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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Le Pen v Parliament (Order) French Text [2019] EUECJ T-211/19_CO (25 October 2019) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2019/T21119_CO.html Cite as: EU:T:2019:776, [2019] EUECJ T-211/19_CO, ECLI:EU:T:2019:776 |
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ORDONNANCE DU TRIBUNAL (septième chambre)
25 octobre 2019 (*)
« Droit institutionnel – Membre du Parlement européen – Privilèges et immunités – Décision de levée de l’immunité parlementaire – Expiration du mandat de député – Disparition de l’intérêt à agir – Non-lieu à statuer »
Dans l’affaire T‑211/19,
Jean-Marie Le Pen, demeurant à Saint-Cloud (France), représenté par Me F. Wagner, avocat,
partie requérante,
contre
Parlement européen, représenté par M. N. Görlitz et Mme C. Burgos, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision P8_TA(2019)0136 du Parlement, du 12 mars 2019, de lever l’immunité parlementaire du requérant,
LE TRIBUNAL (septième chambre),
composé, lors des délibérations, de Mmes V. Tomljenović, présidente, A. Marcoulli (rapporteure) et M. A. Kornezov, juges,
greffier : M. E. Coulon,
rend la présente
Ordonnance
Antécédents du litige
1 Le requérant, M. Jean-Marie Le Pen, a été élu à plusieurs reprises député au Parlement européen, notamment au titre des sixième, septième et huitième législatures, lesquelles couvrent la période allant du mois de juillet 2004 au mois de juillet 2019.
2 Le 9 mars 2015, le président du Parlement a adressé une lettre au garde des Sceaux, ministre de la Justice français, concernant d’éventuelles irrégularités relatives à la prise en charge des frais d’assistance parlementaire de députés du Front national, parti politique français.
3 À la suite de cette information, les autorités françaises ont mené une enquête préliminaire. Le 5 décembre 2016, une information judiciaire des chefs d’abus de confiance, de recel d’abus de confiance, d’escroquerie en bande organisée, de faux et usage de faux et de travail dissimulé par dissimulation de salarié concernant les conditions d’emploi des assistants d’élus du Front national au Parlement a été ouverte. Dans le cadre de cette procédure, le requérant a été convoqué le 21 juin 2018 par les enquêteurs puis son conseil a été contacté par les magistrats instructeurs dans le courant du mois de juillet 2018 aux fins d’organiser un interrogatoire de première comparution. Le requérant a opposé son immunité parlementaire européenne.
4 Le 5 septembre 2018, le garde des Sceaux, ministre de la Justice français, a transmis au président du Parlement la requête du procureur général près la cour d’appel de Paris (France) tendant à obtenir la levée de l’immunité parlementaire du requérant.
5 Par décision du 12 mars 2019 (ci-après la « décision attaquée »), le Parlement a levé l’immunité du requérant. En substance, le Parlement a rappelé les éléments à charge contre le requérant qui avaient été mis à jour par l’enquête menée par les autorités françaises et relevé que les magistrats instructeurs estimaient, au vu de ces éléments, que l’audition du requérant était nécessaire. Le Parlement a ensuite rappelé l’article 9 du protocole no 7 sur les privilèges et immunités de l’Union européenne (JO 2010, C 83, p. 266, ci-après le « protocole no 7 ») ainsi que le texte de l’article 26, deuxième alinéa, de la Constitution française et a considéré qu’aucun élément ni raison ne portait à soupçonner l’existence d’un fumus persecutionis.
Procédure et conclusions des parties
6 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 avril 2019, le requérant a introduit le présent recours.
7 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner le Parlement aux dépens.
8 Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 2 juillet 2019, le Parlement a formé une demande de non-lieu à statuer au titre de l’article 130, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal.
9 Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– constater que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu d’y statuer ;
– condamner le requérant aux dépens.
10 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 9 juillet 2019, le requérant a présenté ses observations sur la demande de non-lieu à statuer.
En droit
11 En vertu de l’article 130, paragraphes 2 et 7, du règlement de procédure, si une partie le demande, le Tribunal peut constater que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer.
12 En l’espèce, le Parlement ayant demandé qu’il soit constaté que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, décide de statuer sur cette demande, sans poursuivre la procédure.
Sur le prétendu caractère tardif de la demande de non-lieu à statuer
13 En l’espèce, la demande de non-lieu à statuer a été présentée par le Parlement, par acte déposé au greffe du Tribunal le 2 juillet 2019. Le requérant soutient, en substance, que cet acte a été déposé par le Parlement après l’expiration du délai de deux mois qui lui était accordé, sans qu’il en ait sollicité sa prorogation en vertu de l’article 81, paragraphe 3, du règlement de procédure, ni que la prise en compte d’un tel acte ait été acceptée en application de l’article 62 dudit règlement.
14 Toutefois, il convient de relever que le délai de deux mois fixé à l’article 81, paragraphe 1, du règlement de procédure s’applique au dépôt d’un mémoire en défense, d’une exception d’irrecevabilité ou d’une exception d’incompétence et non au dépôt d’une demande de non-lieu à statuer, laquelle peut être présentée à tout moment de la procédure. Au demeurant, il y a lieu de relever que la requête a été signifiée au Parlement le 23 avril 2019. Ainsi, en tenant compte du délai de deux mois précité et du délai de distance forfaitaire de dix jours prévu à l’article 60 du règlement de procédure, le Parlement disposait d’un délai fixé au 3 juillet 2019 pour déposer un mémoire en défense une exception d’irrecevabilité ou une exception d’incompétence.
15 Il s’ensuit que le requérant n’est pas fondé à soutenir que la demande de non-lieu à statuer serait tardive.
Sur la recevabilité de l’annexe produite par le Parlement
16 Le requérant soutient que le document annexé à la demande de non-lieu à statuer serait irrecevable en l’état dans la mesure où, en violation de l’article 41, paragraphe 4, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, il est rédigé en anglais et n’est pas accompagné d’une traduction dans la langue de procédure.
17 D’emblée, il convient de relever que l’article 41, paragraphe 4, de la charte des droits fondamentaux, selon lequel « [t]oute personne peut s’adresser aux institutions de l’Union dans l’une des langues des traités et doit recevoir une réponse dans la même langue », n’est pas applicable en l’espèce. En effet, la demande de non-lieu à statuer déposée par le Parlement, ainsi que son annexe, ne constitue pas une réponse à une demande du requérant adressée au Parlement mais un acte produit dans le cadre d’une procédure juridictionnelle, par une institution, partie à l’instance.
18 Les règles applicables en matière de traduction des pièces fournies par une partie sont fixées par l’article 46, paragraphes 2 et 3, du règlement de procédure, aux termes duquel :
« 2. Toute pièce produite ou annexée et rédigée dans une langue autre que la langue de procédure est accompagnée d’une traduction dans la langue de procédure.
3. Toutefois, dans le cas de pièces volumineuses, des traductions en extraits peuvent être présentées. À tout moment, le président peut exiger une traduction plus complète ou intégrale, soit d’office, soit à la demande d’une des parties. »
19 En l’espèce, le requérant n’a pas exigé la traduction de l’annexe produite par le Parlement, mais a demandé que cette annexe soit écartée de la procédure.
20 En l’absence d’une demande de traduction formellement présentée par le requérant, il convient donc de déterminer si une traduction de l’annexe litigieuse est nécessaire au bon déroulement de la procédure (voir, en ce sens, arrêt du 15 juin 2010, Mediaset/Commission, T‑177/07, EU:T:2010:233, point 37 et jurisprudence citée).
21 En l’espèce, le Tribunal estime que cette condition de nécessité n’est pas satisfaite. En effet, l’annexe en cause consiste en l’ordre du jour de la séance plénière du Parlement du 2 juillet 2019, lequel n’est utilisé par le Parlement qu’aux fins d’établir la date de la fin du mandat de député du requérant. Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que les éléments pertinents de ce document, limités à son titre et à sa date, ne nécessitent pas de traduction.
22 Il s’ensuit que l’annexe produite par le Parlement est recevable.
Sur la demande de non-lieu à statuer
23 En vertu d’une jurisprudence constante, un recours en annulation intenté par une personne physique ou morale n’est recevable que dans la mesure où cette dernière a un intérêt à voir annuler l’acte attaqué. Un tel intérêt suppose que l’annulation de cet acte soit susceptible, par elle-même, d’avoir des conséquences juridiques et que le recours puisse ainsi, par son résultat, procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté. La preuve d’un tel intérêt, qui s’apprécie au jour où le recours est formé et qui constitue la condition essentielle et première de tout recours en justice, doit être rapportée par le requérant (voir arrêt du 18 octobre 2018, Gul Ahmed Textile Mills/Conseil, C‑100/17 P, EU:C:2018:842, point 37 et jurisprudence citée).
24 Cet intérêt doit, en outre, perdurer jusqu’au prononcé de la décision juridictionnelle, sous peine de non-lieu à statuer (voir arrêt du 17 septembre 2015, Mory e.a./Commission, C‑33/14 P, EU:C:2015:609, point 57 et jurisprudence citée).
25 En effet, si l’intérêt à agir du requérant disparaît au cours de la procédure, une décision du Tribunal sur le fond ne saurait lui procurer un quelconque bénéfice (voir arrêt du 15 décembre 2016, Gul Ahmed Textile Mills/Conseil, T‑199/04 RENV, non publié, EU:T:2016:740, point 47 et jurisprudence citée).
26 Ainsi, il appartient au requérant de justifier de façon pertinente la persistance de son intérêt à agir (voir arrêt du 15 décembre 2016, Gul Ahmed Textile Mills/Conseil, T‑199/04 RENV, non publié, EU:T:2016:740, point 49 et jurisprudence citée).
27 Dans diverses circonstances, le juge de l’Union a reconnu que l’intérêt à agir d’un requérant ne disparaissait pas nécessairement du fait que l’acte attaqué par ce dernier aurait cessé de produire des effets en cours d’instance. Notamment, il a ainsi jugé qu’un requérant pouvait conserver un intérêt à demander l’annulation d’une décision soit pour obtenir une remise en état de sa situation, soit pour amener l’auteur de l’acte attaqué à apporter, à l’avenir, les modifications appropriées et ainsi éviter le risque de répétition de l’illégalité dont l’acte attaqué était prétendument entaché (voir arrêt du 15 décembre 2016, Gul Ahmed Textile Mills/Conseil, T‑199/04 RENV, non publié, EU:T:2016:740, point 50 et jurisprudence citée).
28 Il ressort de cette jurisprudence que la persistance de l’intérêt à agir d’un requérant doit être appréciée in concreto, en tenant compte, notamment, des conséquences de l’illégalité alléguée et de la nature du préjudice prétendument subi (voir arrêt du 15 décembre 2016, Gul Ahmed Textile Mills/Conseil, T‑199/04 RENV, non publié, EU:T:2016:740, point 51 et jurisprudence citée).
29 En l’espèce, il convient de relever que le mandat de député au Parlement du requérant a expiré le 2 juillet 2019, soit postérieurement à la date d’introduction du présent recours. Depuis cette date, le requérant n’a donc plus la qualité de député.
30 À cet égard, premièrement, il y a lieu de rappeler que l’article 8 du protocole no 7 dispose :
« Les membres du Parlement européen ne peuvent être recherchés, détenus ou poursuivis en raison des opinions ou votes émis par eux dans l’exercice de leurs fonctions. »
31 L’article 9 du protocole no 7 dispose :
« Pendant la durée des sessions du Parlement européen, les membres de celui-ci bénéficient :
a) sur leur territoire national, des immunités reconnues aux membres du parlement de leur pays ;
b) sur le territoire de tout autre État membre, de l’exemption de toute mesure de détention et de toute poursuite judiciaire.
L’immunité les couvre également lorsqu’ils se rendent au lieu de réunion du Parlement européen ou en reviennent.
L’immunité ne peut être invoquée dans le cas de flagrant délit et ne peut non plus mettre obstacle au droit du Parlement européen de lever l’immunité d’un de ses membres. »
32 Par ailleurs, l’article 26 de la Constitution française dispose :
« Aucun membre du Parlement [français] ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions.
Aucun membre du Parlement [français] ne peut faire l’objet, en matière criminelle ou correctionnelle, d’une arrestation ou de toute autre mesure privative ou restrictive de liberté qu’avec l’autorisation du Bureau de l’assemblée dont il fait partie. Cette autorisation n’est pas requise en cas de crime ou délit flagrant ou de condamnation définitive.
La détention, les mesures privatives ou restrictives de liberté ou la poursuite d’un membre du Parlement [français] sont suspendues pour la durée de la session si l’assemblée dont il fait partie le requiert.
[…] »
33 L’immunité parlementaire des députés au Parlement, telle que prévue aux articles 8 et 9 du protocole no 7 rappelés aux points 30 et 31 ci-dessus, comprend les deux formes de protection habituellement reconnues aux membres des parlements nationaux des États membres, à savoir l’immunité en raison des opinions et des votes exprimés dans l’exercice des fonctions parlementaires ainsi que l’inviolabilité parlementaire, comportant, en principe, une protection contre les poursuites judiciaires (arrêts du 21 octobre 2008, Marra, C‑200/07 et C‑201/07, EU:C:2008:579, point 24, et du 6 septembre 2011, Patriciello, C‑163/10, EU:C:2011:543, point 18).
34 L’article 8 du protocole no 7, qui constitue une disposition spéciale applicable à toute procédure judiciaire pour laquelle le député européen bénéficie de l’immunité en raison des opinions et des votes exprimés dans l’exercice des fonctions parlementaires, vise à protéger la libre expression et l’indépendance des députés européens, de sorte qu’elle fait obstacle à toute procédure judiciaire en raison de tels opinions et votes (voir arrêt du 6 septembre 2011, Patriciello, C‑163/10, EU:C:2011:543, point 26 et jurisprudence citée). Ainsi, lorsque les conditions de fond pour reconnaître l’immunité édictée à l’article 8 du protocole no 7 sont remplies, celle-ci ne peut pas être levée par le Parlement et la juridiction nationale compétente pour l’appliquer est tenue d’écarter l’action diligentée contre le député européen concerné (voir arrêt du 6 septembre 2011, Patriciello, C‑163/10, EU:C:2011:543, point 27 et jurisprudence citée). L’immunité prévue à l’article 8 du protocole no 7 est ainsi susceptible d’empêcher définitivement les autorités judiciaires et les juridictions nationales d’exercer leurs compétences respectives en matière de poursuites et de sanctions des infractions pénales dans le but d’assurer le respect de l’ordre public sur leur territoire et, corrélativement, de priver ainsi totalement les personnes lésées par ces déclarations de l’accès à la justice, y compris, le cas échéant, en vue d’obtenir devant les juridictions civiles la réparation du préjudice subi (voir, en ce sens, arrêt du 6 septembre 2011, Patriciello, C‑163/10, EU:C:2011:543, point 34).
35 En revanche, l’inviolabilité parlementaire établie à l’article 9 du protocole no 7 peut être levée par le Parlement, conformément à l’article 9, troisième alinéa, dudit protocole.
36 En l’espèce, par la décision attaquée, le Parlement a levé l’immunité du requérant sur le fondement de l’article 9 du protocole no 7, qui, ainsi que cela résulte des points 34 et 35 ci-dessus, est le seul susceptible de justifier une telle levée d’immunité.
37 Il y a lieu de constater que, en raison de l’expiration du mandat de député du requérant à compter du 2 juillet 2019 et, partant, de la perte de l’immunité qui y est afférente, la durée de celle-ci étant, aux termes de l’article 9 du protocole no 7, limitée audit mandat, la décision attaquée a cessé de produire ses effets à compter de cette date.
38 Il résulte également de l’expiration du mandat de député du requérant que l’annulation de la décision attaquée ne pourrait pas conduire le Parlement à prendre une nouvelle décision relative à cette immunité.
39 Deuxièmement, il convient de relever que, certes, la réponse apportée à la question de savoir si la décision attaquée est légale est susceptible d’avoir des conséquences sur l’immunité du requérant durant la période allant de l’entrée en vigueur de la décision attaquée au 2 juillet 2019, date d’expiration de son mandat, et donc sur le déroulement de la procédure pénale engagée à son égard en France. Toutefois, le requérant n’établit pas, ni même n’allègue, que ladite procédure pénale aurait connu des développements durant cette période et que l’annulation de la décision attaquée conserverait un intérêt à cet égard. Ainsi, dans les observations visées au point 10 ci-dessus, il se prévaut exclusivement d’un intérêt à agir consistant à obtenir du Tribunal une réponse à deux moyens d’annulation contenus dans la requête tirés de prétendus détournements de procédure et fait état d’une convocation par le magistrat instructeur à une date postérieure à l’expiration de son mandat de député.
40 Troisièmement, le requérant fait valoir qu’il a toujours intérêt à agir au motif qu’il a invoqué, au soutien de la demande d’annulation de la décision attaquée, deux moyens afférents à de prétendus détournements de procédure commis par le Parlement qui seraient en lien avec la procédure pénale engagée à son égard. En substance, le requérant soutient que, par ladite décision, le Parlement aurait transféré aux autorités françaises sa compétence exclusive en matière de recouvrement des frais d’assistance parlementaire indûment versés et méconnu la compétence exclusive de la Cour de justice de l’Union européenne.
41 À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence citée au point 23 ci-dessus, en présence d’un acte qui, tel que la décision attaquée, a cessé de produire des effets juridiques, il appartient au requérant d’établir que, par elle-même, l’annulation de cet acte, c’est-à-dire sa disparition rétroactive de l’ordre juridique, est susceptible d’avoir des conséquences juridiques et que le recours peut ainsi, par son résultat, lui procurer un bénéfice. Or, par son argumentation, le requérant ne soutient pas que l’annulation de la décision attaquée aurait, par les effets juridiques qui en découleraient, une incidence sur sa situation juridique dans le cadre de la procédure pénale engagée à son égard. Il se borne en effet à faire valoir qu’il pourrait tirer un avantage des motifs d’une annulation si celle-ci était fondée sur certains des moyens développés dans sa requête. Or, un tel bénéfice n’est pas de nature à établir la persistance d’un intérêt à agir.
42 En tout état de cause, le requérant n’explique pas en quoi l’examen par le Tribunal des moyens relatifs aux détournements de procédure prétendument commis par le Parlement et, le cas échéant, une annulation de la décision attaquée sur ce fondement, seraient susceptibles de lui procurer un bénéfice dans le cadre de la procédure pénale engagée à son égard.
43 En effet, d’une part, l’examen par le Tribunal de l’existence des prétendus détournements de pouvoir, dont le détournement de procédure n’est qu’une forme, impliquerait d’analyser le but réellement poursuivi par le Parlement lorsqu’il a décidé de lever l’immunité du requérant, lequel apparaît sans effet sur la procédure pénale en cause. D’autre part, la question de savoir si les conditions pour une levée d’immunité sont remplies est distincte de celle de savoir si l’infraction est établie, laquelle relève en effet de la seule compétence des autorités de l’État membre qui a sollicité la levée de l’immunité (arrêt du 30 avril 2019, Briois/Parlement, T‑214/18, non publié, EU:T:2019:266, point 47). Il s’ensuit que le requérant n’établit pas que la reconnaissance de l’existence des détournements de procédure allégués aurait des incidences sur l’issue de la procédure pénale.
44 Quatrièmement, il est vrai que, dans certaines circonstances, un requérant peut conserver un intérêt à demander l’annulation d’un acte abrogé en cours d’instance, afin d’amener l’auteur de l’acte attaqué à apporter, à l’avenir, les modifications appropriées et, ainsi, éviter le risque de répétition de l’illégalité dont cet acte est prétendument entaché (voir arrêt du 6 septembre 2018, Bank Mellat/Conseil, C‑430/16 P, EU:C:2018:668, point 64 et jurisprudence citée). Une telle jurisprudence est transposable dans le cas où l’acte en cause a cessé de produire ses effets en cours d’instance.
45 Toutefois, le principe ainsi consacré par la jurisprudence doit être circonscrit aux situations dans lesquelles le requérant démontre de manière précise et concrète l’existence d’un risque de répétition de l’illégalité alléguée (voir arrêt du 6 septembre 2018, Bank Mellat/Conseil, C‑430/16 P, EU:C:2018:668, point 65 et jurisprudence citée).
46 Or, le requérant n’établit pas, ni même ne soutient, que les illégalités alléguées en l’espèce seraient susceptibles de se reproduire à l’avenir indépendamment des circonstances de l’affaire ayant donné lieu à son recours.
47 Cinquièmement, un recours en annulation n’est pas irrecevable pour défaut d’intérêt du seul fait que, en cas d’annulation de la décision attaquée, l’institution dont émane l’acte pourrait se trouver dans l’impossibilité, compte tenu des circonstances, de mettre en œuvre l’obligation qui lui incombe en vertu du traité. En pareil cas, le recours conserve encore un intérêt à tout le moins en tant que base d’un éventuel recours en indemnité (voir arrêt du 19 mars 2010, Gollnisch/Parlement, T‑42/06, EU:T:2010:102, point 71 et jurisprudence citée).
48 Toutefois, dans la présente instance, le requérant, à qui il appartient de justifier de façon pertinente la persistance de son intérêt à agir, ne fait pas valoir que l’adoption de la décision attaquée lui aurait causé un quelconque préjudice, y compris moral.
49 Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le requérant n’a pas démontré la persistance de son intérêt à agir. En conséquence, il convient de conclure qu’il n’y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à l’annulation de la décision attaquée.
Sur les dépens
50 Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, en cas de non-lieu à statuer, le Tribunal règle librement les dépens.
51 Compte tenu des circonstances de l’espèce, le Tribunal estime qu’il y a lieu d’ordonner que chaque partie supportera ses propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (septième chambre)
ordonne :
1) Il n’y a plus lieu de statuer sur le présent recours.
2) Chaque partie supportera ses propres dépens.
Fait à Luxembourg, le 25 octobre 2019.
Le greffier | La présidente |
E. Coulon | V. Tomljenović |
* Langue de procédure : le français.
© European Union
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