BAILII is celebrating 24 years of free online access to the law! Would you consider making a contribution?
No donation is too small. If every visitor before 31 December gives just £1, it will have a significant impact on BAILII's ability to continue providing free access to the law.
Thank you very much for your support!
[Home] [Databases] [World Law] [Multidatabase Search] [Help] [Feedback] | ||
Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
||
You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Comercializadora Eloro v OHMI - Zumex Group (zumex) (Judgment) French Text [2015] EUECJ T-354/14 (09 December 2015) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2015/T35414.html Cite as: EU:T:2015:947, [2015] EUECJ T-354/14, ECLI:EU:T:2015:947 |
[New search] [Contents list] [Help]
DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
9 décembre 2015 (*)
« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative ZUMEX – Marque nationale verbale antérieure JUMEX – Absence d’usage sérieux de la marque antérieure – Article 42, paragraphe 2, du règlement (CE) nº 207/2009 »
Dans l’affaire T‑354/14,
Comercializadora Eloro, SA, établie à Ecatepec (Mexique), représentée par Me J. de Castro Hermida, avocat,
partie requérante,
contre
Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme S. Palmero Cabezas, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant
Zumex Group, SA, établie à Moncada (Espagne), représentée par Me M. C. March Cabrelles, avocat,
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 13 février 2014 (affaire R 391/2012-1), relative à une procédure d’opposition entre Comercializadora Eloro, SA et Zumex Group, SA,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre),
composé de M. M. Prek, président, Mme I. Labucka (rapporteur) et M. V. Kreuschitz, juges,
greffier : M. E. Coulon,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 19 mai 2014,
vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 30 octobre 2014,
vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 31 octobre 2014,
vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991 de statuer sans phase orale de la procédure,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 9 avril 2008, Zumex Maquinas y Elementos, SA, devenue l’intervenante, Zumex Group, SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) nº 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1) [remplacé par le règlement (CE) nº 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].
2 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :
3 Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, de la classe 32 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Bières ; eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons ».
4 La demande a été publiée au Bulletin des marques communautaires nº 32/2008, du 11 août 2008.
5 Le 11 novembre 2008, Frugosa, SA de CV a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement nº 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée, pour l’ensemble des produits visés au point 3 ci-dessus.
6 L’opposition était fondée sur la marque communautaire verbale antérieure JUMEX, enregistrée le 7 juin 2002 sous le numéro 2113512, et renouvelée le 15 mai 2011, désignant les produits relevant de la classe 32 et correspondant à la description suivante : « Bières, ‘ale’ et ‘porter’ ; boissons non alcooliques, jus de fruits ».
7 Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement nº 207/2009].
8 Le 14 mars 2011, l’intervenante a demandé à l’OHMI que l’opposante prouve l’usage de la marque antérieure. Le 23 mai 2011, cette dernière a présenté des documents à cet effet.
9 Le 8 août 2011, la marque antérieure a été cédée par l’opposante à la requérante, Comercializadora Eloro, SA.
10 Par décision du 21 décembre 2011, considérant, d’une part, que les documents produits démontraient l’existence d’un usage sérieux de la marque antérieure quant aux « boissons non alcooliques » et aux « jus de fruits » et, d’autre part, qu’il existait un risque de confusion entre les marques en cause, la division d’opposition a accueilli l’opposition dans son intégralité et a rejeté la marque demandée pour tous les produits concernés.
11 Le 20 février 2012, l’intervenante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement nº 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.
12 Par une première lettre du 19 octobre 2012, la première chambre de recours a invité la requérante à clarifier ses allégations ainsi que les preuves déjà produites pour déterminer si les produits facturés à Nidera General Merchandising BV, selon les documents présentés, avaient bien été mis à disposition sur le territoire de l’Union européenne.
13 Par une seconde lettre du même jour, la chambre de recours a proposé aux parties d’obtenir une décision en suivant une procédure de médiation. L’intervenante a informé la chambre de recours de sa volonté de parvenir à un accord amiable par l’intermédiaire de cette procédure et en a également informé la requérante. La procédure de recours a dès lors été suspendue. Néanmoins, la procédure de médiation s’est achevée sans que les parties soient parvenues à un accord. Partant, la procédure de recours a été rouverte.
14 Le 5 février 2014, la requérante a présenté de nouveaux documents tendant à démonter l’usage de la marque antérieure sur le territoire de l’Union, expliquant qu’elle n’avait pas présenté ces documents auparavant, car elle considérait qu’il serait possible de parvenir à une solution amiable par voie de médiation.
15 Par décision du 13 février 2014 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours a accueilli le recours.
16 En substance, la chambre de recours a considéré que les documents présentés par la requérante ne contenaient pas d’indication suffisante sur la nature de l’usage de la marque antérieure et ne permettaient pas non plus d’établir que les produits facturés à Nidera General Merchandise avaient été effectivement utilisés sur le territoire de l’Union.
17 En particulier, la chambre de recours a relevé que les factures présentées par la requérante, émises à l’attention d’une société, établie à Rotterdam (Pays-Bas), ne permettaient pas à elles seules de démontrer que les produits portant la marque antérieure et fabriqués en dehors de l’Union avaient effectivement été introduits sur le territoire de l’Union.
18 En effet, lesdites factures auraient uniquement démontré qu’une société dont le siège social était situé aux Pays-Bas avait acquis des produits facturés par une entreprise ayant son siège social au Mexique, mais elles n’auraient pas démontré l’introduction de ces produits sur le territoire de l’Union.
19 De surcroît, selon la chambre de recours, les autres documents présentés par la requérante ne permettaient pas de corroborer son allégation selon laquelle elle aurait fait usage de la marque antérieure sur le territoire de l’Union.
20 Enfin, la chambre de recours a souligné que les documents présentés tardivement par la requérante ne pouvaient pas être pris en compte comme preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure. En effet, selon la chambre de recours, la présentation de preuves complémentaires d’un tel usage demeurait certes possible après l’expiration des délais. Cependant, selon la chambre de recours, il n’en demeurait pas moins que, eu égard au stade de la procédure auquel était intervenu cette production tardive de documents et aux circonstances qui l’avaient entouré, il convenait de s’opposer à la prise en compte desdits documents.
21 En tout état de cause, selon la chambre de recours, les éléments tardifs ne seraient pas réellement pertinents pour l’issue du recours. La chambre de recours a, donc, décidé qu’il y avait lieu de rejeter l’opposition, conformément à l’article 42, paragraphe 2, du règlement nº 207/2009, à l’article 15, paragraphe 1, sous b), du même règlement et à la règle 22, paragraphe 3, du règlement (CE) nº 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1).
Conclusions des parties
22 La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :
– considérer que, compte tenu des documents de la procédure administrative et des documents produits au soutien du présent recours, l’usage de la marque antérieure avait été suffisamment établi pour les jus de fruits compris dans la classe 32 ;
– l’usage de la marque antérieure ayant été établi, refuser l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits relevant de la classe 32, en raison de l’existence d’un risque de confusion pour le consommateur.
23 Eu égard à la requête appréhendée dans son ensemble, le Tribunal considère que la requérante doit être regardée comme demandant, par son premier chef de conclusions, l’annulation de la décision attaquée. En effet, dans la mesure où la chambre de recours a fondé le rejet du recours porté devant elle sur l’absence d’usage sérieux de la marque antérieure, le premier chef de conclusions, tendant à ce que le Tribunal juge que l’usage de la marque antérieure était établi, vise en réalité l’annulation de la décision attaquée.
24 L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
25 L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
Sur la recevabilité des éléments de preuve produits pour la première fois devant le Tribunal
26 La requérante produit, pour la première fois devant le Tribunal, des factures adressées à Nidera General Merchandise, établie à Rotterdam, et à la société JSC Vijera, établie à Zibu (Lituanie), comportant l’élément verbal « jumex » et concernant la vente de lots de canettes de nectar et de jus JUMEX, à savoir les annexes A.8, A.9 et A.10 de la requête.
27 Elle allègue que ces nouveaux éléments de preuve, qui visent à dissiper les doutes au sujet de l’usage réel et sérieux de la marque antérieure dans l’Union, complètent les éléments déjà versés au dossier au cours de la procédure administrative ainsi que les éléments que la chambre de recours a rejetés pour présentation tardive.
28 À cet égard, il convient de rappeler que le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 65 du règlement n° 207/2009.
29 Dès lors, la fonction du Tribunal n’est pas celle de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui [arrêts du 19 novembre 2008, Rautaruukki/OHMI (RAUTARUUKKI), T‑269/06, EU:T:2008:512, point 20, et du 25 juin 2010, MIP Metro/OHMI – CBT Comunicación Multimedia (Metromeet), T‑407/08, Rec, EU:T:2010:256, point 16].
30 Dans ces conditions, il convient de déclarer irrecevables les annexes mentionnées au point 26 ci-dessus, qui n’ont pas été produites par la requérante dans le cadre de la procédure administrative. Le contrôle de légalité se fera donc au regard des seuls éléments qui ont été communiqués lors de la procédure administrative et qui figurent au dossier de l’OHMI [voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2014, Łaszkiewicz/OHMI – Capital Safety Group EMEA (PROTEKT), T‑576/12, EU:T:2014:667, point 25].
Sur le fond
31 À l’appui de son recours, la requérante soulève deux moyens, le premier, tiré d’une violation de l’article 42, paragraphe 2, du règlement nº 207/2009, et, le second, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, du règlement nº 207/2009.
32 Le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 42, paragraphe 2, du règlement nº 207/2009, se divise en deux branches. La première branche porte sur les documents produits par la requérante dans le délai imparti par la division d’opposition. La seconde branche porte sur les documents produits par la requérante après l’expiration du délai imparti par la division d’opposition et rejetés par la chambre de recours.
Sur la première branche, portant sur les documents produits par la requérante dans le délai imparti par la division d’opposition
33 La requérante soutient, en substance, que la décision de la chambre de recours est entachée d’une erreur de droit dans l’appréciation de la preuve d’usage de la marque antérieure et dans l’interprétation et l’application des dispositions qui régissent celle-ci.
34 En effet, les preuves qu’elle aurait produites au cours de la procédure d’opposition devant la division d’opposition, à savoir quatre factures correspondant à de nombreuses ventes de canettes de 335 ml de différents nectars de fruits, comportant l’élément verbal « jumex », à une société néerlandaise, Nidera General Merchandise, des extraits du catalogue des produits JUMEX qui faisaient apparaître lesdites canettes de jus et de nectars de la marque antérieure dont la vente était visée par les factures et une coupure de presse qui illustrerait la politique commerciale de Jumex visant à s’étendre, notamment, au territoire de l’Union, attesteraient la nature, la portée, la durée et le lieu de l’usage de la marque antérieure.
35 Concernant, en particulier, le rapport entre les factures et les extraits du catalogue des produits JUMEX, la requérante souligne qu’il est possible d’établir un « lien évident », d’une part, entre les produits qui figurent dans ces extraits comme appartenant à la gamme « jus et nectar jumex » et les canettes photographiées qui apparaissent également dans lesdits extraits et, d’autre part, entre ces extraits et les produits visés dans les factures, lesquels produits sont tous indiqués sous la référence « jumex canette 335 ml ».
36 Par conséquent, selon la requérante, la chambre de recours a décidé, a tort, au point 30 de la décision attaquée, que de tels éléments ne prouvaient pas l’usage sérieux de la marque antérieure.
37 S’agissant des indications et des preuves à produire afin de prouver l’usage sérieux de la marque antérieure, la requérante précise que le rapport entre les factures et les extraits de son catalogue commercial, disponible sur son site Internet, permet de conclure que la marque antérieure a été utilisée pour des jus de différents fruits conditionnés dans des canettes de 335 ml, que les opérations de commercialisation ont eu lieu entre le 30 avril 2004 et le 31 janvier 2008, que les ventes ont été effectuées à une entreprise établie à Rotterdam et que les ventes ont atteint un volume total de 8 279 unités pour un montant de 48 846,70 USD.
38 La requérante soutient également que les doutes de la chambre de recours (points 32 et 33 de la décision attaquée) sur le point de savoir si les produits facturés à la société néerlandaise Nidera General Merchandise étaient entrés sur le territoire de l’Union de sorte qu’il puisse être considéré qu’ils avaient été commercialisés sur le territoire de l’Union ou si, au contraire, ces derniers avaient été réexpédiés par cette société dans un pays tiers, en traversant le territoire de l’Union sous le régime douanier de transit externe, se fondent uniquement sur des extraits du site Internet de cette société fournis par l’intervenante. Dans ces extraits, Nidera General Merchandise déclare que ses opérations commerciales étaient destinées aux pays d’Afrique occidentale.
39 La requérante conteste la valeur probatoire de ces extraits de site Internet, étant donné qu’ils ont été obtenus au moment où ils ont été versés au dossier, aux environs du 5 août 2011, c’est-à-dire huit ans après le début de la période pertinente pour la preuve de l’usage de la marque antérieure et trois ans après la fin de celle-ci, et que l’activité commerciale de ladite société et son champ d’action géographique avaient pu varier considérablement.
40 La requérante ajoute que, même à supposer que, au cours de la période pertinente, les opérations commerciales de Nidera General Merchandise étaient principalement ou exclusivement destinées aux pays d’Afrique occidentale, les factures adressées à cette dernière constitueraient elles-mêmes des indices solides qui permettraient de conclure qu’elle avait acheté des nectars de fruits désignés par la marque antérieure et les avait introduit sur le territoire de l’Union, bien qu’elle les aurait ensuite réexportés en Afrique, ce qui impliquerait également un usage sérieux de la marque, conformément à l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous b), du règlement nº 207/2009. À cet égard, étant donné que ladite société apparaîtrait comme le destinataire sur les factures, les produits auxquels ces dernières se rapportaient ne pouvaient pas être déclarés aux douanes de l’Union sous le régime de transit externe, comme d’ailleurs la décision attaquée le laissait entendre.
41 L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.
42 Selon une jurisprudence constante, il ressort de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009, lu à la lumière du considérant 10 du règlement n° 207/2009, et de la règle 22, paragraphe 3, du règlement n° 2868/95 que la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux pour être opposable à une demande de marque communautaire consiste à limiter les conflits entre deux marques, à moins qu’il n’existe un juste motif économique à l’absence d’usage sérieux de la marque antérieure découlant d’une fonction effective de celle-ci sur le marché. En revanche, lesdites dispositions ne visent ni à évaluer la réussite commerciale ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [voir arrêt du 17 janvier 2013, Reber/OHMI – Wedi & Hofmann (Walzer Traum), T‑355/09, EU:T:2013:22, point 25et jurisprudence citée].
43 Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (voir, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, Rec, EU:C:2003:145, point 43). De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur [arrêt du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, Rec, EU:T:2004:225, point 39 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt Ansul, précité, EU:C:2003:145, point 37].
44 L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque (arrêt VITAFRUIT, point 43 supra, EU:T:2004:225, point 40 ; voir également, par analogie, arrêt Ansul, point 43 supra, EU:C:2003:145, point 43).
45 Quant à l’importance de l’usage qui a été fait de la marque antérieure, il convient de tenir compte, notamment, du volume commercial de l’ensemble des actes d’usage, d’une part, et de la durée de la période pendant laquelle des actes d’usage ont été accomplis ainsi que de la fréquence de ces actes, d’autre part [arrêts VITAFRUIT, point 43 supra, EU:T:2004:225, point 41, et du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, Rec, EU:T:2004:223, point 35].
46 Pour examiner, dans un cas d’espèce, le caractère sérieux de l’usage d’une marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte. Ainsi, un faible volume de produits commercialisés sous ladite marque peut être compensé par une forte intensité ou une grande constance dans le temps de l’usage de cette marque et inversement (arrêts VITAFRUIT, point 43 supra, EU:T:2004:225, point 42, et HIPOVITON, point 45 supra, EU:T:2004:223, point 36).
47 C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il convient d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les pièces produites par la requérante ne suffisaient pas dans leur ensemble à démontrer l’usage sérieux de la marque antérieure dans l’Union, au sens de l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009.
48 La demande de marque communautaire présentée par l’intervenante ayant été publiée le 11 août 2008, la période de cinq années visée à l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 s’étend, ainsi que l’a, à juste titre, relevé la chambre de recours au point 8 de la décision attaquée, du 11 août 2003 au 10 août 2008, ce que la requérante ne conteste pas.
49 S’agissant, en premier lieu, de l’article du journal en ligne du Salvador, la chambre de recours a, à juste titre, estimé, au point 36 de la décision attaquée, qu’il s’agissait du matériel promotionnel indiquant uniquement, que l’Europe est l’un des marchés potentiels de la requérante. En effet, l’intention et l’intérêt à exporter vers l’Europe qui sont exprimés dans cet article ne prouvent aucunement que des jus de fruits aient effectivement été exportés vers l’Union.
50 Or, l’usage sérieux d’une marque ne peut pas être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné [arrêts du 12 décembre 2002, Kabushiki Kaisha Fernandes/OHMI – Harrison (HIWATT), T‑39/01, Rec, EU:T:2002:316, point 47, et du 6 octobre 2004, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Krafft (VITAKRAFT), T‑356/02, Rec, EU:T:2004:292, point 28].
51 S’agissant, en second lieu, de la relation entre les extraits du site Internet de la requérante et les quatre factures adressées à la société Nidera General Merchandise, la requérante soutient qu’il est possible d’établir un lien, d’une part, entre les produits et les photographies des canettes qui figurent dans ces extraits et, d’autre part, entre ces produits et ceux mentionnés dans les factures.
52 Il y a lieu de constater que lesdits extraits mentionnent expressément, sur la première page, la marque antérieure et comportent l’image d’un emballage du produit identifié par cette marque précédée par l’expression « nuestras marcas » (« nos marques », en français).
53 Sur la deuxième page desdits extraits, il apparaît l’expression « nombre del producto : Jumex » (« nom du produit : Jumex », en français), la marque antérieure étant mise en évidence, et les produits protégés par celle-ci, c’est-à-dire, « jugos y néctares Jumex » (« jus et nectars jumex », en français), auxquels les factures adressées à la société Nidera General Merchandise font référence.
54 Quant aux factures, il y a lieu de constater que celles-ci mentionnent le nom du produit, lequel est un des éléments les plus importants des factures en général [voir, en ce sens, arrêt du 16 septembre 2013, Avery Dennison/OHMI – Dennison-Hesperia (AVERY DENNISON), T‑200/10, EU:T:2013:467, point 43].
55 Or, dans le cas d’espèce, le nom du produit qui figure dans les factures correspond au nom du produit qui apparaît dans les extraits du site Internet de la requérante, de sorte qu’un lien entre ces deux éléments peut être aisément établi.
56 Ces constatations ne sauraient être remises en cause par le fait que les extraits du site Internet de la requérante ont été imprimés le 15 mai 2011, c’est-à-dire, en dehors de la période pertinente, ainsi que le fait valoir l’intervenante dans ses écritures.
57 À cet égard, il convient de rappeler que l’appréciation du caractère sérieux de l’usage au cours de la période pertinente peut, le cas échéant, tenir compte d’éventuelles circonstances postérieures à cette présentation. De telles circonstances peuvent permettre de confirmer ou de mieux apprécier la portée de l’utilisation de la marque au cours de la période pertinente ainsi que les intentions réelles du titulaire au cours de la même période [voir, en ce sens, arrêt du 13 avril 2011, Bodegas y Viñedos Puerta de Labastida/OHMI – Unión de Cosecheros de Labastida (PUERTA DE LABASTIDA), T‑345/09, EU:T:2011:173, point 32 et jurisprudence citée].
58 En l’espèce, les factures présentées par la requérante sont datées entre le 30 avril 2004 et le 31 janvier 2008, soit au cours de la période pertinente (voir point 48 ci-dessus) tandis que les extraits du site Internet de la requérante ne font que corroborer et illustrer l’information contenue dans ces factures. Il s’agit en effet d’un support visuel visant à démontrer de quelle façon la marque antérieure avait été apposée sur les emballages. Par conséquent, le fait que les extraits du site Internet de la requérante ont été imprimés après la période pertinente n’a pas d’impact, en l’espèce, sur la force probante des éléments de preuve présentés par la requérante. En outre, le fait que les extraits du site Internet de la requérante ont été imprimés le 15 mai 2011 s’explique aisément par le fait que la requérante ne pouvait pas préparer les éléments de preuve en vue de prouver l’usage de la marque antérieure avant que l’intervenante ne l’exige. Les extraits du site Internet de la requérante ne pouvaient donc pas être imprimés au cours de la période pertinente se situant avant la présentation de la demande de marque à l’OHMI par l’intervenante.
59 C’est donc à tort que la chambre de recours a considéré, aux points 29 et 30 de la décision attaquée, que les documents présentés par la requérante dans le délai imparti par la division d’opposition ne contenaient pas d’indication suffisante sur la nature de l’usage de la marque antérieure.
60 En revanche, s’agissant, en troisième lieu, du lieu de l’usage de la marque antérieure, le seul fait que les factures sont adressées à une société commerciale établie à Rotterdam n’est pas suffisant pour prouver l’usage de la marque sur le territoire de l’Union.
61 Force est de constater que, en l’espèce, la requérante n’a pas prouvé l’entrée des produits, mentionnés dans les factures, sur le territoire de l’Union, c’est-à-dire, qu’elle n’a pas démontré que lesdits produits avaient fait l’objet des formalités d’importation et avaient donné lieu à la perception des droits de douane. À cet égard, à l’instar de l’intervenante, il y a lieu d’estimer que, si ces produits étaient entrés sur le territoire de l’Union, en devenant des marchandises européennes, la requérante en aurait aisément rapporté la preuve par la présentation des documents concernant leur entrée aux douanes européennes.
62 Il convient de rejeter également les arguments de la requérante selon lesquels le seul fait que Nidera General Merchandise, dont le siège se trouve sur le territoire de l’Union, est non seulement l’acheteur, mais également le destinataire des marchandises suffit à démontrer l’usage sérieux de la marque antérieure sur le territoire de l’Union, indépendamment du fait que les marchandises pourraient être, par la suite, réexportés en Afrique. En effet, la simple importation de la marchandise sur le territoire de l’Union en vue d’une réexportation en Afrique n’est pas susceptible de créer ou de maintenir les parts de marché au profit des produits couverts par la marque antérieure conformément à la jurisprudence citée au point 44 ci-dessus.
63 Quant à une éventuelle mise en libre pratique ou à la commercialisation des produits visés par les factures en question sur le territoire de l’Union, aucune preuve n’a été apportée par la requérante.
64 Partant, il y a lieu de constater que c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré, aux points 31 à 33 de la décision attaquée, que la requérante n’avait pas prouvé l’usage sérieux de la marque antérieure sur le territoire de l’Union.
65 Eu égard aux considérations qui précédent, l’erreur commise par la chambre de recours, qui résiderait dans la considération qu’il n’était pas possible d’établir un lien entre les factures et les extraits du site Internet de la requérante concernant la nature de l’usage sérieux de la marque antérieure, n’est, en tout état de cause, pas de nature à infirmer la décision attaquée.
66 Partant, la première branche du premier moyen doit être rejetée comme non fondée.
Sur la seconde branche, portant sur les documents produits par la requérante après l’expiration du délai imparti par la division d’opposition et rejetés par la chambre de recours
67 La requérante soutient que les documents produits par elle après l’expiration du délai imparti par la division d’opposition démontrent l’usage sérieux de la marque antérieure pour la vente de jus de fruits à destination de l’Union. Parmi ces éléments figurent, en premier lieu, des factures adressées par la requérante à des sociétés établies en Espagne, en France, en Lituanie et au Royaume-Uni, dans lesquelles le logo du groupe JUMEX apparaît de manière visible sur l’en-tête et, en second lieu, des étiquettes d’emballages de différentes capacités. Ainsi, il serait possible d’établir le lien entre les produits mentionnés sur ces factures et sur ces étiquettes et de conclure à l’usage sérieux de la marque antérieure.
68 L’OHMI et l’intervenante contestent ces arguments.
69 À cet égard, selon une jurisprudence constante, il découle du libellé de l’article 76, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 que, en règle générale et sauf disposition contraire, la présentation de faits et de preuves par les parties demeure possible après l’expiration des délais auxquels se trouve subordonnée une telle présentation en application des dispositions du règlement n° 207/2009 et qu’il n’est nullement interdit à l’OHMI de tenir compte de faits et de preuves ainsi tardivement invoqués ou produits, c’est-à-dire en dehors du délai imparti par la division d’opposition et, le cas échéant, pour la première fois devant la chambre de recours [arrêt du 18 juillet 2013, New Yorker SHK Jeans/OHMI, C‑621/11 P, Rec, EU:C:2013:484, point 30 ; voir, également, arrêt du 11 décembre 2014, CEDC International/OHMI – Underberg (Forme d’un brin d’herbe dans une bouteille), T‑235/12, Rec, EU:T:2014:1058, point 44 et jurisprudence citée].
70 En précisant que l’OHMI « peut » décider de ne pas tenir compte de faits et preuves tardivement invoqués ou produits, l’article 76, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 investit l’OHMI d’un large pouvoir d’appréciation à l’effet de décider, tout en motivant sa décision sur ce point, s’il y a lieu ou non de prendre ceux-ci en compte (voir arrêt Forme d’un brin d’herbe dans une bouteille, point 69 supra, EU:T:2014:1058, point 45 et jurisprudence citée).
71 En l’espèce, la chambre de recours a considéré, aux points 43 et 49 de la décision attaquée, que, eu égard au stade de la procédure auquel était intervenu cette production tardive de documents et aux circonstances qui l’entouraient, il convenait de s’opposer à la prise en compte desdits documents. En outre, la chambre de recours a estimé que, en toute hypothèse, les éléments de preuve présentés tardivement n’étaient réellement pas pertinents en l’espèce.
72 Notamment, elle a indiqué, au point 42 de la décision attaquée, que les éléments de preuve avaient été produits le 5 février 2014, c’est-à-dire après le délai imparti à cet effet par la division d’opposition, après la clôture de la procédure devant la division d’opposition, après la présentation, par la requérante, des observations en réponse à l’exposé des motifs présenté par l’intervenante au cours de la procédure devant la chambre de recours et également après avoir présenté, à l’invitation du rapporteur de la chambre de recours, des observations relatives à la preuve de l’usage de sa marque antérieure sur le territoire de l’Union. À cet égard, la chambre de recours a observé, au point 40 de la décision attaquée, que la requérante avait bien été invitée de manière expresse par le rapporteur à clarifier ses allégations et les preuves déjà produites pour déterminer si les produits facturés à Nidera General Merchandising avaient effectivement été mis à disposition sur le territoire de l’Union, mais qu’elle n’avait pas présenté de preuves satisfaisantes en ce sens. En outre, la chambre de recours a aussi considéré que le fait que les parties aient entamé une procédure de médiation ne justifiait pas, selon elle, la prise en considération desdits documents.
73 Il y a lieu de considérer que, conformément à la jurisprudence citée au point 70 ci-dessus, la chambre de recours, au vu des circonstances de l’espèce, a exercé, de manière effective, son pouvoir d’appréciation aux fins de décider, de manière motivée et en tenant dûment compte de l’ensemble des circonstances pertinentes, s’il y avait lieu ou non de prendre en compte les preuves supplémentaires produites tardivement devant elle aux fins de rendre la décision qu’elle était appelée à prendre (voir, en ce sens, arrêt du 26 septembre 2013, Centrotherm Systemtechnik/OHMI et centrotherm Clean Solutions, C‑610/11 P, Rec, EU:C:2013:593, point 110).
74 De plus, il convient d’observer que les documents que la requérante a présenté tardivement ne comportent pas, de prime abord, d’élément de preuve permettant de conclure à l’introduction des produits visés par ces documents sur le territoire de l’Union. La chambre de recours était donc fondée à les considérer comme n’étant pas réellement pertinents en l’espèce.
75 Il résulte de ces considérations qu’aucun élément ne permet de remettre en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les éléments de preuve produits ne pouvaient pas être pris en compte comme preuve d’usage sérieux de la marque antérieure. Partant, la seconde branche du premier moyen doit être rejetée.
76 Étant donné que la requérante n’a pas démontré un usage sérieux de la marque antérieure, il y a lieu de rejeter le premier moyen et, partant, en tout état de cause, le second moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Par voie de conséquence, le recours doit être rejeté dans son ensemble.
Sur les dépens
77 Aux termes de 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
78 La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Comercializadora Eloro, SA est condamnée aux dépens.
Prek | Labucka | Kreuschitz |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 décembre 2015
Signatures
* Langue de procédure : lʼespagnol.
© European Union
The source of this judgment is the Europa web site. The information on this site is subject to a information found here: Important legal notice. This electronic version is not authentic and is subject to amendment.
BAILII: Copyright Policy | Disclaimers | Privacy Policy | Feedback | Donate to BAILII
URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2015/T35414.html