Groupement pastoral de Oust and Others v Commission (Order) French Text [2016] EUECJ T-663/16_CO (16 December 2016)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2016/T66316_CO.html
Cite as: EU:T:2016:759, ECLI:EU:T:2016:759, [2016] EUECJ T-663/16_CO

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ORDONNANCE DU TRIBUNAL (première chambre)

16 décembre 2016 (*)

« Recours en annulation et en indemnité – Exécution d’un projet national financé partiellement par l’Union – Lâcher d’ours organisé par une autorité nationale dans les Pyrénées centrales – Demande d’annulation du projet national – Demande d’indemnisation du préjudice subi en lien avec le lâcher d’ours – Article 126 du règlement de procédure – Incompétence manifeste »

Dans l’affaire T‑663/16,

Groupement pastoral de Oust, établi à Oust (France),

Groupement pastoral de Ustou, établi à Ustou (France),

Groupement pastoral de Montrouch, établi à Montjoie-en-Couseran (France),

Association régionale d’élevage et de développement agricole (AREDA), établie à Ayzac-Ost (France),

représentés par Me C. Klein, avocat,

parties requérantes,

contre

Commission européenne,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours tendant à faire constater une violation par l’Union européenne de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO 1992, L 206, p. 7), à l’annulation d’un projet intitulé « P[iroslife] » et à la réparation des préjudices prétendument subis,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de Mme I. Pelikánová, président, MM. P. Nihoul et J. Svenningsen (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        Selon les informations figurant dans la requête, les requérants, le Groupement pastoral de Oust, le Groupement pastoral de Ustou, le Groupement pastoral de Montrouch et l’Association régionale d’élevage et de développement agricole (AREDA), qui se présentent comme agissant en l’espèce « au nom de leurs adhérents propriétaires ou utilisateurs soit des espaces pastoraux pyrénéens frontaliers de l’Espagne, soit des espaces pastoraux transfrontaliers au[x] terme[s] d’accords ancestraux », ont découvert qu’un lâcher d’ours avait été organisé dans le cadre du projet intitulé « P[iroslife] – Consolidation of a bear population in a fragmented management territory : Central Pyrenees », référencé LIFE13 NAT/ES/001394 (ci-après le « projet Piroslife »).

2        Le projet Piroslife, coordonné par le Departament d’Agricultura, Ramaderia, Pesca, Alimentació i Medi natural de la Generalidad de Cataluña (ministère de l’Agriculture, de l’Élevage, de la Pêche, de l’Alimentation et de l’Environnement de la Généralité de Catalogne, Espagne), une autorité régionale espagnole, disposerait d’un budget de 2 435 639 euros, auquel l’Union européenne contribuerait à hauteur de 1 826 729 euros, au titre du règlement (UE) n° 1293/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 11 décembre 2013, relatif à l’établissement d’un programme pour l’environnement et l’action pour le climat (LIFE) et abrogeant le règlement (CE) n° 614/2007 (JO 2013, L 347, p. 185).

3        Selon la description du projet Piroslife fournie par les requérants, l’une des interventions spécifiques prévues dans le cadre de ce projet consistait à introduire dans la population indigène des Pyrénées centrales un ours mâle provenant d’un autre territoire et offrant une bonne variabilité génétique.

 Procédure et conclusions des requérants

4        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 septembre 2016, les requérants ont introduit le présent recours.

5        Les requérants concluent formellement à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater que l’Union a violé les dispositions de l’article 22, sous a), de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO 1992, L 206, p. 7) ;

–        annuler le projet Piroslife ;

–        condamner l’Union à réparer les préjudices prétendument subis.

6        À cet égard, même si la requête vise formellement « l’Union européenne » en tant que défendeur, le Tribunal estime, au regard de la teneur de la requête, que les requérants ont entendu viser la Commission européenne en tant qu’institution défenderesse représentant l’Union en l’espèce, notamment en raison du rôle joué par celle-ci dans la détermination des projets, tels que le projet Piroslife, pouvant donner lieu à un financement par le budget de l’Union au titre du programme pour l’environnement et l’action pour le climat établi par le règlement n° 1293/2013 (ci-après le « programme LIFE »).

7        Par ailleurs et en tout état de cause, selon une jurisprudence constante, lorsque la responsabilité de l’Union est engagée en raison de l’acte ou du comportement de l’une de ses institutions, elle est représentée devant le Tribunal par la ou les institutions auxquelles le fait générateur de responsabilité est reproché (voir ordonnance du 2 février 2015, Gascogne Sack Deutschland et Gascogne/Union européenne, T‑577/14, non publiée, EU:T:2015:80, point 23 et jurisprudence citée).

8        Or, en l’espèce, les requérants semblent établir un lien entre les préjudices qu’ils ont prétendument subis du fait du lâcher d’ours organisé par les autorités espagnoles et le programme LIFE géré par la Commission.

9        Par conséquent, dans le cadre du présent recours dirigé contre l’Union, il y a lieu de considérer que celle-ci doit être représentée par la Commission.

 En droit

10      Aux termes de l’article 126 du règlement de procédure du Tribunal, lorsque le Tribunal est manifestement incompétent pour connaître d’un recours, il peut, sans poursuivre la procédure, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.

11      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de l’article 126 du règlement de procédure, de statuer sans poursuivre la procédure.

12      Par leur premier chef de conclusions, les requérants tendent à obtenir du Tribunal qu’il constate que l’Union, en l’occurrence par l’entremise de la Commission, a violé l’article 22, sous a), de la directive 92/43, lequel prévoit que, dans la mise en application des dispositions de cette directive, les États membres « étudient l’opportunité de réintroduire des espèces de l’annexe IV, indigènes à leur territoire », laquelle mentionne, sous a), l’ursus arctos, à savoir l’ours brun, en tant qu’espèce prioritaire.

13      À cet égard, force est toutefois de rappeler que le Tribunal n’est pas compétent pour prononcer des arrêts déclaratoires (arrêt du 15 décembre 2005, Infront WM/Commission, T‑33/01, EU:T:2005:461, point 171, et ordonnance du 31 mars 2014, Herzog/Slovaquie et Cour européenne des droits de l’homme, T‑666/13, non publiée, EU:T:2014:227, point 9).

14      Il s’ensuit que le premier chef de conclusions doit être rejeté pour incompétence manifeste du Tribunal.

15      S’agissant du deuxième chef de conclusions, tendant à l’annulation du projet Piroslife en tant que tel, il convient de rappeler que le juge de l’Union n’est pas compétent pour statuer sur la légalité d’un acte adopté par une autorité nationale (arrêts du 3 décembre 1992, Oleificio Borelli/Commission, C‑97/91, EU:C:1992:491, point 9, et du 15 décembre 1999, Kesko/Commission, T‑22/97, EU:T:1999:327, point 83). En effet, les compétences du Tribunal sont celles énumérées à l’article 256 TFUE, tel que précisé par l’article 51 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, dispositions en application desquelles le Tribunal est compétent pour connaître des recours introduits, au titre de l’article 263 TFUE, à l’encontre des seuls actes des institutions, organes ou organismes de l’Union.

16      Or, en l’espèce et ainsi qu’il ressort des pièces du dossier, l’acte dont les requérants demandent l’annulation, à savoir le projet Piroslife, n’est pas un acte d’une institution, d’un organe ou d’un organisme de l’Union mais celui d’une autorité nationale, à savoir le ministère de l’Agriculture, de l’Élevage, de la Pêche, de l’Alimentation et de l’Environnement de la Généralité de Catalogne, qui est chargé de la coordination du projet Piroslife.

17      Il s’ensuit que le deuxième chef de conclusions doit également être rejeté pour incompétence manifeste du Tribunal.

18      En ce qui concerne le troisième chef de conclusions, le Tribunal constate que, par celui-ci, les requérants demandent au Tribunal de condamner l’Union au paiement de dommages et intérêts pour les préjudices qui leur auraient été prétendument occasionnés du fait du lâcher d’ours organisé dans le cadre du projet Piroslife.

19      À cet égard, il convient toutefois de rappeler que la compétence du Tribunal en matière de responsabilité non contractuelle, telle que prévue par l’article 268 TFUE et l’article 340, deuxième et troisième alinéas, TFUE ainsi que par l’article 188, deuxième alinéa, EA, concerne uniquement les recours en réparation de dommages causés par un acte ou un comportement imputable aux institutions, aux organes et aux organismes de l’Union ou à leurs agents dans l’exercice de leurs fonctions (voir, en ce sens, arrêt du 23 mars 2004, Médiateur/Lamberts, C‑234/02 P, EU:C:2004:174, points 49 et 59, et ordonnance du 17 juin 2015, Ségaud/France et Commission, T‑22/15, non publiée, EU:T:2015:418, point 7). En revanche, les dommages causés par les autorités nationales ne sont susceptibles de mettre en jeu que la responsabilité de ces autorités et les juridictions nationales demeurent seules compétentes pour en assurer la réparation (voir arrêt du 7 juillet 1987, L’Étoile commerciale et CNTA/Commission, 89/86 et 91/86, EU:C:1987:337, point 17 et jurisprudence citée).

20      Or, en l’espèce, les préjudices invoqués par les requérants trouvent leur origine dans un acte ou un comportement d’une autorité nationale et le Tribunal n’est dès lors pas compétent pour en assurer la réparation sur le fondement de l’article 268 TFUE et de l’article 340, deuxième et troisième alinéas, TFUE.

21      En tout état de cause, il convient d’observer que, même à supposer que, par leurs conclusions indemnitaires, les requérants cherchent à obtenir réparation d’un préjudice qui serait imputable à l’acte ou au comportement de la Commission, en ce qu’elle aurait partiellement financé le projet en cause, force est de constater que ces conclusions ne sont pas dûment étayées au regard des exigences de l’article 76, sous d), du règlement de procédure.

22      En effet, la requête n’identifie pas clairement et de manière non équivoque, cohérente et compréhensible les éléments constitutifs des préjudices allégués ni l’existence d’un lien de causalité entre un quelconque comportement prétendument illégal de la Commission et ces préjudices. Par ailleurs, les requérants ne fournissent aucune indication chiffrée permettant de quantifier les prétendus préjudices qui leur auraient été occasionnés en l’espèce.

23      Il s’ensuit que le troisième chef de conclusions doit être rejeté pour incompétence manifeste du Tribunal et, en tout état de cause, comme manifestement irrecevable. Partant, il convient de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

24      La présente ordonnance étant adoptée avant la signification de la requête à la Commission et avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il suffit de décider que les requérants supporteront leurs propres dépens, conformément à l’article 133 du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Le Groupement pastoral de l’Oust, le Groupement pastoral de Ustou, le Groupement pastoral de Montrouch et l’Association régionale d’élevage et de développement agricole (AREDA) supporteront leurs propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 16 décembre 2016.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

I. Pelikánová


* Langue de procédure : le français.

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