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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> NRW. Bank v CRU (Judgment) French Text [2019] EUECJ T-466/16 (26 June 2019) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2019/T46616.html Cite as: ECLI:EU:T:2019:445, [2019] EUECJ T-466/16, EU:T:2019:445 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre élargie)
26 juin 2019 (*)
« Recours en annulation – Union économique et monétaire – Union bancaire – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement (MRU) – Fonds de résolution unique (FRU) – Fixation de la contribution ex ante pour 2016 – Délai de recours – Tardiveté – Article 76 du règlement de procédure du Tribunal – Irrecevabilité »
Dans l’affaire T‑466/16,
NRW. Bank, établie à Düsseldorf (Allemagne), représentée initialement par Mes A. Behrens, J. Kraayvanger et J. Seitz, puis par Mes Seitz et D. Flore, avocats,
partie requérante,
contre
Conseil de résolution unique (CRU), représenté par Mes B. Meyring, S. Schelo, T. Klupsch et S. Ianc, avocats,
partie défenderesse,
soutenu par
Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme K. Michoel et M. J. Bauerschmidt, en qualité d’agents,
et par
Commission européenne, représentée par Mme A. Steiblytė et M. K.-P. Wojcik, en qualité d’agents,
parties intervenantes,
ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation, d’une part, de la décision du CRU dans sa session exécutive du 15 avril 2016 sur les contributions ex ante pour 2016 au Fonds de résolution unique (SRB/ES/SRF/2016/06) et, d’autre part, de la décision du CRU dans sa session exécutive du 20 mai 2016 sur l’ajustement des contributions ex ante pour 2016 au Fonds de résolution unique, complétant la décision du CRU dans sa session exécutive du 15 avril 2016 sur les contributions ex ante pour 2016 au Fonds de résolution unique (SRB/ES/SRF/2016/13), en ce qu’elles concernent la requérante,
LE TRIBUNAL (huitième chambre élargie),
composé de M. A. M. Collins, président, Mme M. Kancheva, MM. R. Barents, J. Passer (rapporteur) et G. De Baere, juges,
greffier : Mme N. Schall, administrateur,
vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 28 février 2019,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 La requérante, NRW. Bank, est la banque de développement du Land Nordrhein-Westfalen (Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, Allemagne).
2 Les activités de la requérante consistent essentiellement en trois types d’activités, à savoir des activités de développement, qui correspondent environ à deux tiers de ses actifs, des activités auxiliaires de développement, qui représentent un tiers environ de ses actifs, et d’autres activités, qui correspondent au reste de ses actifs.
3 En 2015, avant l’entrée en vigueur du règlement (UE) no 806/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 15 juillet 2014, établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) no 1093/2010 (JO 2014, L 225, p. 1), et en application de la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1093/2010 et (UE) no 648/2012 (JO 2014, L 173, p. 190), telle que mise en œuvre par le règlement délégué (UE) 2015/63 de la Commission, du 21 octobre 2014, complétant la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les contributions ex ante aux dispositifs de financement pour la résolution (JO 2015, L 11, p. 44), l’autorité de régulation allemande, la Bundesanstalt für Finanzmarktstabilisierung (Autorité fédérale de stabilisation des marchés financiers, Allemagne, FMSA), a fixé la contribution ex ante de la requérante pour l’année 2015, tout en considérant qu’il fallait exclure du calcul de cette contribution aussi bien les activités de développement de la requérante que ses activités auxiliaires de développement.
4 En 2016, dans le formulaire intitulé « Contributions ex ante au Fonds de résolution unique (FRU) – Formulaire de déclaration pour la période de contribution 2016 », établi par le Conseil de résolution unique (CRU) et transmis par la FMSA à la requérante, cette dernière a déclaré comme devant être exclue du calcul de sa contribution ex ante pour 2016, au sens de l’article 5, paragraphe 1, du règlement délégué 2015/63, la somme de tous ses engagements liés à ses activités de développement et à ses activités auxiliaires de développement.
5 Toutefois, après le dépôt dudit formulaire ainsi rempli, la requérante a été informée que, selon le CRU, les activités auxiliaires de développement ne devaient pas être exclues du calcul. Elle a alors déposé un formulaire de déclaration corrigé ne déclarant comme devant être exclue que la valeur totale des engagements liés à ses activités de développement.
6 Par décision du 15 avril 2016 sur les contributions ex ante pour 2016 au Fonds de résolution unique (SRB/ES/SRF/2016/06), le CRU, dans sa session exécutive, a décidé, en vertu de l’article 54, paragraphe 1, sous b), et de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014, du montant de la contribution ex ante de chacune des entités visées à l’article 2 du règlement no 806/2014 (ci-après, isolément ou collectivement, l’« établissement » ou les « établissements »), dont la requérante, pour l’année 2016.
7 Par avis de perception du 22 avril 2016, reçu par la requérante le 25 avril 2016, la FMSA a informé cette dernière que le CRU avait fixé sa contribution ex ante au Fonds de résolution unique (FRU) pour 2016, et lui a indiqué le montant à payer (ci-après le « premier avis de perception »).
8 Par décision du 20 mai 2016 sur l’ajustement des contributions ex ante au FRU pour 2016, complétant la décision du CRU dans sa session exécutive, du 15 avril 2016, sur les contributions ex ante au FRU pour 2016 (SRB/ES/SRF/2016/13), le CRU a majoré la contribution de la requérante.
9 Par avis de perception du 10 juin 2016, reçu par la requérante le 13 juin 2016, la FMSA a enjoint à cette dernière d’acquitter le montant de la majoration visée au point 8 ci-dessus (ci-après le « second avis de perception »).
Procédure et conclusions des parties
10 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 23 août 2016, la requérante a introduit le présent recours. Le CRU a déposé son mémoire en défense le 2 novembre 2016.
11 Par actes déposés au greffe du Tribunal les 24 et 30 novembre 2016, la Commission européenne et le Conseil de l’Union européenne ont demandé à intervenir au soutien des conclusions du CRU.
12 Par décisions des 10 et 11 janvier 2017, le président de la huitième chambre du Tribunal a fait droit aux demandes d’intervention de la Commission et du Conseil.
13 Par une première mesure d’organisation de la procédure adoptée le 9 octobre 2017 au titre de l’article 89 du règlement de procédure du Tribunal, ce dernier a invité le CRU à produire la copie intégrale de l’original des décisions mentionnées aux points 6 et 8 ci-dessus, y compris leurs annexes.
14 Par acte du 26 octobre 2017, le CRU a indiqué ne pas pouvoir déférer à la mesure d’organisation de la procédure adoptée le 9 octobre 2017, évoquant notamment le caractère confidentiel des données contenues dans les annexes des décisions mentionnées aux points 6 et 8 ci-dessus.
15 Par ordonnance du 14 décembre 2017, le Tribunal a ordonné au CRU, sur le fondement, d’une part, de l’article 24, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et, d’autre part, de l’article 91, sous b), de l’article 92, paragraphe 3, ainsi que de l’article 103 du règlement de procédure, la production, en versions non confidentielle et confidentielle, de la copie intégrale de l’original des décisions mentionnées aux points 6 et 8 ci-dessus, y compris leurs annexes.
16 Par acte du 15 janvier 2018, le CRU a répondu à la mesure d’instruction et a produit, en versions non confidentielle et confidentielle, quatre documents, deux documents pour la décision mentionnée au point 6 ci-dessus et deux documents pour la décision mentionnée au point 8 ci-dessus, correspondant pour chacune, premièrement, à un document de deux pages se présentant sous la forme d’une reconnaissance par scanner, au format PDF, d’un document papier signé et, deuxièmement, à un document se présentant sous la forme d’une génération numérique, au format PDF, de données numériques et constituant l’annexe au texte principal de la décision en cause.
17 Au vu de la réponse du CRU à la mesure d’instruction du 14 décembre 2017, le Tribunal a adopté, le 12 mars 2018, une deuxième mesure d’organisation de la procédure et a invité le CRU, premièrement, à clarifier le format des annexes au moment de l’adoption des décisions mentionnées aux points 6 et 8 ci-dessus, deuxièmement, dans le cas où ces annexes ont été présentées sous format numérique, à s’expliquer et à fournir tous les éléments techniques d’authentification nécessaires pour prouver que la génération PDF de données numériques produite devant le Tribunal correspondait à ce qui fut concrètement présenté à la signature et adopté par le CRU, dans sa session exécutive, lors de ses réunions des 15 avril et 20 mai 2016 et, troisièmement, à déposer ses observations sur la question de l’existence juridique des décisions mentionnées aux points 6 et 8 ci-dessus et la question du respect des formes substantielles.
18 Par acte du 27 mars 2018, le CRU a répondu à la deuxième mesure d’organisation de la procédure. S’agissant de la deuxième demande mentionnée au point 17 ci-dessus, le CRU a indiqué ne pas pouvoir y déférer en raison de la confidentialité de certains documents qu’il devrait produire et a sollicité l’adoption d’une mesure d’instruction.
19 Le 2 mai 2018, le Tribunal a adopté une nouvelle ordonnance de mesure d’instruction, ordonnant au CRU de déférer à la deuxième demande figurant dans la mesure d’organisation de la procédure du 12 mars 2018.
20 Par acte du 18 mai 2018, régularisé le 29 juin 2018, le CRU a déféré à l’ordonnance de mesure d’instruction et a produit, en versions confidentielle et non confidentielle, un document intitulé « Informations techniques sur l’identification », le texte de quatre courriels du CRU datés des 13 avril 2016 à 17 h 41, 15 avril 2016 à 19 h 04 et à 20 h 06 et 19 mai 2016 à 21 h 25, ainsi qu’une clé USB comportant deux fichiers au format Excel et deux fichiers au format TXT.
21 Par décision du 12 juillet 2018, à la suite de l’examen prévu à l’article 103, paragraphe 1, du règlement de procédure, le Tribunal a retiré du dossier les versions confidentielles des documents produits par le CRU en réponse aux deux ordonnances de mesure d’instruction, à l’exception de fichiers au format TXT figurant sur les clés USB produites le 18 mai 2018 par le CRU et ne comportant aucune information confidentielle, lesquels fichiers ont été versés au dossier en format papier.
22 Le 12 juillet 2018, par une troisième mesure d’organisation de la procédure adoptée au titre de l’article 89 du règlement de procédure, le Tribunal a invité la requérante, le Conseil et la Commission à déposer leurs observations sur les réponses du CRU aux mesures d’organisation de la procédure et d’instruction visées aux points 13, 15, 17 et 19 ci-dessus et à se prononcer sur la recevabilité du recours eu égard aux délais en ce qui concerne la décision mentionnée au point 6 ci-dessus.
23 Par actes des 26, 27 et 30 juillet 2018, le Conseil, la Commission et la requérante ont, respectivement, déposé leurs observations.
24 Le 17 septembre 2018, la requérante a déposé des observations sur celles de la Commission visées au point 23 ci-dessus.
25 Sur proposition de la huitième chambre du Tribunal, le Tribunal a décidé, en application de l’article 28 du règlement de procédure, de renvoyer l’affaire devant une formation de jugement élargie.
26 Le 19 novembre 2018, le Tribunal a adopté une quatrième mesure d’organisation de la procédure et a invité les parties à préciser, notamment, leur position s’agissant du respect, par le CRU, de l’obligation de motivation des décisions mentionnées aux points 6 et 8 ci-dessus.
27 Les 3 et 4 décembre 2018, les parties ont déféré à cette demande.
28 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision du CRU fixant la contribution annuelle de la requérante au FRU pour 2016 ;
– condamner le CRU aux dépens.
29 Le CRU conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours comme irrecevable ou, alternativement, comme non fondé ;
– condamner la requérante aux dépens.
30 Le Conseil et la Commission concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
Sur l’objet du recours
31 La requérante demande l’annulation de la « décision du [CRU] fixant [sa] contribution annuelle au [FRU] pour l’exercice allant du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2016 ». Elle précise que, à ses yeux, il s’agit d’une « décision globale du CRU » et que, dans cette mesure, elle conteste la « décision du CRU dans la forme que lui a conférée sa seconde décision », c’est-à-dire la « décision définitive du CRU, dans sa version finale ».
32 Le présent recours vise donc tant la décision du CRU du 15 avril 2016, mentionnée au point 6 ci-dessus (ci-après la « première décision attaquée »), que la décision du CRU du 20 mai 2016, mentionnée au point 8 ci-dessus (ci-après la « seconde décision attaquée » et, ensemble avec la première décision attaquée, les « décisions attaquées »).
Sur la recevabilité
33 Le CRU considère que le recours est irrecevable en ce que la requérante n’est pas directement et individuellement concernée par les décisions attaquées. Seuls les actes adoptés par la FMSA sur le fondement des décisions attaquées produiraient un effet juridique à l’égard de la requérante. Il appartiendrait à cette dernière de déférer les actes adoptés par la FMSA au juge national, lequel pourrait poser une question préjudicielle à la Cour.
34 Dans la duplique, le CRU, soutenu sur ce point par la Commission, fait valoir que, en tout état de cause, le recours a été introduit après le délai imparti et est donc tardif en ce qui concerne la première décision attaquée. En effet, le premier avis de perception aurait contenu des informations précises permettant à la requérante d’avoir la connaissance nécessaire de la première décision attaquée. En conséquence, le délai pour introduire le recours contre cette décision aurait commencé à courir le 25 avril et aurait expiré le 5 juillet 2016. Le CRU souligne que la seconde décision attaquée se limite à modifier certaines parties de la première décision attaquée, mais ne la remplace pas. La seconde décision attaquée ne ferait donc pas courir à nouveau le délai pour introduire une requête en annulation contre la première décision attaquée.
35 Dans sa réponse à la mesure d’organisation de la procédure visée au point 22 ci-dessus, la Commission met en avant le fait que la requérante n’aurait pas demandé au CRU la communication du texte intégral de la première décision attaquée. Par ailleurs, elle prétend, à l’instar du CRU, qu’il existe des raisons valables de considérer que, au moment de la notification du premier avis de perception à la requérante, le contenu essentiel de la première décision attaquée était connu et, partant, que la requérante en a eu une « connaissance exacte » à cette date.
36 La requérante conteste les arguments du CRU et de la Commission.
37 En ce qui concerne le délai de recours, la requérante prétend que, à la date de l’introduction du présent recours, elle n’avait pas directement connaissance des décisions attaquées. Elle aurait présenté en ce sens une demande de consultation de son dossier à la FMSA, mais celle-ci n’avait pas encore répondu à cette demande au moment de l’introduction du recours. De plus, la requérante n’avait même pas connaissance du contenu essentiel des décisions attaquées. La connaissance indirecte de l’existence des décisions attaquées par le biais des avis de perception ne répondrait pas aux exigences élevées auxquelles serait soumise la prise de connaissance de l’acte au sens de l’article 263, sixième alinéa, TFUE.
38 Dans l’hypothèse où la réception des avis de perception devrait être considérée comme suffisante pour faire courir le délai de recours, il y aurait lieu, en tout état de cause, de se fonder sur la date à laquelle le second avis de perception est parvenu à la requérante. En effet, le présent recours serait dirigé contre la décision unique du CRU sous la forme prise par la seconde décision attaquée. À cet égard, la requérante fait valoir, en substance, que la seconde décision attaquée a modifié intégralement le contenu de la première décision attaquée. Il ne se serait pas agi d’un simple calcul inexact d’un paramètre, mais d’un nouveau calcul complet. La « modification » apportée par la seconde décision attaquée constituerait ainsi non pas une simple correction de la décision initiale, en l’occurrence la première décision attaquée, mais, de facto, l’adoption d’une nouvelle décision. Le fait que la seconde décision attaquée et le second avis de perception indiqueraient seulement un montant à verser en supplément ne saurait faire oublier le fait que cette différence serait le résultat d’un nouveau calcul complet et qu’une « substitution » totale de la base des décisions aurait ainsi eu lieu.
39 En premier lieu, il ressort de la réglementation applicable en l’espèce, en particulier de l’article 54, paragraphe 1, sous b), et de l’article 70, paragraphe 2, du règlement no 806/2014, que tant l’auteur concret du calcul des contributions individuelles que l’auteur des décisions attaquées approuvant et ajustant ces contributions est le CRU. La circonstance qu’il existe une coopération entre le CRU et les autorités de résolution nationales ne modifie pas cette constatation (ordonnance du 19 novembre 2018, Iccrea Banca/Commission et CRU, T‑494/17, EU:T:2018:804, point 27).
40 En second lieu, il convient de relever que, quelles que soient les variations terminologiques existant entre les versions linguistiques de l’article 5 du règlement d’exécution (UE) 2015/81 du Conseil, du 19 décembre 2014, définissant des conditions uniformes d’application du règlement no 806/2014 en ce qui concerne les contributions ex ante au FRU (JO 2015, L 15, p. 1), les organes auxquels le CRU, auteur de la décision fixant les contributions ex ante, adresse celle-ci sont les autorités de résolution nationales et non les établissements. Les autorités de résolution nationales sont, de fait et en exécution de la réglementation applicable, les seules entités auxquelles l’auteur de la décision en cause est tenu d’envoyer celle-ci et, donc, en dernière analyse, les destinataires de cette décision au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE (ordonnance du 19 novembre 2018, Iccrea Banca/Commission et CRU, T‑494/17, EU:T:2018:804, point 28).
41 Le constat que les autorités de résolution nationales ont la qualité de destinataires de la décision du CRU au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE est d’ailleurs corroboré par le fait qu’elles sont, dans le système mis en place par le règlement no 806/2014 et conformément à l’article 67, paragraphe 4, de ce règlement, chargées de la collecte des contributions individuelles auprès des établissements (ordonnance du 19 novembre 2018, Iccrea Banca/Commission et CRU, T‑494/17, EU:T:2018:804, point 29).
42 Sans qu’il soit besoin d’examiner le respect des conditions de recevabilité de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, force est ainsi de constater que le présent recours est irrecevable pour les motifs suivants.
43 Selon l’article 263, sixième alinéa, TFUE, les demandes en annulation doivent être formées dans un délai de deux mois à compter, suivant le cas, de la publication de l’acte, de sa notification au requérant ou, à défaut, du jour où celui-ci en a eu connaissance.
44 En outre, conformément à l’article 60 du règlement de procédure, le délai de recours est augmenté d’un délai de distance forfaitaire de dix jours.
45 En l’espèce, les décisions attaquées n’ont été ni publiées ni notifiées à la requérante.
46 Il est de jurisprudence constante que, à défaut de publication ou de notification, le délai de recours ne court qu’à partir du moment où l’intéressé a une connaissance exacte du contenu et des motifs de l’acte en cause, à condition qu’il demande le texte intégral dans un délai raisonnable. Sous cette réserve, le délai de recours ne saurait courir qu’à partir du moment où le tiers concerné a une connaissance exacte du contenu et des motifs de l’acte en cause de manière à pouvoir exercer utilement son droit de recours (voir ordonnance du 19 novembre 2018, Iccrea Banca/Commission et CRU, T‑494/17, EU:T:2018:804, point 33 et jurisprudence citée).
47 Ainsi, le délai de deux mois prévu à l’article 263, sixième alinéa, TFUE, qui court, à défaut de publication ou de notification de l’acte susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation, à compter de la date à laquelle le requérant en a eu connaissance, est différent du délai raisonnable dont ce requérant dispose pour demander la communication du texte intégral de ce même acte afin d’en avoir une connaissance exacte (voir ordonnance du 19 novembre 2018, Iccrea Banca/Commission et CRU, T‑494/17, EU:T:2018:804, point 34 et jurisprudence citée).
48 Par ailleurs, selon une jurisprudence tout aussi constante, les délais de recours, institués en vue d’assurer la clarté et la sécurité des situations juridiques et d’éviter toute discrimination ou tout traitement arbitraire dans l’administration de la justice, présentent un caractère d’ordre public et ne sont à la disposition ni du juge ni des parties (voir arrêts du 23 janvier 1997, Coen, C‑246/95, EU:C:1997:33, point 21 et jurisprudence citée, et du 14 juillet 1998, Hauer/Conseil et Commission, T‑119/95, EU:T:1998:161, point 22 et jurisprudence citée).
49 En l’espèce, si, au vu du dossier et contrairement à ce que soutiennent le CRU et la Commission, il ne saurait être affirmé que la requérante avait une connaissance exacte du contenu de la première décision attaquée au jour de la réception du premier avis de perception, le 25 avril 2016, il n’en reste pas moins que, à cette date, elle avait connaissance de l’existence de cette décision.
50 Il convient, à cet égard, de relever que la requérante a reçu, comme tous les établissements concernés par le versement d’une contribution ex ante au FRU pour 2016, les documents et questionnaires nécessaires pour fournir les données permettant le calcul des contributions individuelles par le CRU. Ces documents et questionnaires l’informaient des bases juridiques applicables et du fait que la contribution au FRU était calculée par le CRU.
51 De plus, le premier avis de perception, reçu le 25 avril 2016, informait la requérante d’une manière claire et sans équivoque que cet avis était fondé sur une décision par laquelle le CRU avait calculé sa contribution ex ante au FRU pour 2016.
52 La requérante ne conteste d’ailleurs pas avoir pris connaissance, le 25 avril 2016, de l’existence de la première décision attaquée.
53 Dans ces conditions, la requérante devait, à défaut d’introduire un recours à titre conservatoire dans l’attente de la communication de la première décision attaquée, en demander la communication dans le délai raisonnable aménagé par la jurisprudence rappelée aux points 44 et 45 ci-dessus.
54 À cet égard, il ressort de la jurisprudence que le « délai raisonnable » pour demander la communication d’une décision après prise de connaissance de son existence n’est pas un délai préfix qui se déduirait automatiquement de la durée du délai du recours en annulation, mais un délai dépendant des circonstances du cas d’espèce (voir ordonnance du 19 novembre 2018, Iccrea Banca/Commission et CRU, T‑494/17, EU:T:2018:804, point 39 et jurisprudence citée).
55 S’agissant de la notion de délai raisonnable, d’une part, il convient de noter que la Cour a jugé dans d’autres affaires qu’un délai de deux mois, calculé à compter de la date de la connaissance de l’existence d’une décision pour en demander la communication, dépassait le délai raisonnable (voir ordonnance du 19 novembre 2018, Iccrea Banca/Commission et CRU, T‑494/17, EU:T:2018:804, point 40 et jurisprudence citée).
56 D’autre part, il convient de relever que le Tribunal a estimé dans d’autres affaires qu’une demande de communication du texte intégral d’une décision présentée plus de quatre mois après que le requérant avait pris connaissance de l’existence de l’acte devait être considérée comme formulée hors de tout délai raisonnable (voir ordonnance du 19 novembre 2018, Iccrea Banca/Commission et CRU, T‑494/17, EU:T:2018:804, point 41 et jurisprudence citée).
57 Eu égard aux circonstances du cas d’espèce, il n’y a pas lieu de retenir une appréciation différente de celle dégagée par la Cour et le Tribunal.
58 En effet, dans ses observations déposées au greffe du Tribunal le 17 septembre 2018 (voir point 24 ci-dessus), la requérante indique qu’elle a présenté sa demande de consultation de son dossier à la FMSA à la date du 22 août 2016, à savoir la veille de l’introduction du présent recours.
59 Ainsi, après sa prise de connaissance, le 25 avril 2016, de l’existence de la première décision attaquée, la requérante n’a pas demandé la communication de cette décision auprès du CRU et n’a demandé l’« accès [à son] dossier », auprès de la FMSA, que presque quatre mois à compter du jour où elle a reçu le premier avis de perception, émis sur le fondement de la première décision attaquée.
60 Par ailleurs, la requérante n’a ni évoqué ni établi l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure permettant de déroger au délai en cause sur le fondement de l’article 45, second alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53 dudit statut.
61 À cet égard, force est de constater que rien dans la manière dont la FMSA a mis en œuvre les décisions attaquées n’était susceptible de laisser penser que la seconde décision attaquée aurait remplacé la première décision attaquée.
62 En effet, la FMSA a immédiatement réagi à la première décision attaquée en émettant le premier avis de perception, imposant le paiement du montant établi par cette décision, moins un huitième de la contribution ex ante de la requérante pour 2015, en application de l’article 8, paragraphe 2, du règlement d’exécution 2015/81. Ainsi, le premier avis de perception prévoit, dans son dispositif, que « [l]a contribution […] pour l’année […] 2016 est fixée à la hauteur de [...] » et que « [l]a contribution doit être versée au plus tard le 31 mai 2016 sur le compte […] ».
63 Quant au second avis de perception, force est de constater que, contrairement à ce que prétend la requérante dans la requête, celui-ci n’a pas abrogé le premier avis de perception. Bien au contraire, il découle clairement des termes du second avis de perception que cet avis se borne à modifier le premier avis de perception. Ainsi, le second avis de perception, intitulé « Avis de perception modificatif », prévoit, dans son dispositif, que « le premier avis de perception est modifié en ce que, au-delà de la contribution pour l’année 2016, fixée au regard de [la requérante] à la hauteur de [...], une contribution supplémentaire de [...] est fixée » et que cette contribution supplémentaire « doit être versée au plus tard le 31 mai 2016 sur le compte […] ». Par ailleurs, dans la motivation, la FMSA indique, après avoir exposé les motifs de la modification mise en œuvre par le second avis de perception, que « [p]our le reste, le [premier avis de perception] demeure intact ».
64 Dans ce contexte, lors de l’audience, la requérante s’est prévalue de la lettre du 23 mai 2016, par laquelle la FMSA avait annoncé au Bundesverband Öffentlicher Banken Deutschlands e.V. (Association fédérale des banques publiques allemandes, Allemagne) l’adoption d’un nouvel avis de perception, pour soutenir que, dès la réception de cette lettre, elle avait pu présumer que l’objectif était d’abroger le premier avis de perception et de le remplacer par un nouvel avis de perception et qu’il y avait donc lieu d’attendre l’adoption de ce dernier. Cependant, à supposer même que cela ait pu être le cas, la requérante aurait dû comprendre que cette présomption n’était pas correcte au plus tard le 13 juin 2016, date de la réception du second avis de perception, qui n’a ni abrogé ni remplacé le premier avis de perception, mais l’a seulement modifié (voir point 61 ci-dessus). Pourtant, la requérante a laissé s’écouler deux mois supplémentaires avant de demander la communication de la première décision attaquée. Or, dans les circonstances de l’espèce, ce délai ne saurait être considéré comme raisonnable au sens de la jurisprudence citée aux points 44, 45 et 52 à 54 ci-dessus.
65 Par ailleurs, force est de constater que, en effet, la seconde décision attaquée, intitulée « Décision [...] sur l’ajustement des contributions ex ante au Fonds de résolution unique pour 2016, complétant la première décision attaquée », n’a pas abrogé la première décision attaquée, qui demeure dans l’ordre juridique, mais a seulement procédé à un ajustement des montants de contribution fixés par la première décision attaquée.
66 Il s’ensuit que le recours, introduit le 23 août 2016, est tardif en ce qu’il vise l’annulation de la première décision attaquée.
67 En ce qui concerne la seconde décision attaquée, à l’égard de laquelle il est constant entre les parties que le présent recours a été introduit dans le délai prévu à l’article 263, sixième alinéa, TFUE, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, un recours en annulation formé contre un acte purement confirmatif d’une décision antérieure non attaquée dans les délais est irrecevable. Une décision est considérée comme purement confirmative d’une décision antérieure lorsqu’elle ne contient aucun élément nouveau par rapport à un acte antérieur et n’a pas été précédée d’un réexamen de la situation du destinataire de cet acte antérieur (voir arrêt du 15 septembre 2011, CMB et Christof/Commission, T‑407/07, non publié, EU:T:2011:477, point 89 et jurisprudence citée).
68 En outre, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, le caractère confirmatif ou non d’un acte ne saurait être apprécié uniquement en fonction de son contenu par rapport à celui de la décision antérieure qu’il confirmerait, mais doit également l’être par rapport à la nature de la demande à laquelle cet acte répond (voir arrêt du 15 septembre 2011, CMB et Christof/Commission, T‑407/07, non publié, EU:T:2011:477, point 90 et jurisprudence citée).
69 Il ressort, en particulier, de cette jurisprudence que, si l’acte constitue la réponse à une demande dans laquelle des faits nouveaux et substantiels sont invoqués et par laquelle l’administration est priée de procéder à un réexamen de la décision antérieure, cet acte ne saurait être considéré comme revêtant un caractère purement confirmatif, dans la mesure où il statue sur ces faits et contient, ainsi, un élément nouveau par rapport à la décision antérieure. En effet, l’existence de faits nouveaux et substantiels peut justifier la présentation d’une demande tendant au réexamen d’une décision antérieure devenue définitive. À l’inverse, lorsque la demande de réexamen n’est pas fondée sur des faits nouveaux et substantiels, le recours contre la décision refusant de procéder au réexamen sollicité doit être déclaré irrecevable (voir arrêt du 15 septembre 2011, CMB et Christof/Commission, T‑407/07, non publié, EU:T:2011:477, point 91 et jurisprudence citée).
70 En l’espèce, la requérante reproche au CRU, en substance, une violation de certaines dispositions de la réglementation applicable, en ce qu’il n’a pas exclu du calcul de sa contribution ex ante au FRU pour 2016 ses passifs liés à ses activités auxiliaires de développement.
71 Or, force est de constater que, à cet égard, la seconde décision attaquée ne contient aucun élément nouveau. En effet, s’il découle de l’annexe de la seconde décision attaquée que la détermination de l’ajustement de la contribution de la requérante, tel qu’approuvé par cette décision, a nécessité un nouveau calcul de ladite contribution, il n’en reste pas moins que la seconde décision attaquée n’a nullement réexaminé l’appréciation, déjà opérée par le CRU dans le cadre de l’adoption de la première décision attaquée, quant à la question, seule en cause dans le présent recours, de savoir s’il convenait ou non d’exclure du calcul de la contribution de la requérante ses passifs liés à ses activités auxiliaires de développement.
72 En outre, il ne ressort pas du dossier soumis au Tribunal que la requérante ait présenté, au CRU ou à la FMSA, une demande tendant à un réexamen de ladite question, qui serait fondée sur des faits nouveaux et substantiels.
73 Enfin, il convient de relever que, dans le cas où une partie requérante ne fait valoir aucun moyen au soutien de l’un de ses chefs de conclusions, la condition prévue à l’article 76, sous d), du règlement de procédure, selon laquelle les moyens invoqués doivent faire l’objet d’un exposé sommaire, n’est pas remplie (voir arrêts du 12 avril 2013, Koda/Commission, T‑425/08, non publié, EU:T:2013:183, point 71 et jurisprudence citée, et du 16 septembre 2013, Dornbracht/Commission, T‑386/10, EU:T:2013:450, point 44 et jurisprudence citée).
74 En l’espèce, la requérante, qui a été informée par le second avis de perception des motifs de l’ajustement opéré par la seconde décision attaquée, ne soulève aucun moyen ou argument à l’encontre de cette décision.
75 Dès lors, dans la mesure où, d’une part, le présent recours est tardif en ce qui concerne la première décision attaquée et, d’autre part, la seconde décision attaquée est, eu égard à l’objet du litige, purement confirmative de la première décision attaquée et où la requérante ne soulève aucun moyen ou argument à l’encontre de la seconde décision attaquée, le présent recours doit être rejeté comme irrecevable.
Sur les dépens
76 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux du CRU, conformément aux conclusions du CRU.
77 Conformément à l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, la Conseil et la Commission supporteront leurs propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (huitième chambre élargie)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté comme irrecevable.
2) NRW. Bank est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux du Conseil de résolution unique (CRU).
3) Le Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne supporteront leurs propres dépens.
Collins | Kancheva | Barents |
Passer | De Baere |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 26 juin 2019.
Signatures
* Langue de procédure : l’allemand.
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