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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Paint Graphos (State aid) French Text [2010] EUECJ C-79/08 (08 July 2010)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2010/C7908_O.html
Cite as: [2010] EUECJ C-79/08, [2010] EUECJ C-79/8

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AVIS JURIDIQUE IMPORTANT: IMPORTANT LEGAL NOTICE - The source of this judgment is the web site of the Court of Justice of the European Communities. The information in this database has been provided free of charge and is subject to a Court of Justice of the European Communities disclaimer and a copyright notice. This electronic version is not authentic and is subject to amendment.



CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NIILO JÄÄSKINEN

présentées le 8 juillet 2010 (1)

Affaires jointes C-78/08 à C-80/08

Amministrazione delle Finanze,

Agenzia delle Entrate

contre

Paint Graphos scarl (C-78/08),

Adige Carni scrl, en liquidation,

contre

Ministero dell’Economia e delle Finanze,

Agenzia delle Entrate (C-79/08)

et

Ministero delle Finanze

contre

Michele Franchetto (C-80/08)

[demandes de décision préjudicielle introduites par la Corte suprema di cassazione (Italie)]

«Aides d’État – Avantages fiscaux octroyés aux sociétés coopératives de production et de travailleurs – Notions d’avantage et de sélectivité»





1.        Dans le cadre des présentes affaires, la juridiction nationale soumet à la Cour une série de questions portant principalement sur la question de savoir si le régime fiscal national relatif à l’exonération des sociétés coopératives de production et de travail est susceptible d’être qualifié d’aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE (2).

2.        Les questions préjudicielles ont été posées dans le cadre de trois litiges ayant pour objet, d’une part, le refus, de la part de l’administration fiscale italienne, d’accorder aux sociétés coopératives Paint Graphos scarl (ci-après «Paint Graphos») et Adige Carni scrl (en liquidation) (ci-après «Adige Carni») les exonérations fiscales dont bénéficiaient, à l’époque, les sociétés coopératives en application du droit italien et, d’autre part, la problématique de l’imposition personnelle de M. Franchetto, qui a contesté les décisions de l’administration fiscale nationale visant à rectifier ses déclarations de revenus pour les années 1984-1988.

3.        D’emblée, il convient de souligner que les renvois préjudiciels en cause soulèvent des doutes sérieux quant à leur recevabilité. En effet, l’une des difficultés majeures du présent dossier réside dans le contraste entre le nombre limité des données qui ont été fournies à la Cour et l’ampleur de la problématique dont elle est saisie, dès lors qu’elle est amenée à examiner, notamment, le régime de la taxation des sociétés coopératives de production et de travail.

4.        Si, toutefois, la Cour envisageait de répondre aux questions, qu’il conviendrait nécessairement de reformuler, la présente procédure constituerait une opportunité intéressante d’analyser la portée des notions d’avantage et de sélectivité de mesures nationales portant sur la fiscalité des sociétés coopératives. En particulier, se poseraient les questions de l’application du critère de la justification fondée sur la logique inhérente au régime national et de l’analyse des options retenues par le législateur italien dans le cadre du système national de fiscalité directe.

I –    Le cadre juridique

A –    Le droit de l’Union

5.        L’article 87, paragraphe 1, CE dispose:

«Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.»

6.        L’article 1er du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article 93 du traité CE (JO L 83, p. 1), est libellé comme suit:

«Aux fins du présent règlement, on entend par:

a)      ‘aide’: toute mesure remplissant tous les critères fixés à l’article 92, paragraphe 1, du traité;

b)      ‘aide existante’:

i)      […] toute aide existant avant l’entrée en vigueur du traité dans l’État membre concerné, c’est-à-dire les régimes d’aides et aides individuelles mis en exécution avant, et toujours applicables après, ladite entrée en vigueur;

[…]»

B –    Le droit national

7.        Il ressort des informations fragmentaires du dossier que les sociétés coopératives italiennes ont été, à l’époque des faits au principal, soumises, d’une part, à l’impôt sur le revenu des personnes morales (imposta sul reddito delle persone giuridiche, ci-après l’«IRPEG») et, d’autre part, à l’impôt local sur le revenu (imposta locale sui redditi, ci-après l’«ILOR»). Entre 1977 et 2004, la taxation générale des sociétés de capitaux (3) en Italie a été basée sur le principe de l’imposition unique, ce qui s’est traduit par l’introduction d’un système de crédit d’impôt pour les associés de celles-ci. Selon ce système, les profits d’une société étaient imposés dans le chef de la société suivant le taux applicable à celle-ci, mais les bénéfices distribués aux associés/actionnaires étaient taxés en application des taux progressifs de la taxation des revenus des personnes physiques. Les associés ayant eu droit au crédit d’impôt correspondant à la taxe due par la société, étaient tenus de verser la différence entre le taux applicable à la société et le taux progressif applicable à leurs impositions personnelles (4).

8.        J’ajoute qu’il découle du dossier que plusieurs dispositions fiscales spécifiques applicables aux sociétés coopératives sont motivées par le principe mutualiste, ce qui a pour conséquence de restreindre la distribution des profits ou fonds desdites sociétés à leurs associés.

9.        Le décret du président de la République n° 601, du 29 septembre 1973, portant réglementation des avantages fiscaux (5), dans sa version en vigueur de 1984 à 1993 (ci-après le «DPR n° 601/1973»), énonçait à son article 11, intitulé «Coopératives de production et de travail»:

«1.      Les revenus des coopératives de production et de travail et de leurs groupements sont exonérés de l’impôt sur le revenu des personnes morales et de l’impôt local sur le revenu si le montant des rémunérations effectivement versées aux membres qui apportent leur travail de façon continue, y compris les sommes visées au dernier paragraphe, n’est pas inférieur à soixante pour cent du montant global de tous les autres coûts, à l’exception de ceux relatifs aux matières premières et fournitures. Si le montant des rémunérations est inférieur à soixante pour cent, mais pas à quarante pour cent, du montant global des autres coûts, l’impôt sur le revenu des personnes morales et l’impôt local sur les revenus sont réduits de moitié.
2.      Pour les sociétés coopératives de production, les dispositions du paragraphe précédent s’appliquent à condition que les membres satisfassent à toutes les exigences prévues, pour les membres des coopératives de travail, par l’article 23 du décret législatif […] du chef provisoire de l’État [n° 1577] du 14 décembre 1947, avec ses modifications ultérieures.
3.      Pour calculer le revenu des sociétés coopératives de production et de travail et de leurs groupements, les sommes versées aux membres salariés à titre de complément de leur rémunération peuvent être déduites dans la limite des salaires courants majorés de 20 %.»

10.      L’article 14, intitulé «Conditions d’applicabilité des avantages», du DPR n° 601/1973 était ainsi rédigé:

«1.      Les avantages fiscaux prévus dans le présent titre s’appliquent aux sociétés coopératives, et à leurs groupements, qui sont régis par les principes de la mutualité prévus par les lois de l’État, et qui sont inscrits sur les registres préfectoraux ou sur le fichier général de la coopération.
2.      Les exigences caractérisant le but mutualiste sont réputées remplies si les conditions prévues à l’article 26 du décret législatif du chef provisoire de l’État n° 1577 du 14 décembre 1947, et ses amendements successifs, sont expressément prévues dans les statuts, sans possibilité de dérogation, et si ces conditions ont été effectivement constatées pendant la période fiscale et dans les cinq années précédentes, ou le cas échéant pendant le laps de temps qui s’est écoulé depuis l’approbation des statuts, s’il n’atteint pas cinq ans.
3.      C’est l’administration fiscale, en consultation avec le ministère du Travail ou les autres organes de surveillance, qui contrôle les conditions d’applicabilité des avantages fiscaux.»

II – Les faits des procédures au principal et les questions préjudicielles

A –    L’affaire C-78/08

11.      À l’issue des contrôles effectués par la Guardia di Finanza, l’administration fiscale de la ville de Matera a notifié à Paint Graphos, société coopérative de droit italien, un avis d’imposition rectifiant, pour l’année 1993, le montant de son revenu aux fins de l’établissement de l’IRPEG et de l’ILOR. Par le même avis, l’administration fiscale a refusé à ladite société le droit aux exonérations prévues aux articles 11, 12 et 14 du DPR n° 601/1973. À la suite d’une série de recours introduits tant par Paint Graphos que par le Ministero dell’Economia e delle Finanze et l’Agenzia delle Entrate, l’affaire est actuellement pendante devant la juridiction de renvoi.

B –    L’affaire C-79/08

12.      Par avis d’imposition du 8 juin 1999, l’administration fiscale de Rovigo a notifié à Adige Carni, société coopérative de droit italien, la déchéance du bénéfice des avantages fiscaux prévus aux articles 10 et suivants du DPR n° 601/1973, le relèvement de son revenu imposable au titre de l’année 1993 ainsi que la majoration consécutive de l’IRPEG et de l’ILOR. L’administration fiscale contestait, notamment, l’émission de factures pour des opérations subjectivement inexistantes, la somme correspondante étant considérée comme un revenu, et par ailleurs, ladite somme n’étant pas comptabilisée comme revenu par Adige Carni, l’administration fiscale présumait que celle-ci avait été distribuée aux membres en violation de l’article 11 du DPR n° 601/1973. À la suite d’une série de recours, Adige Carni s’est pourvue en cassation, en invoquant notamment l’absence ou l’insuffisance de motivation du refus des exonérations fiscales en cause.

C –    L’affaire C-80/08

13.      L’administration fiscale de Monfalcone a rectifié les déclarations de revenus effectuées par M. Franchetto pour les années 1984 à 1986 au motif que, en tant qu’associé de la société de droit italien Cooperativa Maricoltori Alto Adriatico r.l., qui avait pour objet l’élevage et la vente de mollusques, il était intervenu de manière autonome sur le marché alors que la société coopérative, au nom de laquelle étaient émises les factures d’achat et de vente, percevait sur chaque vente une commission pour chaque service rendu, et distribuait la majoration de prix aux associés, au lieu de l’affecter aux réserves prévues à cette fin.

14.      Le Ministero delle Finanze réclame en cassation l’annulation de la décision de la Commissione tributaria centrale, laquelle, sans examiner au fond les arguments invoqués par M. Franchetto, a estimé que le bénéfice des exonérations fiscales ne pouvait être refusé à la coopérative sans que l’avis obligatoire du ministère du Travail ait été obtenu au préalable. Le Ministero delle Finanze soulève, notamment, la violation de l’article 14 du DPR n° 601/1973, au motif que l’avis d’imposition visait l’associé de la société coopérative, et non pas la coopérative elle-même, et que de ce fait il n’était pas nécessaire d’obtenir l’avis du ministère du Travail.

D –    Les questions préjudicielles

15.      Selon la Corte suprema di cassazione (Italie), aux fins de vérifier la compatibilité avec le droit de l’Union des avantages fiscaux dont bénéficient les sociétés coopératives par rapport aux sociétés à but lucratif, il importe de déterminer si le fait pour les opérateurs concernés de réaliser des économies d’impôt constitue une aide d’État illégale qui entraînerait, en raison de l’effet direct de l’article 88, paragraphe 3, CE, l’obligation pour les autorités nationales, y compris juridictionnelles, de laisser inappliqué le régime interne concerné ainsi que celle d’ordonner la restitution des aides perçues. La juridiction de renvoi s’interroge également sur le point de savoir si l’utilisation de la forme de la société coopérative serait constitutive d’un abus de droit.

16.      C’est dans ces conditions que la Corte suprema di cassazione a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles ainsi libellées:

«1)      [L]es avantages fiscaux accordés aux sociétés coopératives, en vertu des articles 10, 11, 12, 13 et 14 du DPR [n° 601/1973], sont-ils compatibles avec le droit de la concurrence et, plus particulièrement, sont-ils qualifiables d’aides d’État au sens de l’article 87 […] CE, sachant notamment que le système de surveillance et de correction des abus prévu par le décret législatif du chef provisoire de l’État n° 1577 [du 14 décembre 1947] est inadéquat?

2)      [E]n ce qui concerne en particulier la question de savoir si les avantages fiscaux litigieux peuvent être qualifiés d’aides d’État, ces mesures peuvent-elles être considérées comme proportionnées par rapport aux objectifs assignés à la société coopérative; l’examen de la proportionnalité peut-il porter, non seulement sur la mesure individuelle, mais aussi sur l’avantage que confèrent les mesures dans leur ensemble, et les distorsions de la concurrence qui en découlent?

3)      Pour répondre aux questions qui précèdent, tenant compte du fait que le système de contrôles se trouve encore gravement affaibli par la réforme du droit des sociétés, en particulier en ce qui concerne les sociétés coopératives à caractère mutualiste prédominant, et non pas exclusif, en vertu de la loi n° 311/2004[.]

4)      [I]ndépendamment du point de savoir si les avantages fiscaux en question peuvent être qualifiés d’aides d’État, l’utilisation de la forme juridique de la société coopérative, même en dehors des cas de fraude ou de simulation, peut-elle être qualifiée d’abus de droit, lorsque le recours à cette forme sociale a lieu dans le but exclusif ou principal de réaliser une économie d’impôt?»

III – La procédure devant la Cour

17.      La demande de décision préjudicielle a été enregistrée au greffe de la Cour le 25 février 2008.

18.      Des observations écrites ont été déposées par Paint Graphos et Adige Carni, par les gouvernements italien, espagnol et français, ainsi que par la Commission des Communautés européennes.

19.      Paint Graphos, Adige Carni, M. Franchetto, les gouvernements italien, espagnol, français, la Commission ainsi que l’Autorité de surveillance AELE ont été représentés à l’audience, qui s’est tenue le 11 mars 2010 (6).

IV – Sur la recevabilité des questions préjudicielles

A –    Observations des parties

20.      Paint Graphos et Adige Carni ainsi que le gouvernement italien proposent à la Cour de déclarer les questions préjudicielles irrecevables. Selon la Commission, la Cour devrait se déclarer incompétente pour répondre aux questions préjudicielles formulées par la juridiction de renvoi.

21.      Ce raisonnement repose sur l’absence, d’une part, d’indications suffisantes en ce qui concerne le cadre juridique et factuel des affaires au principal et, d’autre part, de motifs clairs relatifs à la pertinence des questions posées. Les parties doutent, en effet, de l’utilité de la réponse de la Cour pour la solution des litiges au principal en relevant le caractère prématuré, hypothétique, voire fictif des questions adressées à la Cour.

22.      En tout état de cause, selon la Commission ainsi que les gouvernements italien et espagnol, les trois premières questions seraient irrecevables en ce qu’elles se réfèrent à des dispositions nationales inapplicables dans le cadre des litiges au principal. Il en irait de même, selon la Commission, de la quatrième question, au motif que la question de pratiques tendant à obtenir des avantages au titre du droit communautaire ne se poserait pas, ces derniers découlant en l’espèce du seul droit interne, si bien que le principe communautaire de l’abus de droit ne trouverait pas à s’appliquer.

23.      Enfin, est soulevée la problématique de la compétence exclusive de la Commission pour se prononcer sur la compatibilité d’une aide d’État avec le marché commun. Ainsi, selon la Commission, la deuxième question serait également irrecevable.

B –    Appréciation portant sur la recevabilité des questions posées

24.      À titre liminaire, je relève que les renvois préjudiciels soumis à la Cour dans le cadre de la présente procédure posent des problèmes considérables en ce qui concerne leur recevabilité.

25.      Premièrement, la formulation succincte des décisions de renvoi ne permet de saisir ni les détails du régime national en cause ni les faits des litiges au principal. Les indications fournies par la juridiction nationale et les divers éléments versés au dossier par les parties ayant déposé des observations donnent plutôt un sentiment de confusion quant à la teneur du droit national en la matière. En outre, il n’a pas été fourni à la Cour d’informations précises concernant l’imposition d’autres formes de sociétés que les sociétés coopératives, alors même que ces données seraient indispensables afin de pouvoir apprécier la comparabilité des situations, qui est inhérente aux notions d’avantage et de sélectivité, éléments cruciaux de la notion d’aide d’État.

26.      Deuxièmement, plus incertaine encore apparaît l’existence d’un lien entre le droit de l’Union et les affaires dont est saisie la juridiction de renvoi. Eu égard à l’objet et à la nature des litiges au principal, il est difficile de saisir pertinemment comment la réponse apportée par la Cour pourrait être utile à la solution des litiges pendants devant la juridiction de renvoi. En effet, ces affaires concernent la validité des contrôles effectués par l’administration fiscale alors que les questions portent sur une éventuelle qualification des avantages fiscaux au regard de l’article 87 CE. Je note, par ailleurs, que Paint Graphos précise que les procédures pendantes portent sur les dispositions relatives à la vérification des revenus et non sur la nature ou la compatibilité des taux d’imposition avec les dispositions du droit communautaire.

27.      Par ailleurs, en ce qui concerne le cas de M. Franchetto, force est de constater que l’objet du litige en cause vise non pas l’imposition de la société coopérative concernée, mais la taxation de celui-ci à titre personnel. Contrairement au libellé de la demande préjudicielle, la société coopérative dont M. Franchetto a été l’associé semble avoir été non pas une coopérative du travail visée à l’article 11 du DPR n° 601/1973, mais une coopérative de la petite pêche régie par l’article 10 dudit DPR, disposition dont la portée n’est pas explicitée par la juridiction de renvoi.

28.      Troisièmement, la juridiction de renvoi s’interroge quant à la problématique de la proportionnalité des mesures nationales par rapport aux objectifs assignés à la société coopérative qui semblent être définis dans l’ordre juridique national. L’examen des critères relatifs à l’équilibre entre les intérêts protégés par les mesures fiscales nationales et les distorsions de concurrence renvoie à l’examen de compatibilité d’éventuelles aides d’État avec le marché commun.

29.      Quatrièmement, s’agissant de la troisième question, celle-ci constitue plutôt une réflexion ou un commentaire qui ne saurait être traité en tant que question distincte.

30.      Enfin, je relève que la quatrième question posée s’inscrit exclusivement dans le cadre du droit national, la Cour étant, par conséquent, incompétente pour y répondre. En effet, la juridiction de renvoi s’interroge sur le lien entre l’utilisation de la forme juridique de la société coopérative et la réalisation d’une économie d’impôt.

31.      Eu égard aux difficultés ainsi identifiées, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le refus de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale est possible lorsqu’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation du droit communautaire sollicitée n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (7).

32.      En effet, la juridiction de renvoi est tenue d’indiquer les raisons précises qui l’ont conduite à s’interroger sur l’interprétation et la validité de certaines dispositions du droit de l’Union. Ainsi, la Cour a jugé qu’il est indispensable que la juridiction nationale donne un minimum d’explications sur les raisons du choix des dispositions communautaires dont elle demande l’interprétation ou la validité et sur le lien qu’elle établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige (8).

33.      En outre, la Cour n’est pas compétente pour statuer sur la compatibilité d’une mesure nationale avec le droit de l’Union (9). Elle ne saurait davantage se prononcer sur la compatibilité d’une aide d’État ou d’un régime d’aides avec le marché commun, l’appréciation de cette compatibilité relevant de la compétence exclusive de la Commission, agissant sous le contrôle du juge de l’Union (10). La Cour n’est pas non plus compétente pour apprécier les faits au principal ou pour appliquer à des mesures ou à des situations nationales les règles de l’Union, ces questions relevant de la compétence exclusive de la juridiction nationale (11).

34.      Eu égard à ce qui précède, les questions soumises à la Cour devraient donc être, dans leur globalité, déclarées irrecevables.

35.      Toutefois, au cas où la Cour estimerait ne pas pouvoir suivre une proposition aussi radicale, je propose de concentrer l’analyse sur la première question préjudicielle.

36.      À cet égard, il semble que la Corte suprema di cassazione se fonde sur une hypothèse selon laquelle, même si les sociétés coopératives en cause avaient droit aux exonérations, ces sociétés ne pourraient pas bénéficier des avantages en cause dès lors que ceux-ci représenteraient des aides d’État illégales.

37.      Par sa demande de décision préjudicielle et, notamment, par sa première question, la juridiction nationale vise donc à soumettre à la Cour l’analyse de la compatibilité des dispositions du régime fiscal national portant sur les sociétés coopératives avec le droit de l’Union. Elle fournit, à cet égard, de longs développements au sujet de l’évolution du droit fiscal italien en la matière, en grande partie inapplicable aux litiges au principal, en faisant également référence tant à la jurisprudence de la Cour qu’aux diverses communications de la Commission relatives à l’application de la discipline des aides d’État aux mesures fiscales nationales.

38.      Alors même que la Cour n’est pas compétente, au titre de l’article 234 CE, pour statuer à titre préjudiciel sur l’interprétation des règles relevant du droit interne (12), celle-ci peut pour fournir à la juridiction de renvoi tous les éléments d’interprétation relevant du droit de l’Union qui peuvent permettre à la juridiction nationale d’apprécier la conformité d’une mesure nationale avec ce droit en vue du jugement de l’affaire dont elle est saisie (13). En matière d’aides d’État, elle peut notamment fournir au juge de renvoi les éléments d’interprétation lui permettant de déterminer si une mesure nationale peut être qualifiée d’aide d’État au sens du droit de l’Union (14).

39.      En l’espèce, compte tenu des éléments de droit et de fait fournis par la juridiction de renvoi, il me semble judicieux de considérer que la Cour dispose d’un minimum d’éléments afin de pouvoir statuer, en partie, sur la demande de décision préjudicielle, tout en reformulant la première question posée (15) en ce sens que la Cour se prononce sur les critères de la notion d’aide d’État au regard du régime fiscal en cause. À l’issue de cet examen et eu égard aux éléments apportés par la Cour, il appartiendra à la juridiction de renvoi de trancher la question de savoir si l’éventuel avantage fiscal destiné aux sociétés coopératives est susceptible de constituer une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE.

40.      Par ailleurs, dans le cadre de cette reformulation, il conviendra de se limiter aux dispositions nationales applicables aux litiges au principal. Dès lors que la juridiction confirme dans les trois ordonnances de renvoi que ce sont des sociétés coopératives de production et de travail qui sont en cause, je propose donc de limiter l’analyse de la première question préjudicielle à l’article 11 du DPR n° 601/1973.

41.      Enfin, je note que la Cour a expressément indiqué que, à l’instar de la Commission, les juridictions nationales sont habilitées à interpréter la notion d’aide d’État (16). Par conséquent, dès lors qu’un doute relatif à l’interprétation de cette notion apparaît dans le chef de la juridiction nationale, celle-ci est habilitée à saisir la Cour. La coopération entre les juridictions nationales et la Cour ne devrait toutefois pas conduire à contourner l’équilibre des compétences conférées aux institutions de l’Union. Le rôle d’un juge national reste accessoire en matière d’examen de compatibilité par rapport au champ d’intervention de la Commission.

V –    Observations liminaires sur les sociétés coopératives

A –    Sur les caractéristiques des sociétés coopératives et leur traitement fiscal

42.      Les sociétés coopératives sont des groupements de personnes physiques ou morales dotés d’un fort intuitu personæ, qui obéissent à des principes de fonctionnement particuliers, dont le principe de la structure et du contrôle démocratique et la distribution équitable des bénéfices nets de l’exercice (17).

43.      La spécificité des sociétés coopératives est illustrée à travers la notion d’avantage mutualiste qui peut être réalisé par le biais de deux techniques distinctes, à savoir celle de l’avantage immédiat ou celle de l’avantage différé, c’est-à-dire la ristourne. Dans les sociétés coopératives, il est, en outre, possible de distinguer entre le revenu réalisé à travers l’activité avec les associés et celui réalisé via les échanges avec les tiers (18).

44.      Dans le cadre des activités de la société coopérative avec les associés, les revenus sont répartis entre les associés en deux phases. L’avantage immédiat est réalisé par un traitement tenant au prix payé ou au moyen de la remise pratiquée sur l’acquisition d’un bien par l’associé. L’avantage différé est réalisé par le biais d’une ristourne qui constitue une somme distribuée périodiquement par une société aux associés, en proportion des rapports avec la coopérative et du capital souscrit.

45.      Le système fiscal prévu pour les sociétés coopératives est strictement lié à la structure de leur capital et au système économique qui la sous-tend. Il serait donc possible d’en déduire que ces sociétés fonctionnent dans un cadre juridique et économique propre.

46.      La question complexe du traitement fiscal des revenus des sociétés coopératives est illustrée par la diversité des solutions adoptées dans les différents États membres (19). Il a ainsi été relevé dans la doctrine que cette «hétérogénéité» fiscale reflète leur «hétérogénéité» civile et semble nécessaire afin d’atteindre des objectifs qui, malgré l’évolution concurrentielle qu’ont subie les sociétés coopératives, restent distincts par rapport aux sociétés poursuivant un but lucratif (20).

47.      Ainsi, dans certains régimes nationaux, les sociétés coopératives se voient appliquer les normes générales de la taxation des sociétés (21). D’autres États membres appliquent une méthode d’exemption qui se traduit, d’une part, par le système «de la transparence», laquelle est basée sur l’imputabilité aux associés des résultats obtenus par la coopérative, et d’autre part, par l’exemption uniquement des résultats des opérations faites avec les associés, lesquels sont tenus de payer à titre personnel l’impôt sur les revenus distribués (22). Certains régimes nationaux permettent une déduction de la ristourne de la base imposable de l’impôt (23). Enfin, il existe la possibilité de traiter les bénéfices distribués aux associés en tant que dividendes, tout en leur appliquant un taux d’impôt plus bas (24).

48.      Souvent, l’imposition des sociétés coopératives est liée à une obligation de suivre un comportement propre aux coopératives. À défaut d’obéir à cette exigence, elles doivent subir des conséquences fiscales importantes. Ainsi, il n’est pas toujours possible d’identifier les différences entre les principes régissant la taxation des sociétés coopératives par comparaison avec la fiscalité des sociétés de capitaux en général, afin de pouvoir constater si ces différences sont fondées sur l’objectif de favoriser les coopératives ou sur leur nature particulière (25).

49.      En Italie, les sociétés coopératives de production et de travail se sont développées, d’une part, comme une forme de coopération entre des artisans – la première en 1855 entre les fabricants de verre à Altare – et, d’autre part, comme une forme d’organisation regroupant des ouvriers du travail manuel sans qualifications particulières. Ces dernières ont été créées – la première en 1883 à Ravenne – afin d’améliorer l’accès à l’emploi des associés souffrant du chômage structurel ou saisonnier, à l’origine surtout dans le cadre de travaux de construction et de bâtiment mais plus récemment dans le cadre d’activités assez variées. Je note, à cet égard, que, en Italie, il existe une séparation entre les coopératives de production et de travail engagées dans le secteur agricole, voire de la pêche, et les autres coopératives de production et de travail (26).

50.      En l’espèce, il découle de la décision de renvoi que, en ce qui concerne les dispositions applicables à l’époque des faits au principal dans l’ordre juridique italien, les entreprises coopératives jouissaient d’exonérations totales ou partielles de tout un ensemble d’impôts dans le but de remplir un objectif économique spécifique, que l’article 45 de la Constitution italienne reconnaît en raison de la fonction sociale et du caractère mutualiste de la coopération.

51.      Il importe d’indiquer que, aux termes de l’article 26 du décret législatif du chef provisoire de l’État n° 1577 du 14 décembre 1947 (ci-après la «loi Basevi»), les qualités mutualistes étaient considérées comme remplies dès lors que figuraient dans les statuts de la société coopérative les clauses suivantes. Premièrement, l’interdiction de la distribution des dividendes supérieurs au taux d’intérêt légal appliqué au capital effectivement versé, deuxièmement, l’interdiction de la distribution de la réserve entre les associés pendant la vie de la société et, troisièmement, la dévolution en cas de dissolution de la société du patrimoine entier, moins le capital versé et les éventuels dividendes, dans un but d’utilité publique à caractère mutualiste.

52.      Ainsi que le souligne la juridiction de renvoi, les sociétés coopératives de production et de travail sont caractérisées par le rôle de l’associé entrepreneur ou salarié. Dans le cas desdites coopératives, comme en l’espèce, les membres exercent leur propre activité professionnelle au sein de la coopérative et l’excédent produit grâce à leur travail peut être redistribué à titre de complément de rémunération (27).

53.      Selon les informations fournies par les parties ayant déposé des observations dans le cadre de la présente procédure, la base imposable de la société coopérative est déterminée de la même manière que la base imposable d’une société non coopérative. Il s’agit, en principe, d’un taux du profit net résultant de l’exercice de l’entreprise. Il convient d’ajouter qu’il ressort du dossier que toutes les sociétés ont le droit de déduire les rémunérations versées de leurs revenus imposables.

54.      Enfin, je relève que, au-delà de la problématique soulevée par la demande préjudicielle, la taxation des sociétés coopératives a été débattue par les parties dans une perspective plus large que celle relative aux exonérations figurant à l’article 11 du DPR n° 601/1973. Surtout, la Commission me semble avoir recentré sa position à l’audience par rapport à ses observations écrites, en soulevant la question relative à un défaut d’imposition des réserves indivisibles des sociétés coopératives en droit italien.

55.      À cet égard, je considère que, en ce qui concerne les sociétés coopératives de production et de travail, cette question ne peut jouer un rôle que dans la mesure où la coopérative concernée n’a pas pu bénéficier des exonérations en cause au principal. Or, l’objet de l’appréciation de la Cour devrait, à mon sens, être limité à la question de savoir si les exonérations visées à l’article 11 du DPR n° 601/1973 pour les sociétés coopératives de production et de travail sont susceptibles de remplir les critères de la notion d’aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE.

B –    Sur l’article 11 du DPR n° 601/1973

56.      Selon l’article 11, paragraphe 1, du DPR n° 601/1973, l’exonération des revenus est accordée aux sociétés dès lors que le montant des rémunérations n’est pas inférieur à 60 % du montant global de tous les autres coûts, à l’exception de ceux relatifs aux matières premières et aux fournitures. Une telle exonération est donc subordonnée à la possibilité de déterminer le rapport entre l’apport d’un travail des associés et celui des autres facteurs de production – tels que le capital et le travail des tiers –, y compris des frais généraux et des coûts de biens et d’équipement. La définition d’un tel paramètre permet d’instituer un contrôle entre les rémunérations effectivement versées et le montant global de tous les autres coûts supportés par la société coopérative (28). Dans l’hypothèse où le montant des rémunérations se situe entre 60 % et 40 %, les impôts susvisés sont réduits de moitié (29).

57.      En outre, l’allégement fiscal prévu à l’article 11, paragraphe 1, du DPR n° 601/1973 ne s’applique que lorsque les sociétés répondent aux conditions figurant à l’article 23 de la loi Basevi susmentionnée.

58.      L’article 11, paragraphe 3, du DPR n° 601/1973 établit une déduction du revenu de la société des sommes versées aux membres salariés en complément de leurs salaires dans la limite du taux des salaires en vigueur majoré de 20 % puisque ces montants sont assimilables à des ristournes, à savoir aux avantages mutualistes différés revenant aux associés. Dans la doctrine italienne, il a donc été observé que cette déduction n’introduit pas une dérogation par rapport au régime commun d’imposition des sociétés et entités commerciales (30).

59.      Selon moi, ladite disposition instaure une limitation de la possibilité de distribuer l’excédent de la société coopérative aux associés sous la forme des compléments de rémunération déductibles du revenu imposable de celle-ci.

60.      Ainsi que l’a précisé le gouvernement italien à l’audience, l’associé perçoit une rémunération pour le travail fourni à la société et ce revenu est soumis à l’impôt progressif sur le revenu. Les sommes versées aux membres à titre de complément de rémunération font l’objet d’une déduction de la taxation en tant que revenus assimilables à ceux d’un travail salarié. En effet, ceux-ci sont imposables dans le chef de l’associé travailleur (31).

VI – Sur la qualification d’un régime fiscal en tant qu’aide d’État

A –    Sur les critères généraux du concept d’aide d’État

61.      La notion d’aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE comprend non seulement des prestations positives, telles que les subventions, mais également des interventions qui, sous des formes diverses, allègent les charges qui normalement grèvent le budget d’une entreprise et qui, par là, sans être des subventions au sens strict du mot, sont de même nature et ont des effets identiques (32).

62.      Il en découle qu’une mesure par laquelle les autorités publiques accordent à certaines entreprises une exonération fiscale qui, bien que ne comportant pas un transfert de ressources d’État, place les bénéficiaires dans une situation financière plus favorable que les autres contribuables constitue une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE (33).

63.      En ce qui concerne les sociétés coopératives, ainsi qu’il découle de la communication de la Commission du 23 février 2004 (34), certains États membres, dont la République italienne, estiment que les restrictions inhérentes à la nature spécifique du capital de la coopérative appellent un traitement fiscal particulier. La Commission a donc invité les États membres à respecter le principe selon lequel les protections ou avantages accordés à un type d’entité particulier doivent être proportionnés aux contraintes juridiques, à la valeur ajoutée sociale ou aux limitations inhérentes à cette forme et ne devraient pas conduire à une concurrence déloyale.

64.      La Cour a itérativement jugé que la finalité poursuivie par des interventions étatiques ne suffit pas à les faire échapper d’emblée à la qualification d’«aides» au sens de l’article 87 CE (35). En effet, l’article 87, paragraphe 1, CE ne distingue pas selon les causes ou les objectifs des interventions étatiques, mais les définit en fonction de leurs effets (36).

65.      L’application de cette approche assez simple ne manque pas de susciter des difficultés dans le contexte de la taxation des entreprises ayant des formes juridiques variées. En ce qui concerne les entreprises de petite ou moyenne taille, des activités quasiment similaires peuvent être exercées sous la forme d’une société de personnes (37), d’une société de capitaux à but lucratif (38), d’une société coopérative ou même dans le cadre d’une entreprise individuelle sans personnalité morale.

66.      À cet égard, j’observe que, alors même que la typologie des formes juridiques des entreprises est largement comparable entre les États membres, il existe des variations importantes concernant, notamment, le concept de la personnalité morale, voire de la capacité juridique (39) des entreprises.

67.      La fiscalité de différentes formes juridiques peut être basée sur le principe classique de la double imposition, auquel cas le revenu généré par l’activité économique est taxé dans le chef de l’entreprise et dans le chef du propriétaire. En revanche, dans les systèmes de taxation unique, tous les revenus d’une telle activité sont taxés soit dans le chef de l’entreprise, les revenus distribués aux associés étant exonérés de l’impôt, soit dans le chef de l’associé, l’entreprise n’étant pas imposée. Il existe, bien évidemment, plusieurs variantes qui unissent certains aspects de ces modèles.

68.      Ainsi, dans l’identification des notions clés que sont l’avantage et la sélectivité dans le contexte des choix pour lesquels a opté le législateur national en adoptant les normes du droit fiscal, il existe un certain danger de clarté conceptuelle apparente qui peut, en réalité, rendre plus obscure l’analyse de la problématique en cause.

69.      Surtout, je souhaiterais ajouter que l’existence d’une justification relative à la nature ou à l’économie générale du système fiscal me paraît être pertinente tant en ce qui concerne l’examen de la notion d’avantage que celle de sélectivité.

70.      En effet, dans les deux cas de figure, il s’agit de l’examen d’un traitement distinct établi au sein d’un système fiscal par rapport à une situation hypothétique de l’absence de ce traitement, y compris de l’évaluation de la portée et des raisons d’un tel choix du législateur national. Pour des raisons d’économie de ma présentation, j’ai décidé de rapprocher la question de l’existence d’un avantage du point de vue plutôt formel et de discuter les caractéristiques, qui, en soi, pourraient également mettre en question l’existence d’un avantage au sens économique, dans le contexte de la sélectivité.

B –    Sur l’avantage

71.      Il importe de constater que l’avantage au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE n’existe que lorsque la mesure prévoit un allégement de la charge fiscale par rapport à la situation normale prévue dans le système fiscal. La notion fondamentale dans la détermination de l’avantage dans le cadre d’un régime fiscal est donc celle d’un système général de taxation (40).

72.      Dans ce contexte, afin de pouvoir déterminer s’il s’agit d’un avantage, il y a lieu d’identifier le niveau général de taxation auquel sont soumises les personnes morales dans un système fiscal national. Cet exercice étant particulièrement complexe, il convient donc de comparer la situation de l’entreprise bénéficiaire par rapport à d’autres entreprises se trouvant dans une situation factuelle et juridique comparable au regard de l’objectif poursuivi par la mesure concernée (41).

73.      De surcroît, il conviendrait de distinguer sur le plan conceptuel entre l’avantage pur et l’avantage réel. En effet, malgré l’identification d’un certain type d’avantage, par exemple sous forme d’un allégement fiscal, il importe d’examiner si celui-ci n’est pas un moyen d’exclure l’application d’une disposition fiscale au profit d’une autre. À titre d’exemple, une exonération fiscale peut diriger l’imposition d’une certaine activité vers un autre régime (42). Le bénéfice fiscal peut aussi être équilibré ou justifié par les obligations découlant de la structure juridique d’une certaine forme de personne morale, ce qui écarte le caractère d’un avantage au sens économique (43).

74.      En l’espèce, l’article 11, paragraphe 1, du DPR n° 601/1973 exonère le revenu imposable d’une société coopérative de production et de travail totalement ou partiellement, en fonction de l’importance du travail des associés dans la génération de la valeur économique dans le cadre des activités de ladite société. La portée de l’exonération est déterminée de façon approximative. La disposition susmentionnée ne régit pas la déductibilité des rémunérations des associés qui doivent être effectivement versées puisque cette déductibilité découle des dispositions générales régissant le calcul du revenu imposable d’une personne morale.

75.      Par conséquent, si la Cour optait pour une approche formelle, l’exonération en question constitue sans doute un avantage. Par dérogation à la règle applicable généralement aux personnes morales, le revenu imposable des sociétés coopératives concernées est exonéré.

76.      Toutefois, je m’interroge sur la question de savoir si une telle approche formelle est justifiée du point de vue de l’analyse des effets économiques de la disposition en cause.

77.      En effet, il va de soi que l’application des règles uniformes aux différentes formes de sociétés reste impossible sans avoir fait des présomptions arbitraires concernant l’imposition des facteurs économiques contribuant à la formation du revenu. Les États membres bénéficient, dans le cadre de la politique fiscale, d’une marge de discrétion importante en ce qui concerne le choix et l’étendue de l’imposition des facteurs de production (44).

78.      Néanmoins, au sens économique, l’exonération prévue à l’article 11, paragraphe 1, du DPR n° 601/1973 ne me paraît pas constituer un avantage visé à l’article 87, paragraphe 1, CE. En effet, il ressort du dossier que le système général de taxation des personnes morales n’a pas vocation à s’appliquer, sous réserve de quelques exceptions, aux sociétés suivant le principe mutualiste. Il me semble que lorsque les règles générales portant sur l’imposition des personnes morales s’appliquent aux sociétés coopératives, lesdites règles visent à régir les éléments pertinents pour la détermination de la base imposable et du calcul du revenu imposable. Toutefois, l’imposition définitive est soumise à des dispositions dérogatoires qui s’appliquent soit à toutes les coopératives, soit aux coopératives de certains types ou de certains secteurs. Ainsi, le régime général ne serait applicable, dans son ensemble, à une société coopérative que lorsqu’une telle société n’a pas rempli les critères découlant des dispositions strictes concernant son caractère mutualiste, autrement dit lorsqu’elle n’a pas agi de façon propre aux coopératives.

C –    Sur la sélectivité

79.      L’article 87, paragraphe 1, CE interdit les aides d’État «favorisant certaines entreprises ou certaines productions», c’est-à-dire les aides sélectives. Afin d’apprécier la sélectivité d’une mesure, il convient d’examiner si, dans le cadre d’un régime juridique donné, cette mesure constitue un avantage pour certaines entreprises par rapport à d’autres se trouvant dans une situation factuelle et juridique comparable (45). La condition de sélectivité est constitutive de la notion d’aide d’État (46).

80.      Malgré une jurisprudence très riche, la notion de sélectivité échappe à une qualification univoque, notamment, en ce qui concerne les mesures fiscales.

81.      Comme il découle des communications de la Commission, le fait que certaines entreprises ou certains secteurs bénéficient plus que d’autres de certaines de ces mesures fiscales n’a pas nécessairement pour conséquence de les faire entrer dans le champ d’application des règles de concurrence en matière d’aides d’État (47). Les mesures peuvent, en revanche, s’avérer sélectives sans être formellement limitées à certains secteurs (48). Ainsi, les mesures qui sont ouvertes à tous les secteurs peuvent néanmoins être qualifiées de sélectives lorsque les conditions d’éligibilité à ces mesures restreignent, en fait, le nombre des bénéficiaires potentiels (49).

82.      En effet, selon la jurisprudence, d’une part, des aides sous forme d’un programme d’aides peuvent concerner tout un secteur économique et relever néanmoins de l’article 92, paragraphe 1, du traité CE (devenu, après modification, article 87, paragraphe 1, CE) et, d’autre part, une mesure destinée à exempter partiellement les entreprises d’un secteur industriel particulier des charges pécuniaires découlant de l’application normale du système général de prévoyance sociale, sans que cette exemption se justifie par la nature ou l’économie de ce système, doit être considérée comme une aide (50).

83.      Selon le libellé de l’article 87, paragraphe 1, CE, sont incompatibles avec le marché commun les aides favorisant certaines entreprises ou certaines productions. Le traité reste toutefois silencieux en ce qui concerne le critère de la forme juridique de la personne morale.

84.      Certes, le recours à un certain modèle de personne morale peut être caractéristique pour un secteur déterminé ou pour une entreprise déterminée. Dans ce cas de figure, les critères de la forme de la personne morale et les critères du traité selon lequel est interdite une mesure favorisant certaines entreprises ou certains secteurs fusionnent ou plutôt se fondent les uns dans les autres (51).

85.      Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Cassa di Risparmio di Firenze e.a. (52), la Commission soutenait que, en avantageant certaines entreprises en fonction de leur forme juridique (fondations ou personnes morales de droit public) ainsi que certains secteurs spécifiques (éducation, santé publique, etc.) dans lesquels elles opèrent, la législation nationale correspondait prima facie au critère de la sélectivité.

86.      La Cour a relevé que la mesure en cause ne s’appliquait pas à tous les opérateurs économiques. Elle ne pouvait donc être considérée comme une mesure générale de politique fiscale ou économique (53) dès lors que l’avantage fiscal concerné était accordé en fonction de la forme juridique de l’entreprise, personne morale de droit public ou fondation, et des secteurs dans lesquels cette entreprise exerce son activité. La Cour a précisé que la dérogation n’était pas fondée sur la logique de la mesure ou la technique d’imposition, mais résultait de l’objectif du législateur national de favoriser financièrement des organismes considérés comme socialement méritants (54).

87.      Une telle approche relative à la forme juridique d’une entreprise ne doit donc pas être considérée comme une règle qui ne souffrirait aucune exception. J’en conclus que les mesures fiscales adaptées à la forme et à la structure de la personne morale pourraient être qualifiées de non sélectives dans la mesure où elles seraient justifiées par la nature et l’économie du système.

88.      En effet, la notion d’aide d’État a été interprétée par la Cour comme ne visant pas des mesures introduisant une différenciation entre entreprises en matière de charges lorsque cette différenciation résulte de la nature et de l’économie du système de charges en cause (55). Dans ce cas-là, la qualification en tant qu’aide d’État peut être exclue.

89.      En ce qui concerne le domaine de la fiscalité, selon la jurisprudence, une mesure portant exception à l’application du système fiscal général peut être justifiée par la nature et l’économie générale du système fiscal si l’État membre concerné peut démontrer que cette mesure résulte directement des principes fondateurs ou directeurs de son système fiscal. À cet égard, une distinction doit être établie entre, d’une part, les objectifs assignés à un régime fiscal particulier et qui lui sont extérieurs et, d’autre part, les mécanismes inhérents au système fiscal lui-même qui sont nécessaires à la réalisation de tels objectifs (56).

90.      Dans sa pratique, la Commission a admis l’existence d’une justification par la nature et l’économie du système dans l’hypothèse de la nature progressive de la taxe, de la non-taxation en l’absence des profits, et du traitement particulier des organisations sans but lucratif (57). Telle était également la situation des terrains agricoles qui bénéficiaient d’exonérations ou d’allégements fiscaux par rapport au régime d’impôt foncier applicable en droit commun (58). Ainsi, l’avantage a été justifié par le rôle spécifique du foncier dans la production agricole.

91.      La Cour a admis une justification fondée sur la nature et l’économie du système national de taxation des assurances, dans un contexte particulier d’application du taux supérieur de la taxe à une partie déterminée des contrats d’assurance préalablement soumis au taux normal (59).

92.      La difficulté du critère relatif à la nature ou à l’économie du système réside, toutefois, dans le fait que, lorsque la Cour considère que la mesure diffère du système fiscal général national, la mesure est qualifiée de sélective. Cette jurisprudence conduit alors à un statu quo selon lequel aucune mesure ne pourra être qualifiée de justifiée par la nature et l’économie du système (60).

93.      Ce qui importe à cet égard, ce sont, en effet, non pas les objectifs de la mesure mais la logique inhérente au système fiscal national.

94.      L’article 11 du DPR n° 601/1973 constitue une mesure complexe englobant plusieurs solutions fiscales visant à introduire un traitement fiscal propre aux sociétés coopératives de production et de travail (61).

95.      Malgré cette nature dérogatoire à première vue, la conclusion selon laquelle les avantages fiscaux destinés aux sociétés coopératives de production et de travail sont de nature sélective ne s’impose pas de toute évidence. Il me semble, au contraire, que, en considérant la nature transversale desdites sociétés, à savoir la variété des secteurs dans lesquels elles peuvent être actives, la nature sélective de la mesure en question pourrait être débattue. En tout état de cause, à supposer que le système d’exonérations desdites sociétés soit de nature a priori sélective, il pourrait être justifié par l’économie et la nature du système.

96.      À cet égard, j’observe qu’il ressort de la jurisprudence (62) que la condition de sélectivité est remplie dès lors que la mesure avantage certaines entreprises par rapport à d’autres qui se trouvent dans une situation factuelle et juridique comparable, alors même que les aides concernent tout un secteur économique.

97.      À cette fin, il conviendrait de trancher d’abord la question de savoir si les sociétés coopératives à but mutualiste et les autres sociétés à but lucratif se trouvent dans une situation comparable. Puis, il serait nécessaire de comparer la situation d’une société coopérative de production et de travail dans l’hypothèse de l’application de l’article 11 du DPR n° 601/1973 avec les autres sociétés à but lucratif et avec les autres sociétés coopératives.

98.      Dans ses observations écrites, la Commission a fait valoir que les sociétés coopératives de production et de travail correspondant au modèle mutualiste pur et les sociétés à but lucratif ne se trouvent pas dans une situation de fait et de droit comparable pour ce qui est des sommes versées aux membres salariés à titre de rémunération, y compris les éventuels compléments de leur rémunération.

99.      Elle a été rejointe sur ce point par le gouvernement français, lequel relève qu’il est logique de ne pas traiter de la même façon les sociétés qui distribuent leurs bénéfices à leurs associés et les autres entités, telles que les coopératives, qui, du fait de leur statut, ne peuvent pas procéder à de telles distributions.

100. Ainsi que la représentante d’Adige Carni l’a souligné à l’audience, la participation des actionnaires ou des associés (sociétaires) dans une société de capitaux est une participation qui se limite à apporter des capitaux. En revanche, le rapport mutualiste ou un rapport d’échange est typique pour une société coopérative. La différence de traitement fiscal repose sur la différence qui existe entre ces rapports. En outre, ayant souligné qu’il ne s’agissait pas d’un problème de double imposition, la représentante d’Adige Carni a rappelé que, dans l’économie du système fiscal de l’imposition applicable à l’époque des faits au principal, l’objectif du régime national consistait en l’imposition unique d’un revenu, soit dans le chef de la coopérative, soit dans le chef du membre.

101. À cet égard, je souligne que l’exonération prévue à l’article 11 du DPR n° 601/1973 semble conduire à l’absence d’imposition du revenu exonéré tant dans le chef de l’associé que dans le chef de la société coopérative. Ce n’est que dans l’hypothèse où la société coopérative ne remplit pas des conditions propres aux coopératives que le régime général d’imposition des personnes morales s’applique.

102. Aux termes de la réglementation applicable à l’époque des faits au principal, la différence substantielle entre une société à but lucratif et une société coopérative résiderait dans le fait que, pour la société à but lucratif, la seule imposition, qu’elle se fasse dans le chef de l’associé ou dans le chef de la société, concernait un bénéfice que les actionnaires pouvaient s’approprier à un stade ultérieur, par exemple, soit lors de la distribution de dividendes, soit lors de la vente des actions ou lors de la liquidation de l’entreprise. Il est donc justifié de considérer qu’il s’agissait d’une espèce d’acompte à titre de revenu du capital.

103. L’idéologie qui sous-tend la notion de «shareholder value» en tant que principe directeur des sociétés de capitaux à but lucratif est fondée sur l’hypothèse selon laquelle le patrimoine social appartient, au sens économique, toujours aux associés.

104. En revanche, dans le régime civil des sociétés coopératives mutualistes, les membres de la société coopérative ne pourraient jamais s’approprier ce type de bénéfices. Un acompte comparable à celui qui est admissible dans une société de capitaux est donc exclu. L’accumulation du capital au sein d’une société coopérative ne profite pas aux associés.

105. En ce qui concerne, en particulier, les coopératives de production et de travail, je rappelle que, dans le respect des conditions strictes du caractère mutualiste, l’article 11, paragraphe 1, du DPR n° 601/1973 vise à exclure du champ d’application de l’exonération y prévue des sociétés coopératives de production et de travail dont le revenu imposable est généré par les facteurs de production autres que le travail des associés ayant une obligation de participer à l’activité de la société avec un apport consistant dans le travail (63). À l’inverse, dans la mesure où le revenu d’une société coopérative de production et de travail peut être considéré comme généré par les apports de travail des associés, ledit revenu n’est pas taxé.

106. Un tel cas de figure est difficile à concevoir dans le cas des personnes morales à but lucratif soumises à la règle générale d’imposition étant donné, d’une part, que leurs associés n’ont pas d’obligation de travailler pour la société et, d’autre part, que les profits d’une telle société peuvent être distribués aux associés.

107. Enfin, je souhaiterais attirer l’attention de la Cour sur la problématique relative à un aspect de la comparabilité entre les situations des sociétés de capitaux et des sociétés coopératives de production et de travail. Cet aspect me paraît pertinent, notamment, par rapport à la prise de position de la Commission, laquelle a soutenu à l’audience que, dès lors que l’impôt n’est pas dû dans le chef de l’associé, l’impôt devrait frapper les bénéfices de la société pour que la mesure en cause échappe à la qualification d’aide d’État.

108. Ainsi que je l’ai observé ci-dessus, l’article 11 du DPR n° 601/1973 essaie d’établir une distinction schématique entre le revenu «interne» ou mutualiste, généré par le travail des membres, et le revenu «externe», provenant du capital ou des relations avec les non-membres, ce dernier ne relevant pas de l’exonération. En effet, les excédents générés par les autres facteurs de production qui correspondent au bénéfice d’exploitation réellement perçu par la société coopérative ne sont pas couverts par l’article 11 du DPR n° 601/1973.

109. À cet égard, il convient de souligner que, dans la plupart des cas, un apport de l’associé au capital social ne constitue pas, dans une société de capitaux, un revenu taxable pour la société mais que ce sont les profits, tels que le produit de ce capital, qui sont taxés dans le chef de la société. Un apport social sous forme d’une participation en nature, telle que le travail, est d’ailleurs habituellement exclu dans le cas de la société de capitaux.

110. Dans une société coopérative de production et de travail, l’une des obligations principales incombant aux membres est celle d’apporter leur travail de façon continue. La valeur ajoutée sociale générée par le travail d’un membre de la société coopérative dépassant les rémunérations versées à ceux-ci reste à la société. Économiquement, cette partie de l’excédent qui n’est pas rémunérée et que l’associé doit laisser au patrimoine de la société a la nature d’un apport au capital. Selon cette logique, cette partie doit être exonérée de l’impôt dans le chef de la société.

111. Eu égard à tout ce qui précède, le régime fiscal des sociétés coopératives de production et de travail, tel que prévu, en particulier, à l’article 11 du DPR n° 601/1973, ne saurait être considéré comme sélectif, dès lors que lesdites sociétés ne se trouvaient pas dans une situation comparable par rapport aux sociétés à but lucratif, ni par rapport aux autres sociétés coopératives.

112. En tout état de cause, la réglementation en question peut être expliquée par la nature ou par l’économie du système national de fiscalité appliqué dans le contexte des sociétés coopératives de production et de travail. Les allégements fiscaux destinés aux sociétés coopératives de production et de travail me semblent, en effet, résulter directement des principes fondateurs et directeurs du système fiscal italien.

113. Dès lors que, à mon avis, au moins l’un des critères constitutifs de la notion d’aide d’État n’est pas rempli en l’espèce, et étant donné que ceux-ci sont de nature cumulative, il n’y a pas lieu d’examiner les autres critères figurant à l’article 87, paragraphe 1, CE.

114. En revanche, si la Cour n’entendait pas suivre ma proposition, il conviendrait d’étudier la problématique des conditions d’affectation des échanges entre États membres et celle d’une éventuelle distorsion de la concurrence. À cet égard, je suis d’avis que la jurisprudence de la Cour fournit des indications suffisantes à la juridiction de renvoi (64). En tout état de cause, il appartiendra au juge national d’apprécier en fait, à la lumière des éléments d’interprétation découlant de la jurisprudence, si les deux conditions susvisées sont remplies en l’espèce.

115. Toutefois, il reste à examiner la question des éventuelles aides existantes ainsi que celle de l’applicabilité du principe de minimis.

VII – Sur les notions d’aides existantes et de minimis

A –    Sur la notion d’aide existante

116. Selon la jurisprudence, la notion d’aide d’État, existante ou nouvelle, répond à une situation objective. Cette notion ne saurait dépendre du comportement ou des déclarations des institutions (65).

117. Dans leurs observations écrites, le gouvernement italien ainsi que Paint Graphos et Adige Carni ont fait valoir que les mesures fiscales particulières destinées aux sociétés coopératives sont des «aides existantes» car elles étaient déjà prévues par la législation italienne applicable avant l’entrée en vigueur du traité de Rome en 1957 (66).

118. Le gouvernement italien a précisé que la législation applicable avant l’entrée en vigueur du traité de Rome en 1957 prévoyait un régime fiscal qui, en substance, exonérait complètement les sociétés coopératives de l’imposition normalement applicable aux sociétés à but lucratif, l’exonération n’étant naturellement acquise qu’aux seules coopératives à but mutualiste, conformément au principe prévu à l’époque par la loi Basevi (67).

119. Ainsi que l’a précisé également la Commission, dans l’ordre juridique italien dès 1957, les sociétés coopératives bénéficiaient de la possibilité d’exclure du montant imposable la totalité du pourcentage du bénéfice annuel, avantage qui, en termes globaux, n’a cessé de diminuer depuis cette date. Les services de la Commission ont par ailleurs constaté que les modifications apportées aux mesures en question depuis l’entrée en vigueur du traité CEE visaient à apporter des modifications techniques afin d’adapter le système d’imposition des coopératives à la fiscalité générale modifiée à la suite des réformes de 1973, 1986 et 2004.

120. À l’audience, Adige Carni, Paint Graphos, le gouvernement italien ainsi que la Commission se sont exprimés en faveur d’une thèse selon laquelle les mesures en question, sous réserve de constituer des aides d’État au sens de l’article 87 CE, sont des aides existantes au sens de l’article 1er, paragraphe 1, sous b), point i), du règlement n° 659/1999.

121. Il paraît donc, à première vue, fondé de considérer que, dans l’hypothèse où elles remplissent les critères de l’article 87, paragraphe 1, CE, les mesures en cause sont susceptibles de constituer des aides existantes.

122. Toutefois, dès lors d’une part, que le régime de 1954 (68) était caractérisé par l’imposition tant sur le patrimoine que sur le revenu et, d’autre part, que selon le régime établi en vertu du DPR n° 601/1973, seul le revenu était imposable et il existait certaines limites à l’application des avantages fiscaux liées au capital de la société coopérative, je considère que seule la juridiction nationale est à même d’apprécier, de manière globale, la continuité éventuelle entre les régimes susvisés. Dans ce cadre, elle sera amenée à vérifier, notamment, si l’allégement de la charge fiscale à la date de l’entrée en vigueur du traité de Rome était comparable ou plus important par rapport à celui introduit dans le DPR n° 601/1973. Ce n’est que si tel était le cas, qu’il s’agirait, en l’espèce, d’aides existantes.

B –    Sur le principe de minimis

123. Dans ses écritures, Paint Graphos a soulevé la problématique de la règle dite «de minimis». Elle a renvoyé, à cet égard, aux différents rapports et communications de la Commission établis entre l’année 1984 et l’année 1993 (69) et a fait valoir que, compte tenu, d’une part, du taux de l’impôt sur le revenu des entreprises et, d’autre part, des seuils d’application du principe de minimis à l’époque des déclarations de revenus litigieuses, le montant des impôts éludés serait de toute manière inférieur au seuil en vigueur pendant les années concernées par les rectifications.

124. Il convient de rappeler que la règle de minimis répond à des exigences de simplification administrative tant pour les États membres que pour les services de la Commission, laquelle doit pouvoir concentrer ses ressources sur les cas d’importance réelle au niveau de l’Union (70).

125. À supposer même que la règle de minimis puisse s’appliquer aux sociétés coopératives en question, ce qui ne me paraît pas exclu en principe, le jeu dudit principe n’est pas une question simple en l’espèce, notamment, du point de vue de l’application du droit ratione temporis.

126. À cet égard, il me semble que, si la juridiction nationale considérait que le droit aux exonérations a été contesté et, partant, que les sociétés en cause n’ont pas pu véritablement bénéficier des avantages fiscaux, l’identification de la mesure en tant qu’aide de minimis devrait être opérée au regard des critères en vigueur au moment où leur caractère d’aide d’État sera définitivement établi et l’avantage fiscal éventuel en découlant pour l’entreprise sera calculé au regard du règlement n° 1998/2006.

127. Toutefois, si le juge de renvoi considérait que les sociétés ont déjà bénéficié des exonérations, ce qui me semble exclu étant donné que les impositions concernées ne sont pas devenues juridiquement définitives, la vérification devrait être opérée au regard des critères définis dans les communications de la Commission qui étaient applicables à l’époque des faits des litiges au principal.

VIII – Conclusion

128. Au vu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour:

–        de déclarer irrecevables les questions préjudicielles posées par la Corte suprema di cassazione;

–        à titre subsidiaire, de ne déclarer recevable que la première question préjudicielle et d’y répondre en ce sens qu’un régime fiscal des sociétés coopératives de production et de travail qui vise, alors même qu’il s’agit d’une application schématique, à exonérer le revenu correspondant à l’excédent social généré par le travail des associés, tel que celui prévu à l’article 11 du DPR n° 601/1973, dans la mesure où il résulte directement des principes fondateurs et directeurs du système fiscal applicable en ce qui concerne l’imposition des sociétés coopératives, ne saurait être considéré comme une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE.


1 – Langue originale: le français.


2 – Dès lors que le litige au principal concerne l’interprétation d’un décret datant du 29 septembre 1973, il sera fait référence aux dispositions du traité CE selon la numérotation applicable antérieurement à l’entrée en vigueur du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.


3 – En Italie, les sociétés coopératives sont aussi considérées comme des sociétés de capitaux et non pas, comme dans plusieurs autres ordres juridiques des États membres, comme des associations de personnes. À l’origine, avant que les réglementations spécifiques applicables aux coopératives ne fussent adoptées en Italie, une société coopérative était plutôt qualifiée de société à capital variable. Voir Klingberg, W., Genossenschaften und Genossenschaftsrecht in Italien, Veröffentlichung des Institut für Genossenschaftswesen an der Philipps-Universität Marburg, Marburg/Lahn, 1957, p. 49 à 50.


4 – Selon le système actuellement applicable aux sociétés de capitaux, celles-ci sont soumises à l’impôt sur le revenu des sociétés (imposta sul reddito delle societa, ci-après l’«IRES») qui est un impôt proportionnel, appliqué avec un taux fixe. Les associés paient l’impôt sur le revenu des personnes physiques (imposta sul reddito delle persone fisiche) qui est une taxe progressive sur les dividendes ou bénéfices distribués à ceux-ci, leur revenu étant imposable à 40 %. Est ainsi introduite une exonération à 60 % des dividendes ou bénéfices des associés en vue d’éliminer une imposition en chaîne.


5 – Supplément ordinaire à la GURI n° 268, du 16 octobre 1973, p. 3.


6 – Dans une annexe à la convocation à l’audience publique, les parties ont été invitées à concentrer leurs plaidoiries sur le point de savoir si et, le cas échéant, à quelles conditions des exonérations fiscales telles que celles en cause au principal sont susceptibles de constituer des aides d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE. Une question portant sur l’aspect du litige relatif aux aides existantes a également été adressée au gouvernement italien.


7 – Arrêts du 16 juillet 1992, Lourenço Dias (C-343/90, Rec. p. I-4673, point 20), ainsi que du 19 novembre 2009, Filipiak (C-314/08, non encore publié au Recueil, point 42 et jurisprudence citée).


8 – Arrêt du 9 mars 2000, EKW et Wein & Co (C-437/97, Rec. p. I-1157, point 52).


9 – Voir, notamment, arrêt du 26 janvier 2010, Transportes Urbanos y Servicios Generales (C-118/08, non encore publié au Recueil, point 23 et jurisprudence citée).


10 – Voir arrêt du 23 mars 2006, Enirisorse (C-237/04, Rec. p. I-2843, point 23).


11 – Voir arrêt du 30 mars 2006, Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti (C-451/03, Rec. p. I-2941, point 69 et jurisprudence citée).


12 – Arrêt du 26 septembre 1996, Allain (C-341/94, Rec. p. I-4631, point 11).


13 – Voir arrêts précités Enirisorse (point 24), et Transportes Urbanos y Servicios Generales (point 23).


14 – Voir arrêt du 10 juin 2010, Fallimento Traghetti del Mediterraneo (C-140/09, non encore publié au Recueil, point 24 et jurisprudence citée).


15 – Arrêts du 8 mars 2007, Campina (C-45/06, Rec. p. I-2089, point 30); du 23 septembre 2008, Bartsch (C-427/06, Rec. p. I-7245, point 31), et du 5 mars 2009, Kattner Stahlbau (C-350/07, Rec. p. I-1513, point 24).


16 – Arrêts du 22 mars 1977, Steinike & Weinlig (78/76, Rec. p. 595, point 14); du 21 novembre 1991, Fédération nationale du commerce extérieur des produits alimentaires et Syndicat national des négociants et transformateurs de saumon (C-354/90, Rec. p. I-5505, point 10); du 11 juillet 1996, SFEI e.a. (C-39/94, Rec. p. I-3547, point 49), ainsi que du 5 octobre 2006, Transalpine Ölleitung in Österreich (C-368/04, Rec. p. I-9957, point 39).


17 – Cathiard, C., «La société coopérative européenne», La semaine juridique. Entreprise et affaires, n °1, 2009, p. 34 à 50.


18 – Bassi, A., Le società cooperative, UTET, Turin, 1995, p. 30.


19 – Pour une présentation de la taxation des coopératives dans les États membres de l’Union européenne des douze, voir Stracke, B., Besteuerung von Genossenschaften in der Europäischen Union, Erich Schmidt Verlag, Bielefeld, 1997.


20 – Lolli, R., «Social Cooperatives in the Context of Recent Italian Regulation», Droit comparé des coopératives européennes, Larcier, Luxembourg, 2009, p. 89.


21 – Alguacil Marí, M. P., «Il trattamento fiscale delle cooperative alla luce del regime europeo degli aiuti di Stato», Rivista di diritto tributario internazionale (International tax law review), 1 (2004), p. 51 à 79. L’auteur identifie dans ce groupe l’Irlande et la plupart des coopératives en Autriche et en Grèce.


22 – Alguacil Marí, M. P., op. cit., énumère dans cette catégorie, notamment, la République portugaise en ce qui concerne les coopératives de consommation, la République fédérale d’Allemagne et la République hellénique en ce qui concerne les coopératives agricoles et la République italienne en ce qui concerne les coopératives agricoles et de la pêche.


23 – Alguacil Marí, M. P, op. cit., indique, notamment, la République fédérale d’Allemagne, le Royaume de Danemark, la République de Finlande et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.


24 – Alguacil Marí, M. P, op. cit., indique dans ce groupe, notamment, la République portugaise et le Royaume d’Espagne.


25 – Voir Mannio, L., Osuuskunnat ja verotus, Edita, Helsinki, 2004, p. 73.


26 – Sur l’histoire des coopératives de production et de travail en Italie, voir Klingberg, W., op. cit., p. 21 à 27. La législation adoptée en 1911 a prévu un régime spécial concernant la distribution d’excédent des sociétés coopératives de production et de travail désireuses de participer aux travaux publics. Ibidem p. 123 et 124.


27 – Selon Stracke, l’objectif des coopératives de production et de travail typiques des États membres de l’Europe du Sud est d’améliorer l’accès à l’emploi des associés. Leur traitement fiscal spécifique tend à promouvoir la durabilité de ces coopératives par l’accumulation du capital coopératif commun. Voir Stracke, B., op. cit., p. 46.


28 – Stillitani, G., «La piccola società cooperativa: applicazione delle agevolazioni fiscali», Sistema Leggi d’Italia, Dottrina, 2008. Voir aussi Stracke, B., op. cit., p. 180 et 181.


29 – Mathématiquement, ceci correspond à une exonération de 50 % des revenus.


30 – Pistolesi, F., «Le agevolazioni fiscali per le cooperative», TributImpresa, n° 3/2005.


31 – Il ressort de l’article 50 du texte unique des impôts directs (Testo Unico del 22/12/1986 n. 917) que sont assimilées aux revenus d’un travail salarié les rémunérations perçues, entre les limites des salaires courants majorés de 20 %, par les travailleurs membres des coopératives de production et de travail.


32 – Arrêts du 8 novembre 2001, Adria-Wien Pipeline et Wietersdorfer & Peggauer Zementwerke (C-143/99, Rec. p. I-8365, point 38); du 20 novembre 2003, GEMO (C-126/01, Rec. p. I-13769, point 28 et jurisprudence citée); du 15 juillet 2004, Espagne/Commission (C-501/00, Rec. p. I-6717, point 90 et jurisprudence citée); du 15 décembre 2005, Italie/Commission (C-66/02, Rec. p. I-10901, point 77), ainsi que du 22 juin 2006, Belgique et Forum 187/Commission (C-182/03 et C-217/03, Rec. p. I-5479, point 86).


33 – Arrêts du 15 mars 1994, Banco Exterior de España (C-387/92, Rec. p. I-877, point 14), et Italie/Commission, précité (point 78).


34 – Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur la promotion des sociétés coopératives en Europe [COM(2004) 18 final].


35 – Arrêt du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission (C-487/06 P, Rec. p. I-10505, point 84 et jurisprudence citée).


36 – Arrêt British Aggregates/Commission, précité (point 85).


37 – Société en nom collectif, société en commandite.


38 – Société à responsabilité limitée ou société anonyme/par actions.


39 – Le droit italien semble faire une distinction entre la «soggettività giuridica» et la «personalità giuridica». Voir Magrini, P. P., Italienisches Gesellschaftsrecht: das neue Recht und seine erweiterten Aufbau- und Finanzierungsformen, Sellier European Law Publishers, Munich, 2004, p. 8.


40 – Rossi-Macanico, P., «The specificity criterion in fiscal aid review: proposals for state aid control of direct business tax measures», EC tax review, vol. 16, 2007, issue 2, p. 91.


41 – Voir, en ce sens, arrêts Adria-Wien Pipeline et Wietersdorfer & Peggauer Zementwerke, précité (point 41); du 29 avril 2004, GIL Insurance e.a. (C-308/01, Rec. p. I-4777, point 68 et jurisprudence citée), ainsi que du 3 mars 2005, Heiser (C-172/03, Rec. p. I-1627, point 40).


42 – Ceci paraît être le cas de l’exonération prévue à l’article 10 du DPR n° 601/1973 par rapport aux activités agricoles. En effet, ainsi qu’il ressort des écritures de Paint Graphos, d’après les règles générales de fixation de l’IRES, le revenu effectif des sociétés coopératives est intégralement imposable. Il s’ensuit que l’agriculteur qui apporte ses produits à une coopérative resterait assujetti à l’impôt sur le revenu des personnes physiques sur la base du revenu cadastral, du simple fait qu’il possède de la terre agricole, comme tout autre agriculteur, et que, de plus, la coopérative – et, à travers elle, l’associé – resterait assujettie à l’IRES sur les revenus tirés de la transformation, de la vente, etc. de ses produits, tandis que l’agriculteur indépendant ne paie aucun impôt sur ce type de revenu. La fonction de l’exonération en cause est donc de rééquilibrer cette inégalité de traitement, qui – si elle n’était pas corrigée – découragerait complètement l’usage de la forme de la coopérative comme modalité d’association entre agriculteurs. J’observe, en outre, que la fiscalité des sociétés de personnes est souvent régie par le principe de la transparence susmentionné, selon lequel la société est exonérée de l’impôt mais ses revenus sont taxés dans le chef des associés indépendamment du fait de savoir si le revenu a été distribué ou non.


43 – Rossi-Macanico, P., op. cit., p. 92 et 93. L’auteur a constaté que les distinctions incluses dans la logique du système fiscal ne sont pas des exceptions et, par conséquent, elles ne constituent pas des avantages à justifier.


44 – À mon avis, cette marge de discrétion existe, par exemple, en ce qui concerne la classification de certaines parties de revenu du propriétaire/associé d’une entreprise en tant que revenu du travail ou du capital, ou en ce qui concerne l’adoption des différents barèmes de la taxation.


45 – Voir arrêt British Aggregates/Commission, précité (point 82).


46 – Arrêt du 6 septembre 2006, Portugal/Commission (C-88/03, Rec. p. I-7115, point 54).


47 – Communication de la Commission du 10 décembre 1998 sur l’application des règles relatives aux aides d’État aux mesures relevant de la fiscalité directe des entreprises (JO C 384, p. 3, point 14): «Ainsi, les mesures visant à alléger la fiscalité du travail de toutes les entreprises ont un effet relativement plus important pour les industries à forte intensité de main-d’œuvre que pour les industries à forte intensité en capital, sans nécessairement pour autant constituer des aides d’État. De même, des incitants fiscaux en faveur d’investissements environnementaux, en recherche-développement ou en formation, ne favorisent que les entreprises qui entreprennent de tels investissements, sans non plus nécessairement constituer des aides d’État.»


48 – Voir décision 2003/755/CE de la Commission, du 17 février 2003, concernant le régime d’aides mis en œuvre par la Belgique en faveur des centres de coordination établis en Belgique (JO L 282, p. 25).


49 – Rapport sur la mise en œuvre de la communication de la Commission sur l’application des règles en matière d’aide d’État aux mesures relevant de la fiscalité directe des entreprises.


50 – Arrêt du 17 juin 1999, Belgique/Commission (C-75/97, Rec. p. I-3671, point 33).


51 – À titre d’exemple, il existe des formes juridiques de personnes morales limitées et spécifiques pour certains secteurs économiques, tels que le secteur bancaire et le secteur des assurances. Voir point 20 de la communication de la Commission du 10 décembre 1998.


52 – Arrêt du 10 janvier 2006 (C-222/04, Rec. p. I-289).


53 – Ibidem (point 135).


54 – Ibidem (point 137).


55 – Voir arrêt British Aggregates/Commission, précité (point 83).


56 – Arrêt Portugal/Commission, précité (point 81).


57 – Communication de la Commission du 10 décembre 1998 (points 24 à 27).


58 – Décisions N 20/2000 (Pays-Bas) et N 53/99 (Danemark) disponibles sur le site Internet du secrétariat général de la Commission: http://ec.europa.eu/competition/elojade/isef/index.cfm?clear=1&policy_area_id=3.


59 – Arrêt GIL Insurance e.a., précité.


60 – Voir, en ce sens, Lenaerts, K., «State Aid and Direct Taxation», EU competition law in context: essays in honour of Virpi Tiili, 2009, p. 305.


61 – La mesure en question semble être une application d’un objectif de portée plus générale établi dans le droit fiscal italien visant à favoriser la capitalisation des sociétés coopératives et à défavoriser les ristournes. Voir, Stracke, B., op. cit., p. 176 à 183.


62 – Arrêts précités, Belgique/Commission; Adria-Wien Pipeline et Wietersdorfer & Peggauer Zementwerke; Heiser, ainsi que Italie/Commission.


63 – Une telle obligation est propre aux sociétés de personnes qui dans plusieurs États membres ne constituent pas les entités taxables indépendantes, mais dont le revenu social est attribué et taxé dans le chef des associés alors même que ledit revenu n’a pas été distribué à ceux-ci. Malgré leur personnalité morale propre, les sociétés coopératives possèdent plusieurs caractéristiques des sociétés de personnes. Voir Stracke, B., op. cit., p. 16 à 19, et Mannio, L., op. cit., p. 69.


64 – Voir, arrêt Cassa di Risparmio précité (points 140 et 141).


65 – Arrêt du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a. (C-89/08 P, non encore publié au Recueil, point 72).


66 – Voir article 1, sous b), i, du règlement n° 659/1999.


67 – Cette loi a régi jusqu’en 2003 les dispositions de nature fiscale destinées à vérifier le respect de la condition du but mutualiste, condition nécessaire de l’application des mesures fiscales particulières prévues en faveur des sociétés coopératives.


68 – Loi n° 603, du 6 août 1954, Istituzione di una imposta sulle società e modificazioni in materia di imposte indirette sugli affari, GURI n° 182, du 11 août 1954.


69 – Voir XIVe rapport sur la politique de la concurrence – 1985, paragraphe 203 in fine et communication de la Commission du 6 mars 1996 relative aux aides de minimis (JO C 68, p. 9).


70 – Arrêt du 7 mars 2002, Italie/Commission (C-310/99, Rec. p. I-2289, point 94).


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