BAILII is celebrating 24 years of free online access to the law! Would you consider making a contribution?

No donation is too small. If every visitor before 31 December gives just £1, it will have a significant impact on BAILII's ability to continue providing free access to the law.
Thank you very much for your support!



BAILII [Home] [Databases] [World Law] [Multidatabase Search] [Help] [Feedback]

Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Jestel (Customs union) French Text [2011] EUECJ C-454/10 (14 July 2011)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2011/C45410_O.html

[New search] [Help]


AVIS JURIDIQUE IMPORTANT: The source of this judgment is the web site of the Court of Justice of the European Communities. The information in this database has been provided free of charge and is subject to a Court of Justice of the European Communities disclaimer and a copyright notice. This electronic version is not authentic and is subject to amendment.



CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PEDRO CRUZ VILLALÓN

présentées le 14 juillet 2011 (1)

Affaire C-454/10

Oliver Jestel

contre

Hauptzollamt Aachen

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesfinanzhof (Allemagne)]

«Union douanière – Code des douanes communautaire – Règlement (CEE) n° 2913/92 – Naissance de la dette douanière – Introduction irrégulière de marchandises dans le territoire douanier de l’Union – Article 202 – Notion de débiteur – Détenteur d’une boutique eBay participant à la conclusion de contrats de vente relatifs à des marchandises originaires d’un État tiers – Introduction des marchandises dans le territoire douanier de l’Union par voie postale sans accomplissement des formalités douanières – Participation à l’introduction irrégulière de marchandises dans le territoire de l’Union»





1.        La présente demande préjudicielle soulève des questions d’interprétation d’une disposition du code des douanes de l’Union européenne (2) que la Cour a déjà eu l’occasion d’interpréter (3), définissant les débiteurs de la dette douanière née de l’introduction irrégulière de marchandises dans le territoire douanier de l’Union. L’affaire au principal présente toutefois une configuration inédite et sa résolution est susceptible d’avoir des répercussions non négligeables. Sa spécificité tient à ce que la participation à l’introduction irrégulière en cause a été réalisée par l’intermédiaire d’Internet et que l’irrégularité litigieuse est intervenue dans le cadre du trafic postal. La solution du litige au principal est, de ce double fait, susceptible d’affecter un nombre potentiellement important de personnes, à raison du développement sans précédent des échanges par correspondance réalisés par l’intermédiaire d’Internet (4) et de l’effet démultiplicateur d’Internet (5).

I –    Le cadre juridique

2.        L’article 202 du code des douanes dispose:

«1.      Fait naître une dette douanière à l’importation:

a)      l’introduction irrégulière dans le territoire douanier de la Communauté d’une marchandise passible de droits à l’importation

[…]

Au sens du présent article, on entend par introduction irrégulière, toute introduction en violation des articles 38 à 41 et article 177 deuxième tiret.

2.      La dette douanière naît au moment de l’introduction irrégulière.

3.      Les débiteurs sont:

–        la personne qui a procédé à cette introduction irrégulière,

–        les personnes qui ont participé à cette introduction en sachant ou en devant raisonnablement savoir qu’elle était irrégulière,

–        ainsi que celles qui ont acquis ou détenu la marchandise en cause et qui savaient ou devaient raisonnablement savoir au moment où elles ont acquis ou reçu cette marchandise qu’il s’agissait d’une marchandise introduite irrégulièrement.» (6)

II – Le litige au principal

3.        Il ressort de la décision de renvoi, ainsi que des observations écrites présentées conformément à l’article 23 du statut de la Cour de justice, que M. Jestel, le requérant dans l’affaire au principal, a, entre les mois d’avril 2004 et de mai 2006, procédé à la mise aux enchères, sur la plateforme Internet d’enchères eBay par l’intermédiaire de laquelle il exploitait deux boutiques sous son nom (7), de nombreuses marchandises originaires de Chine.

4.        Le requérant dans l’affaire au principal intervenait en tant qu’intermédiaire pour la conclusion des contrats de vente des marchandises, moyennant contrepartie pour les services, notamment d’ordre linguistique, ainsi fournis à travers ses boutiques eBay. C’est le fournisseur chinois qui garantissait la fourniture des marchandises, fixait leurs prix et se chargeait de leur expédition vers l’Union, les acheteurs établis en Allemagne étant directement livrés par voie postale.

5.        Les marchandises ainsi livrées l’auraient été sans avoir été présentées en douane et, par conséquent, sans qu’aient été acquittés les droits à l’importation, en raison, apparemment, des indications erronées fournies par le fournisseur chinois sur le contenu et la valeur des colis expédiés.

6.        Estimant que le requérant dans l’affaire au principal avait participé à l’introduction irrégulière de marchandises dans le territoire douanier de l’Union au sens de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes, le Hauptzollamt Aachen lui a adressé un avis de recouvrement portant sur les sommes d’environ 10 000 euros au titre des droits de douane et 21 000 euros au titre de la taxe sur la valeur ajoutée à l’importation.

7.        Le requérant dans l’affaire au principal a introduit une réclamation contre l’avis de recouvrement dans laquelle il faisait valoir que la conclusion des contrats de vente sur eBay et la transmission des noms et adresses des acheteurs au fournisseur chinois ne pouvaient constituer une participation à l’introduction irrégulière de marchandises au sens de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes, dès lors qu’elles constituaient des opérations bien antérieures à l’acheminement des marchandises et se rapportant exclusivement à la transaction causale.

8.        La réclamation du requérant dans l’affaire au principal ayant été rejetée, de même que le recours introduit contre ce rejet devant le Finanzgericht (Allemagne), il a alors formé un pourvoi en révision devant le Bundesfinanzhof.

III – Les questions préjudicielles

9.        S’interrogeant sur la question de savoir si la participation du requérant dans l’affaire au principal à la conclusion des contrats de vente des marchandises par l’intermédiaire de ses boutiques en ligne sur eBay pouvait suffire à conférer à ce dernier la qualité de débiteur de la dette douanière au sens de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes, le Bundesfinanzhof a décidé de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      Une dette douanière découlant de la ‘participation’ à l’introduction irrégulière d’une marchandise dans le territoire douanier de l’Union européenne, au sens de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, naît-elle à la charge de celui qui, sans apporter directement son concours à l’introduction, sert d’intermédiaire pour la conclusion des contrats de vente relatifs aux marchandises en question et envisage, dans ce contexte, que le vendeur puisse livrer les marchandises ou une partie d’entre elles en fraude des droits à l’importation?

2)      Suffit-il le cas échéant qu’il considère cela comme concevable ou ne devient-il débiteur que s’il s’attend à ce que cela se produise?»

10.      La juridiction de renvoi précise que n’a pas encore été tranchée de manière définitive la question de savoir si le requérant dans l’affaire au principal avait supposé que les importations seraient réalisées dans le respect des formalités douanières, s’il avait conçu des doutes à cet égard ou s’il s’était attendu dès le début à ce qu’elles interviennent en méconnaissance desdites formalités.

11.      Les gouvernements tchèque et allemand ainsi que la Commission européenne ont présenté des observations écrites.

12.      Aucune demande en ce sens n’ayant été formulée dans les délais prévus à l’article 104, paragraphe 4, du règlement de procédure de la Cour par les intéressés ayant présenté des observations écrites, la Cour a décidé de ne pas tenir d’audience.

IV – Analyse

A –    Les questions posées

13.      À travers ses deux questions, la juridiction de renvoi se demande, en substance, si les faits dont elle est saisie dans le litige au principal relèvent des dispositions de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes.

14.      Il importe de souligner que la juridiction de renvoi considère comme acquis que les marchandises litigieuses ont été introduites irrégulièrement dans le territoire douanier de l’Union, au sens de l’article 202, paragraphe 1, du code des douanes. Ce qu’elle se demande, c’est si les circonstances dans lesquelles le requérant dans l’affaire au principal est intervenu dans les opérations ayant conduit à l’introduction irrégulière litigieuse peuvent permettre de le considérer, sur le fondement de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes, comme débiteur de la dette douanière née de ladite introduction.

15.      La juridiction de renvoi indique expressément qu’elle considère comme douteux qu’une personne qui, sans apporter directement son concours à l’introduction irrégulière d’une marchandise, sert d’intermédiaire pour la conclusion d’un contrat de vente portant sur ladite marchandise puisse être considérée comme ayant participé à cette introduction au sens de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes.

16.      Elle se demande par ailleurs si une personne dans la situation de M. Jestel peut être qualifiée de débiteur au sens de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes, dès lors qu’elle a pu «envisager» («in Betracht ziehen») que les marchandises ou une partie d’entre elles aient pu être livrées en fraude des droits à l’importation. Par sa seconde question, la juridiction de renvoi se demande, plus précisément, s’il suffit que ladite personne ait pu considérer cette éventualité comme «concevable» («für denkbar halten») ou s’il faut au contraire que ladite personne «s’attende» («fest rechnen») à ce que cette éventualité se produise.

B –    La structure de l’article 202, paragraphe 3, du code des douanes: le deuxième tiret

17.      L’article 202, paragraphe 3, du code des douanes définit trois catégories de personnes susceptibles d’être déclarées débitrices de la dette douanière née de l’introduction irrégulière d’une marchandise dans le territoire de l’Union. Premièrement, les auteurs de l’introduction irrégulière, deuxièmement, les personnes qui ont participé à l’introduction irrégulière en sachant ou en devant raisonnablement savoir qu’elle était irrégulière et, troisièmement, les personnes qui ont acquis ou détenu la marchandise introduite irrégulièrement, en sachant ou en devant raisonnablement savoir que cette introduction était irrégulière.

18.      Ainsi que la Cour l’a jugé, il ressort du libellé même de l’article 202, paragraphe 3, du code des douanes que le législateur de l’Union a entendu fixer de façon complète les conditions de détermination des personnes débitrices de la dette douanière (8) et définir de façon large les personnes susceptibles d’être reconnues débitrices de la dette douanière (9), en cas d’introduction irrégulière de marchandises dans le territoire douanier de l’Union.

19.      Il est constant que le requérant dans l’affaire au principal n’est pas la personne qui a introduit matériellement (10) les marchandises litigieuses dans le territoire douanier de l’Union et qu’il ne peut, dès lors, être considéré comme débiteur de la dette douanière sur le fondement de l’article 202, paragraphe 3, premier tiret, du code des douanes (11).

20.      Il est constant, également, qu’il n’a pas acquis ou détenu les marchandises litigieuses et qu’il ne peut, pas plus, être considéré comme débiteur de la dette douanière sur le fondement de l’article 202, paragraphe 3, troisième tiret, du code des douanes.

21.      C’est donc à juste titre que la juridiction de renvoi s’interroge sur l’applicabilité de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes aux faits en cause dans l’affaire au principal.

C –    Qui est débiteur au sens de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes?

22.      La qualification de «débiteur» au sens de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes est subordonnée à des conditions qui reposent sur des éléments d’appréciation, en principe, objective, à savoir la participation à l’introduction des marchandises litigieuses, et subjective, à savoir la connaissance de l’irrégularité de cette introduction. Ainsi que la Cour a eu l’occasion de le souligner en des termes parfaitement synthétiques, le débiteur, personne physique ou morale, doit avoir participé sciemment (12) aux opérations d’introduction irrégulière des marchandises dans le territoire douanier de l’Union, étant précisé que les éléments d’appréciation subjective sont de nature à exclure, dans certains cas, cette qualification (13).

23.      Il doit être rappelé, avant d’examiner en détail les conditions d’application de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes, que la juridiction de renvoi part du principe que les marchandises ont été introduites irrégulièrement dans le territoire de l’Union, et donc qu’elles l’ont été en méconnaissance des formalités prévues aux articles 38 à 41 du code des douanes. Elle ne fournit cependant guère plus d’informations à cet égard, alors même que cette introduction est intervenue dans le cadre du trafic postal. Or, le trafic postal fait l’objet de dispositions spécifiques, dont certaines relevant du droit international, qui sont de nature à exercer une influence sur la solution du litige au principal. Une présentation rapide des principales dispositions applicables au trafic postal s’impose par conséquent avant l’examen des deux conditions d’application de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes.

1.      Observations liminaires sur la spécificité du trafic postal

24.      Conformément à l’article 38, paragraphe 1, sous a), du code des douanes, les marchandises qui sont introduites dans le territoire douanier de l’Union doivent être conduites sans délai par la personne qui a procédé à cette introduction au bureau de douane désigné par les autorités douanières ou en tout autre lieu désigné ou agréé par ces autorités. L’article 38, paragraphe 4, du code des douanes prévoit cependant une exception à cette règle pour le trafic postal, pour autant que la surveillance douanière et les possibilités de contrôle douanier ne s’en trouvent pas compromises (14).

25.      La Cour n’a jamais encore été appelée à interpréter cette disposition du code des douanes ni, plus largement, à se pencher sur les règles douanières applicables au trafic postal.

26.      Ce sont les articles 237 et 238 du règlement (CEE) n° 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement n° 2913/92 (15), composant la section 4, intitulée «Trafic postal», du titre VII regroupant les dispositions applicables à la procédure normale de déclaration en douane, qui établissent les principales règles spécifiques applicables, en droit de l’Union (16), au trafic postal (17).

27.      Le règlement (CEE) n° 918/83 du Conseil, du 28 mars 1983, relatif à l’établissement du régime communautaire des franchises douanières (18), prévoyait, par ailleurs, des franchises de droits à l’importation en ce qui concerne les envois d’une valeur négligeable, c’est-à-dire n’excédant pas 22 euros (19), ainsi que les envois de particulier à particulier, plus précisément d’un particulier d’un pays tiers à un autre particulier se trouvant dans le territoire douanier de l’Union, pour autant qu’il s’agissait d’importations dépourvues de tout caractère commercial (20).

28.      Toutefois, il n’est fait aucune mention ni de ces franchises spécifiques ni même du règlement n° 918/83 dans la décision de renvoi. Le gouvernement tchèque déduit d’ailleurs des circonstances de fait présentées dans la décision de renvoi que les marchandises litigieuses ont dû être mentionnées par l’expéditeur des colis, c’est-à-dire le fournisseur, dans la documentation annexée à ces derniers, à savoir les formulaires CN21 ou CN22, comme étant des marchandises d’une valeur négligeable admises en franchise de droits à l’importation en application de l’article 27 du règlement n° 918/83. Il peut également se déduire de la décision de renvoi que les importations litigieuses ne peuvent, en tout état de cause, eu égard à leur fréquence, bénéficier des franchises au titre d’échanges entre particuliers.

29.      Il appartient, cependant, à la juridiction de renvoi d’opérer les constatations de faits lui permettant de tirer d’éventuelles conclusions à cet égard.

30.      Ce qu’il importe de retenir, c’est que les envois postaux font l’objet de règles particulières, qui sont, pour l’essentiel, fixées non par les actes de droit dérivé de l’Union évoqués ci-dessus, mais par la convention de l’Union postale universelle, adoptée le 10 juillet 1964 dans le cadre de l’Organisation des Nations unies (21) et par la convention internationale pour la simplification et l’harmonisation des régimes douaniers (22), signée à Kyoto le 18 mai 1973 (23), et en particulier son annexe F.4 concernant les formalités douanières applicables au trafic postal, approuvée par la décision 94/798/CE du Conseil, du 8 décembre 1994 (24), telles que mises en œuvre dans les différents ordres juridiques nationaux (25).

31.      Il ressort, en particulier, des dispositions de la convention internationale pour la simplification et l’harmonisation des régimes douaniers, et notamment de son annexe F.4 concernant les formalités douanières applicables au trafic postal, que le respect des formalités douanières dans le cadre des envois postaux internationaux repose principalement sur l’expéditeur, qui doit fournir les documents requis, à savoir la formule de déclaration en douane (initialement les formulaires C2/CP3 dans l’annexe F.4 et désormais la déclaration en douane CN22 ou CN23 dans le code des douanes), les factures commerciales ou pro forma requises et tout autre document exigé le cas échéant (certificat d’origine, certificat phytosanitaire, autorisation d’exportation, par exemple).

2.      La participation à l’introduction des marchandises dans le territoire douanier de l’Union

32.      Ainsi que la juridiction de renvoi l’a relevé, la notion de «participation» visée à l’article 202, paragraphe 3, second tiret, du code des douanes n’est pas définie par ledit code. Ce dernier n’opère, par ailleurs, aucun renvoi au droit des États membres aux fins de déterminer le sens et la portée de ces dispositions. Il s’agit, dès lors, d’une notion autonome du droit de l’Union qu’il incombe à la Cour de définir. La Cour a, en effet, itérativement jugé qu’il découlait des exigences tant de l’application uniforme du droit de l’Union que du principe d’égalité que les termes d’une disposition du droit communautaire ne comportant aucun renvoi exprès au droit des États membres pour déterminer son sens et sa portée devaient normalement trouver, dans toute l’Union, une interprétation uniforme et autonome qui doit être recherchée en tenant compte du contexte de la disposition et de l’objectif poursuivi par la disposition en cause (26).

33.      Il importe de souligner d’emblée que les dispositions de l’article 202, paragraphe 3, du code des douanes ont pour objet non pas de déterminer le «responsable» de l’introduction irrégulière de marchandises dans le territoire de l’Union, mais plus largement de définir les débiteurs de la dette née de cette introduction irrégulière, dans l’intérêt plus général de la protection des intérêts financiers de l’Union.

34.      L’article 202, paragraphe 3, du code des douanes doit, en effet, d’abord être lu à la lumière des paragraphes précédents, et en particulier de son paragraphe 1, sous a), qui définit l’introduction irrégulière par référence aux dispositions des articles 38 à 41 du code des douanes, notamment. L’introduction de marchandises dans le territoire de l’Union est, en vertu de l’article 202, paragraphe 1, dernière phrase, du code des douanes, considérée comme irrégulière dès lors qu’elle n’a pas fait l’objet d’une présentation en douane conformément aux dispositions des articles 38 à 41 dudit code des douanes.

35.      Cette disposition confirme ainsi le rôle central joué par la déclaration en douane, et par extension le déclarant en douane, dans le code des douanes. Ainsi que la Cour a eu l’occasion de le constater, la qualité de redevable de la dette douanière est exclusivement liée à la formalité de la déclaration en douane, elle résulte des effets juridiques liés à la formalité de la déclaration (27). Le débiteur de la dette douanière est normalement le déclarant ou, le cas échéant, la personne pour le compte de laquelle la déclaration est faite (28) ou encore la personne sur laquelle pèse l’obligation de déclaration (29). L’objet même de l’article 202 du code des douanes est, dans cette perspective, d’étendre (30) la notion de débiteur de la dette douanière aux personnes qui ont méconnu les dispositions de la réglementation douanière de l’Union relatives à la déclaration en douane, confirmant ainsi en négatif le rôle central de cette dernière (31).

36.      Cela étant précisé, il doit être relevé que les trois tirets de l’article 202, paragraphe 3, du code des douanes établissent un ordre traduisant une certaine gradation dans «l’implication» de la personne reconnue comme débitrice à raison de sa participation à l’introduction irrégulière de marchandises. Le premier tiret désigne ainsi, en quelque sorte comme débiteur principal ou de premier rang, la personne qui a procédé à l’introduction irrégulière, c’est-à-dire celle qui aurait normalement dû mener les opérations de dédouanement et remplir les obligations du déclarant en douane. Les deuxième et troisième tirets visent les personnes qui, bien que non «responsables» des opérations de dédouanement en vertu des dispositions du code des douanes, sont néanmoins impliquées, soit avant soit immédiatement après l’introduction irrégulière.

37.      L’article 202, paragraphe 3, du code des douanes permet, ce faisant, de définir plusieurs catégories de débiteurs et, le cas échéant, de codébiteurs solidaires (32) de la dette douanière née de l’introduction irrégulière de marchandises, déterminés en fonction de leur implication dans l’opération litigieuse. Il importe d’insister, à cet égard, sur le fait que le code des douanes n’établit aucune préséance d’une catégorie de débiteurs sur une autre, l’administration des douanes pouvant indifféremment s’adresser au débiteur qu’elle juge le plus à même de permettre la réalisation de l’objectif poursuivi par cette disposition, à savoir le paiement des droits de douane éludés du fait du non-respect des formalités douanières.

38.      La condition objective posée par l’article 202, paragraphe 3, second tiret, du code des douanes est, dans ce cadre, conçue en des termes très généraux, manifestement destinés à appréhender toutes sortes de situations. Ce qui est exigé, c’est non pas une «participation» effective à une «introduction irrégulière» de marchandises dans le territoire douanier, et donc une implication plus ou moins directe dans l’irrégularité commise, mais plus simplement une «participation» à l’introduction en tant que telle des marchandises, c’est-à-dire une implication dans l’ensemble des opérations ayant concouru à la présence physique des marchandises dans le territoire douanier de l’Union.

39.      Comme l’avocat général Tizzano l’a souligné dans ses conclusions dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Spedition Ulustrans (33), précité, «cette condition sera réalisée chaque fois qu’une personne aura apporté un concours matériel ou moral à l’introduction de la marchandise dans la Communauté». C’est souligner ainsi que le champ potentiellement (34) couvert par cette disposition est particulièrement vaste et que sont susceptibles d’être appréhendées aussi bien la contribution directe à l’introduction physique des marchandises dans le territoire douanier de l’Union, c’est-à-dire une complicité active dans le franchissement frauduleux des frontières externes de l’Union (35), qu’une contribution indirecte, telle que la participation au financement des opérations d’importation conduisant à l’introduction irrégulière ou encore, comme dans l’affaire au principal, la simple intermédiation dans la conclusion du contrat de vente de la marchandise ultérieurement introduite de façon irrégulière dans le territoire douanier de l’Union.

40.      Certes, ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, l’introduction des marchandises dans le territoire douanier de l’Union est intervenue dans le cadre du trafic postal et le requérant dans l’affaire au principal n’était ni l’expéditeur ni le destinataire des envois postaux constitutifs de cette introduction. Ces circonstances ne sauraient, cependant, me permettre de conclure que le requérant dans l’affaire au principal n’a pas «participé» à l’introduction litigieuse, dès lors que le fondement de la dette douanière née de marchandises non déclarées en douane ou déclarées en douane sous une dénomination erronée (36) est l’article 202 du code des douanes.

41.      La spécificité du trafic postal doit, en revanche, certainement être prise en considération dans le cadre de l’examen de la condition subjective requise par les deuxième et troisième tirets de l’article 202, paragraphe 3, du code des douanes, que j'examine ci-dessous et qui a précisément pour fonction de relativiser les rigueurs de la condition objective appliquée à des personnes normalement non tenues par les obligations pesant sur le déclarant en douane.

42.      Il peut donc être conclu qu’une personne ayant servi d’intermédiaire pour la conclusion de contrats de vente relatifs à des marchandises introduites dans le territoire de l’Union a «participé» à cette introduction au sens de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes.

3.      «En sachant ou en devant raisonnablement savoir qu’elle était irrégulière»

43.      La personne qui a «participé» à l’introduction de marchandises dans le territoire de l’Union, dans le sens où cela vient d’être exposé, ne peut, toutefois, être qualifiée de débiteur de la dette douanière qu’à la condition, conformément à l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes, qu’il soit établi qu’elle savait ou, alternativement, devait raisonnablement savoir que cette introduction était irrégulière. La juridiction de renvoi précise, à cet égard, qu’elle n’a pas encore effectué cette constatation.

44.      Ainsi que la Cour l’a souligné à maintes reprises, dans le cadre de la procédure visée à l’article 267 TFUE, fondée sur une nette séparation des fonctions entre les juridictions nationales et la Cour, toute appréciation des faits de la cause relève de la compétence de la juridiction nationale (37). Il n’appartient donc pas à la Cour de constater elle-même que la condition subjective était remplie en l’espèce, que le requérant dans l’affaire au principal savait ou «devait raisonnablement savoir» que l’introduction des marchandises litigieuses était irrégulière. Toutefois, afin de donner à celle-ci une réponse utile, la Cour peut, dans un esprit de coopération avec les juridictions nationales, lui fournir toutes les indications qu’elle juge nécessaires (38). Il lui incombe, par conséquent, de fournir à la juridiction de renvoi les indications lui permettant d’effectuer ce constat, de la renseigner à la fois sur la méthode à suivre et sur les critères à utiliser.

45.      La difficulté principale que soulève le deuxième tiret de l’article 202, paragraphe 3, du code des douanes, tout comme le troisième tiret d’ailleurs, est incontestablement de déterminer ce qu’il convient d’entendre par «‘devant raisonnablement savoir’ (39) que l’introduction de marchandises est irrégulière» (40).

46.      Par la seconde de ses deux questions, la juridiction de renvoi nous propose une alternative, soit deux réponses possibles. D’une part, il pourrait être considéré qu’une personne ayant participé à l’introduction irrégulière en cause est débitrice de la dette douanière dès lors qu’elle était en situation de concevoir ou d’imaginer que cette irrégularité puisse se produire. D’autre part, il pourrait être considéré qu’elle n’est débitrice qu’à la condition qu’elle soit pratiquement assurée que cela puisse se produire.

47.      Je ne suis pas du tout convaincu que le législateur de l’Union ait entendu permettre qu’une personne qui a «participé» à l’introduction de marchandises dans le territoire de l’Union, au sens très large de la «participation» que j’ai proposée de retenir ci-dessus, puisse être qualifiée de «débiteur de la dette douanière» au sens de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes dès lors qu’elle n’était pas en situation d’exclure que cette irrégularité puisse se produire, c’est-à-dire, et pour reprendre la formule de la juridiction de renvoi, qu’elle la considère comme «concevable» («denkbar»). Je ne suis toutefois pas certain non plus que la qualification de «débiteur de la dette douanière» au sens de cette disposition exige le niveau d’assurance que suggère l’idée que la personne en cause doive s’attendre («fest rechnen») à ce que cette irrégularité se produise.

48.      Je suis donc enclin à considérer qu’il faut s’affranchir de l’alternative proposée par la juridiction de renvoi et s’efforcer de dégager une interprétation autonome de l’expression employée par les dispositions de l’article 202, paragraphe 3, deuxième et troisième tirets, du code des douanes (41).

49.      L’adverbe «raisonnablement» fait référence à la condition d’un agent économique normalement avisé (42) et désigne ce que chacun, dans des circonstances normales, aurait dû savoir. Ce que la condition subjective requiert, c’est, en définitive, une évaluation in concreto des informations dont la personne en cause disposait ou pouvait disposer dans des circonstances normales destinée à mesurer la probabilité qu’elle ait agi en fraude aux règles douanières en connaissance de cause.

50.      La condition subjective prévue à l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes impose par conséquent à l’administration des douanes d’établir, sous le contrôle des juridictions compétentes, que la personne ayant participé à l’introduction irrégulière des marchandises litigieuses disposait, devait disposer ou pouvait disposer d’informations lui permettant d’identifier cette irrégularité, de la prévoir et d’empêcher, le cas échéant, qu’elle ne se produise.

51.      Dans le cadre de cette évaluation, des éléments de toutes sortes sont susceptibles d’être pris en considération par les autorités et juridictions nationales compétentes. Peuvent être cités, à titre indicatif et non exhaustif, la condition de la personne en cause (simple particulier, professionnel ou semi-professionnel) ainsi que la qualité en laquelle elle est intervenue dans l’opération litigieuse, la nature des activités considérées comme une «participation» à l’introduction irrégulière litigieuse ainsi que le stade de l’opération d’importation au cours duquel ces activités sont intervenues (financement des opérations d’importation, organisation des modalités de transport des marchandises, conclusion des contrats de vente), les obligations contractuelles qui s’imposent éventuellement à elle ou encore, plus simplement, les informations dont elle est censée prendre connaissance ou qui sont disponibles et aisément accessibles.

52.      C’est aux autorités et aux juridictions nationales compétentes d’évaluer en les pondérant les différents éléments pertinents à leur disposition susceptibles d’établir que la personne en cause a, avec une probabilité suffisante, agi en connaissance de cause. Si une marge certaine d’appréciation doit leur être reconnue à cet égard, il leur incombe cependant de mener cette évaluation dans le respect des règles gouvernant l’administration de la preuve dans des situations comparables, conformément aux principes d’équivalence et d’effectivité (43).

53.      Cela étant précisé, qu’il me soit permis, à seule fin de donner à la juridiction de renvoi une réponse utile à ses questions et à titre conclusif, d’illustrer plus concrètement les éléments susceptibles d’être pris en considération dans le cadre de la situation en cause au principal.

54.      Ainsi qu’il ressort des précisions fournies par la juridiction de renvoi, la participation du requérant dans l’affaire au principal à l’introduction irrégulière des marchandises litigieuses l’a été par l’intermédiaire de ses boutiques eBay.

55.      La Commission fait observer, à cet égard, que le requérant dans l’affaire au principal, d’une part, ne peut nier qu’il se livrait ainsi, à travers ses boutiques eBay, avec une certaine régularité et dans un but lucratif, à une activité de commercialisation de marchandises par Internet, en organisant et en facilitant la conclusion de contrats de vente relatifs à des livraisons de marchandises de la Chine vers l’Union, et, d’autre part, ne pouvait ignorer que des livraisons de cette nature faisaient naître l’obligation d’acquitter des droits à l’importation. Elle se réfère, sur ce point, à la fiche d’information sur la commande de marchandises par Internet (commerce électronique) élaborée par l’administration des douanes allemande. La Commission en déduit que l’on était en droit de s’attendre à ce qu’il signale au fournisseur ou à ses clients l’existence des dispositions en vigueur et insiste sur leur respect, s’il avait des doutes concernant la régularité de l’introduction des marchandises litigieuses dans le territoire de l’Union.

56.      Ce faisant, la Commission fait appel à deux éléments, à savoir, d’une part, la nature des activités du requérant dans l’affaire au principal, et en l’occurrence le caractère quasi professionnel, dans sa durée et son volume, de son activité sur Internet, et, d’autre part, la publicité des informations pertinentes concernant les règles douanières applicables à ces activités, qui appellent les observations suivantes.

57.      Le premier élément – il importe de le souligner – concerne moins le statut du requérant dans l’affaire au principal que la nature de ses activités ou les modalités suivant lesquelles il exerce lesdites activités. Il ne s’agit pas de déterminer si ce dernier doit être considéré comme professionnel, semi professionnel ou simple amateur, car cette distinction ne trouve aucun fondement dans le code des douanes. Si, certes, l’exercice par une personne physique d’une activité à titre professionnel implique qu’elle est présumée connaître l’ensemble des règles applicables à ladite activité (44), l’exercice par une personne physique d’une activité en amateur ne saurait, à l’inverse et de ce seul fait, l’affranchir de l’obligation de respecter les règles douanières applicables ni l’exonérer de toute responsabilité pour leur violation éventuelle.

58.      En revanche, le caractère continu de l’activité en cause, tout comme le volume des marchandises concernées, le nombre et la fréquence des envois postaux réalisés, ainsi que la circonstance que ces derniers aient été réalisés par un seul et même fournisseur ou un nombre très réduit de fournisseurs, sont assurément des éléments à prendre en considération dans le cadre de cette évaluation. De même, la circonstance que la personne en cause ait modifié les modalités suivant lesquelles elle exerçait son activité en vue précisément d’éviter d’avoir à s’acquitter des formalités douanières est, dans cette perspective, de nature à revêtir une importance décisive.

59.      Le second élément, à savoir la publicité d’informations pertinentes, constitue certainement le principal élément à prendre en considération pour évaluer si une personne peut être raisonnablement considérée comme ayant agi en fraude aux règles douanières en connaissance de cause. La juridiction de renvoi peut, à cet égard, assurément tenir compte des informations destinées au grand public facilement identifiables et aisément accessibles telles que la fiche d’information sur la commande de marchandises par Internet évoquée par la Commission. Elle doit également pouvoir s’appuyer, plus sûrement, sur les informations dont le requérant dans l’affaire au principal était tenu de prendre connaissance, contractuellement, à savoir les conditions d’utilisation (45) et les règlements spécifiques d’eBay.

60.      Relève, en particulier, de cette catégorie d’informations «obligatoires» le «règlement pour les vendeurs» (46), que tous les membres d’eBay doivent lire et comprendre et qui vise notamment à assurer l’application des «lois et réglementations locales». Les vendeurs sont ainsi contractuellement tenus de connaître et respecter les directives pour la mise en vente au niveau international (47), qui précisent la nécessité pour les vendeurs et les acheteurs de respecter les différentes réglementations applicables. Parmi les informations ainsi mises en ligne par eBay sous la section «Aide» du site Internet, se trouve en particulier, sous les rubriques intitulées «Paiement et livraisons», «Emballer et envoyer un objet», «Livrer à l’international», un document, intitulé «Documents et formalités douanières» (48), qui expose sommairement les obligations douanières incombant aux vendeurs.

61.      C’est toutefois, et ainsi que je l’ai indiqué ci-dessus, à la juridiction de renvoi qu’il appartient de déterminer si, compte tenu de la nature des activités du requérant dans l’affaire au principal, des informations dont il était tenu de prendre connaissance et du contexte factuel et juridique dans lequel lesdites activités se sont déployées, notamment le fait que l’introduction des marchandises litigieuses est intervenue dans le cadre du trafic postal, il peut être qualifié de «débiteur de la dette douanière née de l’introduction irrégulière de marchandises dans le territoire douanier de l’Union» au sens de l’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du code des douanes.

V –    Conclusion

62.      En conséquence, je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le Bundesfinanzhof dans les termes suivants:

«L’article 202, paragraphe 3, deuxième tiret, du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, tel que modifié par le règlement (CE) n° 2700/2000 du Parlement européen et du Conseil, du 16 novembre 2000, doit être interprété en ce sens qu’une dette douanière découlant de la participation à l’introduction irrégulière d’une marchandise dans le territoire douanier de l’Union européenne naît à la charge d’une personne qui, sans apporter directement son concours à ladite introduction, a participé à celle-ci en qualité d’intermédiaire pour la conclusion des contrats de vente relatifs auxdites marchandises, dès lors qu’il est établi que, eu égard aux informations dont elle disposait ou pouvait disposer dans des circonstances normales, elle a, avec une probabilité suffisante, agi en connaissance de cause.

C’est aux autorités et aux juridictions nationales compétentes qu’il incombe, à cet effet, d’évaluer et de pondérer les différents éléments pertinents à leur disposition, dans le respect des règles gouvernant l’administration de la preuve dans des situations comparables, conformément aux principes d’équivalence et d’effectivité.»


1 – Langue originale: le français.


2 – Règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO L 302, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 2700/2000 du Parlement européen et du Conseil, du 16 novembre 2000 (JO L 311, p. 17, ci-après le «code des douanes»).


3 – Voir, en particulier, arrêts du 4 mars 2004, Viluckas et Jonusas (C-238/02 et C-246/02, Rec. p. I-2141); du 23 septembre 2004, Spedition Ulustrans (C-414/02, Rec. p. I-8633), ainsi que du 3 mars 2005, Papismedov e.a. (C-195/03, Rec. p. I-1667).


4 – Comme l’a, par exemple, relevé le Comité économique et social européen dans son avis sur la proposition de règlement (CE) du Parlement européen et du Conseil établissant le code des douanes communautaire (Code des douanes modernisé) [COM(2005) 608 final] (JO 2006, C 309, p. 22), «le volume des achats de marchandises effectués par Internet ou par correspondance dans des pays tiers augmente de manière exponentielle».


5 – Cette affaire est, plus largement, susceptible d’avoir un impact sur le développement de techniques commerciales telles que le «drop shipment», qui permet de vendre un produit acquis auprès d’un fournisseur se chargeant lui-même des opérations de livraison et donc de s’affranchir des problèmes de gestion des stocks, de logistique et de service après-vente, entre autres.


6 – Le code des douanes a, au cours de la période pendant laquelle se sont déroulés les faits en cause dans l’affaire au principal, à savoir entre avril 2004 et mai 2006, été modifié notamment par le règlement (CE) n° 648/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 13 avril 2005, modifiant le règlement n° 2913/92 (JO L 117, p. 13). Les modifications apportées au code des douanes par ce règlement, et notamment celles relatives à son article 40, n’ont cependant pas d’incidence directe sur la solution du litige au principal.


7 – Il peut d’emblée être précisé que, nonobstant la circonstance que le requérant dans l’affaire au principal exerçait ses activités par l’intermédiaire d’Internet, la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur («directive sur le commerce électronique») (JO L 178, p. 1), ne trouve pas à s’appliquer. En effet, si l’activité d’intermédiaire eBay relève de cette directive, ce n’est pas le cas, en vertu de l’article 2, sous h), ii), de ladite directive, de «la livraison de biens pour lesquels un contrat a été conclu par voie électronique», comme la Cour l’a constaté (voir arrêt du 2 décembre 2010, Ker-Optika, C-108/09, non encore publié au Recueil, points 29 et 30).


8 – Arrêts précités Spedition Ulustrans (point 39), ainsi que Papismedov e.a. (point 38). Voir, également, arrêt du 15 septembre 2005, United Antwerp Maritime Agencies et Seaport Terminals (C-140/04, Rec. p. I-8245, point 30).


9 – Arrêt Papismedov e.a., précité (point 38).


10 – Cela serait, par exemple, le cas du chauffeur d’un camion qui aurait omis de se présenter avec les marchandises qu’il convoie au premier poste de douane rencontré sur sa route à son entrée sur le territoire de l’Union, comme dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Viluckas et Jonusas, précité.


11 – Arrêts précités Viluckas et Jonusas (point 29) ainsi que Spedition Ulustrans.


12 – Arrêt Papismedov e.a., précité (point 40).


13 – Arrêts précités Spedition Ulustrans (points 27 et 28) ainsi que Papismedov e.a. (point 40).


14 – Voir, également, article 45 du code des douanes.


15 – JO L 253, p. 1. Le règlement (CEE) n° 4151/88 du Conseil, du 21 décembre 1988, fixant les dispositions applicables aux marchandises introduites sur le territoire douanier de la Communauté (JO L 367, p. 1), abrogé par le code des douanes, prévoyait déjà des dispositions spécifiques pour le trafic postal (voir, en particulier, cinquième considérant ainsi que articles 3, paragraphe 4, et 10 de ce règlement).


16 – Il doit toutefois être rappelé que, conformément à l’article 8 de la décision 2000/597/CE, Euratom du Conseil, du 29 septembre 2000, relative au système des ressources propres des Communautés européennes (JO L 253, p. 42), applicable à l’époque des faits de l’affaire au principal, les ressources propres des Communautés européennes visées à l’article 2, paragraphe 1, sous a) et b), de ladite décision, dont les droits de douane, «sont perçues par les États membres conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales, qui sont, le cas échéant, adaptées aux exigences de la réglementation communautaire».


17 – L’article 237, paragraphe 1, A, du règlement n° 2454/93 précise, ainsi, que les envois de la poste, et notamment les colis postaux, sont «considérés» comme déclarés en douane pour la mise en libre pratique, soit [hypothèse sous a)] au moment de leur introduction dans le territoire douanier, à condition qu’ils soient dispensés de l’obligation d’être conduits en douane conformément aux dispositions prises en application de l’article 38, paragraphe 4, du code des douanes, soit à défaut [hypothèse sous b)] au moment de leur présentation en douane, à condition qu’ils soient accompagnés des déclarations CN22 et/ou CN23. Initialement, il s’agissait des déclarations C1 et/ou C2/CP3. La disposition a été modifiée par l’article 1er, point 6, du règlement (CE) n° 1602/2000 de la Commission, du 24 juillet 2000, modifiant le règlement n° 2454/93 (JO L 188, p. 1), pour tenir compte du fait que les formulaires établis par l’Union postale universelle pour la déclaration des envois par lettre ou par colis postal avaient été remplacés (voir, à cet égard, neuvième considérant dudit règlement).


18 – JO L 105, p. 1, et rectificatif JO 1986, L 271, p. 31. Ce règlement a été modifié par l’acte relatif aux conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République tchèque, de la République d’Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République slovaque, et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne – Protocole n° 3 sur les zones de souveraineté du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord à Chypre (JO 2003, L 236, p. 940). Ce règlement a, depuis, été abrogé par le règlement (CE) n° 1186/2009 du Conseil, du 16 novembre 2009, relatif à l’établissement du régime communautaire des franchises douanières (JO L 324, p. 23).


19 – Voir articles 27 et 28 de ce règlement. Cette exemption concernait les marchandises expédiées directement d’un pays tiers à un destinataire se trouvant sur le territoire de l’Union, à l’exception des produits alcooliques, des parfums et eaux de toilette et des tabacs et produits de tabac.


20 – Voir articles 29 à 31 dudit règlement.


21 – Cette convention, à laquelle tous les États membres de l’Union ont adhéré, établit le cadre juridique général régissant les activités postales internationales.


22 – Décision 75/199/CEE du Conseil, du 18 mars 1975, portant conclusion de la convention internationale pour la simplification et l’harmonisation des régimes douaniers et acceptation de son annexe concernant les entrepôts de douane (JO L 100, p. 1).


23 – Par décision 2003/231/CE du Conseil, du 17 mars 2003, portant adhésion de la Communauté européenne au protocole d’amendement à la convention internationale pour la simplification et l’harmonisation des régimes douaniers (convention de Kyoto) (JO L 86, p. 21), l’Union a adhéré au protocole d’amendement à la convention internationale pour la simplification et l’harmonisation des régimes douaniers, adopté par le Conseil de coopération douanière le 26 juin 1999. Voir, également, décision 2004/485/CE du Conseil, du 26 avril 2004, modifiant la décision 2003/231/CE portant adhésion de la Communauté européenne au protocole d’amendement à la convention internationale pour la simplification et l’harmonisation des régimes douaniers (convention de Kyoto) (JO L 162, p. 113). L’adhésion couvre le texte dudit protocole d’amendement, y compris les appendices I et II, à l’exclusion de l’appendice III.


24 – Décision portant acceptation, au nom de la Communauté, des annexes E.7 et F.4 de la convention internationale pour la simplification et l’harmonisation des régimes douaniers (JO L 331, p. 11). Il est à noter que cette annexe a toutefois été approuvée avec une réserve d’ordre général et des réserves à l’égard des normes 19 et 26 et des pratiques recommandées 23, 24 et 25.


25 – Voir, à cet égard, mes observations à la note en bas de page 16.


26 – Voir, en particulier, arrêts du 18 janvier 1984, Ekro (327/82, Rec. p. 107, point 11); du 19 septembre 2000, Linster (C-287/98, Rec. p. I-6917, point 43), et du 27 février 2003, Adolf Truley (C-373/00, Rec. p. I-1931, point 35).


27 – Arrêt du 14 novembre 2002, Ilumitrónica (C-251/00, Rec. p. I-10433, points 32, 33 et 65).


28 – Par exemple, l’employeur de la personne qui a procédé à l’introduction irrégulière litigieuse dans l’exécution des tâches qui lui sont confiées par celui-ci (voir arrêt Spedition Ulustrans, précité).


29 – Arrêt Viluckas et Jonusas, précité (points 23 et 24).


30 – Voir, notamment, arrêt du 2 avril 2009, Elshani (C-459/07, Rec. p. I-2759, points 26 à 28).


31 – À l’instar des articles 203 à 205, 210, 211 ainsi que 220 du code des douanes, qui visent tous des situations se caractérisant par une méconnaissance par l’opérateur concerné de la réglementation douanière de l’Union (voir arrêt du 31 mars 2011, Aurubis Balgaria, C-546/09, non encore publié au Recueil, points 32 à 34).


32 – Comme c’était le cas dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Spedition Ulustrans, précité.


33 – Point 40 desdites conclusions.


34 – C’est-à-dire sous réserve que la seconde condition, subjective, soit remplie.


35 – Ainsi en est-il de la responsabilité partagée par le chauffeur du camion à l’intérieur duquel les marchandises ont franchi les frontières externes de l’Union en méconnaissance des formalités douanières et son employeur, comme dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Spedition Ulustrans, précité.


36 – Arrêt Papismedov e.a., précité (point 36).


37 – Voir, notamment, arrêts du 16 mars 1978, Oehlschläger (104/77, Rec. p. 791, point 4); du 15 novembre 1979, Denkavit Futtermittel (36/79, Rec. p. 3439, point 12), et du 10 février 2011, Haribo Lakritzen Hans Riegel et Österreichische Salinen (C-436/08 et C-437/08, non encore publié au Recueil, point 41).


38 – Voir, notamment, arrêts du 1er juillet 2008, MOTOE (C-49/07, Rec. p. I-4863, point 30); du 4 juin 2009, Mickelsson et Roos (C-142/05, Rec. p. I-4273, point 41); du 15 avril 2010, Sandström (C-433/05, non encore publié au Recueil, point 35), ainsi que du 22 décembre 2010, Lecson Elektromobile (C-12/10, non encore publié au Recueil, point 15).


39 – En anglais, «reasonably have been aware», en allemand, «vernünftigerweise hätten wissen müssen» et, en espagnol, «debiendo saber razonablemente».


40 – Il doit être observé que le code des douanes comporte d’autres dispositions empruntant des formulations proches ou identiques. L’article 8, paragraphe 1, premier tiret, concerne l’annulation d’une décision favorable adoptée sur la base d’éléments inexacts ou incomplets. L’article 201, paragraphe 3, second alinéa, concerne les déclarations en douane reposant sur des données fausses. L’article 203, paragraphe 3, deuxième et troisième tirets, concerne la soustraction de marchandises à la surveillance douanière. L’article 205, paragraphe 3, concerne la consommation d’une marchandise passible de droits à l’importation dans une zone franche ou un entrepôt franc. L’article 210, paragraphe 3, deuxième tiret, concerne la sortie sans déclaration en douane d’une marchandise passible de droits à l’exportation hors du territoire douanier de l’Union. La Cour a elle-même employé des formules identiques dans ses propres arrêts (arrêt du 17 mars 2011, Commission/Portugal, C-23/10). L’emploi de formules similaires est également fort répandu dans les actes imposant des sanctions à des États tiers ou à certaines personnes ou entités («smart sanctions»), une personne physique ou morale ne pouvant être tenue pour responsable de la violation d’une interdiction si elle ne «pouvait raisonnablement savoir» que son action emporterait cette conséquence [voir, par exemple, article 10, paragraphe 2, du règlement (UE) n° 442/2011 du Conseil, du 9 mai 2011, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO L 121, p. 1)].


41 – Voir, à cet égard, mes observations au point 32 des présentes conclusions.


42 – La notion d’agent économique normalement avisé n’est, bien sûr, pas sans rappeler celle de consommateur moyen, ou d’internaute, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’aune de laquelle est évalué, entre autres, le caractère distinctif d’une marque (arrêts du 18 juin 2002, Philips, C-299/99, Rec. p. I-5475, et du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C-37/03 P, Rec. p. I-7975). Le «consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé» est également utilisé dans d’autres contextes que celui du droit des marques (voir arrêt du 16 juillet 1998, Gut Springenheide et Tusky, C-210/96, Rec. p. I-4657). Voir aussi, en matière de protection des consommateurs, arrêt du 4 octobre 2007, Schutzverband der Spirituosen-Industrie (C-457/05, Rec. p. I-8075), ainsi que, en matière de publicité trompeuse, arrêt du 8 avril 2003, Pippig Augenoptik (C-44/01, Rec. p. I-3095).


43 – Voir à cet égard, en particulier, arrêts du 10 avril 2003, Steffensen (C-276/01, Rec. p. I-3735, point 80); du 7 septembre 2006, Laboratoires Boiron (C-526/04, Rec. p. I-7529); du 24 avril 2008, Arcor (C-55/06, Rec. p. I-2931, point 192), et du 28 janvier 2010, Direct Parcel Distribution Belgium (C-264/08, non encore publié au Recueil, points 32 à 36 et 42 à 47).


44 – Le caractère professionnel de l’activité menée peut, en revanche et à l’évidence, être pris en considération dans l’appréciation des informations à la disposition de la personne en cause.


45 – http://pages.ebay.fr/help/policies/user-agreement.html.


46 – http://pages.ebay.fr/help/policies/seller-rules-overview.html.


47 – http://pages.ebay.fr/help/policies/seller-international.html.


48 – http://pages.ebay.fr/help/pay/customs.html.


BAILII: Copyright Policy | Disclaimers | Privacy Policy | Feedback | Donate to BAILII
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2011/C45410_O.html