Federal Express Europe (Judgment) French Text [2017] EUECJ C-273/16 (04 October 2017)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2017/C27316.html
Cite as: ECLI:EU:C:2017:733, EU:C:2017:733, [2017] EUECJ C-273/16

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ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

4 octobre 2017 (*)

« Renvoi préjudiciel – Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Sixième directive 77/388/CEE – Directive 2006/112/CE – Exonération de la TVA – Article 86, paragraphe 1, sous b), et article 144 – Franchise de droits à l’importation des marchandises d’une valeur négligeable ou sans caractère commercial – Exonération des prestations de services se rapportant à l’importation de biens – Réglementation nationale assujettissant à la TVA les frais de transport de documents et de biens de valeur négligeable malgré leur caractère accessoire à des biens non imposables »

Dans l’affaire C‑273/16,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Corte suprema di cassazione (Cour de cassation, Italie), par décision du 9 décembre 2015, parvenue à la Cour le 13 mai 2016, dans la procédure

Agenzia delle Entrate

contre

Federal Express Europe Inc.,

LA COUR (première chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta (rapporteur), président de chambre, MM. E. Regan, J.‑C. Bonichot, C. G. Fernlund et S. Rodin, juges,

avocat général : M. E. Tanchev,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 18 mai 2017,

considérant les observations présentées :

–        pour Federal Express Europe Inc., par Mes G. Brocchieri, G. Di Garbo, G. Polacco et B. Bagnoli, avvocati, ainsi que par Me T. Scheer, advocaat,

–        pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de MM. S. Fiorentino et E. De Bonis, avvocati dello Stato,

–        pour la Commission européenne, par M. R. Lyal ainsi que par Mmes L. Lozano Palacios et F. Tomat, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 86, paragraphe 1, sous b), et de l’article 144 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1, ci-après la « directive TVA »).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant l’Agenzia delle Entrate (administration fiscale, Italie) à Federal Express Europe Inc. (ci-après « FedEx »), filiale italienne du groupe FedEx Corporation, au sujet de la soumission à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) des frais de transport liés à l’importation de biens exonérés de la TVA.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

 Le règlement (CEE) n° 918/83

3        L’article 27 du règlement (CEE) n° 918/83 du Conseil, du 28 mars 1983, relatif à l’établissement du régime communautaire des franchises douanières (JO 1983, L 105, p. 1), tel que modifié par le règlement (CEE) n° 3357/91 du Conseil, du 7 novembre 1991 (JO 1991, L 318, p. 3) (ci-après le « règlement n° 918/83 »), est libellé dans les termes suivants :

« Sont admis en franchise de droits à l’importation, sous réserve de l’article 28, les envois composés de marchandises d’une valeur négligeable qui sont expédiés directement d’un pays tiers à un destinataire se trouvant dans la Communauté.

Par “marchandises d’une valeur négligeable”, on entend les marchandises dont la valeur intrinsèque n’excède pas 22 [euros] au total par envoi. »

 La directive 83/181/CEE

4        L’article 22 de la directive 83/181/CEE du Conseil, du 28 mars 1983, déterminant le champ d’application de l’article 14 paragraphe 1 sous d) de la directive 77/388/CEE en ce qui concerne l’exonération de la taxe sur la valeur ajoutée de certaines importations définitives de biens (JO 1983, L 105, p. 38), telle que modifiée par la directive 88/331/CEE du Conseil, du 13 juin 1988 (JO 1988, L 151, p. 79) (ci-après la « directive 83/181 »), prévoyait :

« Sont admises en exonération les importations de biens dont la valeur globale n’excède pas 10 [euros]. Les États membres peuvent admettre en exonération les importations de biens dont la valeur globale est supérieure à 10 [euros] et n’excède pas 22 [euros].

Toutefois, les États membres peuvent exclure de l’exonération prévue au premier alinéa première phrase les biens importés dans le cadre d’une vente par correspondance. »

5        La directive 83/181 a été abrogée par la directive 2009/132/CE du Conseil, du 19 octobre 2009, déterminant le champ d’application de l’article 143, points b) et c), de la directive 2006/112 en ce qui concerne l’exonération de la taxe sur la valeur ajoutée de certaines importations définitives de biens (JO 2009, L 292, p. 5). L’article 23 de la directive 2009/132 a repris en substance le contenu de l’article 22 de la directive 83/181.

 La directive 2006/79/CE

6        Les considérants 2 et 3 de la directive 2006/79/CE du Conseil, du 5 octobre 2006, relative aux franchises fiscales applicables à l’importation des marchandises faisant l’objet de petits envois sans caractère commercial en provenance de pays tiers (JO 2006, L 286, p. 15), énoncent :

« (2)      Il convient d’exonérer des taxes sur le chiffre d’affaires et des accises l’importation de petits envois sans caractère commercial en provenance de pays tiers.

(3)      À cet effet, pour des raisons pratiques, les limites dans lesquelles une telle franchise est à appliquer devraient, dans toute la mesure du possible, être les mêmes que celles prévues pour le régime communautaire de franchises douanières par le [règlement n° 918/83]. »

7        L’article 1er de cette directive est libellé comme suit :

« 1.      Les marchandises faisant l’objet de petits envois sans caractère commercial en provenance d’un pays tiers, par un particulier à destination d’un autre particulier se trouvant dans un État membre, bénéficient, à l’importation, d’une franchise des taxes sur le chiffre d’affaires et des accises.

2.      Aux fins du paragraphe 1, on entend par “petits envois sans caractère commercial”, les envois qui, à la fois :

a)      présentent un caractère occasionnel ;

b)      contiennent exclusivement des marchandises réservées à l’usage personnel ou familial des destinataires, ces marchandises ne devant traduire, par leur nature ou leur quantité, aucune préoccupation d’ordre commercial ;

c)      sont constitués de marchandises dont la valeur globale n’est pas supérieure à 45 [euros] ;

d)      sont adressés par l’expéditeur au destinataire sans paiement d’aucune sorte. »

 La directive TVA

8        L’article 85 de la directive TVA, qui figure au chapitre 4, relatif aux importations de biens, du titre VII de celle-ci, lui-même intitulé « Base d’imposition », dispose :

« Pour les importations de biens, la base d’imposition est constituée par la valeur définie comme la valeur en douane par les dispositions communautaires en vigueur. »

9        L’article 86 de cette directive, qui figure également à ce chapitre 4, énonce, à son paragraphe 1 :

« Sont à comprendre dans la base d’imposition, dans la mesure où ils n’y sont pas déjà compris, les éléments suivants :

a)      les impôts, droits, prélèvements et autres taxes qui sont dus en dehors de l’État membre d’importation, ainsi que ceux qui sont dus en raison de l’importation, à l’exception de la TVA à percevoir ;

b)      les frais accessoires, tels que les frais de commission, d’emballage, de transport et d’assurance intervenant jusqu’au premier lieu de destination des biens sur le territoire de l’État membre d’importation, ainsi que ceux découlant du transport vers un autre lieu de destination se trouvant dans la Communauté, si ce dernier lieu est connu au moment où intervient le fait générateur de la taxe. »

10      L’article 143 de ladite directive, figurant dans le chapitre 5, intitulé « Exonérations à l’importation », du titre IX de celle-ci, lui-même intitulé « Exonérations », prévoit :

« Les États membres exonèrent les opérations suivantes :

a)      les importations définitives de biens dont la livraison par des assujettis est, en tout état de cause, exonérée sur leur territoire respectif ;

b)      les importations définitives de biens régies par les directives 69/169/CEE [du Conseil, du 28 mai 1969, concernant l’harmonisation des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives aux franchises des taxes sur le chiffre d’affaires et des accises perçues à l’importation dans le trafic international de voyageurs (JO 1969, L 133, p. 6)], [83/181] et [2006/79] ;

[...] »

11      Aux termes de l’article 144 de la directive TVA, qui figure dans le même chapitre :

« Les États membres exonèrent les prestations de services se rapportant à l’importation de biens et dont la valeur est incluse dans la base d’imposition conformément à l’article 86, paragraphe 1, [sous] b). »

12      L’article 413 de la directive TVA établit :

« La présente directive entre en vigueur le 1er janvier 2007. »

 Le droit italien

13      L’article 9 du decreto del Presidente della Repubblica n. 633 – istituzione e disciplina dell’imposta sul valore aggiunto (décret du président de la République n° 633, portant création et réglementation de la taxe sur la valeur ajoutée), du 26 octobre 1972 (GURI n° 292, du 11 novembre 1972), dans sa rédaction applicable à la date des faits au principal (ci-après le « décret n° 633/72 »), prévoit :

« 1.      Constituent des services internationaux ou liés aux échanges internationaux :

[...]

2)      les transports relatifs à des biens en exportation, en transit ou en importation temporaire, ainsi que les transports relatifs à des biens en importation dont les contreparties sont soumises à la taxe conformément à l’article 69, paragraphe 1 [...]

[...] »

14      L’article 69, paragraphe 1, de ce décret énonce :

« La taxe est calculée, selon les taux indiqués à l’article 16, en fonction de la valeur des biens importés, déterminée conformément aux dispositions en matière douanière, majorée du montant des droits de douane dus, à l’exception de la TVA, ainsi que du montant des frais d’acheminement jusqu’au lieu de destination à l’intérieur du territoire de [l’Union] qui figure sur le document de transport sous le couvert duquel les biens sont introduits sur ledit territoire. [...] »

15      Selon l’article 12, paragraphe 1, de la legge n. 115 – Disposizioni per l’adempimento degli obblighi derivanti dall’appartenenza dell’Italia all’Unione europea – Legge europea 2014 (loi n° 115, portant dispositions visant le respect des obligations découlant de l’appartenance de l’Italie à l’Union européenne – loi européenne 2014), du 29 juillet 2015 (GURI n° 178, du 3 août 2015) :

« 1.      À l’article 9, paragraphe 1, du [décret n° 633/72] et ses modifications ultérieures, le point suivant est inséré après le point 4 :

“4 bis)      les services accessoires relatifs aux petits envois sans caractère commercial et aux envois d’une valeur négligeable, au sens des directives [2006/79] et [2009/132], pour autant que les contreparties des services accessoires ont concouru à la formation de la base d’imposition au sens de l’article 69 du présent décret et alors même que celle-ci n’a pas été imposée.” »

 Les faits du litige au principal et la question préjudicielle

16      À la suite d’un contrôle fiscal effectué par la Guardia di Finanza (police douanière et financière, Italie) et de l’établissement d’un procès-verbal de constatation notifié le 18 septembre 2008, quatre avis de recouvrement ont été émis à l’encontre de FedEx concernant les services de transport entrants (inbound) opérés par celle-ci, consistant à prendre en charge les envois provenant du circuit international et à assurer la livraison ultérieure de ces envois aux destinataires sur le territoire italien.

17      En particulier, par l’avis de recouvrement relatif à l’exercice 2007, en cause au principal, l’administration fiscale a constaté que la TVA devait être majorée d’un montant de 1 913 970 euros et a, en outre, appliqué des sanctions à hauteur de 5 167 719,01 euros pour « absence de facturation d’opérations imposables » et « déclarations d’impôt inférieures aux montants dus ».

18      L’administration fiscale s’est en effet fondée sur une interprétation de l’article 9, paragraphe 1, point 2, du décret n° 633/72, lu en combinaison avec l’article 69, paragraphe 1, de ce décret, en vertu de laquelle la non-applicabilité de la TVA en douane aux importations de marchandises faisant l’objet de petits envois ne fait pas obstacle à l’assujettissement à la TVA de la contrepartie correspondant aux frais de transport relatifs à ces marchandises, et que l’exonération de la TVA pour ces frais accessoires n’est accordée que si ces frais ont déjà été soumis à la TVA en douane.

19      FedEx a saisi la Commissione tributaria provinciale di Milano (commission fiscale provinciale de Milan, Italie) d’un recours dirigé contre cet avis de recouvrement, en faisant valoir, en particulier, que l’interprétation donnée par l’administration fiscale de l’article 9, paragraphe 1, point 2, du décret n° 633/72 était dépourvue de tout fondement.

20      Par arrêt du 27 mars 2013, la Commissione tributaria provinciale di Milano (commission fiscale provinciale de Milan) a accueilli le recours introduit par FedEx.

21      Entretemps, FedEx avait saisi la Commission européenne d’une plainte en vue de l’ouverture, en application de l’article 258 TFUE, d’une procédure d’infraction à l’encontre de la République italienne, en ce qui concerne la soumission à la TVA des frais de transport de biens importés d’une valeur négligeable, qu’elle considérait comme étant non conforme à l’article 86, paragraphe 1, sous b), et à l’article 144 de la directive TVA.

22      Après l’ouverture, le 27 septembre 2012, d’une procédure d’infraction, la Commission a émis, le 1er octobre 2012, une lettre de mise en demeure, puis, le 21 novembre 2013, un avis motivé. La République italienne ayant, à la suite de cet avis, modifié l’article 9, paragraphe 1, du décret n° 633/72 dans les conditions exposées au point 15 du présent arrêt, cette procédure d’infraction a été clôturée.

23      L’arrêt de la Commissione tributaria provinciale di Milano (commission fiscale provinciale de Milan) du 27 mars 2013 a été confirmé par la Commissione tributaria regionale della Lombardia (commission fiscale régionale de Lombardie, Italie), cette dernière estimant que la position de l’administration fiscale était « manifestement contraire » à l’article 144 de la directive TVA. Celle-ci s’est pourvue en cassation devant la Corte suprema di cassazione (Cour de cassation, Italie).

24      Dans son pourvoi, l’administration fiscale soutient que l’interprétation de l’article 9, paragraphe 1, point 2, du décret n° 633/72, lu en combinaison avec l’article 69, paragraphe 1, de ce même décret, n’est pas contraire à la directive TVA, dans la mesure où, d’une part, celle-ci n’est entrée en vigueur qu’à compter du 1er janvier 2008 et, partant, n’est pas applicable au litige au principal et, d’autre part, en tout cas, ce litige ne relève du champ d’application ni de l’article 86 ni de l’article 144 de cette directive, puisque les frais en cause au principal ne présentent pas un caractère accessoire et qu’ils n’ont pas été exposés à l’occasion d’un transport international.

25      La juridiction de renvoi émet des doutes quant à la conformité de l’article 9, paragraphe 1, point 2, et de l’article 69 du décret n° 633/72 à l’article 86, paragraphe 1, sous b), et à l’article 144 de la directive TVA.

26      Dans ces circonstances, la Corte suprema di cassazione (Cour de cassation) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« Les dispositions combinées de l’article 144 et de l’article 86, paragraphe 1, de la directive TVA [correspondant à l’article 14, paragraphes 1 et 2, et à l’article 11, B, paragraphe 3, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme (JO 1977, L 145, p. 1)], peuvent-elles être interprétées en ce sens que la seule condition pour la non-imposabilité aux fins de la TVA des prestations liées consistant dans le service de transport interne dit “entrant” (‘‘inbound’’) ‒ depuis les espaces aéroportuaires jusqu’à la destination, sur le territoire de l’État membre, et sous la clause “franco destination” ‒ est que leur valeur soit incluse dans la base d’imposition, indépendamment de leur taxation effective en douane, lors de l’importation des biens, et convient-il par conséquent de considérer comme incompatible avec lesdites dispositions [de l’Union] une lecture des dispositions combinées des règles internes énoncées à l’article 9, paragraphe 1, point 2, et à l’article 69, paragraphe 1, du décret n° 633/72, dans la version applicable ratione temporis aux faits de l’espèce, en vertu de laquelle en tout état de cause et, partant, également en cas d’importations non imposables aux fins de la TVA ‒ comme en l’occurrence, s’agissant de documents et de biens d’une valeur négligeable ‒ il faut que soit remplie la condition supplémentaire exigeant leur soumission effective à la TVA (et le paiement concret de la taxe en douane) lors de l’importation desdits biens, et cela, le cas échéant, compte tenu également du caractère accessoire des services de transport par rapport aux prestations principales (importations) et de la ratio de simplification qui sous-tend l’ensemble de ces opérations ? »

 Sur la question préjudicielle

27      Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 144 de la directive TVA, lu en combinaison avec l’article 86, paragraphe 1, sous b), de celle-ci, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale telle que celle en cause au principal qui impose, pour l’application de l’exonération de la TVA aux prestations accessoires, y compris aux services de transport, non seulement que leur valeur soit incluse dans la base d’imposition, mais aussi que ces prestations aient été effectivement soumises à la TVA en douane lors de l’importation.

28      Compte tenu du fait que le gouvernement italien soutient que la directive TVA n’était pas en vigueur à l’époque des faits au principal, il convient, à titre liminaire, de déterminer le cadre juridique applicable en l’occurrence.

29      À cet égard, il résulte de l’article 413 de la directive TVA que celle-ci est entrée en vigueur le 1er janvier 2007. Quant au délai de transposition, le considérant 66 de cette directive énonce que « [l]’obligation de transposer [celle-ci] en droit national devrait être limitée aux dispositions qui constituent une modification de fond par rapport aux directives précédentes » et que « [l]’obligation de transposer les dispositions inchangées résulte des directives précédentes ».

30      Or, les articles 86 et 144 de la directive TVA correspondent, respectivement, à l’article 11, B, paragraphe 3, et à l’article 14, paragraphe 1, sous i), de la sixième directive 77/388, de telle sorte que l’obligation de transposition résulte des directives précédentes. En effet, ces dernières dispositions ont été introduites dans la sixième directive 77/388 par la directive 91/680/CEE du Conseil, du 16 décembre 1991, complétant le système commun de la taxe sur la valeur ajoutée et modifiant, en vue de l’abolition des frontières fiscales, la directive 77/388 (JO 1991, L 376, p. 1), dont l’article 3, paragraphe 1, a fixé au 1er janvier 1993 le délai de transposition desdites dispositions.

31      Il s’ensuit que, dans la mesure où, en l’occurrence, la présente question préjudicielle porte sur un avis de recouvrement émis par l’administration fiscale relatif à l’année 2007, la directive TVA est applicable ratione temporis au litige au principal.

32      La juridiction de renvoi s’interroge sur le point de savoir si la législation italienne, en subordonnant l’application de l’exonération de la TVA aux frais de transport non seulement à l’inclusion de leur valeur dans la base d’imposition, mais également à leur soumission effective à la TVA en douane lors de l’importation, est compatible avec le droit de l’Union.

33      En particulier, la question posée concerne les envois de marchandises d’une valeur négligeable ou sans valeur commerciale, lesquels, d’une part, conformément à l’article 27 du règlement n° 918/83, bénéficient d’une franchise des droits à l’importation et, d’autre part, conformément à l’article 143, sous b), de la directive TVA, sont exonérés de TVA lors de l’importation.

34      À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 143, sous b), de la directive TVA, les États membres ont l’obligation d’exonérer de la TVA les importations définitives de biens en provenance de pays tiers relevant des directives 83/181 et 2006/79. Par ailleurs, selon l’article 144 de la directive TVA, les États membres sont tenus d’exonérer les prestations de services se rapportant à l’importation de biens et dont la valeur est incluse dans la base d’imposition conformément à l’article 86, paragraphe 1, sous b), de cette directive.

35      S’agissant de la base d’imposition relative aux importations de biens, il résulte de l’article 85 de la directive TVA que celle-ci est constituée par la valeur définie comme la valeur en douane. Cette valeur doit, en tout état de cause, comprendre les éléments visés à l’article 86, paragraphe 1, sous b), de cette directive, au nombre desquels figurent, en tant que frais accessoires, les frais de transport.

36      Or, la législation italienne en vigueur à l’époque des faits au principal, notamment l’article 9 du décret n° 633/72, exigeait, pour l’application de l’exonération de la TVA aux prestations accessoires, non seulement que leur valeur soit incluse dans la base d’imposition, mais aussi leur soumission effective à la TVA en douane lors de l’importation. Selon la demande de décision préjudicielle, cette dernière exigence visait à éviter les situations de double imposition à la TVA.

37      À cet égard, il convient de rappeler que, aux fins de la TVA, chaque opération doit normalement être considérée comme distincte et indépendante, ainsi qu’il découle de l’article 1er, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la directive TVA (voir, en ce sens, arrêt du 17 janvier 2013, BGŻ Leasing, C‑224/11, EU:C:2013:15, point 29).

38      Néanmoins, il ressort également de la jurisprudence de la Cour que, dans certaines circonstances, plusieurs prestations formellement distinctes, qui pourraient être fournies séparément et ainsi donner lieu, séparément, à taxation ou à exonération, doivent être considérées comme une opération unique lorsqu’elles ne sont pas indépendantes. Il s’agit d’une opération unique, notamment, lorsque deux ou plusieurs éléments ou actes fournis par l’assujetti sont si étroitement liés qu’ils forment, objectivement, une seule prestation économique indissociable dont la décomposition revêtirait un caractère artificiel (arrêt du 16 juillet 2015, Mapfre asistencia et Mapfre warranty, C‑584/13, EU:C:2015:488, point 50).

39      À cet égard, il y a lieu de relever que l’article 86, paragraphe 1, sous b), de la directive TVA assure que la taxation de la prestation accessoire suit la taxation de la prestation principale. En effet, selon l’article 144 de cette directive, d’une part, l’opération principale exonérée correspond à celle de l’importation des biens et, d’autre part, les prestations accessoires sont les services énumérés à l’article 86, paragraphe 1, sous b), de ladite directive, ceux-ci devant, en tant que tels, suivre le sort fiscal de la prestation principale, à condition que leur valeur soit incluse dans la base d’imposition.

40      Partant, il découle d’une lecture combinée de l’article 86, paragraphe 1, sous b), et de l’article 144 de la directive TVA que, dans la mesure où les frais de transport sont inclus dans la base d’imposition de l’opération d’importation exonérée, la prestation de service accessoire doit être également exonérée de la TVA.

41      L’exigence que cette prestation de service ait été effectivement soumise à la TVA en douane, telle que prévue par la législation en cause au principal, priverait d’efficacité l’exonération visée à l’article 144 de la directive TVA, dès lors qu’une telle exigence aurait comme effet que ladite exonération ne serait jamais applicable en cas d’importations d’envois composés de marchandises d’une valeur négligeable ou sans caractère commercial, alors même que ces dernières doivent être exonérées de la TVA en vertu de l’article 143, sous b), de cette directive.

42      Or, il est de jurisprudence constante de la Cour que l’interprétation des termes employés pour désigner les exonérations doit être conforme aux objectifs poursuivis par lesdites exonérations, garantir leurs effets ainsi que respecter les exigences de la neutralité fiscale (voir, en ce sens, arrêt du 21 mars 2013, PFC Clinic, C‑91/12, EU:C:2013:198, point 23).

43      Enfin, en ce qui concerne la finalité poursuivie par l’exonération en cause au principal, le gouvernement italien soutient que cette dernière vise à éviter les situations de double imposition, expliquant que, dans le cas où les frais de transport ont été exonérés de la TVA en douane, ils devraient être soumis à la TVA, même si la contrepartie est comprise dans la base d’imposition. FedEx et la Commission estiment, en revanche, que l’objectif de l’exonération est la simplification technique et que, dès lors, l’application d’une telle exonération est indépendante de la soumission à la TVA des frais de transport en douane. En conséquence, de leur point de vue, les frais de transport afférents aux importations sont exonérés de la TVA sur la base de l’article 144 de la directive TVA, pour autant que leur valeur est incluse dans la base d’imposition.

44      La Cour a déjà reconnu, s’agissant des franchises de droits à l’importation de marchandises d’une valeur négligeable, que celles-ci visent à une simplification administrative des procédures douanières (voir, en ce sens, arrêt du 2 juillet 2009, Har Vaessen Douane Service, C‑7/08, EU:C:2009:417, point 33).

45      Dès lors que l’exonération prévue à l’article 144 de la directive TVA porte sur les mêmes biens que ceux bénéficiant d’une telle franchise, il y a lieu d’appliquer cette jurisprudence également à cet article. Partant, il peut être conclu que l’objectif de cette exonération est non pas d’éviter des situations de double imposition, mais, de nature purement technique, de simplifier l’application de l’impôt.

46      Il s’ensuit que les frais de transport afférents à l’importation définitive des biens doivent être exonérés de la TVA, pour autant que leur valeur est incluse dans la base d’imposition, alors même qu’ils n’ont pas été soumis à la TVA en douane lors de l’importation.

47      Eu égard à ces considérations, il convient de répondre à la question préjudicielle que l’article 144 de la directive TVA, lu en combinaison avec l’article 86, paragraphe 1, sous b), de cette directive, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale telle que celle en cause au principal qui prévoit, pour l’application de l’exonération de la TVA aux prestations accessoires, y compris aux services de transport, non seulement que leur valeur soit incluse dans la base d’imposition, mais aussi que ces prestations aient été effectivement soumises à la TVA en douane lors de l’importation.

 Sur les dépens

48      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :

L’article 144 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, lu en combinaison avec l’article 86, paragraphe 1, sous b), de cette directive, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale telle que celle en cause au principal qui prévoit, pour l’application de l’exonération de la taxe sur la valeur ajoutée aux prestations accessoires, y compris aux services de transport, non seulement que leur valeur soit incluse dans la base d’imposition, mais aussi que ces prestations aient été effectivement soumises à la taxe sur la valeur ajoutée en douane lors de l’importation.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.

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