Combaro v Commission (Judgment) French Text [2017] EUECJ T-752/14 (19 July 2017)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2017/T75214.html
Cite as: EU:T:2017:529, ECLI:EU:T:2017:529, [2017] EUECJ T-752/14

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ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

19 juillet 2017 (*)

« Union douanière – Accord d’association entre la Communauté européenne et la République de Lettonie – Article 239 du règlement (CEE) n° 2913/92 – Remboursement et remise de droits à l’importation – Importation de tissu de lin de Lettonie – Clause d’équité – Situation particulière – Manœuvre ou négligence manifeste – Décision de la Commission déclarant non justifiée la remise des droits à l’importation »

Dans l’affaire T‑752/14,

Combaro SA, établie à Lausanne (Suisse), représentée par Me D. Ehle, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. A. Caeiros et B.‑R. Killmann, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision C(2014) 4908 final de la Commission, du 16 juillet 2014, portant rejet d’une demande de la requérante relative à la remise de droits à l’importation d’un montant de 461 415,12 euros,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. M. Prek, président, F. Schalin (rapporteur) et Mme M. J. Costeira, juges,

greffier : Mme S. Bukšek Tomac, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 6 décembre 2016,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

 Régime applicable aux importations des textiles et accord d’association : importations de la requérante

1        La décision C(2014) 4908 final de la Commission, du 16 juillet 2014, constatant que la remise de droits à l’importation n’est pas justifiée dans un cas particulier (REM 05/2013) (ci-après la « décision attaquée »), a pour objet des droits à l’importation sur de tissu de lin qui a été importé dans l’Union européenne via l’Allemagne entre le 10 décembre 1999 et le 10 juin 2002 (ci-après la « période pertinente ») et dont l’origine préférentielle lettonne n’est pas prouvée.

2        Le tissu de lin est, en tant que textile, soumis à des restrictions d’importation. Il existait ainsi, durant la période pertinente, des mesures restrictives applicables notamment aux importations de Chine et de Russie, conformément au règlement (CEE) n° 3030/93 du Conseil, du 12 octobre 1993, relatif au régime commun applicable aux importations de certains produits textiles originaires des pays tiers (JO 1993, L 275, p. 1).

3        Les textiles d’origine préférentielle lettonne étaient exemptés des restrictions à l’importation mentionnées au point 2 ci-dessus. Cette exemption résultait de l’accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République de Lettonie, d’autre part (JO 1998, L 26, p. 3, ci-après l’« accord d’association »).

4        De même que d’autres produits d’origine préférentielle lettonne, les textiles ne bénéficiaient de l’exonération douanière que si l’importateur prouvait leur caractère originaire aux autorités douanières de l’État membre d’importation par un certificat de circulation des marchandises EUR.1 délivré par les autorités douanières lettonnes lors de l’exportation.

5        La requérante, Combaro SA, est une entreprise de négoce de textiles et autres biens établie en Suisse depuis 1978.

6        La requérante achetait du tissu de lin à deux entreprises lettonnes. Les livraisons de ces deux entreprises à la requérante étaient accompagnées de certificats de circulation des marchandises attestant que le tissu de lin fourni était d’origine préférentielle lettonne.

7        Les certificats de circulation des marchandises indiquaient comme exportateur respectivement l’une des deux entreprises lettonnes et comme importateur la requérante, mais l’Autriche en tant que pays de destination. Les lieux de délivrance indiqués sur les certificats de circulation des marchandises étaient respectivement Jelgava (Lettonie) et Bauska (Lettonie).

8        Durant la période pertinente, la requérante a ensuite importé ce tissu de lin dans l’Union. Elle a fait procéder à sa mise en libre pratique en Allemagne et a demandé, sur présentation des certificats de circulation des marchandises, dont les 51 certificats de circulation des marchandises en cause dans la présente affaire (ci-après les « certificats litigieux »), une exonération des droits à l’importation selon l’accord d’association. Les autorités douanières allemandes ont procédé au dédouanement des produits conformément à la demande de la requérante.

 Contrôle et procédure de recouvrement a posteriori

9        Le 18 juillet 2002, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) a établi un rapport sur une mission d’enquête qu’il avait effectuée en Lettonie (ci-après le « rapport de l’OLAF »). Selon le rapport de l’OLAF, l’administration douanière danoise avait fait part à l’OLAF, en février 2002, de ses doutes sur l’origine préférentielle lettonne de tissu de lin importé de Lettonie, malgré la présentation de certificats de circulation des marchandises attestant de sa provenance. Le rapport de l’OLAF précisait que, au terme de la mission d’enquête, l’OLAF et les autorités douanières lettonnes avaient constaté que les certificats de circulation des marchandises présentés pour l’importation au Danemark n’étaient pas inscrits aux registres des autorités douanières lettonnes. Il était également constaté que le fonctionnaire dont la signature figurait sur lesdits certificats avait fourni une déclaration écrite selon laquelle la signature figurant sur ces certificats n’était pas la sienne. Enfin, il était indiqué dans le rapport de l’OLAF que les investigations concernant les empreintes de cachets figurant sur les certificats en question n’étaient pas encore terminées.

10      À la suite du rapport de l’OLAF, la Commission européenne a envoyé aux États membres, le 11 septembre 2002, une communication d’assistance mutuelle demandant un contrôle de toutes les importations de tissu de lin en provenance de Lettonie.

11      Les autorités douanières allemandes ont alors demandé aux autorités douanières lettonnes un contrôle a posteriori des certificats litigieux (ci-après le « contrôle a posteriori »). Les autorités douanières lettonnes ont répondu aux demandes des autorités douanières allemandes le 7 avril, le 2 mai et le 7 mai 2003 dans les termes suivants :

« [Les] certificats [litigieux] n’ont pas été inscrits au registre des douanes. Ils n’ont pas été délivrés par les douanes lettonnes, en conséquence de quoi ils doivent être considérés comme non valables. »

12      Ces réponses étaient signées par le directeur adjoint des autorités douanières lettonnes, M. R., lequel a, ultérieurement, été condamné pénalement et fait l’objet de procédures disciplinaires pour avoir omis de recouvrer des dettes fiscales auprès d’une entreprise lettonne.

13      Les autorités douanières lettonnes ayant déclaré non valables les certificats litigieux, les autorités douanières allemandes ont considéré que les importations de tissu de lin en provenance de Lettonie de la requérante ne pouvaient plus bénéficier d’un traitement préférentiel et ont, par décision du 3 juillet 2003, décidé d’engager une procédure de recouvrement a posteriori des droits à l’importation correspondants (ci-après la « procédure de recouvrement a posteriori »). Les autorités douanières allemandes ont, en outre, engagé une procédure pénale à l’encontre de deux directeurs exécutifs de la requérante, en raison d’un soupçon de fraude aux droits à l’importation. La procédure a été classée sans suite concernant l’un d’eux et, concernant l’autre, a été poursuivie devant le Landgericht München (tribunal régional de Munich, Allemagne).

14      Entre-temps, des expertises portant sur la comparaison d’empreintes de cachets et sur les signatures ont été réalisées, à l’instigation de l’OLAF, concernant les certificats de circulation des marchandises présentés pour les importations au Danemark. Pour réaliser ces expertises, l’OLAF a dû se procurer du matériel de comparaison se trouvant en Lettonie. Il a été constaté dans les rapports d’expertise en cause que certaines empreintes de cachets étaient les mêmes que celles des cachets authentiques des autorités douanières lettonnes, alors que d’autres empreintes de cachets, par manque de matériel de référence, n’avaient pu faire l’objet que d’une évaluation générale de l’image, dont il ressortait qu’elles étaient probablement authentiques.

15      S’agissant de l’expertise portant sur les signatures, il a été constaté dans le rapport d’expertise correspondant qu’une évaluation de l’authenticité de la signature figurant sur les certificats de circulation des marchandises examinés présentait certaines difficultés, étant donné que la comparaison devait être faite sur la base de copies de cette signature, qu’il n’y avait pas de signature authentique du fonctionnaire concerné, à savoir M. O., datant de la période où les signatures avaient été faites et que la méthode consistant à demander des signatures a posteriori en vue d’une expertise posait un problème de fiabilité. Par conséquent, le rapport d’expertise a conclu que la signature figurant sur les certificats examinés était, avec une probabilité légèrement prédominante, celle de M. O.

16      Afin de défendre ses intérêts dans les procédures pendantes devant les autorités pénales et douanières allemandes, la requérante s’est adressée aux autorités douanières lettonnes et à l’OLAF. En réponse aux demandes de la requérante, les autorités douanières lettonnes ont confirmé, dans un courrier du 26 juin 2007, leur réponse du 7 mai 2003 adressée aux autorités douanières allemandes, selon laquelle les certificats litigieux « d[evaient] être considérés comme non valables », et l’OLAF a informé la requérante de l’état de ses investigations.

17      Enfin, la requérante a également adressé à la Commission une demande d’accès à la correspondance échangée entre cette dernière et les autorités douanières lettonnes. Cette demande a été partiellement rejetée. La requérante n’a pas introduit de recours contestant ce refus partiel d’accès à la correspondance en cause.

18      Le 30 avril 2009, une ordonnance du Landgericht München (tribunal régional de Munich) a mis fin à la procédure pénale à l’encontre du directeur exécutif de la requérante. Aux termes de cette ordonnance, il n’était pas possible de reprocher sans le moindre doute audit directeur d’avoir sciemment éludé des droits à l’importation. Plus précisément, il ressortait de ladite ordonnance que des irrégularités avaient peut-être été commises au sein de l’administration douanière lettonne. Le Landgericht München (tribunal régional de Munich) a aussi émis des doutes sur la volonté dudit directeur d’échapper frauduleusement aux droits à l’importation au bénéfice de la société qu’il représentait, à savoir la requérante, indépendamment de la question de savoir si les critères objectifs relatifs à l’obligation de paiement de tels droits pouvaient ou non être constatés.

19      La procédure de recouvrement a posteriori a été déférée au Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich, Allemagne). Dans ce cadre, la requérante a notamment fait valoir que sa dette devait être remise, conformément à l’article 239 du règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO 1992, L 302, p. 1, ci-après le « CDC »).

20      Par décision du 28 novembre 2012, le Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich) a constaté que, en substance, une remise des droits à l’importation dus par la requérante devait être « sérieusement » envisagée au motif, d’une part, qu’il existait des éléments permettant de considérer que les certificats litigieux avaient été sciemment délivrés à tort par les fonctionnaires des autorités douanières lettonnes et, d’autre part, que la Commission n’avait pas contrôlé de manière appropriée le respect par la Lettonie du régime préférentiel en vigueur. Le Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich) a également constaté qu’il n’y avait pas d’intention frauduleuse ou de négligence manifeste de la part de la requérante. Par conséquent, le Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich) a suspendu la procédure de recouvrement a posteriori et a enjoint aux autorités douanières allemandes de présenter à la Commission une demande de remise desdits droits.

 Procédure REM 05/2013

21      À la suite de la décision du Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich), le Bundesministerium der Finanzen (ministère fédéral des Finances, Allemagne) a prié la requérante de donner son avis et a présenté à la Commission, le 3 septembre 2013, une demande de remise des droits à l’importation au titre de l’article 239 du CDC. La Commission a alors ouvert la procédure REM 05/2013.

22      Dans le cadre de la procédure REM 05/2013, la Commission, sur le fondement de l’article 906 bis du règlement (CEE) n° 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du CDC (JO 1993, L 253, p. 1, ci-après le « règlement d’application »), et du droit d’être entendu, a informé la requérante, par lettre du 14 mars 2014, de ses objections et de son intention d’adopter une décision défavorable à son égard, en lui offrant la possibilité de présenter ses observations. La requérante a présenté des observations sur la décision envisagée à son égard par la Commission.

23      Le 16 juillet 2014, la Commission a adopté la décision attaquée.

24      Au considérant 32 de la décision attaquée, la Commission a expliqué qu’il n’existait pas de situation particulière, au sens de l’article 239 du CDC, qui serait due à un manquement des autorités douanières lettonnes, étant donné qu’elle ne pouvait pas conclure que lesdites autorités avaient participé à la délivrance des certificats litigieux.

25      La Commission a également examiné si elle avait elle-même commis un manquement dans le cadre de la surveillance de l’application correcte de l’accord d’association. Aux considérants 36 à 41 de la décision attaquée, elle a conclu que son comportement ne donnait pas lieu à une situation particulière.

26      Aux considérants 42 à 44 de la décision attaquée, la Commission a considéré que les autorités douanières allemandes ne pouvaient pas non plus se voir reprocher un manquement dans le cadre de la procédure de recouvrement a posteriori.

27      La Commission ayant conclu, au considérant 45 de la décision attaquée, qu’une remise des droits à l’importation n’était pas justifiée en l’absence d’une situation particulière au sens de l’article 239 du CDC, elle a ajouté, aux considérants 48 à 52 de la décision attaquée, que la requérante n’avait pas fait preuve de la diligence requise.

28      La décision attaquée a été notifiée à la requérante le 4 septembre 2014.

 Procédure et conclusions des parties

29      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 12 novembre 2014, la requérante a introduit le présent recours.

30      Le 17 février 2015, la Commission a fait parvenir le mémoire en défense au greffe du Tribunal.

31      Le 2 avril et le 18 mai 2015, ont été respectivement déposées au greffe du Tribunal la réplique et la duplique.

32      Le 12 octobre 2016, sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure du Tribunal, il a, par lettre du 19 octobre suivant, posé des questions écrites à la Commission, en l’invitant à y répondre avant le 3 novembre 2016. La Commission a répondu aux questions du Tribunal dans le délai imparti. Le Tribunal a notamment demandé à la Commission d’apporter des précisions sur des rapports contenant les résultats de contrôles annuels qui lui incombaient en vertu de l’accord d’association et d’indiquer dans quelles annexes déposées devant le Tribunal ils figuraient ou, le cas échéant, d’en fournir des copies. Le Tribunal a, par ailleurs, demandé à la Commission de lui fournir la communication COM(97) 402 du 23 juillet 1997 invoquée par la requérante au point 106 de la requête. Enfin, le Tribunal a demandé à la Commission si une expertise portant sur les empreintes de cachets et les signatures figurant sur les certificats litigieux avait été réalisée et d’en fournir les résultats ou, le cas échéant, d’expliquer pourquoi une telle expertise n’avait pas été réalisée.

33      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 6 décembre 2016.

34      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

35      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non-fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

36      Au soutien de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 239 du CDC.

 Sur la mise en œuvre de l’article 239, paragraphe 1, deuxième tiret, du CDC

37      La requérante fait valoir que la Commission a commis une erreur dans l’appréciation des conditions relatives à l’existence d’une situation particulière et aux circonstances n’impliquant ni manœuvre ni négligence manifeste au sens de l’article 905 du règlement d’application, lu en combinaison avec l’article 239 du CDC.

38      La Commission conteste les arguments de la requérante.

39      À titre liminaire, il convient de rappeler que l’article 905 du règlement d’application, disposition qui précise et développe la règle prévue à l’article 239 du CDC selon laquelle il peut être procédé au remboursement ou à la remise des droits à l’importation dans des situations qui résultent de circonstances n’impliquant ni manœuvre ni négligence manifeste de la part de l’intéressé, constitue une clause générale d’équité, destinée, notamment, à couvrir des situations exceptionnelles qui, en soi, ne relèvent pas de l’un des cas de figure prévus aux articles 900 à 904 du règlement d’application (arrêt du 25 février 1999, Trans-Ex-Import, C‑86/97, EU:C:1999:95, point 18). Il ressort du libellé de l’article 905 du règlement d’application que le remboursement des droits à l’importation est subordonné à la réunion de deux conditions cumulatives, à savoir, premièrement, l’existence d’une situation particulière et, deuxièmement, l’absence de négligence manifeste et de manœuvre de la part de l’intéressé (arrêt du 12 février 2004, Aslantrans/Commission, T‑282/01, EU:T:2004:42, point 53). En conséquence, il suffit que l’une des deux conditions fasse défaut pour que le remboursement des droits à l’importation doive être refusé (arrêts du 5 juin 1996, Günzler Aluminium/Commission, T‑75/95, EU:T:1996:74, point 54, et du 12 février 2004, Aslantrans/Commission, T‑282/01, EU:T:2004:42, point 53).

40      Afin de déterminer si les circonstances de l’espèce sont constitutives d’une situation particulière n’impliquant ni négligence manifeste ni manœuvre de la part de l’intéressé au sens de l’article 239 du CDC, la Commission doit apprécier l’ensemble des données de fait pertinentes (voir, en ce sens, arrêt du 15 mai 1986, Oryzomyli Kavallas et Oryzomyli Agiou Konstantinou/Commission, 160/84, EU:C:1986:205, point 16).

41      Cette obligation implique, dans un cas comme celui de l’espèce où le redevable a invoqué, à l’appui de sa demande de remboursement ou de remise des droits à l’importation, l’existence de certains manquements de la part des autorités douanières lettonnes et allemandes ainsi que de la Commission dans le cadre de l’application de l’accord d’association, que la Commission porte son appréciation, lors de l’examen de cette demande, sur l’ensemble des faits relatifs aux certificats litigieux dont elle a eu connaissance dans le cadre de sa fonction de surveillance et de contrôle de l’application correcte dudit accord (voir, en ce sens, arrêt du 25 juillet 2008, C.A.S./Commission, C‑204/07 P, EU:C:2008:446, point 90).

42      Cette conclusion est d’ailleurs confortée par l’article 904, sous c), du règlement d’application, qui prévoit qu’il n’est pas procédé au remboursement ou à la remise des droits à l’importation lorsque le « seul motif » à l’appui de la demande de remboursement ou de remise est constitué par la présentation, même de bonne foi, pour l’octroi d’un traitement tarifaire préférentiel, de documents dont il est établi ultérieurement qu’ils étaient faux, falsifiés ou non valables pour l’octroi dudit traitement. En d’autres termes, la présentation de certificats faux, falsifiés ou non valables n’est pas constitutive, en soi, d’une situation particulière au sens de l’article 239 du CDC (arrêt du 25 juillet 2008, C.A.S./Commission, C‑204/07 P, EU:C:2008:446, point 91).

43      En revanche, d’autres circonstances invoquées à l’appui d’une demande de remboursement ou de remise des droits à l’importation, telles que le contrôle déficient de la part de la Commission de l’application correcte de l’accord d’association, peuvent constituer une telle situation particulière (voir, en ce sens, arrêt du 25 juillet 2008, C.A.S./Commission, C‑204/07 P, EU:C:2008:446, point 92).

44      Or, si la Commission jouit d’une marge d’appréciation en ce qui concerne l’application de l’article 239 du CDC, elle ne saurait faire abstraction de son devoir de mettre effectivement en balance, d’une part, l’intérêt de l’Union au plein respect des dispositions de la réglementation douanière, qu’elle soit de l’Union ou liant cette dernière, et, d’autre part, l’intérêt de l’importateur de bonne foi à ne pas supporter des préjudices dépassant le risque commercial normal (arrêt du 25 juillet 2008, C.A.S./Commission, C‑204/07 P, EU:C:2008:446, point 93).

45      Cette mise en balance sous-tend l’économie de l’article 239 du CDC, qui constitue une clause générale d’équité. En conséquence, lors de l’examen d’une demande de remboursement ou de remise des droits à l’importation, la Commission ne saurait valablement se contenter d’évaluer le comportement et les agissements de l’importateur et de l’exportateur. Elle doit également tenir compte, notamment, de l’incidence de son propre comportement sur la situation concrète de l’espèce, dans le cadre de son devoir de surveillance et de contrôle (arrêt du 25 juillet 2008, C.A.S./Commission, C‑204/07 P, EU:C:2008:446, point 94).

46      Les conditions de l’article 239 du CDC étant cumulatives, il y a lieu d’examiner, d’abord, la première condition, relative à l’existence d’une situation particulière, et, ensuite, si cela s’avère nécessaire, la seconde condition, relative à l’absence de manœuvre ou de négligence manifeste.

 Sur la condition relative à l’existence d’une situation particulière

47      La requérante a divisé la première branche du moyen unique, tirée de la violation de la condition relative à l’existence d’une situation particulière, en plusieurs griefs. Cependant, le Tribunal estime opportun de traiter ces griefs conjointement.

48      À titre d’observation préalable, il convient de rappeler qu’il a été jugé que, afin d’évaluer l’existence de manquements de la part des autorités de pays tiers et de la Commission, lesquels seraient susceptibles de constituer des situations particulières au sens de l’article 239 du CDC, il faut examiner, dans chaque cas d’espèce, la nature réelle des obligations mises à la charge de ces autorités et à celle de la Commission, respectivement, par la réglementation applicable (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 2002, Hyper/Commission, T‑205/99, EU:T:2002:189, point 117).

49      À cet égard, il importe de noter que l’argumentation de la requérante au soutien de la première branche du moyen unique repose essentiellement sur la thèse selon laquelle les autorités douanières lettonnes auraient effectivement délivré les certificats litigieux. Les divers manquements reprochés par la requérante aux autorités douanières lettonnes constitueraient des indices du bien-fondé de sa thèse. Ainsi, la requérante fait valoir que la situation particulière dans laquelle elle se trouve résulte de l’ensemble des circonstances de l’espèce, notamment celles relatives aux défaillances qu’elle impute aux autorités douanières lettonnes.

50      La requérante reproche également à l’administration douanière allemande d’avoir violé ses obligations telles qu’elles résultent des protocoles additionnels à l’accord d’association et du règlement (CE) n° 515/97 du Conseil, du 13 mars 1997, relatif à l’assistance mutuelle entre les autorités administratives des États membres et à la collaboration entre celles-ci et la Commission en vue d’assurer la bonne application des réglementations douanière et agricole (JO 1997, L 82, p. 1). Eu égard plus particulièrement au contenu des courriers des 7 avril et 7 mai 2003 et aux rapports du bureau des enquêtes douanières allemandes, elle reproche aux autorités douanières allemandes d’avoir qualifié à la légère les certificats litigieux de « faux ». Elle estime que les autorités douanières allemandes se sont abstenues d’éclaircir les faits, que ce soit directement auprès de l’administration douanière lettonne, ou par l’intermédiaire de l’OLAF.

51      Au vu de ces circonstances, la requérante fait valoir que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation étant donné qu’elle a conclu à l’absence, en l’espèce, d’une situation particulière. La requérante soutient également, en substance, que la Commission a violé son obligation de surveillance au sens de l’accord d’association et qu’elle aurait dû, en vertu de certaines dispositions de cet accord, agir afin d’éclaircir les faits de l’espèce.

52      Les indices et les arguments invoqués par la requérante sont notamment les suivants.

53      Premièrement, la requérante soutient que les empreintes de cachets figurant sur les certificats litigieux présentent une « concordance évidente » avec les empreintes des cachets utilisés par les autorités douanières lettonnes. En outre, les expertises effectuées sur les certificats de circulation de marchandises présentés pour les importations au Danemark démontreraient qu’il était au moins probable que les empreintes de cachets et les signatures y figurant étaient authentiques.

54      Deuxièmement, la requérante soutient, en substance, que les réponses envoyées par les autorités douanières lettonnes, dans le cadre du contrôle a posteriori, étaient irrégulières et ambiguës. À cet égard, la requérante avance que le fait que les autorités douanières lettonnes ont indiqué que les certificats litigieux étaient « non valables » démontre que lesdites autorités ont participé à la délivrance de ces certificats. Pour la requérante, il n’est pas cohérent que les autorités douanières lettonnes se soient prononcées sur la validité des certificats litigieux, alors qu’elles prétendaient, en même temps, que lesdits certificats n’existaient pas dans leurs registres. En outre, même si les certificats litigieux ne figuraient pas dans les registres des autorités douanières lettonnes, cela ne démontrerait pas qu’ils étaient faux. En effet, d’après la requérante, les autorités douanières lettonnes n’étaient pas obligées de tenir des registres. De plus, selon la requérante, ces registres n’ont pas été définis dans les réponses fournies par les autorités douanières lettonnes.

55      Troisièmement, le fait que les réponses des autorités douanières lettonnes ont été signées par le directeur adjoint des autorités douanières lettonnes, M. R., qui, par la suite, a été condamné pénalement pour des agissements dans ses fonctions, remettrait en cause la force probante de ces réponses. À cet égard, la requérante fait référence à des articles de presse selon lesquels M. R. et une autre personne haut placée au sein des autorités douanières lettonnes ont été condamnés pénalement pour des agissements illégaux dans le cadre de leurs fonctions.

56      La requérante souligne également qu’un climat de corruption régnait au sein de l’administration douanière lettonne durant la période pertinente. Elle invoque à cet égard plusieurs rapports de la Commission évoquant l’état de corruption en Lettonie (ci-après les « rapports de la Commission »).

57      Quatrièmement, la requérante allègue qu’il n’est plus possible d’éclaircir les faits. Elle fait valoir que les autorités douanières lettonnes n’ont pas répondu aux demandes de l’OLAF de lui fournir des pièces ou l’ont fait tardivement, ce qui ressortirait de leurs échanges de courriers. Selon la requérante, les autorités douanières lettonnes ont sciemment détruit les empreintes de cachets afin de supprimer des preuves les impliquant dans la délivrance des certificats litigieux.

58      De plus, selon la requérante, le fait que les autorités douanières lettonnes ou le ministère public letton n’ont pas diligenté d’enquête démontre que les autorités douanières lettonnes étaient impliquées dans la délivrance des certificats litigieux.

59      La Commission conteste les arguments de la requérante. Elle estime, en substance, que les indices avancés par la requérante ne démontrent pas que les autorités douanières lettonnes ont participé à la délivrance des certificats litigieux. En outre, elle estime qu’elle a rempli ses obligations de surveillance et de contrôle de l’application correcte de l’accord d’association. Elle allègue que, contrairement à ce que prétend la requérante, l’accord d’association ne lui permettait pas d’entreprendre des actions auprès de l’administration douanière lettonne impliquant une surveillance par des agents douaniers fiables ou la mise en place d’un système centralisé de délivrance de certificats d’origine et l’organisation de visites spéciales afin d’assurer une bonne application de l’accord d’association.

60      La Commission ne conteste pas qu’il y avait une « concordance » entre les empreintes de cachets figurant sur les certificats litigieux et ceux utilisés par les autorités douanières lettonnes. Toutefois, la Commission souligne que les expertises faites sur les empreintes de cachets ainsi que sur les signatures figurant sur les certificats présentés pour les importations au Danemark n’ont pas été effectuées sur les certificats litigieux et n’ont pas donné lieu à des conclusions définitives, mais ont seulement indiqué qu’il s’agissait probablement d’empreintes de cachets et de signatures authentiques. Les similitudes entre les empreintes des cachets et les résultats des expertises ne permettraient pas de tirer une conclusion définitive quant à l’authenticité ou au caractère faux des certificats litigieux.

61      En ce qui concerne les réponses fournies par les autorités douanières lettonnes dans le cadre du contrôle a posteriori, la Commission considère que celles-ci étaient claires et sans ambiguïtés.

62      S’agissant de la condamnation pénale du directeur adjoint des autorités douanières lettonnes, M. R., la Commission souligne qu’elle ne présente pas de lien avec la délivrance des certificats litigieux. Cette circonstance ne permettrait ainsi pas de conclure que les autorités douanières lettonnes ont délivré ou participé à la délivrance des certificats litigieux. De plus, la Commission souligne que les réponses envoyées par les autorités douanières lettonnes à une date ultérieure et signées par un autre agent douanier (voir point 16 ci-dessus) ont confirmé les lettres de M. R.

63      En ce qui concerne les rapports de la Commission faisant mention d’un climat de corruption au sein des autorités douanières lettonnes, la Commission considère qu’une telle situation ne permet pas de présumer que les certificats litigieux ont été délivrés par les autorités douanières lettonnes. Par ailleurs, la corruption dont il est fait état dans lesdits rapports ne présenterait aucun lien avec le traitement tarifaire préférentiel.

64      La Commission soutient, enfin, que, contrairement à ce que prétend la requérante, les autorités douanières lettonnes ont fait preuve d’une bonne collaboration avec l’OLAF et avec les autorités douanières allemandes. En effet, dans le cadre du contrôle a posteriori et de l’enquête de l’OLAF en Lettonie, elles auraient répondu aux demandes des autorités douanières allemandes et à celles de la Commission. Les courriers invoqués par la requérante mettraient en évidence que les autorités douanières lettonnes ont répondu aux questions posées dans un délai raisonnable. La Commission allègue que, si les autorités douanières lettonnes ont expliqué qu’elles étaient dans l’impossibilité d’envoyer des empreintes de cachets authentiques, rien n’indique que cela serait dû à une volonté de leur part de cacher un comportement illégal.

65      Au vu de ces considérations, la Commission soutient, en substance, que les autorités douanières lettonnes ont respecté l’accord d’association et qu’elles ont envoyé des réponses satisfaisantes, dans les délais, à l’OLAF et aux autorités douanières allemandes. Ainsi, la Commission n’aurait pas eu de raison de faire des enquêtes plus approfondies en ce qui concerne les certificats litigieux. Elle soutient également qu’elle a respecté son obligation de surveillance quant à la bonne application de l’accord d’association et rappelle que les règles concernant l’origine de produits reposent sur une confiance mutuelle entre les autorités des États membres d’importation et celles de l’État d’exportation.

66      De même, la Commission soutient que les autorités douanières allemandes n’ont pas manqué non plus à leurs obligations. En effet, elles seraient liées par les réponses fournies par les autorités douanières lettonnes dans le cadre du contrôle a posteriori. Il ressortirait également d’un courrier envoyé par les autorités douanières allemandes en réponse à une demande de la requérante qu’elles auraient clarifié les faits.

67      Il convient de rappeler que la Commission, en tant que gardienne du traité et des accords conclus en vertu de celui-ci, est tenue de s’assurer de la correcte application par un pays tiers des obligations qu’il a contractées en vertu d’un accord conclu avec l’Union par le biais des moyens prévus par l’accord ou par les décisions prises en vertu de celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 25 juillet 2008, C.A.S./Commission, C‑204/07 P, EU:C:2008:446, point 95).

68      Cette obligation résulte également de l’accord d’association ainsi que des protocoles qui s’y rattachent. L’article 110 de l’accord d’association dispose que le conseil d’association, composé de membres de la Commission, du Conseil de l’Union européenne et de membres nommés par le gouvernement de la Lettonie, est chargé de superviser l’application de cet accord. Il ressort de l’article 113 de l’accord d’association que chaque partie peut saisir le conseil d’association de tout différend relatif à l’application ou à l’interprétation dudit accord. Il ressort, en outre, de l’article 14, intitulé « Application », du protocole no 5 de l’accord d’association, relatif à l’assistance mutuelle entre autorités administratives en matière douanière, ce qui suit :

« La gestion du présent protocole est confiée aux autorités douanières centrales de la Lettonie, d’une part, aux services compétents de la Commission […], et, le cas échéant, aux autorités douanières des États membres de l’Union européenne, d’autre part. Ils décident de toutes les mesures et dispositions pratiques nécessaires pour son application, en tenant compte des règles en vigueur dans le domaine de la protection des données. Ils peuvent recommander au conseil d’association les modifications qui devraient, selon eux, être apportées au présent protocole. »

69      Il faut également relever que, dans le cadre de son obligation de surveillance et de contrôle de l’application correcte de l’accord d’association, la Commission dispose de certaines prérogatives.

70      Ainsi, la Commission peut demander aux autorités douanières lettonnes, conformément aux dispositions de l’article 3, paragraphe 1, du protocole no 5 de l’accord d’association, tout renseignement de nature à lui permettre de s’assurer que la législation douanière est correctement appliquée (voir, par analogie, arrêt du 25 juillet 2008, C.A.S./Commission, C‑204/07 P, EU:C:2008:446, point 100).

71      La Commission peut également, aux termes de l’article 3, paragraphe 3, sous a), du protocole no 5 de l’accord d’association, demander aux autorités douanières lettonnes de prendre les mesures nécessaires pour exercer une surveillance sur des personnes physiques ou morales dont on peut raisonnablement penser qu’elles commettent ou ont commis des infractions à la législation douanière (voir, par analogie, arrêt du 25 juillet 2008, C.A.S./Commission, C‑204/07 P, EU:C:2008:446, point 101).

72      En outre, selon l’article 7, paragraphes 3 et 4, du protocole no 5 de l’accord d’association, les fonctionnaires de la Commission dûment autorisés peuvent recueillir, dans les bureaux respectifs des autorités douanières lettonnes, des renseignements relatifs aux opérations contraires à la législation douanière et être présents aux enquêtes effectuées sur le territoire letton, avec l’accord de ces autorités et dans les conditions qu’elles prévoient (voir, par analogie, arrêt du 25 juillet 2008, C.A.S./Commission, C‑204/07 P, EU:C:2008:446, point 102).

73      Par ailleurs, il en va de même pour l’article 31, paragraphe 2, du protocole no 3 de l’accord d’association, tel que modifié par la décision n° 4/98 du conseil d’association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République de Lettonie, d’autre part, du 2 décembre 1998, concernant l’adoption des modifications du protocole nº 3 de l’accord d’association, incluses dans la décision nº 1/97 de la commission mixte adoptée en vertu de l’accord sur la libéralisation des échanges et l’institution de mesures d’accompagnement entre la Communauté européenne, la Communauté européenne de l’énergie atomique et la Communauté européenne du charbon et de l’acier, d’une part, et la République de Lettonie, d’autre part (JO 1999, L 6, p. 10, ci-après la « décision no 4/98 »), selon lequel, « [a]fin de garantir une application correcte du présent protocole, [l’Union] et la Lettonie se prêtent mutuellement assistance, par l’entremise de leurs administrations douanières respectives, pour le contrôle de l’authenticité des certificats EUR.1 ou des déclarations sur facture et de l’exactitude des renseignements fournis dans lesdits documents » (voir, par analogie, arrêt du 25 juillet 2008, C.A.S./Commission, C‑204/07 P, EU:C:2008:446, point 103).

74      Il s’ensuit qu’il incombe à la Commission de faire pleinement usage des prérogatives dont elle dispose en vertu des dispositions de l’accord d’association et des décisions et des protocoles adoptés pour son application, afin de ne pas manquer à ses obligations de surveillance et de contrôle de l’application correcte dudit accord (voir, par analogie, arrêt du 25 juillet 2008, C.A.S./Commission, C‑204/07 P, EU:C:2008:446, point 104).

75      Un tel usage s’impose d’autant plus en l’espèce, en présence d’indices d’une possible implication des autorités douanières lettonnes dans la délivrance des certificats litigieux, à savoir :

–        le contrôle a posteriori des certificats litigieux a été engagé en conséquence de l’enquête de l’OLAF concernant les importations de tissu de lin au Danemark ;

–        le rapport de l’OLAF fait état d’un transit très bref de tissu de lin dans un entrepôt douanier letton afin de dissimuler l’origine des marchandises en cause ;

–        les expertises effectuées sur les empreintes de cachets et les signatures figurant sur les certificats utilisés pour les importations au Danemark, après le rapport de l’OLAF, démontrent qu’il s’agissait probablement d’empreintes de cachets et de signatures authentiques ;

–        les empreintes de cachets figurant sur les certificats litigieux présentent une forte similitude avec les empreintes de cachets authentiques des autorités douanières lettonnes ;

–        le directeur adjoint des autorités douanières lettonnes, M. R., signataire des certificats litigieux et des courriers dans le cadre du contrôle a posteriori, a été condamné pour des agissements illégaux dans le cadre de ses fonctions ;

–        les autorités douanières lettonnes ont été dans l’incapacité de fournir les empreintes de cachets originales utilisées par les bureaux de douane concernés, à savoir les bureaux de douane de Jelgava et de Bauska ;

–        les rapports de la Commission font état d’un climat de corruption, notamment au sein des autorités douanières lettonnes ;

–        les importations de tissu de lin en provenance de Lettonie ont augmenté et ont dépassé les capacités de production de ce pays.

76      En effet, à la lumière de ces indices, les réponses des autorités douanières lettonnes s’avèrent insuffisantes pour déterminer si les certificats litigieux avaient un caractère authentique ou faux. Certes, il est vrai que, comme le fait observer la Commission, les indices fournis par la requérante ne permettaient pas de conclure que les autorités douanières lettonnes avaient participé à la délivrance des certificats litigieux. Or, au vu de l’ensemble des indices mentionnés au point 75 ci-dessus, il convient de considérer que la Commission aurait dû faire usage de ses prérogatives aux fins de l’application correcte de l’accord d’association et procéder à une vérification plus approfondie que celle effectuée en l’espèce.

77      Par conséquent, il incombait à la Commission de demander des précisions quant aux enquêtes qui avaient été effectuées par les autorités douanières lettonnes afin d’éclaircir les faits de l’espèce.

78      Premièrement, la Commission aurait dû demander à quels documents les numéros figurant sur les certificats litigieux correspondaient, si les signatures figurant sur les certificats litigieux correspondaient aux personnes travaillant pour les autorités douanières lettonnes et, dans l’affirmative, si ces personnes avaient effectivement signé les certificats litigieux.

79      Deuxièmement, il ressort des échanges de courriers entre l’OLAF et les autorités douanières lettonnes que ces dernières n’ont pas été en mesure de fournir des empreintes de cachets authentiques relatives aux certificats litigieux, au motif qu’elles les avaient détruites.

80      Cependant, même si les autorités douanières lettonnes n’étaient pas dans l’obligation de les garder, il est pertinent d’observer que c’est la communication des spécimens des empreintes des cachets et des signatures utilisés dans les bureaux de douanes concernés qui permet d’effectuer une surveillance effective quant au respect des règles douanières relatives aux préférences tarifaires (voir, en ce sens, arrêt du 25 juillet 2008, C.A.S./Commission, C‑204/07 P, EU:C:2008:446, point 117).

81      L’obligation incombant à la Commission de veiller à ce que l’accord d’association soit correctement appliqué exige que celle-ci, et par son intermédiaire les autorités douanières des États membres, dispose à chaque instant de tous les éléments susceptibles de lui permettre de procéder à un contrôle efficace, les spécimens d’empreintes des cachets et des signatures constituant incontestablement de tels éléments (voir, en ce sens, arrêt du 25 juillet 2008, C.A.S./Commission, C‑204/07 P, EU:C:2008:446, point 118).

82      Or, en l’espèce, la Commission n’a pas reçu les empreintes de cachets demandées dans le cadre du contrôle a posteriori et n’a ni demandé ni examiné les signatures figurant sur les certificats litigieux.

83      Troisièmement, il y lieu de relever qu’il ne ressort pas du dossier que les autorités douanières lettonnes aient procédé ou non à des inspections auprès des exportateurs. À cet égard, il convient de rappeler qu’il ressort de l’article 32, paragraphe 3, du protocole n° 3 de l’accord d’association, tel que modifié par la décision no 4/98, que les autorités douanières du pays d’exportation « sont habilitées à exiger toutes preuves et à effectuer tous contrôles des comptes de l’exportateur ou tout autre contrôle qu’elles estiment utile ». Par conséquent, la Commission aurait dû, surtout si un examen des empreintes des cachets et des signatures n’était pas possible, demander aux autorités douanières lettonnes si de tels contrôles avaient été effectués et, si non, pourquoi.

84      Il est certes vrai que l’article 32, paragraphe 3, du protocole n° 3, relatif à la définition de la notion de « produits originaires » et aux méthodes de coopération administrative, de l’accord d’association n’impose pas en détail à l’État d’exportation la manière dont il doit effectuer un contrôle a posteriori des certificats de circulation. Toutefois, cette disposition suppose que, au regard des conséquences financières pour l’importateur et des circonstances de l’espèce, la Commission aurait dû s’assurer que ce contrôle soit effectué de manière fiable et consciencieuse, cela d’autant plus que, au point 4 du rapport de l’OLAF, intitulé « Conclusions », il est énoncé ce qui suit :

« Cette affaire a révélé, une fois de plus, que, dans le cadre de cas de fraudes complexes, il est plus utile et plus efficace de ne pas se fier exclusivement aux procédures administratives applicables (comme, en l’espèce, à la procédure de contrôle a posteriori) mais de tenter de clarifier tous les aspects de l’affaire sur place et en étroite collaboration avec les autorités compétentes du pays tiers concerné. Cette manière d’agir aboutit, notamment, à ce que les différents pays apprennent la manière dont il est approprié de procéder dans le cadre de telles enquêtes et connaissent les informations et documents nécessaires pour l’éclaircissement et la poursuite des infractions dans la Communauté, afin d’être mieux à même d’évaluer les besoins des États membres en cas d’évènements similaires et de pouvoir mener leur propre enquête en conséquence. »

85      Il découle de l’ensemble des considérations qui précèdent que la Commission a manqué à ses obligations de surveillance et de contrôle de l’application correcte de l’accord d’association. En effet, si la Commission avait fait pleinement usage des prérogatives dont elle disposait dans le cadre de l’accord d’association aux fins de l’application correcte dudit accord, le caractère authentique ou faux des certificats litigieux aurait pu être établi avec plus de certitude.

86      Il est vrai que la Cour a déjà jugé que le système de coopération administrative mis en place par un protocole énonçant, dans une annexe d’un accord conclu entre l’Union et un État tiers, des règles concernant l’origine de produits repose sur une confiance mutuelle entre les autorités des États membres d’importation et celles de l’État d’exportation (voir arrêt du 15 décembre 2011, Afasia Knits Deutschland, C‑409/10, EU:C:2011:843, point 28 et jurisprudence citée).

87      Cependant, eu égard aux circonstances de l’espèce (voir point 75 ci-dessus), la Commission aurait dû faire usage de ses prérogatives aux fins de l’application correcte de l’accord d’association en dépit des réponses données par les autorités douanières lettonnes dans le cadre du contrôle a posteriori. En effet, la Commission disposait d’informations suscitant des questions importantes sur l’origine des certificats litigieux.

88      En l’absence de réponses à ces questions, la Commission ne pouvait pas valablement se prononcer sur la situation de l’espèce. Ainsi, les réponses fournies par les autorités douanières lettonnes dans le cadre du contrôle a posteriori n’étaient que de brèves affirmations ne permettant pas à la Commission de tirer des conclusions quant à l’implication ou non des agents relevant des autorités douanières lettonnes dans la délivrance des certificats litigieux. Cela vaut également pour la confirmation de la réponse envoyée à la requérante par les autorités douanières lettonnes (voir point 16 ci-dessus), dont il ressort du dossier qu’elle n’était pas issue d’un véritable réexamen du dossier ouvert par les autorités douanières lettonnes concernant les certificats litigieux. En effet, il ressort de ladite réponse que ledit dossier avait déjà été envoyé à l’OLAF.

89      À ce titre, il convient de rappeler notamment que la Commission aurait pu effectuer des expertises sur les empreintes des cachets et les signatures figurant sur les certificats litigieux et, le cas échéant, demander des précisions quant à la manière dont le contrôle a posteriori avait été effectué, afin de déterminer si elle disposait de suffisamment d’informations pour se prononcer sur la situation de l’espèce ou s’il y avait lieu d’approfondir ses investigations.

90      C’est donc à tort que la Commission a conclu, au point 37 de la décision attaquée, qu’elle disposait de suffisamment d’informations lui permettant d’évaluer la situation.

91      C’est également à tort que la Commission a constaté, au point 38 de la décision attaquée, qu’« [elle] a[vait] respecté toutes les obligations générales de surveillance qui lui incombaient en vertu de l’accord d’association en menant des contrôles annuels, dont les résultats [avaient] été publiés dans les rapports [de la Commission] ». En effet, il lui incombait de prendre des mesures concrètes en l’espèce.

92      À cet égard, il est pertinent de rejeter les arguments de la Commission selon lesquels l’enquête concernant les certificats litigieux était sous la responsabilité des autorités douanières allemandes et que l’OLAF n’avait pas été saisi par ces dernières. En effet, il ressort du dossier que la Commission était informée de l’enquête menée par les autorités douanières allemandes et qu’ainsi elle aurait pu leur demander de faire des investigations supplémentaires ou conduire de telles investigations elle-même afin de s’assurer qu’elle avait un dossier contenant suffisamment d’informations pour évaluer la situation particulière de la requérante au sens de l’article 239 du CDC.

93      En tout état de cause, le fait que les autorités douanières nationales ayant conduit les enquêtes n’ont pas pris certaines mesures d’instruction n’implique pas que la Commission ait pu, en l’absence de telles mesures, conclure que la requérante ne se trouvait pas dans une situation particulière au sens de l’article 239 du CDC.

94      Il résulte de ce qui précède que la première branche du moyen unique, tirée d’une violation de la condition relative à l’existence d’une situation particulière, doit être accueillie.

95      Compte tenu de la nature cumulative des conditions visées à l’article 239 du CDC, il convient, à présent, d’examiner la deuxième condition, relative à l’absence de manœuvre et de négligence manifeste de la part de la requérante.

 Sur la condition relative à l’absence de manœuvre ou de négligence manifeste de la part de l’importateur

96      La requérante soutient qu’elle a conclu ses contrats avec les exportateurs lettons selon les pratiques commerciales courantes et qu’elle a procédé aux importations litigieuses en conséquence. Elle souligne que la charge de la preuve de la négligence manifeste pèse sur la Commission.

97      La requérante fait également valoir qu’elle n’avait aucune expérience d’importations en provenance de pays bénéficiant d’un régime préférentiel. Toutefois, elle fait observer qu’elle n’a jamais affirmé que les dispositions de l’accord d’association, protocoles et annexes compris, étaient complexes et, pour elle, incompréhensibles. Elle note qu’elle n’avait aucun droit de regard sur la manière dont les autorités douanières lettonnes compétentes appliquaient concrètement l’accord d’association dans leur pratique quotidienne. Elle ignorait de plus si, et dans quelle mesure, la Commission contrôlait, conformément à ses obligations, la correcte application de l’accord d’association en Lettonie. La requérante affirme que les graves manquements et omissions des autorités compétentes qui ont été constatés après coup échappaient à sa connaissance et à son influence et que l’avis de fixation des droits de douane l’avait étonnée.

98      La requérante estime qu’elle a fait preuve de la diligence requise. Elle soutient qu’elle n’avait pas le moindre doute quant à la régularité des exportations de Lettonie réalisées sous régime préférentiel et que c’est la raison pour laquelle les enquêtes pénales ouvertes contre ses deux gérants pour faux en écriture et fraude fiscale se sont révélées injustifiées. La requérante allègue notamment, dans la réplique, que la mention « origine Russie » (« origin Russia ») dans une lettre concernant le tissu de lin importé sous le couvert des certificats litigieux ne démontre pas de négligence manifeste de sa part. En effet, la Commission aurait fait état de cette mention hors contexte. Les bons de livraison des marchandises en cause ne laisseraient pas de doute quant à leur origine lettonne. En ce qui concerne la mention « origine Russie » figurant dans la lettre, il s’agirait d’une erreur commise par un employé de la requérante. De plus, selon la requérante, cette mention était une manière habituelle dans le commerce de désigner une qualité particulière de tissu de lin.

99      La Commission allègue que la requérante était au courant de ce que le tissu de lin qu’elle importait était d’origine russe et non pas d’origine lettonne. Cela ressortirait de l’ordonnance du Landgericht München (tribunal régional de Munich) du 30 avril 2009 dans la procédure pénale contre le directeur exécutif de la requérante. Une négligence manifeste pourrait ainsi être imputée à la requérante. La Commission ne pourrait pas se prononcer sur la véracité de l’explication relative à la mention « origine Russie » fournie par la requérante. La Commission estime, en toute hypothèse, que la requérante n’a pas fait preuve de la diligence requise, étant donné qu’il y avait des indices lui permettant de soupçonner que les marchandises en cause n’étaient pas d’origine lettonne et que, malgré cela, elle n’avait pas vérifié l’origine des marchandises, mais qu’elle avait continué de les importer en revendiquant la franchise douanière sous régime préférentiel.

100    Il y a lieu, pour le Tribunal, de rappeler que, lorsque les autorités douanières ont conclu qu’il ne pouvait être établi que l’opérateur économique avait fait preuve de manœuvre ou de négligence manifeste, il incombe à la Commission, lorsqu’elle entend s’écarter de la prise de position des autorités nationales, de prouver, sur la base d’éléments factuels pertinents, l’existence d’un comportement manifestement négligeant dudit opérateur (voir arrêt du 19 mars 2013, Firma Van Parys/Commission, T‑324/10, EU:T:2013:136, point 86 et jurisprudence citée). En l’espèce, les autorités douanières allemandes ont rejeté la demande de remise des droits à l’importation de la requérante en se fondant uniquement sur la condition relative à la situation particulière. Cette décision de rejet a, par la suite, fait l’objet d’un appel devant le Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich), lequel a conclu que la requérante n’avait pas manqué à son obligation de diligence (voir point 20 ci-dessus). Par conséquent, la charge de la preuve incombe à la Commission en application de la jurisprudence susmentionnée.

101    Aux fins de l’examen des conditions prévues par l’article 239 du CDC, lu en combinaison avec l’article 905, paragraphe 3, du règlement d’application, et ainsi que cela a été rappelé au point 40 ci-dessus, la Commission doit analyser tous les éléments pertinents, y compris ceux liés au comportement de l’opérateur concerné, notamment son expérience professionnelle, sa bonne foi et la diligence dont il a fait preuve.

102    À cet égard, il y a lieu de rappeler la jurisprudence constante selon laquelle, pour apprécier l’existence d’une négligence manifeste au sens de l’article 239 du CDC, il faut tenir compte, notamment, de la complexité des dispositions dont l’inexécution a fait naître la dette douanière, ainsi que de l’expérience professionnelle et de la diligence de l’opérateur en question (voir arrêt du 27 septembre 2005, Common Market Fertilizers/Commission, T‑134/03 et T‑135/03, EU:T:2005:339, point 135 et jurisprudence citée).

103    À la lumière de ces principes, il convient d’examiner les éléments pris en compte par la Commission lors de son analyse relative à la seconde condition de l’article 239 du CDC.

104    Il ressort de la décision attaquée que, selon la Commission, la requérante avait manqué à son obligation de diligence du fait qu’elle avait importé les marchandises en cause alors qu’elle était censée savoir que celles-ci étaient d’une origine autre que lettonne. Dans la décision attaquée, il est également fait mention d’une réunion du groupe d’experts qui s’est tenue le 8 mai 2014 au sein du comité du CDC, section « Dette douanière et garanties », conformément à l’article 907 du règlement d’application, au cours de laquelle le cas de la requérante avait été discuté (ci-après la « réunion du groupe d’experts »). D’après la décision attaquée, la Lettonie aurait déclaré qu’elle n’avait pas délivré les certificats litigieux et qu’il y avait des éléments « solides » démontrant que les marchandises en cause n’étaient pas d’origine lettonne. À ce titre, les autorités douanières lettonnes auraient avancé, au cours de la réunion du groupe d’experts, que le transport de tissu de lin s’était effectué en plusieurs étapes uniquement pour masquer l’origine réelle des marchandises et pour utiliser des documents de transport délivrés en Lettonie en vue de certifier faussement que les marchandises étaient d’origine lettonne.

105    Au vu de ce qui précède, force est de constater que la Commission n’a fait aucune analyse du comportement de la requérante. En effet, la démonstration de ce que la requérante était censée savoir que les marchandises qu’elle importait n’étaient pas d’origine lettonne ne ressort pas de la décision attaquée. Cette question est, d’ailleurs, la question principale posée dans la présente affaire, dans la mesure où la requérante avance qu’elle ne savait pas que les marchandises en cause étaient d’une origine autre que lettonne. Le fait que cette dernière a cherché à bénéficier du régime préférentiel ne démontre pas qu’elle a agi avec une négligence manifeste.

106    De même, la déclaration faite par les autorités douanières lettonnes lors de la réunion du groupe d’experts ne démontre pas non plus que la requérante avait agi avec une négligence manifeste. En effet, il convient de relever que ladite réunion a eu lieu le 8 mai 2014, soit plus de douze ans après la fin de la période pertinente, ce qui permet de douter que les conditions d’importation durant la période pertinente, et notamment celles relatives aux importations de la requérante, aient été concrètement examinées dans la présente affaire.

107    Par ailleurs, le fait que les marchandises en cause transitaient par des entrepôts de douane en Lettonie, comme l’auraient avancé les autorités douanières lettonnes lors de la réunion du groupe d’experts, n’est pas un fait pertinent dans la mesure où cela n’a été relaté que dans le rapport de l’OLAF, soit après la période pertinente. En outre, ce fait, à le supposer établi, démontre uniquement des irrégularités pouvant être imputées tout aussi bien aux autorités douanières lettonnes qu’à la requérante ou à d’autres opérateurs concernés.

108    De plus, la Commission n’a fourni aucun élément permettant de corroborer ou de vérifier la déclaration faite par les autorités douanières lettonnes lors de la réunion du groupe d’experts. Il convient, par ailleurs, de relever qu’une déclaration identique figure dans la lettre du 14 mars 2014 dans laquelle la Commission informait la requérante de son intention d’adopter une décision défavorable à son égard (voir point 22 ci-dessus). Cependant, dans cette lettre, la Commission cite comme source, non pas les autorités douanières lettonnes, mais l’ordonnance du Finanzgericht München (tribunal des finances de Munich) du 30 avril 2009, laquelle, à son tour, renvoie au rapport de l’OLAF.

109    Dès lors, la Commission n’établit pas, dans la décision attaquée, que le comportement de la requérante a constitué un manque de diligence de sa part.

110    Quant à l’argument opposé en défense par la Commission, selon lequel la requérante aurait été manifestement négligente du fait qu’un de ses employés aurait mentionné « origine Russie » dans une lettre, force est de constater que cette considération constitue une tentative de motivation tardive de la décision attaquée et, partant, irrecevable devant le Tribunal. En effet, selon une jurisprudence constante, la motivation doit, en principe, être communiquée à l’intéressé en même temps que l’acte lui faisant grief, son absence ne pouvant pas être régularisée par le fait que l’intéressé apprend les motifs de l’acte au cours de la procédure devant le juge de l’Union (arrêts du 26 novembre 1981, Michel/Parlement, 195/80, EU:C:1981:284, point 22, du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 463, et du 12 décembre 2006, Organisation des Modjahedines du peuple d’Iran/Conseil, T‑228/02, EU:T:2006:384, point 139).

111    En tout état de cause, cette circonstance ne permet pas de prouver, à elle seule, une négligence manifeste de la part de la requérante.

112    La Commission n’ayant pas apporté la preuve, ainsi que l’exige la jurisprudence rappelée aux points 100 et 102 ci-dessus, de l’absence de diligence de la requérante et, donc, de sa négligence manifeste, la seconde branche du moyen unique, tirée d’une violation de la condition relative à l’absence de négligence manifeste de la part de l’importateur, doit donc, elle aussi, être accueillie.

113    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le recours de la requérante doit être accueilli et la décision attaquée, en conséquence, annulée.

 Sur les dépens

114    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

115    La Commission ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision C(2014) 4908 final de la Commission, du 16 juillet 2014, portant rejet de la demande de Combaro SA relative à la remise de droits à l’importation d’un montant de 461 415,12 euros, est annulée.

2)      La Commission européenne supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par Combaro.

Prek

Schalin

Costeira

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 juillet 2017.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.

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