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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Moonich Produktkonzepte & Realisierung v OHMI - Thermofilm Australia (HEATSTRIP) (Judgment) (French Text) [2014] EUECJ T-184/12 (09 July 2014)
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2014/T18412.html
Cite as: [2014] EUECJ T-184/12

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

9 juillet 2014(*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale HEATSTRIP – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 207/2009 – Articles 75 et 76 du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑184/12,

Moonich Produktkonzepte & Realisierung GmbH, établie à Sauerlach b. München (Allemagne), représentée par Me H. Pannen, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme D. Walicka, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Thermofilm Australia Pty Ltd, établie à Melbourne (Australie), représentée par Mes J. Kroher et K. Bach, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 26 janvier 2012 (affaire R 1956/2010-1), relative à une procédure d’opposition entre Thermofilm Australia Pty Ltd et Moonich Produktkonzepte & Realisierung GmbH,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen, président, F. Dehousse (rapporteur) et A. M. Collins, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 26 avril 2012,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 10 août 2012,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 2 août 2012,

vu le mémoire en réplique de la requérante déposé au greffe du Tribunal le 14 novembre 2012.

vu le mémoire en duplique de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 18 février 2013.

vu la réattribution de l’affaire à la sixième chambre et à un nouveau juge rapporteur,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant alors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 8 octobre 2008, la requérante, Moonich Produktkonzepte & Realisierung GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)]

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal HEATSTRIP.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 9, 11 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante :

–        classe 9 : « Appareils et instruments pour la conduite, la distribution, la transformation, l’accumulation, le réglage ou la commande du courant électrique ; thermostats » ;

–        classe 11 : « Appareils d’éclairage, de chauffage, de production de vapeur, de cuisson, de réfrigération, de séchage, de ventilation, de distribution d’eau et installations sanitaires ; pièces détachées et pièces de rechange pour ces articles » ;

–        classe 35 : « Vente en gros et au détail d’appareils et d’instruments pour la conduite, la distribution, la transformation, l’accumulation, le réglage ou la commande du courant électrique, de thermostats, d’appareils d’éclairage, de chauffage, de production de vapeur, de cuisson, de réfrigération, de séchage, de ventilation, de distribution d’eau et d’installations sanitaires, pièces détachées et de rechange pour tous les produits précités ».

4        La requérante a revendiqué, en vertu de l’article 30 du règlement n° 40/94 (devenu article 30 du règlement n° 207/2009), la priorité d’une demande antérieure de marque allemande déposée le 16 avril 2008.

5        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 007/2009, du 20 février 2009.

6        Le 8 mai 2009, l’intervenante, Thermofilm Australia Pty Ltd, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, pour l’ensemble des produits et services visés au point 3 ci-dessus.

7        L’opposition était fondée sur des droits antérieurs revendiqués par l’intervenante sur la marque non enregistrée verbale HEATSTRIP, protégée en Australie, au Canada, aux États-Unis et au Royaume-Uni, pour des « appareils de chauffage et leurs pièces ; thermostats, minuteurs et contrôleurs électriques pour appareils de chauffage ».

8        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés, respectivement, à l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, s’agissant des quatre États visés au point précédent, et à l’article 8, paragraphe 4, du même règlement, s’agissant du Royaume-Uni. L’intervenante soutenait, d’une part, que la requérante était son agent et avait déposé la demande de marque en son propre nom et sans son consentement et, d’autre part, qu’elle jouissait de droits antérieurs sur cette marque et que ces droits incluaient celui d’en interdire l’usage par la requérante.

9        Par décision du 10 septembre 2010, la division d’opposition a rejeté les deux motifs d’opposition comme étant insuffisamment étayés, faute pour l’intervenante de parvenir à prouver ses droits antérieurs.

10      Le 7 octobre 2010, l’intervenante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, par lequel elle demandait l’annulation de la décision de la division d’opposition et le rejet de la demande de marque communautaire.

11      Par décision du 26 janvier 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté l’opposition en ce qu’elle était fondée sur l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, et l’a accueillie en ce qu’elle était fondée sur l’article 8, paragraphe 3, du même règlement, s’agissant de l’Australie. La chambre de recours a considéré, en substance, que l’intervenante avait prouvé jouir de droits exclusifs sur la marque HEATSTRIP en Australie, qu’une relation fiduciaire existait entre les parties et que le consentement de l’intervenante au dépôt par la requérante de la demande de marque n’existait pas d’après le dossier.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée.

–        condamner l’OHMI aux dépens.

13      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

14      À l’appui du recours, la requérante invoque trois moyens d’annulation, tirés, premièrement, de la violation de l’article 75, deuxième phrase, du règlement n° 207/2009 et du principe d’égalité de traitement, deuxièmement, de la violation de l’article 76, paragraphe 1, du même règlement et, troisièmement, de la violation de l’article 8, paragraphe 3, du même règlement.

15      Il convient de commencer l’examen du recours par celui du deuxième moyen d’annulation.

 Sur la violation 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009

16      La requérante fait valoir que la chambre de recours a procédé elle-même à l’instruction du droit national applicable concernant la protection de la marque demandée en Australie, en appliquant des critères qui ne ressortiraient pas du droit australien invoqué et prouvé par l’intervenante. Ainsi, il ne ressortirait pas des éléments produits par l’intervenante que la notion de « reputation » en droit australien aurait une autre signification que celle, retenue par la division d’opposition, de renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009. Il en serait de même en ce qui concerne la déclaration de la chambre de recours selon laquelle la notion de « reputation » est liée à la notion de « goodwill » en droit australien. Le « goodwill » ne serait pas mentionné dans le document déposé à titre de preuve par l’intervenante. En conséquence, la chambre de recours aurait violé l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009.

17      L’OHMI et l’intervenante contestent la position de la requérante.

18      Ainsi qu’il découle de l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, dans les procédures concernant un motif relatif de refus d’enregistrement, il incombe à la partie qui s’oppose à l’enregistrement d’une marque communautaire en s’appuyant sur une marque antérieure nationale d’en démontrer l’existence et, le cas échéant, la portée de la protection. En revanche, il incombe à l’OHMI d’examiner si, dans le cadre d’une procédure d’opposition, les conditions d’application d’un motif de refus d’enregistrement invoqué sont réunies. Dans ce cadre, il est tenu d’apprécier la matérialité des faits invoqués et la force probante des éléments présentés par les parties [arrêt du Tribunal du 20 avril 2005, Atomic Austria/OHMI – Fabricas Agrupadas de Muñecas de Onil (ATOMIC BLITZ), T‑318/03, Rec. p. II‑1319, points 33 et 34].

19      Ainsi que la Cour a eu l’occasion de le rappeler, cette règle fait peser sur le demandeur la charge de présenter à l’OHMI non seulement les éléments démontrant qu’il remplit les conditions requises, conformément à la législation nationale dont il demande l’application, afin de pouvoir faire interdire l’usage d’une marque communautaire en vertu d’un droit antérieur, mais aussi les éléments établissant le contenu de cette législation (arrêt de la Cour du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI, C‑263/09 P, Rec. p. I‑5853, point 50).

20      Toutefois, la limitation, par l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, de la base factuelle de l’examen opéré par l’OHMI n’exclut pas que celui-ci prenne en considération, outre les faits avancés explicitement par les parties à la procédure d’opposition, des faits notoires, c’est-à-dire des faits qui sont susceptibles d’être connus par toute personne ou qui peuvent être connus par des sources généralement accessibles [arrêt du Tribunal du 22 juin 2004, Ruiz-Picasso e.a./OHMI – DaimlerChrysler (PICARO), T‑185/02, Rec. p. II‑1739, point 29, non frappé de pourvoi sur ce point, et arrêt ATOMIC BLITZ, point 18 supra, point 35].

21      En l’espèce, la chambre de recours a relevé que l’intervenante avait produit, à titre de preuve de son usage de la marque en Australie, un certain nombre de documents commerciaux, publicitaires et de presse (point 30 de la décision attaquée).

22      Quant au droit applicable, la chambre de recours a relevé que l’intervenante avait produit, à titre de preuve que, en vertu de la « common law », des droits sur un signe pouvaient être acquis en Australie sur la base de l’usage dans le commerce et qu’une action en usurpation d’appellation (action for passing off) pouvait être intentée contre un concurrent utilisant le signe, un extrait du World Trademark Yearbook 2006, un guide pour les praticiens (point 31 de la décision attaquée).

23      La chambre de recours a considéré que l’intervenante avait établi de manière satisfaisante avoir utilisé la marque HEATSTRIP pour le commerce d’appareils de chauffage en Australie et que, en vertu de la législation australienne, elle avait acquis des droits exclusifs sur cette marque (points 32 à 39 de la décision attaquée). Selon la chambre de recours, les éléments de preuve fournis par l’intervenante, considérés dans leur ensemble, étayaient l’assertion concernant ses droits fondés sur la « common law » (point 40 de la décision attaquée).

24      Revenant sur les appréciations de la division d’opposition, la chambre de recours, après avoir indiqué que cet organe avait sans doute eu à l’esprit la renommée de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, lorsqu’il avait apprécié le critère de la « reputation » en « common law », a indiqué que ces deux notions n’étaient pas les mêmes. La chambre de recours a remarqué que la notion de « reputation » dans le contexte de l’usurpation d’appellation est généralement associée à celle du « goodwill ». Cela signifie, a ajouté la chambre de recours, que la partie qui invoque la « reputation » de la « common law » n’est pas tenue de prouver que sa marque est devenue renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, mais, selon le chapitre du World Trademark Yearbook 2006 consacré à l’Australie, qu’elle « a été portée à l’attention du public pertinent et qu’elle a atteint un degré de signifiance dans l’esprit du public » (it has come to the attention of the relevant public and has attained a level of significance in the public mind) (points 41 et 42 de la décision attaquée).

25      La chambre de recours a considéré que les ventes très substantielles de produits et l’activité promotionnelle réalisée au cours de plusieurs années avaient permis l’association, par le public pertinent, de la marque aux produits de l’intervenante et que l’usage de cette marque avait, en d’autres termes, généré un « goodwill » et une « reputation » suffisants pour permettre à cette marque de jouir de la protection dans le cadre de l’usurpation d’appellation (point 43 de la décision attaquée).

26      Il convient, contrairement à ce que soutient la requérante, de considérer que la chambre de recours n’a pas, à l’occasion de ses appréciations relatives au droit australien, violé l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009.

27      Certes, l’extrait du World Trademark Yearbook 2006 consacré à l’Australie et produit par l’intervenante en annexe à ses motifs d’opposition ne comporte pas de définition formelle de la notion de « reputation » en « common law », ni de référence exprès au concept de « goodwill ». Toutefois, cet extrait, après avoir indiqué qu’il n’y a pas de règle spécifiant précisément le degré de « reputation » nécessaire, fournit des lignes directrices utiles à cette fin. Ces lignes directrices suggèrent suffisamment clairement que la « reputation » dans le contexte de l’usurpation d’appellation n’est pas la même notion que la renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

28      Ainsi, l’extrait en cause indique que la marque doit avoir été « portée à l’attention » du public pertinent et avoir atteint « un degré de signifiance » dans l’esprit du public. Il indique qu’une période de promotion de seulement quelques semaines peut suffire lorsque l’ampleur de la promotion est assez substantielle (a period of promotion of just a few weeks’ duration has been held sufficient in some cases where the magnitude of the promotion was quite substantial), et qu’il n’est pas forcément nécessaire d’avoir exploité la marque sur le territoire Australien, pourvu qu’une suffisante « reputation » par rejaillissement en provenance d’un autre territoire (spill over reputation) soit établie pour ce territoire (it is not necessary to have actually carried on business in Australia, as long as sufficient spill-over reputation can be proved).

29      Il convient, en outre, de relever que les notions, intimement liées, de « reputation » et de « goodwill », dans le contexte de l’usurpation d’appellation, sont des notions de « common law », bien connues de l’OHMI, en particulier en relation avec le Royaume‑Uni, État membre qui partage ces notions avec l’Australie et au sujet duquel l’intervenante avait d’ailleurs déposé des éléments d’information dans le cadre de l’opposition. D’ailleurs, comme le relève l’intervenante et comme en convient la requérante, les directives officielles de l’OHMI mentionnent expressément l’usurpation d’appellation de la « common law » comme base d’une opposition.

30      Par ailleurs, il convient de relever que les conditions pour obtenir la protection au titre de l’usurpation d’appellation en « common law » ont été évoquées dans la jurisprudence communautaire [arrêts du Tribunal du 11 juin 2009, Last Minute Network/OHMI – Last Minute Tour (LAST MINUTE TOUR), T‑114/07 et T‑115/07, Rec. p. II‑1919, points 48-53 ; du 9 décembre 2010, Tresplain Investments/OHMI – Hoo Hing (Golden Elephant Brand), T‑303/08, Rec. p. II‑5659, points 92 à 122, et du 18 janvier 2012, Tilda Riceland Private/OHMI – Siam Grains (BASmALI), T‑304/09, non encore publié au Recueil, points 18-28]. Dans ce cadre, le juge de l’Union a notamment énoncé que l’OHMI n’avait commis aucune erreur en considérant qu’une entreprise pouvait créer un « goodwill » sans avoir atteint le niveau de connaissance nécessaire pour établir une renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 (arrêt Golden Elephant Brand, précité, point 117).

31      Au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, lesquels figuraient au dossier de l’OHMI ou étaient constitutifs de faits notoires au sens de la jurisprudence rappelée au point 20 ci-dessus, il ne saurait être considéré que la chambre de recours, par ses énonciations du point 42 de la décision attaquée, a violé l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009,

32      Il s’ensuit que le présent moyen, tiré de la violation de l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, doit être rejeté comme non fondé.

 Sur la violation de l’article 75, deuxième phrase, du règlement n° 207/2009 et du principe d’égalité de traitement,

33      La requérante reproche à la chambre de recours de ne pas lui avoir donné, avant de clore la procédure écrite, l’occasion de prendre position et, le cas échéant, de présenter des arguments complémentaires, sur les motifs qui ont finalement conduit cette instance à annuler la décision de la division d’opposition. Cela se serait imposé, notamment pour des raisons d’égalité de traitement, dès lors que l’intervenante aurait eu, quant à elle, la possibilité de présenter à deux reprises des éléments complémentaires concernant l’existence de son droit de propriété intellectuelle. S’agissant de la relation d’agent, cela se serait également imposé du fait que cette question n’aurait pas été examinée par la division d’opposition, que le rapporteur devant la chambre de recours aurait limité son examen du recours à la question de l’existence d’un droit antérieur au sens de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, et que la chambre de recours aurait fondé sa position sur des considérations qui n’auraient pas découlé telles quelles de l’argumentation de l’intervenante. Enfin, la chambre de recours aurait fondé la décision attaquée sur des éléments jusque-là non débattus, sans entendre la requérante, s’agissant de la signification de la notion de « reputation » aux fins du régime de l’usurpation d’appellation en « common law » australien.

34      L’OHMI et l’intervenante contestent la position de la requérante.

35      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, il découle de l’article 75, deuxième phrase, du règlement n° 207/2009, que l’OHMI ne peut fonder sa décision que sur des éléments de fait ou de droit sur lesquels les parties ont pu présenter leurs observations [arrêt de la Cour du 21 octobre 2004, KWS Saat/OHMI, C‑447/02 P, Rec. p. I‑10107, point 42 ; arrêt du Tribunal du 7 février 2007, Kustom Musical Amplification/OHMI (Forme d’une guitare), T‑317/05, Rec. p. II‑427, point 25].

36      Cette disposition consacre, dans le cadre du droit des marques communautaires, le principe général de protection des droits de la défense, inscrit, par ailleurs, à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. En vertu de ce principe, les destinataires des décisions des autorités publiques qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue (arrêt Forme d’une guitare, point 35 supra, point 26).

37      Le droit à être entendu s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel, mais non à la position finale que l’administration entend adopter [arrêt Forme d’une guitare, point 35 supra, point 27 ; arrêts du Tribunal du 3 décembre 2003, Audi/OHMI (TDI), T‑16/02, Rec. p. II‑5167, point 75, et du 23 septembre 2009, Evets/OHMI (DANELECTRO et QWIK TUNE), T‑20/08 et T‑21/08, Rec. p. II‑3515, point 47].

38      En premier lieu, la requérante fait valoir que, dès lors que l’intervenante aurait été informée de l’« appréciation juridique provisoire » de la chambre de recours et aurait pu présenter à deux reprises des éléments complémentaires concernant l’existence de son droit de propriété intellectuelle, l’égalité de traitement aurait requis que la requérante se vît aussi donner la possibilité de réagir aux motifs ayant finalement conduit la chambre de recours à annuler la décision d’opposition. Cet argument doit être rejeté, pour les raisons suivantes.

39      Tout d’abord, il convient de relever que, par ses invitations adressées à l’intervenante les 26 septembre et 11 octobre 2011, la chambre de recours n’a pas communiqué à cette partie une « appréciation juridique provisoire », mais a seulement exercé son pouvoir, prévu par l’article 63, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, afin de collecter les éléments nécessaires à son appréciation.

40      En outre, ces invitations adressées à l’intervenante ont été suivies d’une invitation adressée à la requérante, le 24 novembre 2011, de déposer ses éventuelles observations sur les réponses de l’intervenante. Ainsi, pour autant que l’argument de la requérante viserait à dénoncer une violation de l’article 75, seconde phrase, du règlement n° 207/2009 commise à l’occasion des invitations faites à l’intervenante de présenter des éléments complémentaires, cet argument est non fondé.

41      Ensuite, il convient de noter que ces éléments complémentaires sollicités par l’OHMI concernaient l’opposition en ce qu’elle était fondée sur l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009. Or, l’opposition au titre de cette disposition a été rejetée par la chambre de recours et l’objet du présent recours concerne donc uniquement l’opposition en ce qu’elle est fondée sur l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, opposition qui a été – à tort selon la requérante – accueillie par la chambre de recours.

42      Enfin et pour autant que, par son argument, la requérante veut déduire de la transmission d’invitations à l’intervenante le fait qu’elle-même aurait dû pouvoir, pour des motifs d’égalité de traitement, réagir aux motifs pour lesquels la chambre de recours a finalement annulé la décision d’opposition, il convient de relever ce qui suit.

43      Si le droit d’être entendu s’étend aux éléments de fait et de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel – ce qui explique la possibilité offerte à la requérante de répondre aux éléments complémentaires déposés par l’intervenante –, il ne s’étend pas à la position finale que l’administration entend adopter. De plus et comme cela a déjà été relevé au point 39 ci-dessus, la chambre de recours n’a pas communiqué à l’intervenante son « appréciation juridique provisoire » aux fins de permettre à celle-ci de réagir, mais n’a fait qu’exercer son pouvoir, prévu par l’article 63, paragraphe 2 du règlement n° 207/2009, afin de collecter les éléments nécessaires à son appréciation. C’est donc à tort que la requérante se prévaut d’une inégalité de traitement.

44      De manière plus générale et comme le soutient de manière circonstanciée l’intervenante, il convient de relever qu’il ressort du dossier de la procédure devant l’OHMI que la requérante a disposé de la possibilité de faire valoir son point de vue tant sur la question de la détention par l’intervenante d’un droit de propriété intellectuelle en Australie que sur la question de la nature des liens entre la requérante et l’intervenante.

45      Ainsi, sur la première de ces questions, la requérante avait toute possibilité de prendre position après que l’intervenante eut, dans ses mémoires des 21 septembre 2009 et 4 mai 2010, exposé son droit de propriété intellectuelle en Australie puis, dans les motifs de son recours du 5 janvier 2011, critiqué l’interprétation par la division d’opposition du droit relatif à l’usurpation d’appellation applicable en Australie.

46      De même, sur la seconde de ces questions, la requérante avait toute possibilité de prendre position après que l’intervenante eut revendiqué, dans son mémoire du 21 septembre 2009 puis dans les motifs de son recours du 5 janvier 2011, l’existence d’une relation fiduciaire violée par la requérante. Dès lors que l’appréciation de la relation entre les parties faisait manifestement partie du litige, rien n’empêchait la requérante, si elle le souhaitait, de soutenir l’existence d’un consentement de l’intervenante au dépôt de la demande de marque.

47      Le fait que la division d’opposition ne se soit pas prononcée sur la relation d’agent, et l’allégation que le rapporteur devant la chambre de recours aurait limité son examen à la question de l’existence d’un droit antérieur au sens de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, ne sont pas de nature à infirmer cette appréciation.

48      En deuxième lieu, pour ce qui est de l’argument selon lequel la chambre de recours se serait fondée sur des considérations (relatives à la fourniture de matériel publicitaire par l’intervenante et à l’importance de sa coopération) qui n’auraient pas découlé telles quelles de l’argumentation de l’intervenante et pour lesquelles la requérante aurait dû être au préalable entendue, il convient de le rejeter, pour les raisons suivantes.

49      Il ressort du dossier de la procédure devant l’OHMI que l’intervenante a soutenu avoir fourni à la requérante du matériel publicitaire ainsi que des spécifications de produits, avoir coopéré à la production de matériel publicitaire et avoir fourni des contacts clients. Il ressort des pièces produites par l’intervenante qu’il ne s’agissait pas seulement – comme le suggère la requérante –« d’un peu » de matériel publicitaire, mais d’un assez grand nombre de documents et d’échantillons, même s’il est vrai que la requérante a ensuite largement assumé la duplication de ces éléments publicitaires et promotionnels aux fins de leur utilisation sur son marché. Il n’est, par ailleurs, pas sérieusement contesté que la requérante préparait une campagne promotionnelle à grande échelle et que c’est dans cette perspective qu’elle sollicitait l’assistance de l’intervenante. L’appréciation de la chambre de recours, selon laquelle la requérante n’aurait pas, sans la coopération de l’intervenante, pu créer la base d’une commercialisation réussie des produits ne découle donc pas d’éléments de fait et de droit sur lesquels la partie requérante n’aurait pas pu déposer ses observations.

50      S’agissant, en troisième lieu, de l’argument selon lequel la chambre de recours aurait fondé la décision attaquée sur des éléments non débattus, sans entendre la requérante, s’agissant de la signification de la notion de « reputation » aux fins du régime de l’usurpation d’appellation en « common law », il a déjà été constaté que la requérante avait eu toute possibilité de faire valoir sa position sur cette question, notamment après que l’intervenante eut critiqué la position de la division d’opposition à cet égard. Il convient, en outre, de rappeler, que le droit d’être entendu ne s’étend pas à la position finale que l’administration entend adopter.

51      Enfin, contrairement à ce que suggère la requérante, la chambre de recours n’a pas violé l’obligation de motivation, aux points 51 à 56 de la décision attaquée contenant l’analyse des liens entre les parties opérée sur la base de la correspondance électronique produite par l’intervenante et à laquelle la requérante a pu réagir. En effet, auxdits points de la décision attaquée, la chambre de recours a exposé de manière suffisamment claire et circonstanciée sa position. En outre, la requérante ayant pu faire valoir son point de vue dans la procédure de recours, la chambre de recours n’était pas tenue de l’entendre préalablement à l’adoption de la décision finale.

52      C’est également à tort que la requérante allègue une violation du droit d’être entendu qui découlerait d’une « perte d’instance », au motif que la chambre de recours aurait statué elle-même sur la question de la relation d’agence sans renvoyer à la division d’opposition qui ne l’aurait pas examinée en premier lieu. En effet, il découle de l’article 64 du règlement n° 207/2009 que, lorsque la chambre de recours statue sur le recours, elle peut soit exercer toute compétence de l’instance qui a rendu la décision, soit renvoyer l’affaire à ladite instance, pour suite à donner. Dès lors que la requérante avait eu la possibilité de faire valoir sa position sur la question de la relation d’agence, rien ne s’opposait à ce que la chambre de recours statuât sur cette question en application de la disposition susvisée, et toute violation du droit d’être entendu du fait d’une prétendue perte d’instance doit donc être écartée.

53      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le présent moyen doit être rejeté.

 Sur la violation de l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009

54      La requérante soutient que la chambre de recours a considéré à tort qu’avait été prouvée une relation d’agence ou de représentation entre elle et l’intervenante. Seule aurait été prouvée une relation de vendeur à acheteur. La fourniture par l’intervenante de matériel publicitaire et d’information sur les produits, ses affirmations concernant la mise en contact de la requérante avec des clients, la correspondance électronique échangée entre les parties, n’établiraient pas une relation fiduciaire. La chambre de recours n’aurait pas suffisamment pris en considération le fait que la requérante aurait acheté et revendu les produits en son propre nom et pour son propre compte, qu’elle n’aurait eu aucun droit de distribution exclusif, qu’elle n’aurait pas intégré la structure commerciale de l’intervenante, qu’elle n’aurait été soumise à aucune interdiction de concurrence, qu’elle aurait assumé les charges de la vente et de la promotion des produits et que, dans le cadre de ses activités, elle n’aurait pas eu à tenir compte des intérêts de l’intervenante. La chambre de recours aurait examiné si l’intervenante avait donné son consentement au dépôt de la demande de marque, alors qu’elle aurait dû examiner s’il existait des raisons légitimes justifiant les agissements de la requérante. Or, de telles raisons auraient existé. Ainsi, alors que l’intervenante aurait renoncé, pour des raisons de coût, à enregistrer la marque en tant que marque communautaire, la requérante, qui aurait beaucoup investi pour promouvoir cette marque dans l’Union européenne, aurait eu un intérêt légitime à la protéger.

55      L’OHMI et l’intervenante contestent la position de la requérante.

56      Conformément à l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, une marque est refusée à l’enregistrement lorsqu’elle est demandée par l’agent ou le représentant du titulaire de la marque en son nom propre sans le consentement du titulaire, à moins que cet agent ou ce représentant ne justifie de ses agissements.

57      Il incombe à la partie qui se prévaut du motif de refus d’enregistrement prévu à cette disposition d’apporter la preuve que les conditions d’application de ce motif de refus sont remplies, notamment en ce qui concerne l’existence d’une relation d’agence ou de représentation entre le titulaire de la marque et le demandeur d’enregistrement en tant que marque communautaire.

58      Le Tribunal a jugé que, s’agissant des termes « agent » et « représentant » visés par l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, il y a lieu de considérer, à l’instar de ce qui est prévu dans les directives relatives à la procédure d’opposition devant l’OHMI en ce qui concerne un dépôt non autorisé par des agents du titulaire de la marque, que ces termes doivent être interprétés largement, de façon à couvrir toutes les formes de relations fondées sur un accord contractuel aux termes duquel l’une des parties représente les intérêts de l’autre, et ce indépendamment de la qualification de la relation contractuelle établie entre le titulaire ou le mandant et le demandeur de la marque communautaire [arrêt du Tribunal du 13 avril 2011, Safariland/OHMI – DEF-TEC Defense Technology (FIRST DEFENSE AEROSOL PEPPER PROJECTOR), T‑262/09, Rec. p. II‑1629, point 64].

59      Le Tribunal a relevé que, selon ces directives, il suffit, aux fins de l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, qu’il existe entre les parties un accord de coopération commerciale de nature à créer une relation de confiance en imposant au demandeur, expressément ou implicitement, une obligation générale de confiance et de loyauté eu égard aux intérêts du titulaire de la marque. Si le demandeur agit en toute indépendance, sans qu’aucune relation n’ait été établie avec le titulaire, il ne peut être considéré comme un agent au sens de l’article 8, paragraphe 3, dudit règlement. Ainsi, un simple acheteur ou client du titulaire ne peut être considéré comme un « agent » ou un « représentant » aux fins de l’article 8, paragraphe 3, de ce même règlement, puisque cette personne n’a aucune obligation particulière de confiance vis-à-vis du titulaire de la marque (arrêt FIRST DEFENSE AEROSOL PEPPER PROJECTOR, point 58 supra, point 64).

60      En l’espèce, la chambre de recours, après avoir rappelé que l’absence d’un contrat formel de distribution ou d’agence signé par les parties n’excluait pas l’existence d’une relation de facto qui serait pertinente dans le contexte de l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, a ajouté qu’une relation contractuelle contraignante pouvait être établie au moyen d’un échange de lettres d’affaires entre les parties et qu’il était, dès lors, nécessaire de prendre en considération la correspondance électronique échangée entre les parties afin de déterminer ce que chacune avait demandé à l’autre. Cela permettrait, selon la chambre de recours, de mettre en lumière la façon dont les parties ont imaginé leur relation (décision attaquée, point 50).

61      La chambre de recours a estimé que l’aspect le plus significatif qui ressortait de cette correspondance était le fait que la requérante s’était fortement appuyée sur les informations, les instructions et l’aide de l’intervenante afin de promouvoir efficacement les produits sur le marché allemand. La chambre de recours a relevé que la requérante avait demandé à l’intervenante « des photos du produit et le logo » (courrier électronique du 29 mai 2006), « la présentation élaborée [par l’intervenante] en format Adobe» (même courrier électronique), ainsi que « le poids et les mesures » des divers modèles d’appareils de chauffage (courrier électronique du 1er juin 2006) et que l’intervenante avait envoyé à la requérante les « instructions » pour l’installation des appareils de chauffage (courrier électronique du 30 juin 2006) (décision attaquée, point 51).

62      Selon la chambre de recours, ces demandes, faites juste au début de la relation, montraient que la requérante préparait une campagne promotionnelle à grande échelle, et qu’elle ne se contentait pas d’acheter et de vendre les produits de l’intervenante. Elles démontraient également, a ajouté la chambre de recours, que l’assertion de la requérante (selon laquelle elle aurait dû supporter les frais de la promotion des produits) était fausse : le matériel promotionnel était en réalité fourni par l’intervenante (décision attaquée, point 52).

63      La chambre de recours a relevé que, à mesure que la relation s’est poursuivie, la requérante n’a cessé de demander davantage d’assistance. La chambre de recours a évoqué les faits suivants : le 3 août 2006, la requérante a demandé des photos des produits à insérer dans « une brochure pour le marché allemand », notamment des photos des produits dans des cadres résidentiels et commerciaux, afin de montrer comment et où ces appareils pouvaient être installés ; le 29 août 2006, l’intervenante a informé la requérante qu’elle envoyait « quelques brochures pour l’Expo » ; le 18 septembre 2006, la requérante a demandé « toutes les images qu’il est possible de trouver de l’appareil ‘HEATSTRIP’ pour notre agence de relations publiques » ; après les avoir reçues, le 22 septembre 2006, la requérante a envoyé un courrier électronique à l’intervenante afin de la remercier de son « aide » (décision attaquée, point 53).

64      Selon la chambre de recours, ces courriers électroniques montraient que les deux parties coopéraient étroitement à la promotion du produit, en faisant de la publicité pour lui dans des brochures et en l’exposant lors d’un salon, afin de créer les meilleures conditions pour une commercialisation couronnée de succès : l’intervenante fournissait le matériel à cet effet et la requérante l’adaptait au marché allemand (décision attaquée, point 54).

65      La chambre de recours a considéré que la requérante ne pouvait faire valoir, dans ces circonstances, qu’elle avait simplement importé des produits d’Australie pour les vendre en Allemagne et qu’elle avait opéré dans un contexte de pleine concurrence avec l’intervenante. Selon la chambre de recours, le sujet essentiel de la correspondance électronique ne concernait pas l’achat et la vente de produits, mais la création par la requérante de la base pour une commercialisation à grande échelle des produits - en produisant du matériel publicitaire et en exposant lors d’un salon - et « l’aide » apportée par l’intervenante à la requérante à cet effet. Sans l’étroite coopération de l’intervenante, a relevé la chambre de recours, la requérante n’aurait pas pu, contrairement à ses allégations, créer la base d’une commercialisation réussie du produit (décision attaquée, point 55).

66      La chambre de recours a conclu que la correspondance par courrier électronique dénotait l’existence d’un accord de coopération commerciale de nature à créer une relation de confiance en imposant au demandeur, expressément ou implicitement, une obligation générale de confiance et de loyauté eu égard aux intérêts de l’intervenante titulaire de la marque, au sens de la jurisprudence évoquée aux points 58 et 59 ci-dessus.

67      Il y a lieu de considérer, à l’instar de la chambre de recours et à la lumière des éléments qui étaient à sa disposition, que la relation nouée entre les parties à la date de priorité revendiquée par la requérante allait effectivement au-delà d’une simple relation d’acheteur à vendeur et constituait un accord implicite de coopération commerciale instaurant entre les parties une relation fiduciaire et comportant donc, pour la requérante, une obligation de loyauté envers l’intervenante s’agissant de son droit à la marque.

68      Cette appréciation n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante.

69      S’agissant de l’argument selon lequel la requérante aurait acheté les produits de l’intervenante pour les revendre à son nom et pour son propre compte et selon lequel il n’aurait existé aucune exclusivité d’approvisionnement en sa faveur, il convient de relever qu’un accord de coopération commerciale comportant une obligation de loyauté peut parfaitement exister en l’absence, comme en l’espèce, d’un contrat de mandat ou d’une clause d’exclusivité.

70      Quant aux circonstances avancées selon lesquelles la requérante n’aurait pas intégré la structure commerciale de l’intervenante, n’aurait pas été soumise à une interdiction de concurrence et aurait assumé les charges de la vente et de la promotion des produits, elles ne remettent pas en cause la réalité de la coopération commerciale nouée entre les parties pour la promotion et la distribution des produits de l’intervenante sous la marque de celle-ci, et l’obligation de loyauté qui en découlait pour la requérante. C’est donc à tort que, dans ce contexte et s’agissant tout au moins de la marque de l’intervenante, la requérante affirme qu’elle n’avait pas à tenir compte des intérêts de l’intervenante.

71      S’agissant de la contestation par la requérante de la réalité de la fourniture par l’intervenante d’adresses de clients, il convient de relever que cette fourniture, alléguée par l’intervenante, n’est pas évoquée par la chambre de recours au soutien de sa conclusion. Par suite, la contestation de la requérante, même à la supposer fondée, n’est pas de nature à remettre en cause l’appréciation de la chambre de recours.

72      S’agissant de l’argument selon lequel la chambre de recours, après avoir conclu à l’existence d’une relation fiduciaire, se serait limitée à examiner si l’intervenante avait donné son consentement au dépôt de la demande de marque, alors qu’elle aurait également dû examiner s’il existait des raisons légitimes de nature à justifier les agissements de la requérante, il convient de relever ce qui suit.

73      La requérante ne s’est, à aucun stade de la procédure devant l’OHMI, prévalue de justifications pour ses agissements. Ainsi, devant la division d’opposition, la requérante s’est limitée à alléguer les raisons pour lesquelles, à son avis, l’intervenante n’avait pas déposé de demande de marque au niveau de l’Union. Devant la chambre de recours, la requérante a seulement contesté être l’agent ou le représentant de l’intervenante.

74      Dans ces conditions, il n’incombait pas à la chambre de recours de spéculer sur une éventuelle justification auxdits agissements. À cet égard, il convient de rappeler que, dans les procédures concernant les motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties.

75      Il s’ensuit que l’argument de la requérante, en ce qu’il reproche à la chambre de recours de n’avoir pas procédé d’office à l’examen de justifications éventuelles, doit être rejeté.

76      Quant aux motifs de justification que la requérante avance pour la première fois devant le Tribunal, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal, les mémoires des parties ne peuvent modifier l’objet du litige devant la chambre de recours. En effet, il appartient au Tribunal de contrôler la légalité des décisions des chambres de recours. Par conséquent, le contrôle exercé par le Tribunal ne peut aller au-delà du cadre factuel et juridique du litige tel qu’il a été porté devant la chambre de recours [arrêt du Tribunal du 22 juin 2004, « Drie Mollen sinds 1818 »/OHMI – Nabeiro Silveria (Galáxia), T‑66/03, Rec. p. II‑1765, point 45]. De même, une partie requérante n’a pas le pouvoir de modifier devant le Tribunal les termes du litige, tels qu’ils résultaient des prétentions et des allégations avancées par elle-même et par l’intervenante (arrêt de la Cour du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, Rec. p. I‑3569, point 43). En outre, le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 65 du règlement n° 207/2009, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des éléments présentés pour la première fois devant lui [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec. p. II‑4891, point 19, et la jurisprudence citée].

77      Dès lors que la chambre de recours n’avait pas à rechercher d’office, dans le cadre de son examen du motif relatif de refus tiré de l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, d’éventuelles justifications aux agissements de la requérante, la revendication par la requérante de telles justifications, opérée pour la première fois devant le Tribunal, constitue une modification des termes du litige et doit être rejetée comme irrecevable.

78      S’agissant, enfin de la question de la prise en considération par le Tribunal des arguments et pièces produits par la requérante dans le mémoire en réplique, concernant un débat noué entre les parties dans un litige national au sujet de l’existence ou non d’une exclusivité commerciale au profit de la requérante, il convient de relever que ce débat figurait déjà dans la procédure devant l’OHMI. Il s’ensuit, conformément à la jurisprudence du Tribunal [arrêt du Tribunal du 17 juin 2008, El Corte Inglés/OHMI – Abril Sánchez et Ricote Saugar (BOOMERANG TV) (T‑420/03, Rec. 2008 p. II‑837, point 35] et comme le fait valoir à juste titre l’intervenante, que les arguments et pièces produits par la requérante pour la première fois devant le Tribunal à ce sujet doivent être rejetés comme tardifs et irrecevables. En tout état de cause, dès lors que la chambre de recours n’a, de toute manière, accordé aucune importance à la revendication par la requérante devant le juge national d’un droit de distribution exclusif, les arguments échangés par les parties devant le Tribunal à ce sujet apparaissent dénués de pertinence pour l’appréciation de la légalité de la décision attaquée.

79      Il résulte des considérations qui précèdent qu’il convient de rejeter le présent moyen.

80      La requérante ayant succombé en tous ces moyens, il convient de rejeter le présent recours.

 Sur les dépens

81      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

82      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’OHMI et par l’intervenante, conformément aux conclusions de ces parties.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Moonich Produktkonzepte & Realisierung GmbH supportera ses propres dépens ainsi que les dépens de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) et les dépens de Thermofilm Australia Pty Ltd.

Frimodt Nielsen

Dehousse

Collins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 juillet 2014.

Signatures


Table des matières


Antécédents du litige

Conclusions des parties

En droit

Sur la violation 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009

Sur la violation de l’article 75, deuxième phrase, du règlement n° 207/2009 et du principe d’égalité de traitement,

Sur la violation de l’article 8, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’allemand.


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