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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Evonik Industries v OHIM (Rectangle pourpre avec un côté convexe) (Intellectual property) French Text [2011] EUECJ T-499/09 (13 July 2011) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2011/T49909_J.html Cite as: [2011] EUECJ T-499/09, [2011] EUECJ T-499/9 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)
13 juillet 2011 (*)
« Marque communautaire – Demande de marque communautaire figurative représentant un rectangle pourpre avec un côté convexe – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »
Dans l’affaire T-499/09,
Evonik Industries AG, établie à Essen (Allemagne), représentée par Me J. Albrecht, avocat,
partie requérante,
contre
Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par M. S. Stürmann, puis par MM. S. Stürmann et G. Schneider, puis par M. Stürmann et Mme R. Manea, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 2 octobre 2009 (affaire R 491/2009-4), concernant une demande d’enregistrement d’un rectangle pourpre avec un côté convexe comme marque communautaire,
LE TRIBUNAL (sixième chambre),
composé de MM. E. Moavero Milanesi (rapporteur), président, N. Wahl et S. Soldevila Fragoso, juges,
greffier : Mme T. Weiler, administrateur,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 14 décembre 2009,
vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 22 mars 2010,
à la suite de l’audience du 5 mai 2011, à laquelle l’OHMI n’a pas participé,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 15 septembre 2008, la requérante, Evonik Industries AG, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].
2 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant, étant spécifié que la couleur revendiquée est le « pourpre pantone 513 C » :
3 L’enregistrement a été demandé pour des produits et des services relevant de l’ensemble des classes 1 à 45 au sens de l’arrangement de Nice, concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.
4 Par décision du 10 mars 2009, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement pour les produits et les services en cause en application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].
5 Le 30 avril 2009, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI contre la décision de l’examinateur.
6 Par décision du 2 octobre 2009 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours et a confirmé que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif. Elle a, tout d’abord, constaté que les classes 1 à 45 couvrent tous les produits et services imaginables, lesquels peuvent se présenter couramment sous la couleur pourpre revendiquée, qui est simple et courante. Elle a ajouté que le public concerné est le consommateur moyen en général, qui est confronté à toutes sortes de produits et de services dans la vie quotidienne et dont le niveau d’attention n’est pas élevé dans le cas des couleurs. Selon la chambre de recours, il semble improbable qu’une seule et même couleur pour des produits et des services des plus divers puisse être associée à une seule et même entreprise. S’agissant de la forme géométrique, la chambre de recours a relevé qu’il s’agit d’un rectangle allongé et que la ligne de délimitation bombée vers l’extérieur, à droite, constitue une divergence peu frappante par rapport à la forme de base d’un rectangle. Envisagé dans son ensemble, le signe demandé, qui se présenterait sous la simple forme d’une étiquette ou d’un fond pour des inscriptions, pourrait être assimilé non pas à une marque figurative, couvrant des produits et des services qui pourraient être associés à une entreprise déterminée, mais tout au plus à une décoration de couleur, sans référence à son origine commerciale. Elle a finalement indiqué que les documents produits par la requérante pour prouver sa participation à la campagne intitulée « Print wirkt » ne renseignent ni sur l’éventuelle étendue de l’usage de la marque demandée ni sur la perception du public pertinent.
Conclusions des parties
7 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner l’OHMI aux dépens.
8 L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
9 La requérante soulève, en substance, un moyen unique tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Elle fait notamment valoir, d’une part, que la chambre de recours n’a pas considéré la marque demandée dans son ensemble, car elle a examiné la possibilité d’enregistrer une figure géométrique et, de façon distincte, la possibilité d’enregistrer la couleur pourpre. D’autre part, elle estime que le pourpre revendiqué est un coloris spécifique très rare, qui n’est pas utilisé dans les secteurs de l’industrie chimique et des centrales thermiques, et que, même abstraction faite de la couleur, la figure plane spécifique présente le degré minimal requis pour être distinctive. En outre, la simplicité d’une marque ne signifierait pas l’absence de caractère distinctif, car des représentations graphiques simples pourraient remplir la fonction d’indication de l’origine commerciale dès lors qu’elles ne sont pas communément utilisées.
10 L’OHMI conteste l’ensemble des allégations de la requérante.
11 Il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif. En outre, l’article 7, paragraphe 2, dudit règlement énonce que « [l]e paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».
12 Le caractère distinctif d’une marque, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, signifie que cette marque permet d’identifier le produit ou le service pour lequel l’enregistrement a été demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit ou ce service de ceux d’autres entreprises (voir arrêt de la Cour du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C-456/01 P et C-457/01 P, Rec. p. I-5089, point 34, et la jurisprudence citée).
13 Par ailleurs, il résulte d’une jurisprudence constante que ce caractère distinctif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement a été demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, qui est constitué par le consommateur moyen desdits produits ou services (arrêts de la Cour du 29 avril 2004, Procter & Gamble/OHMI, C-473/01 P et C-474/01 P, Rec. p. I-5173, point 33, et du 22 juin 2006, Storck/OHMI, C-25/05 P, Rec. p. I-5719, point 25). Le niveau d’attention du consommateur moyen, censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [arrêts de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C-342/97, Rec. p. I-3819, point 26, et du Tribunal du 10 octobre 2007, Bang & Olufsen/OHMI (Forme d’un haut-parleur), T-460/05, Rec. p. II-4207, point 32].
14 C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient de vérifier si le signe figuratif en cause est dépourvu de caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.
15 En l’espèce, le signe dont l’enregistrement a été demandé est constitué d’un rectangle de couleur pourpre avec un côté droit convexe, soit d’un élément graphique et d’un élément de couleur.
16 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, afin d’apprécier si une marque est ou non dépourvue de caractère distinctif, il convient de prendre en considération l’impression d’ensemble qu’elle produit. Cela ne saurait toutefois impliquer qu’il n’y aurait pas lieu de procéder, dans un premier temps, aux examens successifs des différents éléments de présentation utilisés pour cette marque. En effet, il peut être utile, au cours de l’appréciation globale, d’examiner chacun des éléments constitutifs de la marque concernée (voir arrêt de la Cour du 4 octobre 2007, Henkel/OHMI, C-144/06 P, Rec. p. I-8109, point 39, et la jurisprudence citée).
17 Dans la présente affaire, il ressort de la décision attaquée que la chambre de recours a, certes, examiné préalablement la couleur pourpre et la figure géométrique en question de manière séparée. Toutefois, elle a ensuite effectué une appréciation globale du signe demandé comme marque figurative, en particulier au point 30 de cette décision. Notamment, la chambre de recours a indiqué que le signe demandé se présentait sous la simple forme d’une étiquette ou d’un fond sans caractéristique de couleur ou de forme frappante, à laquelle le consommateur est confronté tous les jours, et que, en tant que tel, ce signe ne serait pas perçu comme une marque figurative à part entière, mais produirait tout au plus l’effet d’une décoration de couleur.
18 La chambre de recours n’a donc pas déduit le manque de caractère distinctif de la marque demandée de celui des éléments qui la composent, mais a tenu compte de son impression d’ensemble. Les arguments de la requérante selon lesquels la chambre de recours n’a pas analysé la marque demandée comme une marque figurative et ne l’a pas considérée dans son ensemble doivent ainsi être rejetés.
19 En ce qui concerne, en premier lieu, la couleur pourpre en elle-même, il convient de rappeler que, si les couleurs sont propres à susciter certaines associations d’idées et à générer des sentiments, en revanche, de par leur nature, elles sont peu aptes à véhiculer des informations précises. Elles le sont d’autant moins qu’elles sont habituellement et largement utilisées dans la publicité et dans la commercialisation des produits et des services pour leur pouvoir attractif, en dehors de tout message précis [voir arrêt du Tribunal du 12 novembre 2008, GretagMacbeth/OHMI (Combinaison de 24 carrés de couleur), T-400/07, non publié au Recueil, point 35, et la jurisprudence citée].
20 Ainsi, l’existence d’un caractère distinctif avant tout usage ne pourrait se concevoir, s’agissant d’une couleur en elle-même, que dans des circonstances exceptionnelles, et notamment lorsque le nombre des produits ou des services pour lesquels la marque est demandée est très limité et que le marché pertinent est très spécifique (voir arrêt de la Cour du 21 octobre 2004, KWS Saat/OHMI, C-447/02 P, Rec. p. I-10107, point 79, et la jurisprudence citée). En l’espèce, il convient tout d’abord de noter que les classes 1 à 45 couvrent tous les produits et les services imaginables, sans qu’il soit possible d’établir une subdivision.
21 De plus, la couleur pourpre n’apparaît pas comme étant un coloris spécifique très rare. À supposer même, comme le soutient la requérante, que cette couleur, revendiquée comme étant le « pourpre pantone 513 C », ne soit pas utilisée dans les secteurs d’activités qu’elle invoque, il ressort du dossier que, eu égard à la liste étendue des produits et des services en cause, aucune constatation quant au caractère inhabituel ou frappant de cette couleur ne peut être tirée, de telle sorte que la chambre de recours a correctement considéré que le pourpre était une couleur « simple et courante ». Ainsi, même si cette couleur évoquera une idée ou un sentiment positif dans l’esprit du consommateur, en l’absence d’éléments particuliers aptes à l’individualiser, elle doit être jugée inapte, en l’espèce, à constituer une référence à l’origine commerciale.
22 Dès lors, il y a lieu de considérer que la couleur pourpre, en elle-même, ne sera pas propre à distinguer les produits ou les services de la requérante de ceux d’autres entreprises. Le fait qu’il s’agit du pourpre pantone 513 C, qui n’apparaît pas comme se distinguant, à première vue, de la couleur pourpre communément admise, ne modifie en aucun cas une telle considération.
23 Enfin, l’argument de la requérante, tenant à ce que la chambre de recours, en citant et en tirant des déductions de la jurisprudence relative aux marques exclusivement constituées de couleur, a uniquement examiné de manière abstraite la possibilité d’enregistrer la couleur pourpre, en tant que coloris d’un produit, ne saurait prospérer. Il est vrai, comme le soutient la requérante, que la marque demandée n’est ni une marque de couleur ni une marque dont la reproduction coïncide avec l’aspect extérieur d’un produit. Néanmoins, dans le cas d’une marque figurative comme celle de l’espèce, dont la couleur constitue un élément important, la chambre de recours peut se référer, notamment, à certains principes établis par la jurisprudence quant aux marques de couleurs, pour autant que cette référence intervienne dans le cadre de l’examen préalable et séparé de la couleur. Dans une telle circonstance, il ne s’agit donc pas pour la chambre de recours de décider du caractère distinctif de la marque figurative demandée uniquement sur la base de tels critères, mais seulement d’en tenir compte lors de cet examen, avant d’effectuer une appréciation globale, consistant à rechercher si le signe figuratif demandé, considéré dans son ensemble, est apte à indiquer l’origine commerciale des produits et à les distinguer de ceux des autres entreprises. Or, il ressort des motifs de la décision attaquée que tel est le cas en l’espèce.
24 En ce qui concerne, en deuxième lieu, la forme géométrique du signe demandé, il convient de relever qu’il est constitué d’un rectangle, dont le côté droit est convexe.
25 Selon la jurisprudence, un signe d’une simplicité excessive et constitué d’une figure géométrique de base, telle qu’un cercle, une ligne, un rectangle ou un pentagone conventionnel, n’est pas susceptible, en tant que tel, de transmettre un message dont les consommateurs peuvent se souvenir, de sorte que ces derniers ne le considéreront pas comme une marque, à moins qu’il ait acquis un caractère distinctif par l’usage [arrêt du Tribunal du 12 septembre 2007, Cain Cellars/OHMI (Représentation d’un pentagone), T-304/05, non publié au Recueil, point 22].
26 En l’espèce, comme l’a correctement considéré la chambre de recours, la particularité de la forme géométrique du signe demandé est une divergence peu frappante par rapport à la forme de base d’un rectangle et seul un observateur précis et attentif remarquera le côté droit convexe. À supposer même que le public concerné perçoive les particularités de ce rectangle, sa représentation ne comporte aucune variation notable par rapport à la représentation conventionnelle de quadrilatères, de sorte qu’il sera perçu en réalité comme une figure géométrique simple.
27 S’il est de jurisprudence constante, comme le fait remarquer la requérante, que l’absence de caractère distinctif d’un signe, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, ne saurait résulter de la seule constatation qu’il ne présente pas un aspect inhabituel ou frappant [arrêt du Tribunal du 5 avril 2001, Bank für Arbeit und Wirtschaft/OHMI (EASYBANK), T-87/00, Rec. p. II-1259, point 39] et que l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire n’est pas subordonné à la constatation d’un certain niveau de créativité ou d’imagination de la part du titulaire de la marque (arrêt de la Cour du 16 septembre 2004, SAT.1/OHMI, C-329/02 P, Rec. p. I-8317, point 41), il n’en demeure pas moins qu’un signe doit être capable d’individualiser les produits ou les services du demandeur de marque par rapport à ceux offerts par ses concurrents [arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Rewe-Zentral/OHMI (LITE), T-79/00, Rec. p. II-705, point 30]. Or, un signe constitué par une forme géométrique simple comme celle du cas d’espèce ne saurait remplir une telle fonction d’individualisation.
28 En effet, en raison de sa simplicité, la forme rectangulaire ne transmettra pas de message précis au public concerné, lequel pensera qu’il s’agit d’une étiquette associée aux produits ou aux services, d’une décoration ou d’un ornement utilisé à des fins esthétiques, mais non d’une indication de l’origine commerciale des produits et des services visés. Ainsi, la représentation consistant en un rectangle avec un côté convexe est, en elle-même, dépourvue de caractère distinctif.
29 Par ailleurs, la requérante ne saurait soutenir qu’il y a lieu de distinguer une forme graphique élémentaire, qui doit être considérée comme totalement dépourvue de caractère distinctif car elle est usuelle dans les représentations graphiques de produits et de services, d’une représentation graphique comme celle de l’espèce, pour laquelle il y aurait lieu d’apporter la preuve de son caractère usuel dans le commerce pour établir son manque de caractère distinctif.
30 Comme le fait correctement remarquer l’OHMI, le fait que le signe demandé ne remplit pas la fonction d’indication de l’origine commerciale résulte de la simplicité même de la forme géométrique en cause, qui ne permettra pas de distinguer les produits de la requérante de ceux d’autres entreprises (voir, en ce sens, arrêt Représentation d’un pentagone, précité, point 33). Dès lors, contrairement à ce que soutient la requérante, il n’était pas nécessaire d’apporter la preuve du caractère usuel de ladite forme dans le commerce pour établir le manque de caractère distinctif du signe demandé. Les arguments de la requérante développés à cet égard ou s’y rattachant doivent donc être rejetés.
31 À cet égard, l’arrêt du Tribunal du 13 juin 2007, IVG Immobilien/OHMI (I) (T-441/05, Rec. p. II-1937), invoqué par la requérante, portant sur le caractère distinctif du signe représentant la lettre « i » majuscule de couleur bleu royal, ne saurait être pertinent. En effet, dans cet arrêt, le Tribunal n’a pas indiqué qu’un tel signe était distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, mais a seulement contesté le raisonnement qu’a effectué la chambre de recours pour conclure à l’absence de caractère distinctif dudit signe. En substance, le Tribunal a reproché à la chambre de recours d’avoir fondé son refus d’enregistrer le signe déposé sur son défaut de spécificité graphique marquée et de contenu expressif, sans examiner au préalable, en prenant en considération tous les éléments pertinents liés aux circonstances spécifiques de l’espèce, si ce signe était concrètement apte à distinguer, dans l’esprit du public destinataire, les services fournis par le demandeur de marque de ceux fournis par ses concurrents (arrêt I, précité, point 60).
32 Or, en l’espèce, il résulte de la décision attaquée que la chambre de recours ne s’est pas limitée à constater le défaut de spécificité graphique du signe demandé, mais a fondé son analyse sur l’inaptitude du signe représentant un rectangle avec un côté droit convexe, de couleur pourpre, à identifier l’origine commerciale de l’entièreté des produits et des services couvrant les classes 1 à 45.
33 Par ailleurs, l’OHMI a fait valoir, sans être contesté par la requérante, que la demande d’enregistrement de la lettre « i » majuscule de couleur bleu royal a, ultérieurement à l’arrêt I, précité, été valablement rejetée par la chambre de recours.
34 En ce qui concerne, en troisième lieu, la marque figurative demandée dans son ensemble, la combinaison de deux éléments non distinctifs en eux-mêmes ne changera pas la perception du public pertinent. Les consommateurs n’ont pas pour habitude de présumer l’origine des produits en se basant sur une forme géométrique simple et de couleur courante. À cet égard, le signe visé par la demande, en tant que tel, produira l’effet non pas d’une marque figurative à part entière, mais tout au plus d’un élément décoratif de couleur, d’une étiquette colorée, ou d’un simple échantillon de couleur. Dans le cas de services, le signe demandé sera également perçu comme une étiquette destinée à recevoir une inscription ou tout simplement comme un élément banal de présentation dans la publicité desdits services, sous la forme d’annonces, d’affiches, de brochures informatives, ou encore comme une accroche. La requérante n’a pas non plus précisé pour quels produits ou services elle entend utiliser concrètement le signe et n’a pas produit d’exemples d’utilisation possible du signe demandé susceptible d’indiquer l’origine commerciale (voir, en ce sens, arrêt Combinaison de 24 carrés de couleur, précité, point 57).
35 Ainsi, le public concerné ne pourra pas percevoir la marque demandée comme distinguant les produits et les services de la requérante par rapport à ceux d’autres entreprises. Une telle conclusion vaut d’autant plus que, en l’espèce, cette marque couvre tous les produits et les services imaginables. Or, la liste étendue de produits et de services présentée par la requérante constitue un élément allant à l’encontre d’un caractère distinctif de la couleur utilisée [voir également, en ce sens, arrêt du Tribunal du 15 décembre 2009, Media-Saturn/OHMI (BEST BUY), T-476/08, non publié au Recueil, point 26]. Il semble en effet improbable, comme le soutient la chambre de recours, qu’un signe tel que celui de l’espèce, enregistré au surplus pour des produits et des services des plus divers, puisse être associé à une seule et même entreprise.
36 À cet égard, la requérante ne saurait soutenir que la chambre de recours a affirmé l’existence de motifs de refus indépendamment des produits et des services en cause, dès lors qu’un tel examen à l’égard de produits et de services qui couvrent les 45 classes de l’arrangement de Nice apparaît difficilement envisageable, la requérante n’ayant procédé à aucune limitation de cette liste.
37 De plus, doit être rejetée l’argumentation de la requérante tirée de ce que, s’agissant d’une marque dont l’enregistrement ne se heurte pas au motif de refus de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, il existe un intérêt général faisant obstacle à son enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), lorsque l’utilisation de cette marque par plusieurs, voire même par de très nombreux opérateurs, est usuelle.
38 En effet, selon la jurisprudence, il y a lieu d’interpréter chaque motif absolu de refus à la lumière de l’intérêt général qui le sous-tend. L’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 interdit l’enregistrement en tant que marque communautaire de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé, car il poursuit un but d’intérêt général exigeant que de tels signes ou de telles indications puissent être librement utilisés par tous et demeurent ainsi disponibles. En revanche, si ce critère, en vertu duquel ne peuvent être enregistrées les marques qui sont susceptibles d’être communément utilisées dans le commerce pour présenter les produits ou les services concernés, est pertinent dans le cadre de l’article 7, paragraphe 1, sous c), il n’est pas celui à l’aune duquel le point b) de ce même paragraphe doit être interprété (arrêt de la Cour du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi-Werke/OHMI, C-173/04 P, Rec. p. I-551, points 62 et 63, et la jurisprudence citée).
39 S’agissant de la notion d’intérêt général sous-jacente à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, elle se confond, à l’évidence, avec la fonction essentielle de la marque, qui est de garantir au consommateur l’identité d’origine du produit ou du service désigné par la marque, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance (voir arrêt de la Cour du 8 mai 2008, Eurohypo/OHMI, C-304/06 P, Rec. p. I-3297, points 55 et 56, et la jurisprudence citée). Il s’ensuit que, contrairement à ce que soutient la requérante, la preuve que la marque demandée ne sera pas perçue par le public concerné comme identifiant l’origine commerciale des produits est suffisante pour établir son manque de caractère distinctif.
40 En outre, la requérante fait valoir que l’article de presse paru dans le cadre de la campagne intitulée « Print wirkt » démontre que la marque demandée serait « ancrée » dans l’esprit du public ciblé comme l’identifiant parmi d’autres entreprises et que les campagnes publicitaires faisant état de cette marque lui sont correctement associées, alors même qu’elles ne reproduisent aucun nom de marque, logo d’entreprise ou produit. Or, à supposer même que de tels éléments ressortent clairement de cet article de presse, il n’en demeure pas moins que celui-ci ne saurait prouver en lui-même que la marque demandée possède un caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, et, en tout état de cause, sa prise en considération pour apporter la preuve du caractère distinctif de cette marque ne pourrait intervenir que dans le cadre de la mise en œuvre de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, relatif à l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage. Toutefois, comme le soutient l’OHMI, la requérante n’a pas invoqué l’application d’un tel article en l’espèce ni même avancé d’arguments à cet égard.
41 Enfin, doit être rejetée l’argumentation présentée par la requérante lors de l’audience, se référant à une ordonnance du Bundespatentgericht (Cour fédérale des brevets, Allemagne) du 29 octobre 2010, à la suite de laquelle le Deutsche Patent- und Markenamt (Office des brevets et des marques allemand) aurait enregistré au niveau national, le 16 novembre 2010, la marque demandée.
42 En effet, si ni les parties ni le Tribunal lui-même ne sauraient être empêchés de s’inspirer, dans l’interprétation du droit communautaire, d’éléments tirés de la jurisprudence nationale [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 juillet 2006, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Johnson’s Veterinary Products (VITACOAT), T-277/04, Rec. p. II-2211, point 71], au vu de l’appréciation du Tribunal telle qu’exposée précédemment, l’ordonnance du Bundespatentgericht du 29 octobre 2010, laquelle porte, ainsi que cela résulte des explications de la requérante formulées lors de l’audience, sur un signe différent du signe demandé, ne saurait en elle-même remettre en cause la position du Tribunal quant à ce dernier signe.
43 Quant à l’enregistrement au niveau national de la marque demandée, il y a lieu, tout d’abord, de rappeler la jurisprudence constante selon laquelle le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 65 du règlement n° 207/2009, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière de documents présentés pour la première fois devant lui et que de tels documents doivent être écartés sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probante [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T-346/04, Rec. p. II-4891, point 19, et la jurisprudence citée]. Il convient ainsi de rejeter un argument s’appuyant sur le fait que le signe demandé a été enregistré en Allemagne, dès lors qu’un tel élément de fait, postérieur à l’adoption de la décision attaquée, ne saurait être pris en considération dans le cadre du contrôle de la légalité de ladite décision. Également, il y a lieu d’ajouter que, selon une jurisprudence constante, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque communautaire ne doit être apprécié que sur le fondement de la réglementation pertinente de l’Union. L’OHMI et, le cas échéant, le juge de l’Union ne sont pas liés par une décision intervenue dans un État membre ou dans un pays tiers admettant le caractère enregistrable de ce même signe en tant que marque nationale [arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T-106/00, Rec. p. II-723, point 47, et du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T-19/04, Rec. p. II-2383, point 37].
44 En conséquence, il y a lieu de rejeter le moyen unique, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Il s’ensuit que le recours doit être rejeté comme non fondé.
Sur les dépens
45 Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (sixième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Evonik Industries AG est condamnée aux dépens.
Moavero Milanesi |
Wahl |
Soldevila Fragoso |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 juillet 2011.
Signatures
* Langue de procédure : l’allemand.