordonnance de la Cour du 12 juin 1992, Asia Motor France/Commission, C-29/92, Rec. p. I-3935, point 21; ordonnance du Tribunal du 13 novembre 1995, Dumez/Commission, T-126/95, Rec. p. II-2863, point 33, et arrêt du Tribunal du 22 mai 1996, AITEC/Commission, T-277/94, Rec. p. II-351, point 55).
    8 En effet, lorsque, comme en l'espèce, une décision de la Commission revêt un caractère négatif, cette décision doit être appréciée en fonction de la nature de la demande à laquelle elle constitue une réponse (arrêt de la Cour du 8 mars 1972, Nordgetreide/Commission, 42-71, Rec. p. 105, point 5; ordonnance Dumez/Commission, précitée, point 34, et arrêt du Tribunal du 22 octobre 1996, Salt Union/Commission, T-330/94, Rec. p. II-1475, point 32).
    9 Il convient de rappeler que l'article 230, quatrième alinéa, CE subordonne la recevabilité d'un recours en annulation formé par une personne physique ou morale contre une décision dont elle n'est pas le destinataire à la condition que la décision la concerne directement et individuellement.
    10 Or, dans le cadre de la procédure en manquement régie par l'article 226 CE, les seuls actes que la Commission peut être amenée à prendre sont adressés aux États membres (ordonnances du Tribunal du 29 novembre 1994, Bernardi/Commission, T-479/93 et T-559/93, Rec. p. II-1115, point 31, et du 19 février 1997, Intertronic/Commission, T-117/96, Rec. p. II-141, point 32). En outre, il résulte du système prévu par l'article 226 CE que ni l'avis motivé, qui ne constitue qu'une phase préalable au dépôt éventuel d'un recours en constatation de manquement devant la Cour, ni la saisine de la Cour par le dépôt effectif d'un tel recours ne sauraient constituer des actes concernant de manière directe les personnes physiques ou morales.
    11 Il s'ensuit que la demande de la partie requérante visant à l'annulation de la décision [attaquée], portant refus d'engager une procédure en constatation de manquement au titre de l'article 226 CE à l'encontre de la République italienne, doit être rejetée comme manifestement irrecevable, sans qu'il soit nécessaire de signifier le recours à la partie défenderesse.»

    Le pourvoi

  8. Par son pourvoi, le GISTI conclut à ce qu'il plaise à la Cour:
  9. -" annuler l'ordonnance attaquée;
    -" annuler la décision attaquée;
    -" inviter la Commission à prendre toutes les mesures nécessaires à l'exécution de la décision à intervenir.

    Sur le pourvoi

  10. Il y a lieu de rappeler que, conformément à l'article 119 de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi est manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, le rejeter par voie d'ordonnance motivée.
  11. Il résulte de l'argumentation du GISTI que celui-ci entend se prévaloir de deux moyens. Le premier, qui comporte deux branches, est tiré de ce que le Tribunal a fait une application erronée des dispositions de l'article 230, quatrième alinéa, CE. Le second moyen est tiré d'une insuffisance de la motivation de l'ordonnance attaquée.
  12. Sur le premier moyen

    En ce qui concerne la première branche

  13. Par la première branche du premier moyen, le GISTI fait valoir que le Tribunal s'est mépris sur la qualification de la décision attaquée qui ne constitue pas une décision de refus d'engager une procédure en constatation de manquement. Il s'agirait d'une «décision d'incompétence» par laquelle la Commission aurait, à tort, renoncé à examiner la plainte dont elle était saisie, notamment par le GISTI, lequel serait dès lors recevable à contester cette décision qui le concerne personnellement et directement au sens de l'article 230, quatrième alinéa, CE.
  14. Il convient, cependant, de relever que tant au point 10 de son pourvoi qu'au point 2.2.2 de la requête présentée devant le Tribunal, le GISTI a précisé que la plainte dont il avait saisi la Commission tendait à ce que cette dernière engage une action en manquement contre la République italienne en application de l'article 226 CE. C'est en réponse à cette demande que la Commission a adopté la décision attaquée.
  15. Lorsqu'une décision de la Commission revêt un caractère négatif, elle doit être appréciée en fonction de la nature de la demande à laquelle elle constitue une réponse (arrêt du 24 novembre 1992, Buckl e.a./Commission, C-15/91 et C-108/91, Rec. p. I-6061, point 22).
  16. Dans ces conditions, la décision attaquée, en ce qu'elle constituait une réponse négative à la plainte dont la Commission était saisie et qui tendait à ce que cette dernière engage une action en manquement contre la République italienne en application de l'article 226 CE, ne pouvait être analysée par le Tribunal que comme une décision de refus d'engager une telle action en manquement, quel que soit le motif retenu pour justifier un tel refus.
  17. En soutenant devant le Tribunal que la Commission, pour opposer ce refus, s'était à tort déclarée incompétente en matière de droits fondamentaux et que ce motif était ainsi erroné en droit, le GISTI a soulevé, de la sorte, un moyen de fond dont l'examen présentait un caractère subséquent par rapport à la question de savoir au préalable si le recours était recevable. Il appartenait, en effet, au Tribunal, avant toute appréciation du bien-fondé de ce moyen, de statuer sur la recevabilité du recours en annulation dirigé contre une telle décision de refus d'engager une procédure en manquement.
  18. Comme l'a rappelé à juste titre le Tribunal au point 7 de l'ordonnance attaquée, selon une jurisprudence constante, les particuliers ne sont pas recevables à attaquer un refus de la Commission d'engager une procédure en constatation de manquement à l'encontre d'un État membre (arrêt du 17 mai 1990, Sonito e.a./Commission, C-87/89, Rec. p. I-1981, point 6; ordonnance Asia Motor France/Commission, précitée, point 21, et arrêt du 20 février 1997, Bundesverband der Bilanzbuchhalter/Commission, C-107/95 P, Rec. p. I-947, point 19).
  19. En effet, il résulte de l'économie de l'article 226 CE que la Commission n'est pas tenue d'engager une procédure au sens de cette disposition, mais qu'elle dispose d'un pouvoir d'appréciation discrétionnaire excluant le droit pour les particuliers d'exiger de l'institution qu'elle prenne une position dans un sens déterminé et d'introduire un recours en annulation contre son refus d'agir (arrêt Sonito e.a./Commission, précité, point 6, et ordonnance du 17 juillet 1998, Sateba/Commission, C-422/97 P, Rec. p. I-4913, point 42).
  20. C'est seulement si elle estime que l'État membre en cause a manqué à une de ses obligations que la Commission émet un avis motivé. En outre, dans le cas où cet État ne se conforme pas à cet avis dans le délai imparti, la Commission, en tout état de cause, a la faculté, mais non l'obligation, de saisir la Cour de justice en vue de faire constater le manquement reproché (arrêt Sonito e.a., précité, point 7).
  21. En demandant à la Commission d'ouvrir une procédure en application de l'article 226 CE, le GISTI a sollicité, en réalité, l'adoption d'actes qui ne le concernent pas directement et individuellement au sens de l'article 230, quatrième alinéa, CE et que, en tout état de cause, il ne pourrait donc pas attaquer par la voie du recours en annulation (voir, en ce sens, arrêt du 14 février 1989, Star Fruit/Commission, 247/87, Rec. p. 291, point 13).
  22. Dans ces conditions, le GISTI ne saurait utilement se prévaloir de la circonstance que la réponse de la Commission lui a été adressée directement et individuellement pour soutenir qu'il était recevable, sur le fondement de l'article 230, quatrième alinéa, CE, à contester devant le Tribunal la décision attaquée.
  23. La première branche du premier moyen est dès lors manifestement non fondée.
  24. En ce qui concerne la seconde branche

  25. Par la seconde branche du premier moyen, le GISTI soutient que, même si la décision attaquée devait être qualifiée de refus d'engager une procédure en constatation de manquement, elle était néanmoins susceptible de recours.
  26. Le GISTI fait valoir, à cet égard, que la jurisprudence de la Cour admet la recevabilité de recours dirigés contre des décisions prises par la Commission dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation discrétionnaire, lorsque ce recours relève, comme en l'espèce, de situations exceptionnelles. Il entend se prévaloir du point 25 de l'arrêt Bundesverband der Bilanzbuchhalter/Commission, précité, selon lequel il ne saurait être exclu a priori qu'il puisse exister des situations exceptionnelles où un particulier ou, éventuellement, une association constituée pour la défense des intérêts collectifs d'une catégorie de justiciables a la qualité pour agir en justice contre un refus de la Commission d'adopter une décision dans le cadre de sa mission de surveillance prévue à l'article 86, paragraphes 1 et 3, CE.
  27. à cet égard, il importe de relever que cette appréciation a été portée par la Cour dans le cadre de l'application des dispositions spécifiques du traité CE relatives au droit de la concurrence. Elle ne saurait être utilement invoquée à l'appui d'un recours dirigé contre une décision de refus d'engager la procédure prévue à l'article 226 CE.
  28. D'ailleurs, dès lors que, comme il a été rappelé au point 14 de la présente ordonnance, la Commission dispose, dans le cadre de l'article 226 CE, d'un pouvoir d'appréciation discrétionnaire excluant le droit pour les particuliers d'exiger de l'institution qu'elle prenne une position dans un sens déterminé et d'introduire un recours en annulation contre son refus d'agir, admettre que des situations exceptionnelles justifieraient la recevabilité d'un tel recours reviendrait à reconnaître, en contradiction avec la volonté des auteurs du traité, le droit pour les particuliers d'exiger que la Commission prenne une position dans un sens déterminé.
  29. Le GISTI ne saurait, dès lors, utilement se prévaloir de l'existence d'une telle situation exceptionnelle pour prétendre à la recevabilité de son recours en annulation sur le fondement de l'article 230, quatrième alinéa, CE.
  30. Ainsi, la seconde branche du premier moyen est également manifestement non fondée.
  31. Sur le second moyen

  32. Par son second moyen, le GISTI soutient que le Tribunal n'a pas suffisamment motivé son ordonnance, dans la mesure où il aurait omis de se prononcer sur l'argument tiré de l'existence d'une situation exceptionnelle.
  33. Il suffit, à cet égard, de rappeler que l'obligation pour le Tribunal de motiver ses décisions ne saurait être interprétée comme impliquant qu'il soit tenu de répondre dans le détail à chaque argument invoqué par le requérant (voir, en ce sens, arrêts du 6 mars 2001, Connolly/Commission, C-274/99 P, Rec. p. I-1611, point 121, et du 11 septembre 2003, Belgique/Commission, C-197/99 P, Rec. p. I-8461, point 81).
  34. En considérant que, contrairement à ce que soutenait le GISTI, le recours de ce dernier était irrecevable en application de la jurisprudence constante qui a été rappelée explicitement au point 7 de l'ordonnance attaquée, et qui exclut implicitement mais nécessairement qu'il puisse y être fait échec à raison de situations exceptionnelles, le Tribunal ne saurait avoir manqué, en l'espèce, à son obligation de motivation.
  35. Le second moyen est dès lors manifestement non fondé.
  36. Il résulte de l'ensemble de ces considérations qu'il y a lieu de rejeter le pourvoi comme étant manifestement non fondé.
  37. Sur les dépens

  38. Aux termes de l'article 69, paragraphe 1, du règlement de procédure, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l'article 118 du même règlement, il est statué sur les dépens dans l'ordonnance qui met fin à l'instance. En l'espèce, le GISTI ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens.
  39. Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) ordonne:

    1) Le pourvoi est rejeté.

    2) Le groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI) supporte ses propres dépens.

    Signatures


    * Langue de procédure: le français.


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