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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Szegedi v Parliament (Judgment) French Text [2019] EUECJ T-135/18 (27 June 2019) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2019/T13518.html Cite as: ECLI:EU:T:2019:450, EU:T:2019:450, [2019] EUECJ T-135/18 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)
27 juin 2019 (*)
« Droit institutionnel – Réglementation concernant les frais et indemnités des députés au Parlement européen – Frais de voyage – Frais d’assistance parlementaire – Recouvrement des sommes indûment versées – Droits de la défense – Communication des éléments de preuve – Obligation de motivation – Erreur de fait – Proportionnalité »
Dans l’affaire T‑135/18,
Csanád Szegedi, demeurant à Budapest (Hongrie), représenté par Me K. Bodó, avocat,
partie requérante,
contre
Parlement européen, représenté par M. N. Görlitz, Mme S. Seyr et M. B. Simon, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision du secrétaire général du Parlement du 30 novembre 2017 relative au recouvrement auprès du requérant d’une somme de 264 196,11 euros indûment versée au titre des frais de voyage et des frais d’assistance parlementaire ainsi que de la note de débit y afférente du 19 décembre 2017,
LE TRIBUNAL (sixième chambre),
composé de MM. G. Berardis, président, S. Papasavvas (rapporteur) et Mme O. Spineanu‑Matei, juges,
greffier : M. P. Cullen, administrateur,
vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 7 mars 2019,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le requérant, M. Csanád Szegedi, a été député au Parlement européen de 2009 à 2014.
2 Le Parlement a conclu avec M. E. et M. V., sur le fondement de l’article 5 bis du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le « RAA »), des contrats d’engagement en qualité d’assistants parlementaires accrédités. Conformément à ces contrats, et aux avenants conclus ultérieurement, ceux-ci ont été engagés afin d’assister le requérant, pour la période allant du 1er juin 2011, pour M. E., et du 11 septembre 2012, pour M. V., à la fin de la législature, le 1er juillet 2014.
3 Le 12 février 2013, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) a ouvert une enquête concernant des manquements relatifs à des demandes de remboursement introduites par le requérant en rapport avec les contrats de M. E. et de M. V.
4 Le 18 décembre 2015, l’OLAF a transmis au Parlement son rapport d’enquête final, constatant certaines irrégularités concernant les demandes de remboursement de frais de voyage et de frais d’assistance parlementaire du requérant (ci-après le « rapport de l’OLAF »).
5 Le 24 janvier 2017, le secrétaire général du Parlement a informé le requérant de l’ouverture d’une procédure de recouvrement sur la base de l’article 68 de la décision du bureau du Parlement des 19 mai et 9 juillet 2008 portant mesures d’application du statut des députés au Parlement européen (JO 2009, C 159, p. 1, ci-après les « mesures d’application ») et l’a invité à présenter ses observations (ci-après la « lettre du 24 janvier 2017 »).
6 Le 2 mai 2017, le requérant a présenté ses observations (ci-après les « observations du 2 mai 2017 »).
7 Par décision du 30 novembre 2017 (ci-après la « décision attaquée »), le secrétaire général du Parlement a estimé qu’un montant de 264 196,11 euros avait été indûment versé au requérant, au titre des frais de voyage et des frais pris en charge dans le cadre des contrats de M. E. et de M. V., et devait être recouvré. Il a également chargé l’ordonnateur du Parlement de procéder au recouvrement de la somme en cause.
8 Le 19 décembre 2017, le directeur général de la direction générale des finances du Parlement, en qualité d’ordonnateur du Parlement, a émis la note de débit 2017-1635 ordonnant le recouvrement de la somme de 264 196,11 euros avant le 5 janvier 2018 (ci-après la « note de débit »).
9 Le 26 février 2018, le requérant a, en application de l’article 72, paragraphe 2, des mesures d’application, adressé une réclamation aux questeurs contre la décision attaquée.
Procédure et conclusions des parties
10 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 mars 2018, le requérant a introduit le présent recours.
11 Le 13 septembre 2018, le requérant a sollicité, au titre des mesures d’instruction visées à l’article 91 du règlement de procédure du Tribunal, sa comparution personnelle ainsi que l’audition comme témoins de M. E. et de M. V. Le Parlement a présenté ses observations sur cette demande dans le délai imparti.
12 Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (sixième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure.
13 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 7 mars 2019.
14 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– annuler la note de débit.
15 Dans la requête, le requérant demande également le sursis à exécution de la note de débit.
16 Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter la demande tendant au sursis à exécution de la note de débit comme irrecevable ;
– rejeter le recours comme partiellement irrecevable et partiellement non fondé ;
– condamner le requérant aux dépens.
En droit
Sur la recevabilité
Sur la recevabilité du recours
17 Le Parlement estime que la requête ne contient pas une énumération des moyens invoqués et ne respecte donc pas l’article 76, sous d), du règlement de procédure. Elle serait donc au moins partiellement irrecevable.
18 À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, la requête doit, notamment, contenir l’objet du litige et un exposé sommaire des moyens invoqués. Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autres informations. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (ordonnances du 28 avril 1993, De Hoe/Commission, T‑85/92, EU:T:1993:39, point 20 ; du 21 mai 1999, Asia Motor France e.a./Commission, T‑154/98, EU:T:1999:109, point 49, et arrêt du 15 juin 1999, Ismeri Europa/Cour des comptes, T‑277/97, EU:T:1999:124, points 28 et 29).
19 En l’espèce, d’une part, il y a lieu de relever que, certes, la requête ne contient pas une énumération des moyens invoqués à l’appui du recours et que toutes les sections de celle-ci ne sont pas précédées d’un titre. Toutefois, une telle énumération et de tels titres ne sont pas requis par l’article 76, sous d), du règlement de procédure, lequel exige que les moyens invoqués fassent l’objet d’un exposé sommaire. De même, le point 127, deuxième et troisième phrases, des dispositions pratiques d’exécution du règlement de procédure du Tribunal (JO 2015, L 152, p. 1), dans sa version applicable lors de l’introduction du recours, se borne à indiquer qu’il est « généralement utile » de faire précéder l’argumentation juridique d’un énoncé schématique des moyens invoqués et qu’il est « très souhaitable » d’attribuer un titre à chacun des moyens invoqués, et ce afin de les rendre facilement identifiables. Cette disposition n’impose cependant aucune exigence stricte à cet égard. Aussi, pour regrettable qu’elle soit, l’absence d’énumération des moyens et de certains des titres de ceux-ci ne saurait, en tant que telle, entraîner l’irrecevabilité du recours.
20 D’autre part, il y a lieu de constater que la requête contient neuf sections, lesquelles portent, à l’exception des troisième, cinquième et sixième, un titre en indiquant sommairement l’objet. À cet égard, il convient de relever que la neuvième section comporte des observations, concernant notamment le délai de recours, la compétence du Tribunal, la langue de procédure, une demande d’audition de témoins et une demande de sursis à exécution. Quant aux huit premières sections, il ressort clairement de la requête qu’elles ont trait aux moyens invoqués par le requérant au soutien de son recours. Ainsi, bien que certaines de ces sections ne comportent pas de titre, il peut être aisément déduit du texte de la requête que le requérant soulève, en substance, huit moyens, tirés, respectivement, d’erreurs de fait, de la violation des droits de la défense et des principes du procès équitable et d’égalité des armes, de l’inversion de la charge de la preuve, de l’absence de fondement juridique de la récupération des sommes en cause, de la violation du principe de proportionnalité, de l’absence de pertinence de l’article 39 bis des mesures d’application, d’un défaut de motivation ainsi que d’une violation des articles 13 et 15 des mesures d’application.
21 Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que, conformément à l’article 76, sous d), du règlement de procédure, la requête contient un exposé sommaire des moyens invoqués. Il est d’ailleurs à noter que, dans le mémoire en défense, le Parlement a identifié l’ensemble des griefs soulevés par le requérant et a été en mesure d’y répondre, nonobstant la circonstance qu’il l’a fait en procédant à une réorganisation desdits griefs en quatre moyens.
22 Partant, la fin de non-recevoir soulevée par le Parlement doit être écartée.
Sur la recevabilité de la demande de sursis à exécution de la note de débit
23 Le requérant demande, dans la requête, le sursis à exécution de la note de débit.
24 Le Parlement excipe de l’irrecevabilité de cette demande, faute d’avoir été présentée par acte séparé.
25 À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 156, paragraphe 5, du règlement de procédure, une demande de sursis à exécution d’un acte d’une institution doit être présentée par acte séparé.
26 En l’espèce, la demande de sursis à exécution de la note de débit n’ayant pas été présentée par acte séparé, elle doit être rejetée comme irrecevable.
Sur le fond
27 À l’appui de son recours, le requérant soulève, en substance, les huit moyens évoqués au point 20 ci-dessus.
28 Le Tribunal estime opportun d’examiner, tout d’abord, les septième, deuxième et premier moyens, ensuite, conjointement, les troisième et quatrième moyens et, enfin, les sixième, huitième et cinquième moyens.
Sur le septième moyen, tiré d’un défaut de motivation
29 Le requérant soutient que ni la décision attaquée ni la note de débit ne donnent de justification et qu’elles n’indiquent pas le raisonnement concernant la fixation du montant dont la récupération est demandée. Le lien entre ce montant et les infractions alléguées ne serait pas explicité.
30 Le Parlement conteste cette argumentation.
31 À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 296, deuxième alinéa, TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En particulier, l’institution concernée n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés, mais il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (voir arrêt du 30 avril 2014, Hagenmeyer et Hahn/Commission, T‑17/12, EU:T:2014:234, point 173 et jurisprudence citée).
32 En l’espèce, s’agissant, d’une part, des frais de voyage, il y a lieu de relever que les considérants 14 à 17 de la décision attaquée exposent en détail, tout d’abord, les anomalies qui ont été relevées concernant les demandes de remboursement relatives à huit trajets et qui ont justifié que les services du Parlement vérifient, ainsi qu’il ressort du considérant 17 de ladite décision, si les montants remboursés à ce titre avaient été, totalement ou partiellement, indûment payés et devaient être récupérés. La décision attaquée indique, ensuite, au considérant 18, que les services du Parlement ont constaté que le requérant avait communiqué au Parlement des demandes de remboursement de frais de voyage étayées par des documents trompeurs, les paiements effectués à cet égard s’élevant à 8 273,83 euros. Le même considérant expose, en outre, le montant total en cause pour chacun des huit voyages concernés. Il est conclu au considérant 19 de la décision attaquée que le Parlement a indûment payé 8 273,83 euros pour les frais de voyage du requérant. Enfin, aux considérants 35 à 41 de la décision attaquée, il est procédé à l’analyse des arguments avancés par le requérant dans les observations du 2 mai 2017, lesquels sont écartés, notamment faute de preuve avancée par le requérant.
33 S’agissant, d’autre part, des frais d’assistance parlementaire, la décision attaquée expose, tout d’abord, aux considérants 20 à 25, les principaux constats du rapport de l’OLAF concernant des irrégularités en lien avec les contrats de M. E. et de M. V. Elle souligne, au considérant 28, que les services du Parlement ont vérifié si les montants remboursés au titre de ces contrats avaient été, totalement ou partiellement, indûment payés et devaient être récupérés. La décision attaquée indique, ensuite, au considérant 29, que les services du Parlement ont constaté que l’authenticité d’une relation de travail effective entre le requérant et les assistants parlementaires n’avait pas été établie et que, dans ces circonstances, le Parlement avait indûment payé les rémunérations de ces derniers (comprenant le salaire de base, les allocations familiales et l’indemnité d’expatriation), à savoir 200 833,65 euros pour M. E. et 55 088,63 euros pour M. V., et que ces montants devaient donc être récupérés. Enfin, aux considérants 42 à 46 de la décision attaquée, il est procédé à l’analyse des arguments avancés par le requérant dans les observations du 2 mai 2017. À cet égard, la décision attaquée indique, au considérant 46, que les activités extérieures des assistants en cause et leurs absences consécutives de leur lieu de travail pendant les heures de travail ont été établies par le rapport de l’OLAF et que, de plus, le requérant n’avait pas fourni de preuve documentaire supplémentaire ni d’explication dans le délai imparti. Selon la décision attaquée, il n’y a pas suffisamment de preuve en faveur de la prise en charge des frais d’assistance parlementaire pour M. E. et M. V. en conformité avec les articles 12 ter, 20 et 60 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne, les articles 5 bis, 127 et 131 du RAA et les articles 33, paragraphe 1, 39 bis et 62 des mesures d’application.
34 Il est conclu, au considérant 47 de la décision attaquée, que le requérant n’a pas fourni la preuve qu’il avait effectivement engagé les frais de voyage en cause ainsi que les frais liés aux contrats de M. E. et de M. V. et, au considérant 49 de ladite décision, que les montants remboursés à cet égard doivent être récupérés.
35 Il résulte de ce qui précède que la décision attaquée expose, à suffisance de droit, les motifs pour lesquels la somme en cause doit être récupérée ainsi que les modalités de fixation de son montant.
36 Il s’ensuit que le septième moyen doit être rejeté.
Sur le deuxième moyen, tiré de la violation des droits de la défense ainsi que des principes du procès équitable et d’égalité des armes
37 Le requérant indique qu’il a demandé que lui soient communiqués les éléments sur lesquels reposait la décision attaquée afin de pouvoir présenter ses observations. Le secrétaire général du Parlement n’ayant pas fait droit à cette demande, les droits de la défense du requérant ainsi que les principes du procès équitable et d’égalité des armes auraient été violés. Dans ce contexte, le requérant souligne que, en vertu de la loi hongroise, il n’a pas l’obligation de conserver des pièces justificatives datant de 2010 et de 2011, de sorte que ce n’est qu’après avoir pris connaissance des éléments dont disposait le Parlement qu’il a pu formuler des observations. Il souligne également, dans la réplique, que, eu égard aux griefs figurant dans la lettre du 24 janvier 2017, les observations qu’il pouvait présenter à cet égard concernaient la résidence habituelle de M. E. et de M. V. et leurs activités extérieures. Or, la décision attaquée lui reprocherait de ne pas avoir réussi à prouver que M. E. et M. V. avaient effectivement travaillé comme assistants parlementaires. Eu égard à ces différences entre les griefs formulés, le requérant estime qu’il n’était pas en mesure, au moment de présenter des observations, d’offrir la preuve d’un travail effectif de M. E. et de M. V.
38 Le Parlement souligne que la lettre du 24 janvier 2017 expose en détail les faits allégués de sorte que le requérant a été mis en mesure de faire connaître utilement son point de vue et d’exercer ses droits de la défense. Le requérant aurait d’ailleurs pris position sur ces faits. Quant à la demande de communication des éléments de preuve sur lesquels le rapport de l’OLAF est fondé, la décision attaquée indique que ni l’OLAF ni le Parlement n’ont l’obligation de transmettre le rapport établi par l’OLAF au député concerné. Le requérant aurait néanmoins été informé, par la lettre du 24 janvier 2017, des principales conclusions du rapport de l’OLAF. S’agissant de l’argument concernant l’obligation de conserver des pièces justificatives, le Parlement rétorque qu’il incombe au député d’être en mesure de produire de telles pièces et, partant, de les conserver. Il souligne également que la réalité du travail d’un assistant parlementaire peut être attestée par de nombreux éléments de preuve concrets. Selon le Parlement, le requérant était en mesure d’apporter des preuves pour réfuter les faits qui lui étaient reprochés. Quant à l’allégation concernant les divergences entre la lettre du 24 janvier 2017 et la décision attaquée, le Parlement conteste toute divergence entre celles-ci. En effet, selon le Parlement, après la lettre du 24 janvier 2017, il devait être clair pour le requérant que, s’il ne soumettait pas des preuves établissant l’utilisation des montants en cause en conformité avec les mesures d’application, le secrétaire général du Parlement considérerait ces montants comme indûment versés et en ordonnerait le recouvrement. De l’avis du Parlement, le requérant était, sur la base de la lettre du 24 janvier 2017, en mesure de comprendre qu’il devait les fournir pour éviter le recouvrement.
39 À cet égard, il convient de relever d’emblée que l’argumentation relative à l’obligation de conservation des pièces justificatives a principalement trait à la question de l’administration de la preuve et sera examinée dans le cadre du troisième moyen.
40 Ensuite, il y a lieu de rappeler que le respect des droits de la défense, dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci, constitue un principe fondamental du droit de l’Union européenne et doit être assuré même en l’absence de réglementation concernant la procédure en cause (voir ordonnance du 12 mai 2010, CPEM/Commission, C‑350/09 P, non publiée, EU:C:2010:267, point 75 et jurisprudence citée).
41 En l’espèce, le requérant soutient que les affirmations figurant dans la décision attaquée doivent être étayées par des preuves, en particulier celles concernant le fait qu’il a voyagé à quatre reprises avec une compagnie aérienne à bas coûts, que le type de carburant utilisé par la voiture dont il s’est servi ne correspond pas à celui figurant sur les factures communiquées aux fins du remboursement, que les trajets reconstitués à partir des factures ne correspondent pas à ceux indiqués dans les demandes de remboursement, que M. V. était déclaré comme exerçant son activité principale en Hongrie, que M. E. travaillait comme architecte d’intérieur et était résident à Vienne (Autriche) et que la présence de M. E. et de M. V. au Parlement n’a été qu’occasionnelle. Or, malgré ses demandes, le secrétaire général du Parlement ne lui aurait pas fourni les pièces sur lesquelles reposaient lesdites allégations factuelles.
42 À cet égard, tout d’abord, il y a lieu de rappeler que l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, intitulé « Droit à une bonne administration », prévoit, en son paragraphe 2, sous b), que toute personne a un droit d’accès au dossier qui la concerne, dans le respect des intérêts légitimes de la confidentialité et du secret professionnel et des affaires. Ce droit d’accès au dossier implique que l’institution en cause doit donner à la personne concernée la possibilité de procéder à un examen de la totalité des documents figurant dans le dossier d’instruction qui sont susceptibles d’être pertinents pour sa défense.
43 Ensuite, il convient de relever que, selon l’article 10, paragraphe 2, du règlement (UE, Euratom) no 883/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 11 septembre 2013, relatif aux enquêtes effectuées par l’OLAF et abrogeant le règlement (CE) no 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil et le règlement (Euratom) no 1074/1999 du Conseil (JO 2013, L 248, p. 1), les informations transmises ou obtenues dans le cadre des enquêtes internes, sous quelque forme que ce soit, sont couvertes par le secret professionnel et bénéficient de la protection accordée par les dispositions applicables aux institutions de l’Union.
44 Il est, en outre, à souligner que l’article 11, paragraphe 4, du règlement no 883/2013 prévoit que le rapport établi à la suite d’une enquête interne et tout document utile y afférent sont transmis à l’institution, à l’organe ou à l’organisme concerné, lequel doit donner à l’enquête les suites, notamment disciplinaires et judiciaires, que ses résultats appellent. En revanche, aucune disposition ne prévoit que le rapport d’enquête soit communiqué à la personne concernée (voir, par analogie, arrêt du 18 mai 2017, Panzeri/Parlement, T‑166/16, non publié, EU:T:2017:347, point 98).
45 Enfin, il doit être noté que, selon la jurisprudence, le cadre législatif applicable à l’OLAF exclut, en principe, un droit d’accès au dossier de l’OLAF par les personnes concernées et que ce n’est que si les autorités destinataires du rapport final de l’OLAF ont l’intention d’adopter des actes faisant grief aux personnes concernées que ces autorités devraient, conformément aux règles procédurales qui leur sont applicables, donner accès au rapport final de l’OLAF pour permettre à ces personnes d’exercer leurs droits de la défense (arrêt du 26 mai 2016, International Management Group/Commission, T‑110/15, EU:T:2016:322, point 36).
46 En l’espèce, il convient de relever, d’une part, que le requérant n’a eu accès ni au rapport de l’OLAF, ni au dossier de celui-ci et, d’autre part, que les éléments de preuve sur lesquels reposent les allégations factuelles figurant dans la lettre du 24 janvier 2017 et dans la décision attaquée ne lui ont pas été communiqués, ce qui a été confirmé lors de l’audience. En particulier, s’agissant des frais de voyage, la décision attaquée évoque des anomalies relatives à des voyages en voiture, concernant notamment la réalisation de trajets en avion plutôt qu’en voiture et l’adéquation entre le carburant requis par les véhicules utilisés et les factures de carburant. S’agissant des frais d’assistance parlementaire, la décision attaquée évoque des constats concernant les activités extérieures et les lieux de résidence de M. E. et de M. V. Or, aucun élément se rapportant à ces constats n’a été communiqué au requérant.
47 Certes, dans la lettre du 24 janvier 2017, le secrétaire général du Parlement a présenté au requérant les principales conclusions du rapport de l’OLAF, l’a informé de l’ouverture d’une procédure au titre de l’article 68 des mesures d’application et l’a invité à présenter ses observations dans un délai d’un mois et à produire tout élément qui pourrait remettre en cause les constats préliminaires en cause.
48 À cet égard, il importe de relever que, par la lettre du 24 janvier 2017, le secrétaire général du Parlement a respecté le droit du requérant d’être entendu. En effet, la mise en œuvre du droit d’être entendu n’implique pas nécessairement une audition de la personne concernée, la possibilité de présenter des observations par écrit permettant également de satisfaire audit droit (arrêt du 29 novembre 2017, Bilde/Parlement, T‑633/16, non publié, EU:T:2017:849, point 101). Il convient donc de rejeter les arguments du requérant développés lors de l’audience et relatifs à la circonstance qu’il n’a pas été auditionné par le secrétaire général du Parlement.
49 D’ailleurs, les observations du 2 mai 2017, présentées à la suite de la lettre du 24 janvier 2017, sont circonstanciées et concernent tant les frais de voyage que les frais d’assistance parlementaire.
50 Afin de déterminer si, dans ces circonstances, le requérant a été mis en mesure de faire valablement valoir ses droits de la défense, il y a lieu d’opérer une distinction entre les frais d’assistance parlementaire et les frais de voyage.
51 En ce qui concerne, d’une part, les frais d’assistance parlementaire, le secrétaire général du Parlement a indiqué au requérant, dans la lettre du 24 janvier 2017, les motifs pour lesquels il considérait que la réalité d’une relation de travail effective entre lui et les deux assistants parlementaires n’apparaissait pas établie. Il incombait dès lors au requérant de présenter ses observations à cet égard et de produire les éléments permettant d’attester de la réalité de ces relations, comme lui en a donné l’occasion ladite lettre. À cet effet, il n’était pas nécessaire que le Parlement lui communique préalablement les documents l’ayant conduit à avoir des doutes à cet égard, mais qu’il expose de manière circonstanciée, ainsi que cela a été le cas en l’espèce (voir point 33 ci-dessus), les motifs pour lesquels il nourrissait de tels doutes. II était, ensuite, tout à fait possible pour le requérant de produire des éléments pertinents démontrant la réalité des relations en cause ou contredisant les allégations du secrétaire général du Parlement relatives, notamment, à la résidence des assistants parlementaires, à leur présence sur le lieu de travail ainsi qu’à leurs activités extérieures. Il s’ensuit qu’il n’était pas nécessaire pour que le requérant puisse faire valablement valoir ses droits de la défense que le Parlement lui communique les pièces relatives aux doutes qu’il nourrissait quant à la réalité du travail desdits assistants. Il s’ensuit également que c’est à tort que le requérant invoque une divergence entre les griefs figurant dans la lettre du 24 janvier 2017 et ceux figurant dans la décision attaquée et qu’il prétend que, au moment de présenter ses observations à la suite de ladite lettre, il n’était pas en mesure d’offrir la preuve de l’exercice effectif du travail des assistants parlementaires. D’ailleurs, le requérant a expressément indiqué dans les observations du 2 mai 2017 qu’il pouvait produire des preuves documentaires abondantes attestant que lesdits assistants l’avaient assisté, mais qu’il ne les joignait pas auxdites observations parce qu’elles étaient « trop volumineuses ». Dans ces conditions, il convient de rejeter le présent moyen en tant qu’il a trait aux frais d’assistance parlementaire.
52 En ce qui concerne, d’autre part, les frais de voyage, il y a lieu de souligner, à titre liminaire, que, ainsi qu’il ressort des mesures d’application, ces frais font l’objet d’un remboursement sur la base de documents de voyage ainsi que de pièces justificatives, qui doivent être fournies par le député concerné lors de l’introduction de sa demande de remboursement. Cette situation se distingue ainsi du paiement des frais d’assistance parlementaire, lequel est effectué sans que le requérant ne fournisse, à cet effet, d’éléments démontrant la conformité desdits frais avec les mesures d’application. C’est ainsi que, alors que, s’agissant des frais d’assistance parlementaire, il incombe au député concerné d’établir leur conformité avec les mesures d’application après que le Parlement a émis, sur la base d’indices, des doutes à cet égard, il appartient à cette institution, s’agissant des frais de voyage, d’établir de manière précise, sur la base des éléments en sa possession, les griefs concernant la non-conformité de ceux-ci avec les mesures d’application, en permettant au député concerné de réfuter ces allégations, ce qui implique la communication desdits éléments. En l’espèce, s’agissant des frais de voyage, la décision attaquée se fonde sur des allégations factuelles spécifiques et circonstanciées. Il ressort ainsi de ladite décision et des explications fournies à cet égard lors de l’audience que ces allégations sont fondées sur des éléments fournis par le requérant lors de l’introduction de ses demandes de remboursement de frais de voyage ainsi que, le cas échéant, sur d’autres éléments recueillis, notamment, par l’OLAF, les autorités antifraude hongroises ou le Parlement. Or, force est de constater que, pour que le requérant puisse adéquatement faire valoir son point de vue et utilement réfuter les allégations en cause, il était nécessaire que lui soient communiqués les éléments de preuve sur lesquels le Parlement se fondait pour établir lesdites allégations, à savoir tant les éléments qu’il n’avait pas fournis que ceux qu’il avait communiqués lors de l’introduction de ses demandes de remboursement. Tel était d’autant plus le cas que les faits auxquels se rapportaient ces allégations étaient très anciens et que les pièces justificatives concernant les voyages en cause avaient dû être communiquées au Parlement lors de l’introduction des demandes de remboursement, de sorte que la nécessité pour le requérant d’en conserver une copie pouvait lui sembler inutile. Il importait donc que le requérant puisse avoir accès aux éléments sur lesquels reposaient les allégations concernant les frais de voyage évoquées par le secrétaire général du Parlement dans la lettre du 24 janvier 2017. Or, tel n’a pas été le cas. Dans ces conditions, il y a lieu de constater que, en ne communiquant pas au requérant les éléments sur lesquels reposaient les allégations relatives aux frais de voyage, le Parlement a violé les droits de la défense du requérant.
53 Certes, il ressort de la jurisprudence que, en présence d’une éventuelle irrégularité procédurale, il incombe au juge de vérifier si, en fonction des circonstances de fait et de droit spécifiques de l’espèce, la procédure en cause aurait pu aboutir à un résultat différent si la partie requérante avait pu mieux assurer sa défense en l’absence de cette irrégularité (voir, en ce sens, arrêts du 17 décembre 2009, Réexamen M/EMEA, C‑197/09 RX-II, EU:C:2009:804, point 52 et jurisprudence citée, et du 6 septembre 2012, Storck/OHMI, C‑96/11 P, non publié, EU:C:2012:537, point 80 et jurisprudence citée).
54 Toutefois, en l’espèce, ainsi qu’il découle de ce qui précède, afin de contester utilement les allégations relatives aux frais de voyage évoquées par le secrétaire général du Parlement dans la lettre du 24 janvier 2017, il était nécessaire que le requérant se voie communiquer les éléments sur lesquels elles étaient fondées. Si tel avait été le cas, et que le requérant avait pu mieux assurer sa défense, il ne saurait être exclu que la procédure ait abouti à un résultat différent.
55 Il résulte de ce qui précède que la décision attaquée ainsi que, par voie de conséquence, la note de débit doivent être annulées en tant qu’elles ont trait aux frais de voyage, pour un montant de 8 273,83 euros.
56 Les autres moyens soulevés par le requérant ne seront donc examinés que pour autant qu’ils sont dirigés contre la décision attaquée, en tant qu’elle a trait aux frais d’assistance parlementaire.
Sur le premier moyen, tiré d’erreurs de fait
57 Le requérant conteste les faits constatés dans la décision attaquée, notamment en ce qui concerne les remboursements de frais d’assistance parlementaire.
58 Le Parlement objecte que le requérant n’avance aucune argumentation juridique au soutien de ses affirmations et n’invoque aucune disposition qui aurait été violée. Le premier moyen serait donc irrecevable.
59 À cet égard, il convient de relever que, par ce moyen, le requérant indique contester les faits tels qu’ils sont établis dans la décision attaquée. En ce qui concerne les frais d’assistance parlementaire, il indique que, pendant la période concernée, tant M. V. que M. E. l’ont aidé dans son travail de député à Bruxelles (Belgique) et à Strasbourg (France) et qu’il n’avait pas connaissance que M. V. était déclaré comme exerçant son activité principale en Hongrie et que M. E. aurait travaillé comme architecte d’intérieur et était résident à Vienne.
60 Force est cependant de constater que le requérant procède par pure affirmation, qu’il ne développe aucune argumentation juridique cohérente et n’avance aucun élément de preuve visant à démontrer que, en considérant qu’un montant de 255 922,28 euros avait été indûment versé au titre de frais d’assistance parlementaire en rapport avec les contrats de travail de M. E. et de M. V., le secrétaire général du Parlement aurait commis des erreurs de fait. En particulier, il n’a pas produit, au soutien du présent recours, les prétendues preuves documentaires abondantes qui attesteraient que les assistants parlementaires l’avaient assisté, preuves évoquées dans les observations du 2 mai 2017 et, ainsi qu’il l’a d’ailleurs expressément reconnu lors de l’audience, jamais communiquées au secrétaire général du Parlement.
61 Il s’ensuit que le premier moyen doit être rejeté comme manifestement non fondé, sans même qu’il soit nécessaire d’examiner la fin de non-recevoir soulevée par le Parlement.
Sur le troisième moyen, tiré de l’inversion de la charge de la preuve et sur le quatrième moyen, tiré de l’absence de fondement juridique de la récupération des sommes en cause
62 Le requérant indique, dans le cadre du troisième moyen, que la jurisprudence invoquée par le secrétaire général du Parlement, selon laquelle il appartient au député d’apporter les éléments de preuve de la régularité des dépenses, n’est pas pertinente. En effet, elle concernerait des faits auxquels la réglementation concernant les frais et indemnités des députés au Parlement était applicable et non, comme en l’espèce, le règlement (CE) no 160/2009 du Conseil, du 23 février 2009, modifiant le RAA (JO 2009, L 55, p. 1). Or, selon le requérant, depuis l’entrée en vigueur dudit règlement, la charge de la preuve du travail des assistants parlementaires accrédités ne peut plus reposer sur le député, dès lors que c’est le Parlement, et non le député, qui conclut le contrat avec ceux-ci et les rémunère. Le requérant ajoute, dans la réplique, que les preuves documentaires concernant les contrats en cause, leur durée et les sommes y afférentes sont en possession du Parlement et non en sa possession.
63 Le requérant souligne, dans le contexte du quatrième moyen, que, contrairement aux assistants locaux, les assistants parlementaires accrédités sont employés par le Parlement, qui les paie directement, et qu’un député n’est pas partie aux contrats conclus avec ceux-ci. Partant, faute de lien et de fondement juridiques, il n’existerait aucune obligation de remboursement du requérant à l’égard du Parlement.
64 Le Parlement conteste l’argumentation développée par le requérant au soutien des troisième et quatrième moyens.
65 À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’article 33, paragraphe 1, seconde phrase, des mesures d’application, le Parlement prend en charge les frais effectivement engagés et résultant entièrement et exclusivement de l’engagement d’un ou de plusieurs assistants.
66 Conformément à l’article 33, paragraphe 2, première phrase, des mesures d’application, seuls peuvent être pris en charge les frais correspondant à l’assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat parlementaire des députés.
67 L’article 33, paragraphe 4, des mesures d’application fixe, en outre, le montant mensuel maximal des frais pris en charge pour tous les collaborateurs personnels visés à l’article 34 desdites mesures, à savoir les assistants parlementaires accrédités et les assistants locaux.
68 Selon la jurisprudence, dans l’hypothèse d’un contrôle ayant trait à l’utilisation des frais d’assistance parlementaire, le député concerné doit être en mesure de prouver que les montants perçus ont été utilisés afin de couvrir les dépenses effectivement engagées et résultant entièrement et exclusivement de l’engagement d’un ou de plusieurs assistants, comme le prévoit l’article 33, paragraphe 1, seconde phrase, des mesures d’application (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 10 octobre 2014, Marchiani/Parlement, T‑479/13, non publié, EU:T:2014:866, point 54 et jurisprudence citée).
69 À cet égard, il convient de préciser que, contrairement à ce que prétend le requérant, la circonstance que la jurisprudence évoquée dans la décision attaquée, et rappelée au point 68 ci-dessus, concerne des situations relevant de la réglementation concernant les frais et indemnités des députés au Parlement et non, comme en l’espèce, du RAA, tel que notamment modifié par le règlement no 160/2009, est sans pertinence.
70 En effet, d’une part, cette jurisprudence a également été appliquée par le juge de l’Union à des faits concernant un assistant parlementaire accrédité et relevant du RAA, tel que notamment modifié par le règlement no 160/2009 (arrêt du 19 juin 2018, Le Pen/Parlement, T‑86/17, non publié, EU:T:2018:357, point 126).
71 D’autre part, le fait, relevé par le requérant, que le député n’a pas de lien contractuel avec les assistants parlementaires accrédités est sans influence sur la possibilité, pour le Parlement, de récupérer auprès dudit député des sommes indûment versées à un tel assistant. En effet, tout d’abord, s’il découle de l’article 5 bis du RAA que l’assistant parlementaire accrédité est engagé sous contrat direct avec le Parlement pour apporter une assistance directe à un député dans l’exercice de ses fonctions de député au Parlement, il n’en demeure pas moins qu’il ressort également de cette disposition que l’assistant parlementaire accrédité est choisi par ce député et qu’il exerce ses fonctions sous sa direction et son autorité, et ce dans une relation de confiance mutuelle. Ensuite, le traitement d’un assistant parlementaire accrédité est prélevé sur la dotation d’assistance parlementaire allouée au député qui l’a choisi, laquelle est fixée par l’article 33, paragraphe 4, des mesures d’application. Il est d’ailleurs à noter que le montant mensuel maximal des frais d’assistance parlementaire pris en charge que fixe cette dernière disposition concerne tant les assistants parlementaires accrédités que les assistants locaux. En outre, l’article 33, paragraphe 1, des mesures d’application ne distingue pas en fonction de la catégorie d’assistant parlementaire concernée, le Parlement ne prenant en charge que les frais effectivement engagés et résultant entièrement et exclusivement de l’engagement d’un ou de plusieurs assistants, qu’il s’agisse d’assistants parlementaires accrédités ou d’assistant locaux. Par ailleurs, en vertu de l’article 62, paragraphe 1, des mesures d’application, les montants versés en vertu des mesures d’application, et notamment de leur article 33, sont exclusivement réservés au financement d’activités liées à l’exercice du mandat des députés. Enfin, l’article 68, paragraphe 1, des mesures d’application précise, d’une part, que toute somme indûment versée en application des mesures d’application donne lieu à répétition et, d’autre part, que le secrétaire général du Parlement donne des instructions en vue du recouvrement de ces sommes « auprès du député concerné », et ce sans distinguer selon que les sommes en cause ont été versées en raison ou non d’un lien contractuel avec le député. Certes, l’article 68, paragraphe 3, des mesures d’application prévoit que ledit article peut également s’appliquer aux tiers, et donc à des assistants parlementaires. Toutefois, eu égard, notamment, au lien de subordination existant entre un assistant parlementaire accrédité et le député à qui il fournit une assistance, à la circonstance que les frais d’assistance parlementaire sont uniquement destinés au financement d’activités liées à l’exercice du mandat du député et au fait que ces frais sont prélevés sur la dotation d’assistance parlementaire allouée à celui-ci, il y a lieu de considérer que le député est responsable de l’usage de cette dotation en conformité avec les mesures d’application et, le cas échéant, tenu au remboursement de sommes indûment versées à un assistant parlementaire accrédité.
72 Quant à l’argument du requérant avancé dans le cadre du deuxième moyen (voir points 37 et 39 ci-dessus) selon lequel, en vertu de la loi hongroise, il n’a pas l’obligation de conserver des pièces justificatives datant de 2010 et de 2011, il est sans pertinence. En effet, outre la circonstance que le droit hongrois n’est pas applicable dans le cadre d’une procédure au titre de l’article 68 des mesures d’application, un député doit pouvoir produire des pièces justifiant d’une utilisation conforme aux mesures d’application, de sorte qu’il lui incombe d’être en mesure de produire de telles pièces et, partant, de les conserver, et ce même en l’absence de disposition du droit de l’Union imposant de conserver les traces de la relation de travail entre le député et son assistant (voir, en ce sens, arrêt du 7 mars 2018, Gollnisch/Parlement, T‑624/16, non publié, EU:T:2018:121, point 111).
73 Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que c’est au député concerné de prouver que les montants perçus ont été utilisés, conformément à l’article 33 des mesures d’application, afin de couvrir les dépenses effectivement engagées et résultant entièrement et exclusivement de l’engagement d’un ou de plusieurs assistants et qu’il est loisible au secrétaire général du Parlement de procéder, sur le fondement de l’article 68, paragraphe 1, des mesures d’application, au recouvrement de sommes indûment versées à un assistant parlementaire accrédité auprès d’un député.
74 Il s’ensuit que les troisième et quatrième moyens doivent être rejetés.
Sur le sixième moyen, tiré de l’absence de pertinence de l’article 39 bis des mesures d’application
75 Le requérant souligne que la décision attaquée se réfère à l’article 39 bis des mesures d’application, alors que la décision du bureau du Parlement du 26 octobre 2015 modifiant les mesures d’application (JO 2015, C 397, p. 2) et insérant ledit article n’est applicable que depuis le 1er janvier 2016. La référence serait donc sans pertinence.
76 Le Parlement rétorque que la décision attaquée est fondée sur le fait que le requérant n’a pas fourni d’éléments de preuve aptes à prouver que les frais d’assistance parlementaire avaient été pris en charge en conformité avec l’article 33, paragraphes 1 et 2, des mesures d’application.
77 À cet égard, il y a lieu de constater qu’il ressort en substance de la décision attaquée, dans la mesure où celle-ci concerne les frais d’assistance parlementaire, que les dépenses engagées en l’espèce l’ont été en violation, notamment, de l’article 39 bis des mesures d’application.
78 Or, d’une part, force est de constater, à l’instar du requérant, que l’article 39 bis des mesures d’application, concernant les obligations dans le cadre du contrat de travail, a été introduit par l’article 1er, point 5, de la décision du bureau du Parlement du 26 octobre 2015, lequel s’applique, en vertu de l’article 2, second alinéa, de cette même décision, à partir du 1er janvier 2016. Il s’ensuit que l’article 39 bis des mesures d’application n’est pas applicable ratione temporis aux faits de l’espèce. D’autre part, il est à relever que, conformément à l’article 34, paragraphe 3, des mesures d’application, les articles 35 à 42 de ces dernières ne s’appliquent pas aux assistants parlementaires accrédités. Partant, l’article 39 bis des mesures d’application n’est pas applicable ratione materiae aux faits de l’espèce.
79 Il s’ensuit que c’est à tort que le Parlement s’est référé, dans la décision attaquée, à l’article 39 bis des mesures d’application.
80 Cette conclusion est toutefois sans influence sur la légalité de la décision attaquée. En effet, cette dernière n’est pas fondée, dans la mesure où elle concerne les frais d’assistance parlementaire, uniquement sur la violation de l’article 39 bis des mesures d’application, mais sur la violation de plusieurs dispositions des mesures d’application. Il ressort ainsi de la décision attaquée que c’est notamment la non-conformité des dépenses engagées au titre de l’assistance parlementaire avec l’article 33, paragraphe 1, des mesures d’application qui justifie la récupération des sommes en cause.
81 Il s’ensuit que le sixième moyen doit être rejeté comme inopérant.
Sur le huitième moyen, relatif aux articles 13 et 15 des mesures d’application
82 Le requérant indique que, conformément à l’article 15 des mesures d’application, le remboursement des frais de voyage est calculé sur la base des kilomètres parcourus et non des frais de carburant, de sorte que le type de carburant utilisé par le véhicule en cause est sans pertinence. Il souligne également que, en vertu de l’article 13 des mesures d’application, seuls le lieu et la date sont pertinents parmi les données figurant sur les factures et quittances délivrées par les stations-services, lesdites mesures ne permettant pas de tirer des conclusions supplémentaires sur la base d’autres données.
83 Il convient d’emblée de relever que ce moyen a trait aux considérations de la décision attaquée relatives aux frais de voyage. Aussi, eu égard à l’annulation partielle de la décision attaquée en tant qu’elle a trait auxdits frais (voir point 55 ci-dessus) et conformément au point 56 ci-dessus, il n’y a pas lieu de se prononcer sur le présent moyen.
Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation du principe de proportionnalité
84 Le requérant estime que, à supposer que les assistants parlementaires aient exercé des activités extérieures, cela ne justifierait pas la récupération des sommes en cause. En effet, l’absence d’autorisation de l’administration pour exercer de telles activités ne saurait être sanctionnée par l’obligation de rembourser la totalité desdites sommes.
85 Le Parlement rétorque que, vu le lien de subordination entre les assistants parlementaires et le requérant, il incombait à ce dernier d’interdire les activités étrangères à l’assistance parlementaire desdits assistants. Selon le Parlement, étant donné que le requérant n’a fourni aucune preuve d’une quelconque activité de ceux-ci au titre de l’assistance parlementaire, toutes les sommes qui leur ont été versées ont été indûment payées et pouvaient être récupérées.
86 À cet égard, il convient de relever d’emblée que, contrairement à ce que laisse entendre le requérant, l’obligation de récupération des sommes indûment versées au titre des frais d’assistance parlementaire n’est pas fondée uniquement et spécifiquement sur la circonstance que M. V. et M. E. ont exercé des activités extérieures sans autorisation. En effet, en ce qui concerne lesdits frais, la décision attaquée se fonde, de manière générale, sur le fait que le requérant n’a pas rapporté la preuve que les dépenses engagées en relation avec les contrats de M. V. et de M. E. étaient régulières, ainsi qu’il découle notamment du considérant 47 de la décision attaquée.
87 Ensuite, il y a lieu de rappeler que le principe de proportionnalité constitue un principe général du droit de l’Union, qui exige que les actes des institutions de l’Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause (voir arrêt du 17 octobre 2013, Schaible, C‑101/12, EU:C:2013:661, point 29 et jurisprudence citée).
88 Toutefois, le Parlement ne dispose, s’agissant de la répétition de sommes indues, en vertu de l’article 68, paragraphe 1, première phrase, des mesures d’application, d’aucune marge d’appréciation quant au montant à recouvrer. En effet, en vertu de cette disposition, toute somme indûment versée en application des mesures d’application donne lieu à répétition.
89 Or, dès lors qu’il n’a pas été établi, dans le cadre de l’examen du présent recours, que le Parlement avait estimé à tort, d’une part, qu’il n’avait pas été démontré par le requérant que M. V. et M. E. assuraient des tâches en conformité, notamment, avec les mesures d’application et, d’autre part, que, partant, les sommes qui leur avaient été versées au titre des frais d’assistance parlementaire ne l’avaient pas été conformément à celles-ci, le Parlement était tenu par une obligation inconditionnelle de recouvrer l’intégralité des sommes versées en application des contrats conclus avec ceux-ci.
90 Ainsi, à défaut de marge d’appréciation dans l’exécution de cette obligation inconditionnelle lui incombant, le Parlement n’a pas agi de manière disproportionnée en ordonnant la récupération des sommes versées au titre des frais d’assistance parlementaire.
91 Il s’ensuit que le cinquième moyen doit être rejeté.
Sur les demandes de mesure d’instruction
92 Le requérant demande, dans la requête, que M. V. et M. E. soient entendus en qualité de témoins. Il a également demandé, par acte séparé, à comparaître à titre personnel, tout en réitérant la demande d’audition de M. V. et de M. E. en qualité de témoins.
93 Le Parlement s’oppose à l’audition de M. V. et de M. E. comme témoins ainsi qu’à la comparution personnelle du requérant.
94 À cet égard, il convient de rappeler que c’est au Tribunal qu’il appartient d’apprécier l’utilité de mesures d’instruction (voir arrêt du 22 février 2000, ACAV e.a./Conseil, T‑138/98, EU:T:2000:45, point 72 et jurisprudence citée).
95 Or, à la lumière des éléments du dossier et au vu des moyens, griefs et arguments invoqués par le requérant, il apparaît que l’audition de M. V. et de M. E. comme témoins n’est ni pertinente ni nécessaire pour statuer sur le présent litige. À cet égard, il y a lieu de souligner que c’est à tort que le requérant soutient que le refus d’une telle audition exclura la possibilité de prouver que les assistants parlementaires ont accompli leur travail en conformité avec leur contrat. En effet, il aurait notamment été possible au requérant d’apporter une telle preuve dans le cadre de la procédure devant le Parlement à la suite de la lettre du 24 janvier 2017.
96 En tout état de cause, les éléments contenus dans le dossier et les explications données lors de l’audience sont suffisants pour permettre au Tribunal de se prononcer, celui-ci ayant pu utilement statuer sur la base des conclusions, des moyens et des arguments développés en cours d’instance et au vu des documents déposés par les parties.
97 Il y a donc lieu de rejeter la demande d’audition de M. V. et de M. E. comme témoins ainsi que la demande de comparution personnelle du requérant.
Sur les dépens
98 Aux termes de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure, chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. En l’espèce, il y a lieu de décider que le requérant et le Parlement supporteront chacun leurs propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (sixième chambre)
déclare et arrête :
1) La décision du secrétaire général du Parlement du 30 novembre 2017 relative au recouvrement auprès de M. Csanád Szegedi d’une somme de 264 196,11 euros et la note de débit y afférente du 19 décembre 2017 sont annulées en tant qu’elles ont trait à des sommes versées au titre des frais de voyage, pour un montant de 8 273,83 euros.
2) Le recours est rejeté pour le surplus.
3) M. Szegedi et le Parlement européen supporteront chacun leurs propres dépens.
Berardis | Papasavvas | Spineanu-Matei |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 juin 2019.
Signatures
* Langue de procédure : le hongrois.
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