BAILII is celebrating 24 years of free online access to the law! Would you consider making a contribution?
No donation is too small. If every visitor before 31 December gives just £1, it will have a significant impact on BAILII's ability to continue providing free access to the law.
Thank you very much for your support!
[Home] [Databases] [World Law] [Multidatabase Search] [Help] [Feedback] | ||
Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
||
You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Strack v Commission (Staff Regulations) French Text [2011] EUECJ -132/07 (20 January 2011) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2011/13207_J.html Cite as: [2011] EUECJ -132/7, [2011] EUECJ -132/07 |
[New search] [Help]
DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)
20 janvier 2011 (*)
«Fonction publique – Fonctionnaires – Articles 17, 17 bis et 19 du statut – Demande d’autorisation de divulguer des documents – Demande d’autorisation de publier un texte – Demande d’autorisation d’utiliser des constatations devant des autorités judiciaires nationales – Recevabilité»
Dans l’affaire F-�132/07,
ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,
Guido Strack, fonctionnaire de la Commission européenne, demeurant à Cologne (Allemagne), représenté par Me H. Tettenborn, avocat,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par M. J. Currall et Mme B. Eggers, en qualité d’agents, assistés de Me B. Wägenbaur, avocat,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre),
composé de M. H. Tagaras, président, M. S. Van Raepenbusch (rapporteur) et Mme M. I. Rofes i Pujol, juges,
greffier: M. J. Tomac, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 6 juillet 2010,
rend le présent
Arrêt
1 Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 30 novembre 2007 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 4 décembre suivant), M. Strack demande:
– l’annulation des décisions de la Commission des Communautés européennes des 20 juillet, 9 août, 11 septembre et 9 novembre 2007 en ce qu’elles rejettent des demandes tendant à l’autoriser à publier et à utiliser à des fins pénales divers documents à l’encontre de certains membres et fonctionnaires de la Commission;
– la condamnation de la Commission à lui verser au moins 10 000 euros de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait de ces décisions.
Cadre juridique
2 L’article 17 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le «statut») dispose:
«1. Le fonctionnaire s’abstient de toute divulgation non autorisée d’informations portées à sa connaissance dans l’exercice de ses fonctions, à moins que ces informations n’aient déjà été rendues publiques ou ne soient accessibles au public.
2. Le fonctionnaire reste soumis à cette obligation après la cessation de ses fonctions.»
3 L’article 17 bis du statut prévoit:
«1. Le fonctionnaire a droit à la liberté d’expression, dans le strict respect des principes de loyauté et d’impartialité.
2. Sans préjudice des articles 12 et 17, le fonctionnaire qui a l’intention de publier ou de faire publier, seul ou en collaboration, un texte quelconque dont l’objet se rattache à l’activité [de l’Union européenne] en informe au préalable l’autorité investie du pouvoir de nomination.
Si l’autorité investie du pouvoir de nomination est en mesure de démontrer que la publication est susceptible de porter gravement atteinte aux intérêts légitimes [de l’Union européenne], elle informe le fonctionnaire par écrit de sa décision dans un délai de 30 jours ouvrables à compter de la réception de l’information. Si aucune décision n’est notifiée dans ce délai, l’autorité investie du pouvoir de nomination est réputée ne pas soulever d’objection.»
4 Aux termes de l’article 19 du statut:
«Le fonctionnaire ne peut faire état en justice, à quelque titre que ce soit, des constatations qu’il a faites en raison de ses fonctions, sans l’autorisation de l’autorité investie du pouvoir de nomination. Cette autorisation ne peut être refusée que si les intérêts [de l’Union européenne] l’exigent et si ce refus n’est pas susceptible d’entraîner des conséquences pénales pour le fonctionnaire intéressé. Le fonctionnaire reste soumis à cette obligation même après la cessation de ses fonctions.
Les dispositions de l’alinéa précédent ne s’appliquent pas au fonctionnaire ou ancien fonctionnaire témoignant devant la Cour de justice [de l’Union européenne] ou devant le conseil de discipline d’une institution, pour une affaire intéressant un agent ou un ancien agent [de l’Union européenne].»
Faits du litige
5 Le requérant est entré au service de la Commission le 1er septembre 1995. À compter de cette date et jusqu’au 31 mars 2002, il a exercé ses fonctions au sein de l’Office des publications des Communautés européennes (ci-après l’«OPOCE»). Le 1er janvier 2001, il a été promu au grade A 6. Du 1er avril 2002 au 15 février 2003 il a travaillé à la direction générale (DG) «Entreprises» de la Commission, avant d’être affecté à Eurostat à partir du 16 février 2003. En 2005, il a été mis à la retraite pour invalidité, avec effet au 1er avril de cette année.
6 Le 9 avril 2007, le requérant a présenté une demande, au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, aux fins d’être autorisé, conformément notamment aux articles 17 et 17 bis du statut, à rendre publics, à titre principal, une réclamation qu’il introduisait le même jour, en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut, contre des décisions antérieures, ainsi que les annexes à cette réclamation, et, à titre subsidiaire, des extraits de ladite réclamation et de ses annexes. À titre infiniment subsidiaire, le requérant demandait également l’autorisation de publier intégralement ou par extraits, les documents susmentionnés, à tout le moins à compter du jour où la procédure précontentieuse engagée avec cette réclamation et, le cas échéant, la procédure judiciaire subséquente, seraient clôturées. Les annexes à la réclamation étaient contenues dans un CD-Rom joint à celle-ci.
7 Le 11 mai 2007, le requérant a sollicité l’autorisation de transmettre les informations visées par la demande du 9 avril 2007, ainsi que des documents produits dans le cadre d’une enquête de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) et tous les documents concernant deux recours contentieux qu’il avait introduits et qui étaient désormais définitivement jugés (par ordonnance du Tribunal de première instance du 22 mars 2006, Strack/Commission, T-�4/05, RecFP p. I-�A-�2-�83 et II-�A-�2-�361, et par ordonnance de la Cour du 8 mars 2007, Strack/Commission, C-�237/06 P, non publiée au Recueil), aux autorités pénales de plusieurs États membres, afin de dénoncer des infractions et de porter plainte dans chacun de ces États contre plusieurs fonctionnaires de l’OLAF et de l’OPOCE, ainsi que contre le secrétaire général et plusieurs membres de la Commission. Le requérant précisait que les plaintes qu’il souhaitait déposer contre les fonctionnaires de l’OPOCE, qu’il désignait, visaient des faits pénalement punissables qu’il avait exposés dans une note du 16 avril 2004, tandis que celles concernant les autres fonctionnaires et personnalités désignés dans sa demande visaient des faits d’entrave à la justice, d’incitation de subordonnés à commettre des délits et de prévarication.
8 Par une note du 19 juin 2007, le directeur de la direction «Statut: politique, gestion et conseil» de la DG «Personnel et administration» a demandé au requérant, en se référant à ses demandes des 9 avril et 11 mai 2007, d’identifier chacun des documents en cause et d’«indiquer quelles [étaient ses] intentions en ce qui concerne les documents pour lesquels des précisions [étaient] demandées, et notamment quels documents [il comptait] utiliser dans le cadre d’une procédure devant les juridictions nationales».
9 En réponse, le requérant a estimé que les documents en cause étaient suffisamment identifiés et, sous réserve de ses demandes subsidiaires, a confirmé son intention d’utiliser notamment tout le contenu du CD-Rom annexé à sa réclamation du 9 avril 2007. Les parties sont ainsi restées sur leurs positions.
10 Par décision du 20 juillet 2007, notifiée au requérant par lettre du 23 juillet suivant, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’«AIPN») a rejeté la réclamation du 9 avril 2007, ainsi que la demande du même jour fondée sur les articles 17 et 17 bis du statut, et a ajouté ce qui suit: «Faute de précision, cela vaut également à l’égard de [l]a demande [du réclamant] présentée en vertu des articles 17 et 19 du statut dans la mesure où ladite demande ne porte pas sur des documents dont M. Strack peut, en toute hypothèse, disposer librement». Dans cette décision, l’AIPN a, en outre, suggéré au requérant de sélectionner les documents qu’il entendait rendre publics et utiliser dans des procédures pénales selon quatre critères, afin de ne lui soumettre qu’un nombre restreint de pièces.
11 Par lettre du 11 octobre 2007, le requérant a introduit, sur la base de l’article 90, paragraphe 2, du statut, une réclamation contre le rejet de ses demandes du 9 avril 2007 et du 11 mai 2007 contenu dans la décision du 20 juillet 2007. Dans la mesure où cette décision ne devrait pas être lue comme ayant expressément rejeté lesdites demandes, le requérant a également dirigé sa réclamation contre les décisions implicites de rejet de ces demandes qui seraient intervenues les 9 août et 11 septembre 2007.
12 Par décision du 9 novembre 2007, l’AIPN a rejeté la réclamation du 11 octobre 2007 au motif qu’elle était irrecevable parce que le requérant aurait dû introduire directement un recours contre la décision du 20 juillet 2007.
Procédure et conclusions des parties
13 Le 4 décembre 2007 Le Tribunal a tenu une réunion informelle en vue de rechercher un règlement amiable dans d’autres affaires opposant le requérant à la Commission. Au cours de cette réunion, un règlement amiable a également été recherché dans le cadre de la présente affaire.
14 Après la réunion du 4 décembre 2007, les parties ont fait part de leurs observations sur le projet d’accord contenu dans le procès-verbal de la réunion, sans pour autant parvenir à s’entendre sur les termes dudit projet.
15 Par décision du président du Tribunal, en date du 14 janvier 2008, la présente affaire a été attribuée à la première chambre du Tribunal.
16 Les parties ont été convoquées à une seconde réunion informelle dont la date a été fixée au 6 mars 2008, après le retour de vacances du requérant. Ce dernier a cependant décliné l’invitation dans la mesure où il ne voyait aucune utilité à la tenue d’une nouvelle réunion informelle au regard de la position prise par la Commission. Cette dernière a regretté que la réunion informelle ne pût se tenir en raison de la défaillance du requérant, tout en exprimant l’espoir qu’un accord puisse être trouvé et en se montrant disposée à travailler à l’élaboration d’un règlement amiable.
17 Par acte séparé parvenu au greffe du Tribunal le 29 mai 2008, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité à l’encontre du recours, au titre de l’article 78 du règlement de procédure.
18 Le 12 juin 2008, le Tribunal a invité le requérant à déposer ses observations sur cette exception d’irrecevabilité avant le 7 juillet 2008.
19 Par courrier parvenu au greffe du Tribunal le 19 juin 2008, le requérant a fait valoir que l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission était elle-même irrecevable, faute d’avoir été présentée dans le délai d’un mois à compter de la signification de la requête, prévu à l’article 78, paragraphe 1, du règlement de procédure. Il a, en conséquence, demandé l’annulation de la décision du Tribunal fixant au 7 juillet 2008 le délai pour présenter ses observations sur cette exception. Dans la mesure où la Commission n’avait pas non plus déposé son mémoire en défense dans le délai de deux mois fixé par l’article 39, paragraphe 1, premier alinéa, du même règlement, le requérant a également demandé que l’arrêt à intervenir soit prononcé par défaut. À titre subsidiaire, il a sollicité la prorogation du délai imparti pour présenter ses observations sur l’exception d’irrecevabilité.
20 Par lettre du 1er juillet 2008, le Tribunal a informé les parties qu’il y avait lieu d’enregistrer le courrier du requérant du 19 juin 2008 et de le considérer comme une demande de prorogation du délai de dépôt de ses observations sur l’exception d’irrecevabilité. Un nouveau délai, expirant le 2 septembre 2008, a alors été fixé au requérant par le Tribunal. Le requérant a déposé ses observations au greffe du Tribunal le 1er septembre 2008, observations par lesquelles il a maintenu les conclusions présentées dans son courrier du 19 juin 2008. À titre subsidiaire, il a soutenu que l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission était dénuée de fondement et que son recours était recevable.
21 Par décision du 8 octobre 2008 du président du Tribunal, la présente affaire a été réattribuée à la deuxième chambre du Tribunal.
22 Par ordonnance du 17 septembre 2009, après avoir admis la recevabilité de la demande de la Commission tendant à statuer sur l’irrecevabilité du recours et rejeté la demande du requérant tendant à ce qu’il soit statué par défaut, le Tribunal a ordonné la jonction au fond de l’exception d’irrecevabilité, conformément à l’article 78, paragraphe 3, du règlement de procédure.
23 Par lettre du 15 janvier 2010, le requérant a demandé la jonction de la présente affaire avec ses recours pendants F-�118/07, F-�119/07, F-�120/07, F-�121/07 et F-�62/09. Le Tribunal a refusé de faire droit à cette demande le 26 janvier suivant et en a informé le requérant par lettre du greffe du 18 mars 2010.
24 Par courrier du 24 juin 2010, le requérant a demandé communication de toutes les décisions en rapport avec l’attribution de la présente affaire à la deuxième chambre du Tribunal et a fait parvenir des observations sur le déroulement de la procédure, ainsi que sur le rapport préparatoire d’audience qui lui avait été communiqué le 9 juin précédent.
25 Dans un courrier du 2 juillet 2010, le requérant a esquissé le sens que devrait prendre, selon lui, un éventuel règlement amiable, tout en demandant à ce que la procédure se poursuive, dès lors qu’un tel règlement ne semblait ni très proche ni très probable.
26 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:
– annuler les décisions de la Commission des 20 juillet et 9 novembre 2007, ainsi que les décisions implicites des 9 août et 11 septembre 2007, en ce qu’elles rejettent les demandes d’autorisation présentées par le requérant les 9 avril, 11 mai et 11 octobre 2007 en vue de la publication de certains documents et du dépôt de plaintes contre des membres et des fonctionnaires de la Commission;
– condamner la Commission à lui verser au moins 10 000 euros de dommages-intérêts au titre du préjudice immatériel, médical et moral que les décisions susvisées lui ont causé;
– condamner la Commission aux dépens.
27 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:
– rejeter le recours;
– condamner le requérant aux dépens.
Sur la procédure
28 Dans son courrier du 24 juin 2010 (voir point 24 du présent arrêt), le requérant a demandé la communication de toutes les décisions prises en cours de procédure en rapport avec la décision du président du Tribunal du 8 octobre 2008 de transférer la présente affaire de la première à la deuxième chambre du Tribunal. Dans ce même courrier, le requérant a également contesté le déroulement de la procédure devant le Tribunal, a sollicité l’organisation d’une réunion informelle en vue de rechercher un règlement amiable avant l’audience et a invité le Tribunal à rectifier en plusieurs points le rapport préparatoire d’audience.
29 S’agissant de la communication de décisions d’ordre procédural, le Tribunal rappelle qu’en vertu de l’article 20, paragraphe 1, du règlement de procédure il est tenu au greffe, sous la responsabilité du greffier, un registre dans lequel sont inscrits, notamment, tous les actes de procédure. De plus, conformément à l’article 6, paragraphe 5, des instructions au greffier du Tribunal du 19 septembre 2007 (JO L 249, p. 3), le représentant du requérant peut consulter, dans les bureaux du greffe, le dossier original de l’affaire et demander des copies ou des extraits des pièces de procédure et du registre. Il appartient au requérant qui souhaite prendre connaissance des éléments du dossier de l’affaire de se conformer à ces dispositions. En outre, par courrier du 17 novembre 2008, le greffe du Tribunal a informé le requérant des raisons de la réattribution du présent recours à la deuxième chambre du Tribunal.
30 S’agissant des critiques formulées à l’encontre de la procédure suivie devant lui, le Tribunal relève d’emblée que, sous peine de sortir du cadre du litige circonscrit par la requête et de rendre les débats incertains, il ne saurait avoir égard à des demandes incidentes, observations ou critiques concernant le déroulement de la procédure dans d’autres affaires auxquelles le requérant se borne à renvoyer, de surcroît, de manière souvent confuse.
31 Dans la mesure où le requérant critique explicitement la circonstance que le délai imparti à la Commission pour présenter son mémoire en défense a été prorogé à plusieurs reprises en méconnaissance du principe du contradictoire, le Tribunal rappelle que l’article 39, paragraphe 2, du règlement de procédure permet au président du Tribunal d’accorder de telles prorogations à la demande motivée de la partie défenderesse. Contrairement à ce que prétend le requérant, l’absence de débat contradictoire sur cet aspect, limité, de la procédure n’a pas pu méconnaître son droit à un procès équitable. Conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, l’équité d’une procédure s’apprécie au regard de l’ensemble de celle-ci (voir Cour eur. D.H., arrêt Vidal c. Belgique du 22 avril 1992, n° 12351/86, série A n° 235-�B, § 33, et arrêt Bonifacio c. France du 10 octobre 2006, n° 18113/02, § 22). Or, les prorogations de délai litigieuses n’ont pas modifié substantiellement la situation des parties, plusieurs de ces prorogations ayant été accordées durant une tentative de règlement amiable que la poursuite d’une procédure strictement contentieuse aurait, par nature, pu compromettre. De plus il y a lieu de relever que le requérant a lui-même bénéficié d’une prolongation de délai pour la présentation de ses observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission après l’échec de la tentative de règlement amiable mentionnée plus haut, sans que la Commission ait été entendue sur cette prorogation. Enfin, le requérant a, en toute hypothèse, pu exposer ses arguments à l’audience.
32 Par ailleurs, il ne saurait être répondu à la critique que le requérant formule envers le traitement réservé à un courrier adressé au Tribunal le 2 avril 2009 dans une autre de ses affaires, cette critique étant dépourvue de pertinence dans le cadre du présent litige.
33 Dans la mesure où le requérant conteste l’ordonnance du Tribunal du 17 septembre 2009 admettant la recevabilité de l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission et joignant l’incident au fond, le Tribunal renvoie aux motifs de cette ordonnance. Au demeurant, la recevabilité des recours constitue une question d’ordre public qu’il incombe d’examiner, le cas échéant, d’office.
34 Dans la mesure où le requérant critique le refus d’ordonner la jonction de plusieurs de ses recours, le Tribunal renvoie à sa décision du 26 janvier 2010. Il rappelle, en outre, qu’en vertu de l’article 46, paragraphe 1, du règlement de procédure, la jonction de deux ou plusieurs affaires ne peut être ordonnée que dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice et qu’il dispose, en la matière, d’un large pouvoir d’appréciation. En l’occurrence, le président de la deuxième chambre a estimé que la jonction sollicitée aurait compliqué l’appréhension et le traitement des différentes affaires en cause.
35 S’agissant de l’organisation d’une réunion informelle en vue de rechercher un règlement amiable, le Tribunal constate qu’une telle voie a déjà été explorée en vain au début de la procédure et estime que le litige ne se prête pas à une nouvelle tentative. Dans son courrier du 2 juillet 2010, le requérant lui-même a d’ailleurs concédé qu’un tel règlement amiable ne semblait ni très proche ni très probable.
36 S’agissant de la demande du requérant tendant à ce que le rapport préparatoire d’audience soit rectifié en plusieurs points, le Tribunal rappelle que, comme l’indique son intitulé, un tel document a pour objet de préparer l’audience et de permettre aux parties de faire valoir leurs éventuelles observations sur les données du litige et les questions soulevées dans ledit rapport en vue de la rédaction de l’arrêt. Aussi, la modification comme telle de ce document n’aurait-elle aucune portée sur le déroulement de la procédure juridictionnelle et la teneur de l’arrêt, les critiques formulées par les parties à son égard pouvant seulement être prises en considération dans le cadre de l’établissement de l’arrêt pour autant qu’elles soient pertinentes. En l’occurrence, le requérant a, précisément, fait part de telles critiques dans son courrier du 24 juin 2010, mais il convient de relever que ces critiques concernaient le rapport préparatoire d’audience de l’affaire F-�121/07. Toutefois, au cours de la procédure orale, le requérant a formulé d’autres observations en rapport, celles-ci, avec la présente affaire et dont le présent arrêt tient compte.
En droit
Sur les conclusions en annulation
Arguments des parties
37 La Commission estime que le recours en annulation est irrecevable au regard de l’article 91, paragraphe 2, du statut en l’absence d’acte faisant grief au requérant au sens de l’article 90, paragraphe 1, de celui-ci et de décision sur une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut.
38 Ainsi qu’il ressortirait de la réponse de l’AIPN du 20 juillet 2007, les demandes du requérant n’auraient pas été rejetées. Le requérant aurait, au contraire, été invité à les rendre suffisamment précises. En effet, selon une jurisprudence constante, la demande visée à l’article 90, paragraphe 1, du statut devrait préciser son objet de façon suffisante pour que l’autorité saisie puisse statuer en connaissance de cause (arrêt de la Cour du 12 mars 1975, Küster/Parlement, 23/74, Rec. p. 353, point 11).
39 La Commission observe que, conformément aux articles 17, 17 bis et 19 du statut, il lui incombait, d’une part, d’examiner si une divulgation des informations en cause était susceptible de porter gravement atteinte aux intérêts de l’Union ou de les mettre en péril et, d’autre part, de mettre les intérêts de l’institution en balance avec les intérêts du requérant.
40 Or, des plaintes déposées aux fins de déclencher des poursuites pénales contre un ancien commissaire, un commissaire en exercice, un ancien secrétaire général, des directeurs généraux de l’OLAF et de l’OPOCE et d’autres directeurs de ces services seraient, à première vue, susceptibles de porter considérablement et gravement atteinte aux intérêts de l’Union. Parallèlement, une telle atteinte doit être mise en balance, selon la Commission, avec la liberté d’expression du fonctionnaire et les privilèges que lui confère l’État de droit.
41 Compte tenu de la gravité des griefs soulevés et de l’objectif poursuivi par le requérant d’utiliser certains documents en vue de déposer des plaintes pénales dans divers États membres, il aurait été absolument indispensable que le requérant désignât précisément chaque document dans ses demandes et expliquât brièvement en quoi sa production était nécessaire au dépôt de ces plaintes.
42 Le CD-Rom transmis par le requérant à l’administration n’aurait pas suffi, dès lors qu’il contenait, selon la Commission, une multitude de pièces enregistrées sans aucun ordre, étant remarqué que certaines d’entre elles ne requièrent pas d’autorisation préalable en vue de leur publication.
43 La Commission ajoute qu’il serait contraire aux principes de proportionnalité et de bonne administration que ses services doivent consacrer des ressources considérables, d’abord, à parcourir et mettre en ordre une multitude de documents figurant sur un CD-Rom, puis à tenter de déterminer à quel usage chaque document serait susceptible de servir, en l’absence de toute indication en ce sens de l’auteur de la demande tendant à être autorisé à publier ou à transmettre à des autorités judiciaires lesdits documents. La Commission tire argument de l’article 17 bis du statut qui prévoit que l’autorisation de publication est réputée acquise à l’expiration d’un délai de 30 jours, ce qui suppose que la demande soit traitée par différents services dans un délai d’une vingtaine de jours ouvrables.
44 La Commission soutient que, dans sa réponse du 20 juillet 2007, l’AIPN a fourni au requérant plusieurs critères en fonction desquels ce dernier aurait pu regrouper les documents et présenter ensuite à l’institution, accompagnée d’une brève explication, une demande d’autorisation ne concernant qu’un nombre restreint de documents jugés les plus importants.
45 La position de la Commission ne porterait pas indûment atteinte à la liberté d’expression du requérant ni aux principes de l’État de droit et de transparence. En effet, ces droits fondamentaux ne seraient pas sans limites; ils seraient limités dans l’intérêt du service par les dispositions du statut (arrêt du Tribunal de première instance du 19 mai 1999, Connolly/Commission, T-�34/96 et T-�163/96, RecFP, p. I-�A-�87 et II-�463, point 129), notamment en ce qu’elles prévoient qu’un fonctionnaire est tenu d’informer l’institution des faits dont il a eu connaissance dans le contexte de son travail et qu’il entend rendre publics, ainsi que d’obtenir de l’institution une autorisation à cet effet. De telles dispositions seraient, de surcroît, conformes au devoir de loyauté et de discrétion des fonctionnaires également énoncés à l’article 287 CE, devenu, après modification, article 339 TFUE, ainsi qu’à l’intérêt de l’institution.
46 Par ailleurs, le devoir de sollicitude qui pèse sur l’administration n’exonèrerait pas non plus le requérant de son obligation de présenter une demande suffisamment précise, dans le respect de l’obligation de coopérer loyalement avec l’AIPN.
47 L’interprétation du devoir de sollicitude donnée par le requérant aurait pour effet de modifier, en faveur du fonctionnaire, l’équilibre entre droits et obligations, tel qu’il ressort des articles 17, 17 bis et 19 du statut, car, à le suivre, la Commission ne serait pas en mesure de prendre une décision tenant suffisamment compte également des intérêts de l’institution.
48 Pour l’ensemble de ces raisons, la Commission estime qu’il n’existe pas d’acte de l’AIPN faisant grief au requérant, de sorte que le recours serait irrecevable.
49 Le requérant, quant à lui, conteste que le CD-Rom sur lequel figurent les annexes à la réclamation du 9 avril 2007 contienne une quantité incommensurable de documents enregistrés en vrac. La Commission aurait pu aisément, à la lecture de la réclamation, cerner l’objet de chacun des documents en cause, lesquels auraient été soigneusement numérotés. De plus, les demandes des 9 avril et 11 mai 2007 définiraient de manière précise leur objet, à savoir mettre en évidence la pratique de la lutte contre la fraude au sein de la Commission et la manière selon laquelle cette dernière traite les informations. Le requérant estime que ni l’article 17 ni l’article 19 du statut n’imposent au fonctionnaire concerné d’exposer en détail les motifs justifiant sa demande, l’exigence de précision ne se rapportant qu’à l’objet de l’autorisation. Or, en enregistrant chacun des documents visés par la demande d’autorisation sur un CD-Rom, il aurait fait preuve d’une précision rigoureuse.
50 Quant à l’article 17 bis du statut, il n’obligerait en aucun cas le fonctionnaire à obtenir l’autorisation préalable quant à l’opinion qu’il exprime, car une telle interprétation serait incompatible avec le droit fondamental à la liberté d’expression. Même si c’était le cas, la Commission n’aurait pas été habilitée à rejeter purement et simplement ses demandes, mais aurait dû, dans un premier temps, déterminer les autorisations qu’elle allait lui accorder et exiger ensuite, le cas échéant, que le contenu des plaintes lui soit à nouveau présenté avant d’être envoyé. Seul ce comportement aurait été compatible avec le principe de bonne administration et le devoir de sollicitude. En tout état de cause, l’article 17 bis du statut ne s’appliquerait pas aux fonctionnaires ayant cessé leurs fonctions.
51 Le requérant est également d’avis que, dans sa décision du 20 juillet 2007, l’AIPN a bel et bien statué sur ses demandes des 9 avril et 11 mai 2007, ainsi qu’il ressort du libellé à la fois de cette décision, in fine, et de celle, du 9 novembre 2007, portant rejet de sa réclamation contre ladite décision du 20 juillet 2007.
52 Par ailleurs, le requérant observe que la liberté d’expression doit garantir la possibilité de ne pas devoir soumettre chaque mot à l’autorité de censure, ni non plus de devoir justifier en détail les différents motifs qui sous-tendent l’opinion exprimée. De plus, l’article 17 du statut et, implicitement, l’article 19 du statut soustrairaient les informations rendues publiques ou accessibles au public à l’obligation d’autorisation et en permettraient donc également la libre circulation.
53 Même au regard des quatre groupes de documents auxquels fait référence la décision de l’AIPN du 20 juillet 2007, à savoir les documents dont l’accès est déjà accordé au titre du règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43), les documents médicaux du requérant, les dossiers personnels de ce dernier et les documents le concernant en sa qualité de fonctionnaire, le requérant estime que ses demandes touchant aux documents de chacun de ces groupes ont été rejetées par la Commission.
Appréciation du Tribunal
– Observations liminaires
54 Dans la mesure où le requérant a introduit ses demandes des 9 avril et 11 mai 2007 «au titre des dispositions combinées [de l’article] 90, paragraphe 1, [et des articles] 17 et 17 bis du statut», il convient, à titre liminaire, de vérifier le champ d’application de ces textes et la manière selon laquelle ils s’agencent avant d’examiner la recevabilité du recours.
55 La question se pose, en premier lieu, de savoir si l’article 17 bis du statut était applicable au requérant, lequel avait été mis à la retraite pour invalidité.
56 Le requérant fait observer, à cet égard, que, à l’inverse des articles 17 et 19 du statut, l’article 17 bis ne précise pas que les fonctionnaires restent soumis après la cessation de leurs fonctions aux obligations qu’il instaure.
57 Il ressort toutefois du considérant 16 du règlement (CE, EURATOM) n° 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, modifiant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés (JO L 124, p. 1) qu’en insérant l’article 17 bis dans le statut le législateur a eu pour objectif de clarifier les règles en matière de publication par les fonctionnaires de textes ayant un rapport avec les travaux de l’Union lorsque les intérêts de celle-ci peuvent être menacés. Comme l’observe la Commission, l’article 17 bis complète ainsi l’article 17 du statut qui oblige même les anciens fonctionnaires à s’abstenir de toute divulgation non autorisée d’informations obtenues dans l’exercice de leurs fonctions.
58 Il n’en reste pas moins que le législateur a distingué la divulgation d’informations «privilégiées», parce que reçues dans l’exercice des fonctions (article 17, paragraphe 1, du statut), de la publication d’un «texte quelconque» (article 17 bis, paragraphe 2, du statut), dont la seule caractéristique est de se rattacher à l’activité de l’Union.
59 Par ailleurs, il n’est pas contesté, en l’espèce, que l’obligation d’informer l’AIPN de l’intention de publier un texte quelconque dont l’objet se rattache à l’activité de l’Union constitue une ingérence dans l’exercice de la liberté d’expression du fonctionnaire. Cette ingérence doit, dès lors, s’apprécier conformément à l’article 10, paragraphe 2, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la «CEDH»), laquelle garantit des droits fondamentaux faisant partie du droit de l’Union en tant que principes généraux, conformément à l’article 6, paragraphe 3, TUE. Or, aux termes de l’article 10, paragraphe 2, de la CEDH, l’exercice de la liberté d’expression «comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions», pour autant que celles-ci soient «prévues par la loi» (arrêt de la Cour du 6 mars 2001, Connolly/Commission, C-�274/99 P, Rec. p. I-�1611, points 40 à 42). De plus, il ressort de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme qu’une norme ne peut valablement imposer des restrictions à la liberté d’expression si elle n’est pas énoncée avec assez de précision pour permettre au citoyen de régler sa conduite (Cour eur. D. H., arrêt Sunday Times c. Royaume-Uni du 26 avril 1979, n° 6538/74, série A n° 30, § 49), ce que commande, au demeurant aussi, le principe de sécurité juridique (voir, par exemple, arrêt de la Cour du 3 juin 2008, Intertanko e.a., C-�308/06, Rec. p. I-�4057, point 69).
60 Il s’ensuit qu’à défaut de viser expressément les anciens fonctionnaires, à l’instar des articles 17 et 19 du statut, l’article 17 bis du statut ne saurait être interprété comme imposant à ceux-ci une obligation d’informer l’AIPN de leur intention de publier un texte quelconque dont l’objet se rattache à l’activité de l’Union.
61 Certes, le lien entre une institution et un fonctionnaire mis à la retraite pour invalidité n’est pas entièrement rompu, puisque celui-ci est susceptible d’être réintégré lorsqu’il ne remplit plus les conditions requises pour bénéficier de l’allocation d’invalidité, ainsi que le prévoit l’article 14, deuxième alinéa, de l’annexe VIII du statut. Toutefois, le statut lui-même qualifie les fonctionnaires mis à la retraite pour invalidité d’«anciens fonctionnaires», malgré la possibilité de réintégration. Il est difficile, dans ces conditions, de prétendre que le statut impose avec suffisamment de clarté aux intéressés une obligation d’informer l’AIPN de toute intention de publication.
62 Il y a donc lieu de déduire de ce qui précède que l’article 17 bis du statut n’était pas applicable au requérant.
63 Conformément à l’article 17 du statut, il incombe toutefois aux anciens fonctionnaires de solliciter une autorisation avant de divulguer, le cas échéant dans un texte qu’ils projettent de publier, des informations dont ils ont eu connaissance dans l’exercice de leurs fonctions, sauf si celles-ci ont déjà été rendues accessibles au public.
64 Il s’impose de conclure, au vu de l’ensemble de ce qui précède, que le requérant pouvait publier des textes en rapport avec les activités de l’Union sans en informer au préalable l’AIPN, mais qu’en revanche il était tenu de solliciter une autorisation au sens de l’article 17 du statut non seulement avant de divulguer des informations dont il avait eu connaissance dans le cadre de ses fonctions, mais aussi avant de publier des textes, rédigés par lui ou auxquels il avait collaboré, contenant de telles informations.
65 S’agissant, en deuxième lieu, du champ d’application de l’article 19 du statut, il convient de relever que cette disposition recouvre l’ensemble des situations dans lesquelles un fonctionnaire ou ancien fonctionnaire est amené, à quelque titre que ce soit, à faire état en justice des constatations faites en raison de ses fonctions, notamment dans le contexte du dépôt d’une plainte au pénal (arrêt du Tribunal de première instance du 13 juin 2002, Ferrer de Moncada/Commission, T-�74/01, RecFP p. I-�A-�87 et II-�411, point 48). Aussi, la demande introduite par le requérant le 11 mai 2007 tendant à être autorisé à transmettre des documents aux autorités judiciaires d’États membres ne pouvait-elle être examinée par l’AIPN qu’au vu de cet article.
66 Il convient, en dernier lieu, d’observer que le législateur n’a pas soumis à une procédure particulière les demandes de fonctionnaires tendant à être autorisés à divulguer des informations obtenues dans l’exercice de leurs fonctions ou à utiliser en justice des constatations opérées à cette occasion. Par conséquent, ces demandes, visées aux articles 17 et 19, premier alinéa, du statut, doivent être examinées dans les conditions procédurales fixées à l’article 90, paragraphe 1, du statut.
67 C’est dans ce contexte qu’il convient d’examiner la recevabilité du recours.
– Sur la recevabilité du recours
68 Il incombe au Tribunal d’examiner si, comme le soutient en substance la Commission, le recours est irrecevable parce que l’AIPN était dans l’impossibilité matérielle de statuer sur les demandes du requérant en raison de leur imprécision et de la nécessité dans laquelle elle se serait trouvée de mobiliser des ressources déraisonnables pour y répondre dans un sens ou dans l’autre.
69 Il convient, à cet égard, de rappeler qu’une demande fondée sur l’article 90, paragraphe 1, du statut doit préciser son objet de façon suffisamment claire pour que l’autorité saisie puisse statuer en connaissance de cause et que, à défaut d’invitation précise à statuer, il ne saurait y avoir de demande au sens de cette disposition (arrêt Küster/Parlement, précité, point 11; arrêts du Tribunal de première instance du 11 juin 1996, Sánchez Mateo/Commission, T-�110/94, RecFP p. I-�A-�275 et II-�805, point 26, et Ouzounoff Popoff/Commission, T-�111/94, RecFP p. I-�A-�277 et II-�819, point 28). En effet, une demande ne saurait atteindre son but si l’AIPN n’est pas en mesure d’appréhender suffisamment son objet.
70 Ce devoir de précision est encore accentué par l’économie des articles 17 et 19 du statut.
71 L’article 17 du statut interdit, en principe, aux fonctionnaires de divulguer des informations reçues dans l’exercice de leurs fonctions et subordonne une telle divulgation à une autorisation préalable. Ce régime d’autorisation est destiné à permettre à l’AIPN de s’assurer que cette divulgation ne porte pas atteinte aux intérêts de l’Union, en affectant notamment son fonctionnement et sa réputation. Il a aussi pour but de la mettre en mesure de veiller, en temps opportun, à ce que les fonctionnaires règlent leur conduite en ayant en vue les intérêts des institutions et les obligations qui leur incombent au titre de l’article 339 TFUE. Le régime institué par l’article 17 du statut tend donc, notamment, à préserver la relation de confiance qui doit exister entre les institutions et leurs agents.
72 La mise en œuvre de ce régime suppose que la question de savoir s’il y a lieu d’autoriser la divulgation d’informations soit appréciée à la lumière de l’ensemble des circonstances concrètes de l’espèce et de leurs implications sur l’institution et sur l’exercice du service public. Cette mise en œuvre nécessite également une mise en balance des différents intérêts en présence afin de déterminer lequel des intérêts de l’Union ou de l’intérêt du public à recevoir des informations doit primer. Il ne saurait, d’ailleurs, en aller autrement car la liberté d’expression comporte celle de diffuser des informations et que le refus d’autoriser une telle diffusion sur la base d’une appréciation globale et abstraite ne serait pas conforme aux conditions dans lesquelles une ingérence dans cette liberté est admissible.
73 Il s’ensuit que le régime d’autorisation mis en place par l’article 17 du statut, qui doit permettre à l’AIPN de statuer en pleine connaissance de cause après avoir procédé à un examen circonstancié, ne saurait fonctionner sans que le fonctionnaire soit tenu de fournir des indications suffisamment précises notamment quant aux informations à divulguer, à l’étendue de leur diffusion et au but poursuivi.
74 L’article 19 du statut impose également à tout fonctionnaire d’obtenir une autorisation avant d’utiliser devant les juridictions nationales des constatations faites dans l’exercice de ses fonctions. Par ailleurs, il ressort de la formulation restrictive de la deuxième phrase de cet article que les «intérêts [de l’Union]» qui peuvent justifier un refus d’autorisation doivent nécessairement être d’une importance considérable et présenter un caractère vital pour celle-ci (conclusions de l’avocat général M. Van Gerven sous l’arrêt de la Cour du 18 février 1992, Weddel/Commission, C-�54/90, Rec. p. I-�871, I-�881, point 11; arrêt Ferrer de Moncada/Commission, précité, point 58).
75 D’ailleurs, le droit de tout justiciable d’accéder à un tribunal, garanti par l’article 6 de la CEDH, pourrait être affecté dans sa substance même si l’AIPN était amenée à statuer de manière générale et abstraite, sans avoir procédé au préalable à un examen complet et circonstancié.
76 Il découle de tout ce qui précède que le fonctionnaire qui souhaite divulguer des informations portées à sa connaissance dans l’exercice de ses fonctions ou utiliser devant des juridictions nationales des constatations faites dans ce cadre est tenu de présenter une demande suffisamment précise à l’AIPN.
77 Cette conclusion n’est pas infirmée par le devoir de sollicitude et le principe de bonne administration que le requérant invoque.
78 Il convient, en effet, de rappeler que le devoir de sollicitude de l’administration à l’égard de ses agents doit toujours trouver sa limite dans le respect des normes en vigueur (arrêt du Tribunal de première instance du 27 mars 1990, Chomel/Commission, T-�123/89, Rec. p. II-�131, point 32) et qu’il ne saurait, dès lors, modifier l’équilibre des droits et des obligations créé par le statut dans les relations entre l’autorité publique et les agents du service public (arrêt du Tribunal du 16 avril 2008, Doktor/Conseil, F-�73/07, RecFP p. I-�A-�1-�0000 et II-�A-�1-�0000, point 42). Il ne peut donc pas modifier l’obligation pour le fonctionnaire qui demande à être autorisé à divulguer des informations reçues dans l’exercice de ses fonctions ou à utiliser en justice de telles informations de fournir à l’AIPN des indications suffisamment précises pour lui permettre de statuer. Cette obligation se déduit, au demeurant aussi, du devoir de coopérer loyalement avec l’autorité que l’article 11, premier alinéa, du statut met à la charge des fonctionnaires.
79 Quant au principe de bonne administration, qui est d’application plus générale, il ne dispense pas davantage l’administré de l’obligation d’information et de loyauté envers les institutions qui pèse sur lui lorsqu’il les sollicite (voir, en ce sens, pour les demandeurs et les bénéficiaires de concours financiers, arrêts du Tribunal de première instance du 17 octobre 2002, Astipesca/Commission, T-�180/00, Rec. p. II-�3985, point 93, et du 11 mars 2003, Conserve Italia/Commission, T-�186/00, Rec. p. II-�719, point 50; voir également, pour les candidats à un concours, arrêt du Tribunal de première instance du 23 janvier 2002, Gonçalves/Parlement, T-�386/00, RecFP p. I-�A-�13 et II-�55, point 74).
80 En l’espèce, il ressort du dossier que le requérant a demandé, premièrement, l’autorisation de divulguer et de publier, intégralement ou par extrait, des informations contenues dans une réclamation, ainsi que dans les annexes de celle-ci enregistrée sur un CD-Rom joint. Il a, deuxièmement, sollicité, d’une part, l’autorisation de transmettre aux autorités pénales de plusieurs États membres la réclamation et les annexes susmentionnées, des documents produits dans le cadre d’une enquête de l’OLAF et des documents concernant les affaires T-�4/05 et C-�237/06 P, précitées, et, d’autre part, l’autorisation de dénoncer des infractions pénales et de déposer des plaintes contre des fonctionnaires de l’OLAF et de l’OPOCE, ainsi que contre le secrétaire général et plusieurs membres de la Commission. Invité par l’administration à préciser ses demandes, le requérant a confirmé, le 25 juin 2007, sa volonté de divulguer et d’utiliser en justice, en principe, la totalité du CD-Rom.
81 Les articles 17 et 19 du statut n’obligent, certes, pas le fonctionnaire à limiter le nombre et le volume des documents qu’il demande à être autorisé à divulguer ou à produire en justice dès lors qu’il estime que la divulgation et la production en justice de chacun de ces documents est justifiée. Toutefois, conformément au devoir de coopération loyale qui pèse sur ce fonctionnaire, il lui appartient de faciliter la tâche de l’administration. Dans cette perspective, l’obligation qui lui incombe de fournir des indications suffisamment précises, notamment quant à l’objet des documents en question et quant à leur intérêt respectif au regard de l’objectif général qu’il poursuit, s’impose d’autant plus. Le fonctionnaire peut, ainsi, être amené à classer les documents selon des critères appropriés et cohérents pour en faciliter l’examen et à en fournir, le cas échéant, un résumé.
82 En l’espèce, la réclamation du 9 avril 2007 comptait 77 pages et avait pour objet de contester des décisions antérieures plutôt que d’éclairer la demande de divulgation et d’utilisation en justice de documents. Le CD-Rom qui y était annexé contenait, pour sa part, 233 fichiers qui n’avaient pas été rassemblés en vue d’une demande au titre des articles 17 et 19 du statut mais qui avaient été enregistrés sans aucun ordre ni regroupement selon différents critères qui auraient pu être pertinents. De plus, chaque fichier contenait un ou plusieurs documents et parfois même une grande quantité de documents. Le requérant a joint à sa réclamation du 11 octobre 2007 une liste des fichiers figurant sur le CD-Rom, mais cette liste n’a pas non plus été établie selon des critères en rapport avec les demandes. De plus, si chaque fichier est assorti d’une indication de son objet, celle-ci est sommaire et, le plus souvent, ne permet pas d’avoir une idée concrète du contenu du fichier concerné.
83 S’agissant de la demande formulée le 11 mai 2007, tendant à être autorisé à transmettre des documents aux autorités pénales de divers États membres et à déposer des plaintes pénales étayées par ces mêmes documents, cette demande portait en partie sur des pièces que le requérant avait remises à l’OLAF à l’occasion d’une enquête ou qui lui avaient été transmises, depuis, par ce dernier ou par la Commission. Force est de constater, à nouveau, que la demande ne précisait pas quels documents le requérant avait effectivement communiqués aux fins de l’enquête diligentée par l’OLAF ni quels étaient ceux que l’OLAF et les divers services de la Commission lui avaient communiqués dans ce cadre. La demande du 11 mai 2007 portait aussi sur «tous les documents concernant les affaires T-�4/05 et T-�237/06 P», précitées, et était également évasive, dans la mesure où elle laissait planer une incertitude sur le point de savoir si elle portait sur les écrits de procédure, sur leurs annexes, ou encore sur tout autre avis, note ou courrier en rapport avec ces affaires.
84 En définitive, le requérant, qui était le seul à avoir une connaissance exacte de ce qu’il souhaitait divulguer ou utiliser et du contenu de chaque document qu’il avait en vue, n’a pas eu le souci élémentaire de communiquer ces précisions à l’administration afin de faciliter sa tâche et l’a, ainsi, contrainte à un important travail préparatoire de recherche.
85 Par ailleurs, la demande d’autorisation du 9 avril 2007 de divulguer des documents ne comportait aucune indication quant à l’objectif que le requérant poursuivait et quant à l’étendue de cette diffusion.
86 La demande du 11 mai 2007 mentionnait, quant à elle, que l’objectif du requérant était, dans l’«intérêt public», de déposer des plaintes contre des fonctionnaires et des membres de la Commission. Compte tenu de la gravité de l’objectif poursuivi et du nombre de documents visés par le requérant, la Commission était cependant en droit de considérer qu’il était indispensable que celui-ci décrive sommairement chaque pièce qu’il voulait utiliser et qu’il explique brièvement en quoi cette pièce était nécessaire au dépôt des plaintes. Or, une telle description et une telle explication font défaut. De surcroît, force est de constater que, si le requérant a fait état de son intention de porter plainte pour entrave à la justice, incitation de subordonnés à commettre des délits et prévarication contre des fonctionnaires de l’OLAF, contre le secrétaire général de la Commission et contre des membres de celle-ci, il s’est borné à indiquer, en ce qui concerne les plaintes visant des fonctionnaires de l’OPOCE, que ceux-ci auraient aussi commis des faits pénalement punissables qu’il aurait exposés dans une note du 16 avril 2004, alors que celle-ci n’était même pas jointe à sa demande.
87 Dans sa réclamation du 11 octobre 2007, le requérant a fait part, mais de manière obscure, de son «intention de révéler, au moyen des documents que [les demandes des 9 avril et 11 mai 2007] indiquaient ou qui y étaient joints, [ses] déclarations contenues dans les demandes elles-mêmes et dans les documents accompagnant ces dernières au public ou aux services de répression, ainsi que d’étayer lesdites déclarations par les documents d’autre provenance, également joints».
88 Dans les circonstances particulières de l’espèce, il découle de ce qui précède que les courriers adressés par le requérant à la Commission les 9 avril et 11 mai 2007 ne pouvaient constituer des demandes au sens des articles 17, 19 et 90, paragraphe 1, du statut.
89 Pour autant que de besoin, il y a lieu, enfin, de relever que la Commission a fait preuve de sollicitude, d’une part, en avertissant le requérant, les 19 juin, 26 juin et 20 juillet 2007, du caractère imprécis de ses demandes et, d’autre part, en lui suggérant une manière de procéder dans sa décision du 9 novembre suivant.
90 En conséquence, il y a lieu de considérer que la procédure prévue à l’article 90, paragraphe 1, du statut n’ayant pas été respectée, le recours est irrecevable.
Sur les conclusions en indemnité
Arguments des parties
91 Selon le requérant, le rejet illicite de ses demandes d’autorisation est constitutif d’une faute de service susceptible d’engager la responsabilité extracontractuelle de la Commission. Ce rejet serait arbitraire, le seul but de la Commission ayant été peut-être d’empêcher un débat public sur ses agissements. Il existerait également un risque que les plaintes pénales n’aient plus aucun sens, pour cause de prescription, et que la publication de documents faisant état de dysfonctionnements internes au sein de la Commission à une époque maintenant révolue intéresse peu le public. Cela porterait gravement atteinte à son intérêt à faire la lumière sur ces prétendus dysfonctionnements, ainsi qu’aux mécanismes de contrôle démocratiques et conformes au principe de légalité.
92 Les décisions attaquées auraient causé au requérant un préjudice immatériel, du fait de l’atteinte à sa liberté d’expression, et une aggravation des symptômes de la maladie dont il souffre.
93 Le montant des indemnités devrait prendre en compte le caractère répétitif et les effets cumulatifs des préjudices, aussi bien que le caractère répréhensible des illégalités commises. Il devrait avoir un effet dissuasif. Le montant des indemnités devrait, dès lors, être fixé, au minimum, à la somme de 10 000 euros.
94 La Commission estime que la demande en indemnité est irrecevable en raison de l’irrecevabilité des conclusions en annulation ou, à tout le moins, non fondée en l’absence de faute de service.
95 Le requérant n’aurait pas non plus établi l’existence d’un préjudice ou d’un lien de causalité entre la prétendue faute de service et le préjudice allégué.
Appréciation du Tribunal
96 Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante en matière de fonction publique, les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice doivent être rejetées lorsqu’elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui ont, elles-mêmes, été rejetées soit comme irrecevables, soit comme non fondées (arrêt de la Cour du 12 décembre 1967, Collignon/Commission, 4/67, Rec. p. 469, et arrêt du Tribunal de première instance, du 5 avril 2005, Christensen/Commission, T-�336/02, RecFP p. I-�A-�75 et II-�341, points 117 et 118).
97 En l’espèce, il existe un lien étroit entre les conclusions en indemnité et les conclusions en annulation, le requérant soutenant que le préjudice allégué résulte des décisions dont il demande l’annulation.
98 En conséquence, il y a lieu de rejeter les conclusions en indemnité également comme irrecevables.
Sur les dépens
99 Dans l’hypothèse où son recours serait rejeté comme partiellement irrecevable ou non fondé, le requérant demande que la Commission soit condamnée aux dépens en raison de la formulation insuffisamment précise de l’information relative aux voies de recours figurant dans la décision du 20 juillet 2007 et en raison de son omission de notifier la décision correspondant à celle du 9 novembre 2007 plus tôt, c’est-à-dire avant l’expiration du délai de recours contre la décision du 20 juillet 2007.
100 La Commission a, pour sa part, demandé la condamnation du requérant aux dépens de l’instance.
101 Il convient de rappeler que, conformément à son article 121, le règlement de procédure du Tribunal est entré en vigueur le 1er novembre 2007.
102 Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
103 Toutefois, en vertu de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque l’équité l’exige, le Tribunal peut décider qu’une partie qui succombe n’est condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre. En outre, selon l’article 88 du même règlement, le Tribunal peut condamner une partie, même gagnante, à rembourser à l’autre partie les frais qu’elle lui a fait exposer et qui sont jugés frustratoires ou vexatoires en raison de son attitude, y compris avant l’introduction de l’instance.
104 En l’espèce, le recours est jugé irrecevable en raison de la grande imprécision des courriers des 9 avril et 11 mai 2007, et sur laquelle la Commission a attiré l’attention du requérant à plusieurs reprises. En outre, le courrier de l’AIPN du 9 novembre 2007 ne révèle pas un comportement frustratoire ou vexatoire. Enfin, aucune raison d’équité ne justifie une dérogation à la règle inscrite à l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre)
déclare et arrête:
1) Le recours est rejeté.
2) M. Strack est condamné à l’ensemble des dépens.
Tagaras |
Van Raepenbusch |
Rofes i Pujol |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 janvier 2011.
Le greffier |
Le président |
W. Hakenberg |
H. Tagaras |
Les textes de la présente décision ainsi que des décisions des juridictions de l'Union européenne citées dans celle-ci sont disponibles sur le site internet www.curia.europa.eu
* Langue de procédure: l’allemand.