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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Spain v Commission (Judgment) French Text [2019] EUECJ T-49/17 (07 May 2019) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2019/T4917.html Cite as: EU:T:2019:293, [2019] EUECJ T-49/17, ECLI:EU:T:2019:293 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)
7 mai 2019 (*)
« FEAGA et Feader – Dépenses exclues du financement – Corrections financières – Notion de “producteur” – Investissements réalisés en dehors des locaux d’une organisation de producteurs – Contrôles préalables à l’approbation d’un programme opérationnel – Contrôle dans l’ordonnancement des dépenses – Correction financière unique – Correction financière forfaitaire – Proportionnalité – Obligation de motivation »
Dans l’affaire T‑49/17,
Royaume d’Espagne, représenté initialement par Mme V. Ester Casas, abogado del Estado, puis par M. S. Jiménez García, en qualité d’agent,
partie requérante,
contre
Commission européenne, représentée par M. A. Lewis et Mme M. Morales Puerta, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation partielle de la décision d’exécution (UE) 2016/2018 de la Commission, du 15 novembre 2016, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2016, L 312, p. 26),
LE TRIBUNAL (cinquième chambre),
composé de M. D. Gratsias, président, Mme I. Labucka (rapporteur) et M. I. Ulloa Rubio, juges,
greffier : Mme X. Lopez Bancalari, administrateur,
vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 11 juin 2018,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Dans la décision d’exécution (UE) 2016/2018 de la Commission, du 15 novembre 2016, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2016, L 312, p. 26, ci-après la « décision attaquée »), par trois corrections financières, la Commission européenne a écarté du financement de l’Union européenne des dépenses concernant, respectivement, la communauté autonome d’Andalousie, la communauté autonome de Catalogne et la communauté autonome de Castille et Léon.
Correction financière appliquée à la communauté autonome d’Andalousie
2 Au cours de la première moitié de l’année 2013, la Commission a mené une enquête dans le cadre de l’adoption de la décision d’apurement des comptes de 2012 de l’organisme payeur de la communauté autonome d’Andalousie et a, par lettre du 8 mai 2013, transmis au Royaume d’Espagne ses observations.
3 Par lettre du 17 juillet 2013, les autorités espagnoles ont répondu aux observations de la Commission.
4 Par lettre du 17 août 2015, la Commission a invité les autorités espagnoles à une réunion bilatérale à Bruxelles (Belgique), laquelle s’est tenue le 6 octobre 2015.
5 Précédemment à la tenue de la réunion bilatérale, les autorités espagnoles ont fait parvenir à la Commission, par lettre du 7 septembre 2015, un rapport complémentaire de l’organisme de certification de la communauté autonome d’Andalousie, lequel a été par la suite complété par plusieurs notes transmises par courrier électronique, avant la réunion bilatérale, le 16 septembre 2015 et, après la réunion bilatérale, le 20 octobre 2015.
6 Le 12 janvier 2016, la Commission a transmis aux autorités espagnoles le procès-verbal de la réunion bilatérale du 6 octobre 2015, auquel ces dernières ont répondu, puis envoyé le 30 mars 2016 des documents complémentaires.
7 Par lettre du 4 mai 2016, la Commission a communiqué au Royaume d’Espagne les résultats de l’enquête concluant à l’application d’une correction financière de 1 356 144,90 euros au titre de carences dans les aides à la restructuration de l’industrie sucrière du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et d’une correction financière de 2 037 401,34 euros au titre de carences dans les programmes de développement rural du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader).
8 Sans avoir sollicité dans les 30 jours l’intervention de l’organe de conciliation, les autorités espagnoles ont, en réponse à un courrier électronique de la Commission du 12 mai 2016, transmis deux rapports de l’organisme de certification en date des 31 mars et 9 mai 2016.
9 Par lettre du 28 juin 2016, la Commission a confirmé la correction financière de 1 356 144,90 euros au titre des carences dans les aides à la restructuration de l’industrie sucrière du FEAGA, laquelle était justifiée par des carences dans l’attribution desdites aides (ci-après la « première correction financière »).
10 La première correction financière s’inscrit dans le contexte de la restructuration de l’industrie sucrière dans l’Union, telle que régie par le règlement (CE) no 320/2006 du Conseil, du 20 février 2006, instituant un régime temporaire de restructuration de l’industrie sucrière dans la Communauté européenne et modifiant le règlement (CE) no 1290/2005 relatif au financement de la politique agricole commune (JO 2006, L 58, p. 42).
11 Pour encourager la réduction des quotas, voire l’abandon de la production de sucre sous quota, le législateur de l’Union a instauré une aide à la restructuration de l’industrie sucrière.
12 Une partie de cette aide, correspondant à au moins 10 %, a été réservée, conformément à l’article 3, paragraphe 6, du règlement no 320/2006, aux producteurs de betterave sucrière, de canne à sucre et de chicorée, contraints d’abandonner une partie de leur production, et aux entreprises de machines sous-traitantes ayant travaillé pour lesdits producteurs.
13 Dans ce contexte, l’entreprise sucrière Azucarera Ebro (ci-après l’« entreprise sucrière »), outre ses demandes d’aide à la communauté autonome d’Andalousie, a présenté deux plans de restructuration concernant plusieurs de ses usines.
14 En réponse, la commission pour l’évaluation et le contrôle des plans de restructuration de la communauté autonome d’Andalousie a considéré, notamment, qu’une partie des aides seraient octroyées aux producteurs ayant fourni des betteraves à certaines usines de l’entreprise sucrière durant deux périodes de production de sucre sous quota, à savoir durant les années 2004-2005 et 2005-2006.
15 Figuraient parmi les bénéficiaires de cette aide APA Contrato Colectivo de ACRES, SC (ci-après « ACRES) et Unión Rural, SLU.
Correction financière appliquée à la communauté autonome de Catalogne
16 Du 31 mai au 4 juin 2010, la Commission a mené une enquête, à la suite de laquelle elle a, d’une part, notifié aux autorités espagnoles, par lettre du 16 septembre 2010, ses observations et, d’autre part, demandé aux mêmes autorités des informations complémentaires.
17 Dans ladite lettre, d’une part, la Commission a conclu à l’absence d’éligibilité de certaines dépenses après avoir constaté que les investissements en machines, réalisés par une organisation de producteurs, Fruits secs satalans, SAT (ci-après l’« organisation de producteurs Fruits secs catalans »), dans le cadre de son programme opérationnel, avaient bénéficié à une entreprise prestataire de services sans pour autant rapporter la preuve de l’usage exclusif des machines au bénéfice de l’organisation de producteurs en cause.
18 D’autre part, la Commission a estimé que l’action du programme opérationnel d’une autre organisation de producteurs, Unió Agrària Cooperativa, SCCL (ci-après l’« organisation de producteurs Unió Agrària Cooperativa »), n’avait pas été approuvée conformément aux dispositions réglementaires, en ce qu’il n’avait pas été procédé à un examen technique ou financier détaillé et qu’il n’avait pas été vérifié si les actions exécutées correspondaient au programme opérationnel approuvé.
19 Par lettre du 25 novembre 2010, les autorités espagnoles ont répondu aux observations de la Commission.
20 Par lettre du 23 janvier 2012, la Commission a invité les autorités espagnoles à une réunion bilatérale à Bruxelles le 28 février 2012.
21 Par lettre du 12 septembre 2013, la Commission a communiqué le procès-verbal de la réunion bilatérale du 28 février 2012.
22 Les autorités espagnoles ont, par lettre du 20 novembre 2013, transmis à la Commission les documents complémentaires demandés par celle-ci.
23 Par lettre du 6 mars 2015, la Commission a communiqué officiellement le résultat de l’enquête et a notifié au Royaume d’Espagne une correction financière d’un montant total de 8 376 380,34 euros au titre de carences pour les aides pour les programmes opérationnels relatifs aux fruits et légumes.
24 Par lettre du 20 juillet 2015, les autorités espagnoles ont sollicité une audition par l’organe de conciliation, laquelle a eu lieu le 19 janvier 2016 à Bruxelles.
25 Par lettre du 4 février 2016, l’organe de conciliation a rendu son rapport final.
26 La Commission a communiqué aux autorités espagnoles le 22 juillet 2016 sa position finale et notifié une correction financière d’un montant total de 8 702 642,57 euros (ci-après la « deuxième correction financière »).
Correction financière appliquée à la communauté autonome de Castille et Léon
27 Par lettre du 8 juillet 2013, la Commission a communiqué aux autorités espagnoles ses observations sur l’enquête menée du 8 au 12 avril 2013 et a demandé auxdites autorités de lui fournir des informations complémentaires sur le système de contrôle mis en place pour s’assurer du respect de certaines exigences par les bénéficiaires des aides.
28 Par lettre du 10 octobre 2013, les autorités espagnoles ont transmis à la Commission leurs observations ainsi que les informations complémentaires demandées.
29 Par lettre du 13 février 2014, la Commission a invité le Royaume d’Espagne à une réunion bilatérale, laquelle s’est tenue à Bruxelles le 21 mai 2014.
30 À la suite de cette réunion bilatérale, la Commission a communiqué aux autorités espagnoles le procès-verbal de la réunion et demandé à nouveau à ce que lui soit transmises des informations complémentaires.
31 Par lettre du 6 octobre 2014, les autorités espagnoles ont transmis leurs observations sur le procès-verbal de la réunion bilatérale du 21 mai 2014 ainsi que les informations demandées.
32 Par lettre du 12 juin 2015, la Commission a communiqué aux autorités espagnoles sa position faisant état de carences dans l’application du système de conditionnalité dans la communauté autonome de Castille et Léon, à savoir des « carences dans l’analyse des risques » et « l’absence d’orientations ou d’instructions de contrôle à l’usage des inspecteurs en matière de conditionnalité », et a proposé une correction financière d’un montant de 10 196 695,97 euros.
33 Les autorités espagnoles ont, par lettre du 23 juillet 2015, sollicité l’intervention de l’organe de conciliation.
34 Par lettre du 9 février 2016, l’organe de conciliation a rendu son avis.
35 La Commission a ultérieurement communiqué aux autorités espagnoles sa position finale en maintenant la correction financière à hauteur de 10 071 611,83 euros, laquelle correction concerne les dépenses effectuées dans le cadre du FEAGA et du Feader (ci-après la « troisième correction financière »).
Procédure et conclusions des parties
36 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 janvier 2017, le Royaume d’Espagne a formé le présent recours.
37 Par lettre du 27 octobre 2017, le Royaume d’Espagne a demandé à être entendu dans le cadre d’une audience de plaidoiries, en application de l’article 106, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal.
38 Le 11 juin 2018, le Royaume d’Espagne et la Commission ont été entendus en leurs plaidoiries.
39 Le Royaume d’Espagne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler partiellement la décision attaquée, en ce qu’elle écarte du financement de l’Union, premièrement, pour la communauté autonome d’Andalousie, 1 356 144,90 euros au titre du FEAGA (exercice 2012), deuxièmement, pour la communauté autonome de Catalogne, 2 191 585,00 euros au titre du FEAGA (exercices 2009 à 2012) et, troisièmement, pour la communauté autonome de Castille et Léon, 9 638 473,73 euros au titre du FEAGA et 433 138,10 euros au titre du Feader (exercices 2012 et 2013) ;
– condamner la Commission aux dépens.
40 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours comme non fondé ;
– condamner le Royaume d’Espagne aux dépens.
En droit
41 Au soutien du recours, le Royaume d’Espagne invoque huit moyens.
42 Le premier, dirigé contre la première correction financière, est tiré d’une violation de l’article 3, paragraphe 6, du règlement no 320/2006.
43 Les deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens, dirigés contre la deuxième correction financière, sont, en substance, tirés, respectivement, du caractère illicite de la correction financière unique appliquée au titre de carences dans l’éligibilité des dépenses, du caractère illicite de la correction financière forfaitaire appliquée au titre de faiblesses dans l’approbation des programmes opérationnels et dans l’ordonnancement des dépenses, du caractère disproportionné du taux de la correction financière forfaitaire et du cumul illicite des corrections financières unique et forfaitaire.
44 Les sixième, septième et huitième moyens, dirigés contre la troisième correction financière, sont, en substance, tirés, respectivement, du caractère illicite de la correction financière forfaitaire appliquée au titre de carences dans l’analyse des risques et de l’absence d’orientations ou d’instructions de contrôle à l’usage des inspecteurs en matière de conditionnalité, du caractère disproportionné du taux de la correction financière forfaitaire et d’une violation de l’obligation de motivation.
Sur le premier moyen, dirigé contre la première correction financière et tiré d’une violation de l’article 3, paragraphe 6, du règlement no 320/2006
45 Selon le Royaume d’Espagne, la décision attaquée est à cet égard entachée d’illégalité, en ce que, concernant la première correction financière, la Commission a enfreint l’article 3, paragraphe 6, du règlement no 320/2006.
46 Le Royaume d’Espagne soutient, en substance, que la Commission a commis une erreur de droit en ne reconnaissant pas la qualité de « producteurs », au sens de l’article 3, paragraphe 6, du règlement no 320/2006, à ACRES et à Unión Rural.
47 Il fait tout d’abord observer que doivent être considérés comme des « producteurs », au sens de l’article 3, paragraphe 6, du règlement no 320/2006, les sociétés « qui ont conclu un contrat de livraison » avec les entreprises sucrières pour la production de sucre sous quota, et ce depuis la modification opérée par le règlement (CE) no 1261/2007 du Conseil, du 9 octobre 2007, modifiant le règlement no 320/2006 (JO 2007, L 283, p. 8).
48 Aussi ressortirait-il de cette modification que sont susceptibles de bénéficier des aides les personnes répondant aux conditions suivantes : être un entrepreneur « ayant livré, [sur la base d’un contrat de livraison], de la betterave sucrière pour la production de sucre sous quota, indépendamment de la provenance des betteraves », et livrer « des betteraves acquises dans le cadre d’une production sous quota abandonnée ».
49 Ensuite, la qualité de « producteurs » d’ACRES et d’Unión Rural découle nécessairement, selon le Royaume d’Espagne, de l’attribution initiale d’un quota de production par l’entreprise sucrière, dans la mesure où ladite attribution est validée par les organisations professionnelles agricoles et les entreprises du secteur parties à l’accord-cadre interprofessionnel, lesquelles refuseraient assurément que des entreprises dépourvues d’une telle qualité puissent bénéficier des aides.
50 Puis, le Royaume d’Espagne souligne que la Commission admet elle‑même que les betteraves livrées en vertu d’un contrat de livraison ne doivent pas provenir nécessairement des exploitations du titulaire des droits, et ce pour compenser notamment des déficits de livraison que présenteraient d’autres producteurs.
51 Cette évolution découlerait notamment des dispositions régissant l’industrie sucrière, fondées sur la livraison de betteraves sucrières et ne prévoyant pas d’obligation tenant à ce que la betterave fournie provienne exclusivement des exploitations du titulaire des droits.
52 Une interprétation contraire irait à l’encontre de l’objectif principal poursuivi par le règlement no 320/2006, à savoir l’abandon de la production de sucre sous quota, afin de parvenir, par le biais d’une restructuration des entreprises sucrières, à une situation de marché équilibrée dans l’Union.
53 De même, conférer la seule qualité de « producteur » aux personnes produisant directement de la betterave sucrière sous quota et ayant conclu un contrat de livraison avec l’entreprise sucrière exclurait, d’une part, les producteurs-collecteurs ne s’étant pas vu conférer historiquement un quota de production et, d’autre part, les entrepreneurs qui, bénéficiant de quotas de production et d’un contrat de livraison, ne produisent pas directement de la betterave sucrière.
54 Enfin, le Royaume d’Espagne souligne que tant ACRES qu’Unión Rural, de par leur structure sociale, étaient composées d’agriculteurs, lesquels disposaient initialement de quotas de production.
55 La Commission conteste le bien-fondé de l’ensemble des arguments avancés par le Royaume d’Espagne et considère que le premier moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
56 À titre liminaire, il convient, tout d’abord, de relever que ACRES et Unión Rural sont deux sociétés.
57 ACRES est une société civile, sans personnalité juridique, constituée le 30 janvier 1991 par treize membres d’une association professionnelle de cultivateurs de betteraves sucrières de la province de Séville (Espagne), dont au moins huit sont des agriculteurs individuels.
58 Son objet social est le suivant : « la société civile a pour objet l’achat de betteraves aux producteurs agricoles aux fins de la vente aux entreprises sucrières ou à d’autres entités de forme mixte, ainsi que la gestion en commun de biens et de produits pour la culture de la betterave ».
59 Unión Rural est une société unipersonnelle à responsabilité limitée, constituée le 19 octobre 2004, dont l’associé unique est une autre association professionnelle de cultivateurs de betteraves sucrières de la région de Séville.
60 Son objet social est le suivant : « services administratifs, comptables, fiscaux, vétérinaires et techniques ; gestion, négoce et commercialisation de produits agricoles et agroalimentaires ; assistance et suivi pour tous les documents dont ont besoin les agriculteurs, les éleveurs et leurs coopératives ; participation à des projets ou des programmes ; organisation de cours de formation, de congrès et d’expositions ; édition de publication ; exercice de l’activité d’agent d’assurance ».
61 Ensuite, ACRES et Unión Rural sont titulaires de quotas de production de betteraves sucrières attribués directement par l’entreprise sucrière, et ce conformément à un accord-cadre interprofessionnel.
62 Pour ce qui concerne plus particulièrement Unión Rural, cette dernière a acquis le 14 octobre 2005 auprès de Commercial La Unión, SCA les droits de livraison que cette dernière détenait initialement à l’égard de l’entreprise sucrière. Aussi, par cette convention, Unión Rural a-t-elle été subrogée dans les droits et obligations de Commercial La Unión.
63 Enfin, pour gérer les droits de livraison dont ACRES et Unión Rural étaient titulaires durant les années de référence 2004-2005 et 2005-2006, ces sociétés s’approvisionnaient auprès de producteurs de betterave. Pour ce qui concerne ACRES, ces derniers devaient être membres d’une association professionnelle de cultivateurs de betteraves sucrières de la région de Séville, ainsi que cela ressort du titre V des statuts de ladite société. Pour ce qui concerne Unión Rural, Commercial La Unión s’approvisionnait principalement auprès des associés de cette société, mais également auprès de producteurs tiers.
64 C’est à la lumière de ces éléments factuels qu’il convient de déterminer si la Commission a commis une erreur de droit en considérant qu’ACRES et Unión Rural ne pouvaient être qualifiées de producteur, au sens de l’article 3, paragraphe 6, du règlement no 320/2006.
65 À cet égard, dans sa version initiale, l’article 3, paragraphe 6, du règlement no 320/2006 prévoyait la réservation d’un montant correspondant à au moins 10 % de l’aide à la restructuration de l’industrie sucrière aux « producteurs de betterave sucrière, de canne à sucre et de chicorée qui ont livré ces produits ».
66 Dans sa version telle que modifiée par le règlement no 1261/2007, lequel est entré en vigueur sans dispositions transitoires le 30 octobre 2007, il est prévu que 10 % de l’aide à la restructuration de l’industrie sucrière est réservé aux « producteurs […] qui ont conclu un contrat de livraison avec l’entreprise concernée ».
67 En l’espèce, il ressort clairement du dossier qu’ACRES et Unión Rural étaient parties à un contrat de livraison avec l’entreprise sucrière et, de par ce contrat, titulaires de quotas de production de betteraves sucrières.
68 Toutefois, si ACRES et Unión Rural sont certes parties à un contrat de livraison, elles ne peuvent, dans le même temps, disposer de la qualité de producteur, au sens de l’article 3, paragraphe 6, du règlement no 320/2006.
69 En effet, premièrement, à la lumière dudit article, il ne saurait être contesté que la condition tenant à l’existence d’un « contrat de livraison » n’est pas alternative à celle d’avoir la qualité de « producteur », mais cumulative.
70 Aussi le Royaume d’Espagne ne saurait-il valablement soutenir que les sociétés ayant conclu un contrat de livraison avec l’entreprise sucrière doivent être considérées, de ce seul fait, comme des producteurs, au sens de l’article 3, paragraphe 6, du règlement no 320/2006.
71 Deuxièmement, ACRES et Unión Rural n’ont pas pour objet social la culture de la betterave, mais, notamment, pour ce qui concerne ACRES, « l’achat de betteraves aux producteurs agricoles aux fins de la vente aux entreprises sucrières » et, pour ce qui concerne Unión Rural, le « négoce et [la] commercialisation de produits agricoles et agroalimentaires ».
72 En juger autrement impliquerait que toute société dont l’activité principale est une activité de négoce pourrait être bénéficiaire de l’aide à la restructuration, et ce en contradiction avec les objectifs poursuivis par le règlement no 320/2006.
73 En effet, le considérant 6 du règlement no 320/2006 énonce clairement que, « [a]fin de soutenir les producteurs de betterave sucrière, de canne à sucre et de chicorée contraints d'abandonner leur production en raison de la fermeture des usines qu'ils approvisionnaient précédemment, il convient de mettre à la disposition de ces producteurs […] une partie de l'aide à la restructuration, de manière à compenser les pertes liées à ces fermetures ».
74 Troisièmement, la qualité de producteur ne saurait découler en l’espèce de la validation par un organisme interprofessionnel de l’octroi d’un quota de production à ACRES et à Unión Rural par l’entreprise sucrière, une telle condition n’étant au demeurant pas prévue par le règlement no 320/2006.
75 Quatrièmement, le fait qu’une partie, voire la totalité, des associés ou les membres d’une entité associée de ces entités soient des producteurs de betteraves ne saurait conférer la qualité de producteur, au sens de l’article 3, paragraphe 6, du règlement no 320/2006, à ACRES et à Unión Rural.
76 En effet, pour déterminer la qualité de producteur, il importe de se référer aux objets sociaux de ces sociétés, lesquels font état d’une activité de négoce et non d’une activité de production de betteraves.
77 Cinquièmement, si la Commission a certes considéré que, dans certains cas, le titulaire d’un contrat de livraison pouvait s’approvisionner pour partie auprès de tiers, il n’est toutefois pas contesté que les entités concernées en l’espèce exerçaient une activité de producteur. Leur situation n’était donc pas comparable à celle d’ACRES et de Unión Rural.
78 Partant, ACRES et Unión Rural ne pouvaient être considérées comme étant des producteurs, au sens de l’article 3, paragraphe 6, du règlement no 320/2006.
79 Il aurait pu toutefois en aller différemment si, tout en étant titulaire d’un contrat de livraison, ACRES et Unión Rural avaient agi au nom et pour le compte des producteurs auprès desquelles elles s’approvisionnaient.
80 Or, ainsi que l’admet le Royaume d’Espagne, ces sociétés n’agissaient pas en qualité de représentantes de ces producteurs.
81 Par conséquent, il convient de rejeter le premier moyen du recours comme étant non fondé.
Sur les moyens dirigés contre la deuxième correction financière
82 Les deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens du recours sont dirigés contre la deuxième correction financière.
83 Par son deuxième moyen, le Royaume d’Espagne invoque, à titre principal, le caractère illicite de la correction financière unique de 5 % appliquée au titre de carences dans l’éligibilité des dépenses.
84 Par son troisième moyen, il invoque, également à titre principal, le caractère illicite de la correction forfaitaire de 5 % appliquée au titre de faiblesses dans l’approbation des programmes et l’ordonnancement des dépenses.
85 Par son quatrième moyen, le Royaume d’Espagne soutient, dans la seule hypothèse du rejet du troisième moyen, que la correction forfaitaire de 5 % en question est disproportionnée.
86 Par son cinquième moyen, le Royaume d’Espagne fait valoir, dans l’hypothèse du rejet des deuxième et troisième moyens, un cumul illicite des corrections financières.
87 À cet égard, il convient de relever que, bien que, dans la partie conclusive de la requête, le Royaume d’Espagne ait demandé d’annuler partiellement la décision attaquée, en ce qu’elle écarte du financement de l’Union, pour la communauté autonome de Catalogne, 2 191 585,00 euros au titre du FEAGA, il résulte du contenu de cette requête, en particulier du deuxième moyen, que le Royaume d’Espagne conteste tant la correction financière unique d’un montant de 122 112,95 euros qu’une partie de la correction financière forfaitaire de 5 %, d’un montant de 2 191 585 euros, justifiées respectivement par des faiblesses dans les contrôles relatifs à l’éligibilité des dépenses et par des faiblesses dans les contrôles préalables à l’approbation des programmes opérationnels et à l’ordonnancement des dépenses.
Considérations liminaires
88 Il convient de rappeler que, lorsque la Commission refuse de mettre à la charge d’un fonds agricole européen certaines dépenses pour cause de violations des dispositions du droit de l’Union imputables à un État membre, elle doit prouver l’existence desdites violations (voir arrêt du 3 avril 2017, Allemagne/Commission, T‑28/16, EU:T:2017:242, point 31 et jurisprudence citée).
89 Il en va ainsi dans l’hypothèse où les autorités compétentes d’un État membre ne mettent pas en œuvre de manière adéquate les contrôles préalables à l’approbation d’un programme opérationnel, en application de l’article 105 du règlement (CE) no 1580/2007 de la Commission, du 21 décembre 2007, portant modalités d’application des règlements (CE) no 2200/96, (CE) no 2201/96 et (CE) no 1182/2007 du Conseil dans le secteur des fruits et légumes (JO 2007, L 350, p. 1) ou les contrôles devant être effectuées préalablement à l’octroi d’un paiement, tels que prévus par l’article 106 du règlement no 1580/2007.
90 À cette fin, la Commission est obligée de justifier la décision par laquelle elle constate l’absence ou la défaillance des contrôles mis en œuvre par l’État membre concerné (voir arrêt du 3 avril 2017, Allemagne/Commission, T‑28/16, EU:T:2017:242, point 31 et jurisprudence citée).
91 Toutefois, elle est tenue non de démontrer de façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les autorités nationales ou l’irrégularité des données transmises, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces données (arrêts du 20 septembre 2001, Belgique/Commission, C‑263/98, EU:C:2001:455, point 36, et du 8 mai 2003, Espagne/Commission, C‑349/97, EU:C:2003:251, point 47).
92 Pour sa part, l’État membre concerné ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer par la suite ses propres allégations par des éléments établissant l’existence d’un système fiable et opérationnel de contrôle. Dès lors qu’il ne parvient pas à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, celles-ci constituent des éléments susceptibles de faire naître des doutes sérieux quant à la mise en place d’un ensemble adéquat et efficace de mesures de surveillance et de contrôle (voir arrêt du 3 avril 2017, Allemagne/Commission, T‑28/16, EU:T:2017:242, point 33 et jurisprudence citée).
93 Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes et auquel il incombe, en conséquence, de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission (voir arrêt du 4 septembre 2015, Royaume-Uni/Commission, T‑245/13, EU:T:2015:595, point 65 et jurisprudence citée).
94 De même, s’il appartient à la Commission de prouver l’existence d’une violation des règles de l’Union, une fois cette violation établie, il revient à l’État membre de démontrer, le cas échéant, que la Commission a commis une erreur quant aux conséquences financières à en tirer (arrêts du 14 février 2008, Espagne/Commission, T‑266/04, non publié, EU:T:2008:37, point 105, et du 5 juillet 2012, Grèce/Commission, T‑86/08, EU:T:2012:345, point 196).
95 C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier le bien-fondé des moyens dirigés contre la deuxième correction financière.
Sur le deuxième moyen, tiré du caractère illicite de la correction financière unique appliquée au titre de carences dans l’éligibilité des dépenses
96 Tout d’abord, le Royaume d’Espagne souligne avoir mis en œuvre les contrôles adéquats pour s’assurer du respect des conditions d’éligibilité des dépenses, et ce tant lors de l’approbation du programme opérationnel que lors de l’autorisation des dépenses.
97 Aussi soutient-il que la Commission a violé les articles 105 et 106 du règlement no 1580/2007, lus en combinaison avec l’article 55, paragraphe 3, du règlement (CE) no 1182/2007 du Conseil, du 26 septembre 2007, établissant des règles spécifiques pour le secteur des fruits et légumes, modifiant les directives 2001/112/CE et 2001/113/CE ainsi que les règlements (CEE) no 827/68, (CE) no 2200/96, (CE) no 2201/96, (CE) no 2826/2000, (CE) no 1782/2003 et (CE) no 318/2006, et abrogeant le règlement (CE) no 2202/96 (JO 2007, L 273, p. 1), et l’article 52, paragraphes 1 et 2, du règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant les règlements (CEE) no 352/78, (CE) no 165/94, (CE) no 2799/98, (CE) no 814/2000, (CE) no 1290/2005 et no 485/2008 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 549).
98 Plus précisément, durant la phase d’approbation du programme opérationnel de l’organisation de producteurs Fruits secs catalans, le Royaume d’Espagne souligne que les contrôles adéquats ont été effectués par le Ministerio de Agricultura, Alimentación y Medio Ambiente [ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et de l’Environnement (Espagne), ci-après le « ministère de l’Agriculture »], lequel a procédé à l’approbation du programme opérationnel le 19 janvier 2006.
99 Au stade de l’autorisation des dépenses, les contrôles ont, en 2009, été effectués non seulement par l’organisme payeur de Catalogne, mais également par un organisme de certification.
100 L’ensemble des contrôles a permis de valider l’extension des investissements en dehors des locaux de l’organisation de producteurs Fruits secs catalans ou de ses membres, constatant notamment que l’investissement était réel, qu’il était la propriété de ladite organisation de producteurs et qu’il avait procuré des avantages à ses membres.
101 Ensuite, s’agissant précisément de l’éligibilité des dépenses, notamment s’agissant de ce que les investissements n’ont pas été réalisés dans les locaux de l’organisation de producteurs Fruits secs catalans, le Royaume d’Espagne fait valoir qu’aucune restriction quant à la localisation des investissements n’existait sous l’empire des règlements applicables ratione temporis, à savoir les règlements (CE) no 2200/96 du Conseil, du 28 octobre 1996, portant organisation commune des marchés dans le secteur des fruits et légumes (JO 1996, L 297, p. 1), et (CE) no 1433/2003 de la Commission, du 11 août 2003, portant modalités d'application du règlement no 2200/96 du Conseil en ce qui concerne les fonds opérationnels, les programmes opérationnels et l'aide financière (JO 2003, L 203, p. 25).
102 Il ajoute que, si cette exigence a certes été introduite en 2007 à la suite de l’adoption du règlement no 1580/2007, l’organisation de producteurs Fruits secs catalans avait préféré demeurer régie par les dispositions des règlements no 2200/96 et no 1433/2003, conformément à l’option leur étant conférée par l’article 55, paragraphe 3, du règlement no 1182/2007.
103 Par ailleurs, le Royaume d’Espagne souligne que, s’agissant d’un programme opérationnel non adapté à la nouvelle réglementation, il est possible d’apporter des modifications pour l’année en cours, à condition notamment que la modification n’implique pas une autorisation préalable.
104 Enfin et en tout état de cause, l’investissement aurait été fait au bénéfice des membres de l’organisation de producteurs Fruits secs catalans, ainsi que cela ressortirait des contrôles effectués.
105 Le Royaume d’Espagne précise, premièrement, que la délocalisation de l’investissement se justifiait par la dispersion des membres de l’organisation de producteurs Fruits secs catalans dans tout le pays ; deuxièmement, que l’investissement est demeuré la propriété de cette organisation de producteurs et, troisièmement, que les machines, objet de l’investissement, n’ont été utilisées que par ses membres et que toute utilisation par un tiers donnait notamment lieu au versement d’un loyer.
106 La Commission conteste le bien-fondé de l’ensemble des arguments avancés par le Royaume d’Espagne et considère que le deuxième moyen du recours doit être rejeté comme étant non fondé.
107 Elle justifie l’application, en l’espèce, d’une correction financière unique en raison de faiblesses dans les contrôles de l’éligibilité des dépenses, en particulier de celles affectées au financement des investissements en dehors des locaux de l’organisation de producteurs en cause, et ce en violation des dispositions des règlements nos 1182/2007 et 1580/2007.
108 À cet égard, en premier lieu, il convient de déterminer la réglementation applicable aux fins d’apprécier l’éligibilité des dépenses réalisées en dehors des locaux de l’organisation de producteurs Fruits secs catalans au jour de l’introduction de la demande d’approbation du programme opérationnel et au jour de la demande aux fins de sa modification.
109 En effet, c’est en raison de l’approbation par les autorités espagnoles de telles dépenses que la Commission a identifié des carences dans les contrôles devant être mis en œuvre, lesquelles ont justifié l’application d’une correction financière unique.
110 À cet égard, il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 152, paragraphe 2, du règlement no 1580/2007, « [l]es règles d’approbation des programmes opérationnels présentés en 2007 sont celles applicables immédiatement avant la date d’application du présent règlement ».
111 Or, en l’espèce, l’organisation de producteurs Fruits secs catalans a déposé une demande d’approbation de son programme opérationnel pour la période 2006-2010, lequel a été approuvé par une décision du ministère de l’Agriculture le 19 janvier 2006.
112 L’approbation du programme opérationnel a été prise non pas sur le fondement des dispositions des règlements nos 1182/2007 et 1580/2007, lesquels étaient certes entrés en vigueur le 1er janvier 2008, mais sur le fondement des dispositions applicables au moment de l’introduction de la demande, à savoir les règlements nos 2200/96 et 1433/2003.
113 Toutefois, il convient de relever que, le 30 septembre 2008, l’organisation de producteurs Fruits secs catalans a introduit une demande de modification de son programme opérationnel, laquelle a été approuvée le 21 janvier 2009 par une décision du gouvernement régional de Catalogne.
114 En substance, l’organisation de producteurs Fruits secs catalans a demandé, d’une part, la modification de son programme opérationnel pour, selon le Royaume d’Espagne, « adapter les montants approuvés aux montants effectivement exécutés » et, d’autre part, la non-adaptation du programme opérationnel aux dispositions de la nouvelle réglementation.
115 En effet, aux termes de l’article 55, paragraphe 3, du règlement no 1182/2007, « [à] la demande d’une organisation de producteurs, un programme opérationnel approuvé au titre du règlement […] no 2200/96 avant la date d’entrée en vigueur du présent règlement, peut : a) continuer jusqu’à son expiration […] b) être modifié pour satisfaire aux conditions du présent règlement [...] c) être remplacé par un nouveau programme opérationnel approuvé au titre du présent règlement ».
116 En d’autres termes, il ressort de l’article 55, paragraphe 3, sous a), du règlement no 1182/2007 qu’une organisation de producteurs peut demander à ce que son programme opérationnel demeure régi par une réglementation antérieure, de sorte que, en l’espèce, l’organisation de producteurs Fruits secs catalans était en droit de demander à bénéficier de l’option conférée par cette disposition.
117 Cette option est également précisée à l’article 152, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement no 1580/2007, lequel dispose que « [l]es programmes opérationnels bénéficiant de l’application de l’article 55, paragraphe 3, [sous] a), du règlement [...] no 1182/2007 peuvent continuer a' être mis en œuvre jusqu’à leur expiration pour autant qu’ils soient conformes aux règles applicables avant la date d’application du présent règlement ».
118 Toutefois, si un programme opérationnel peut continuer, jusqu’à son expiration, à être régi par la réglementation antérieure, cela suppose qu’il n’ait fait l’objet d’aucune modification, car, si tel est le cas, la modification doit satisfaire aux conditions de la nouvelle réglementation, conformément à l’article 55, paragraphe 3, sous b) et c), du règlement no 1182/2007.
119 Or, en l’espèce, le programme opérationnel de l’organisation de producteurs Fruits secs catalans a continué à être régi par la réglementation antérieure, alors même qu’il avait fait l’objet d’une modification, en violation de l’article 55, paragraphe 3, du règlement no 1182/2007.
120 En effet, ainsi que le relève à juste titre la Commission, la modification demandée par l’organisation de producteurs Fruits secs catalans le 30 septembre 2008 comprenait des actions nouvelles.
121 Ainsi, dans le cadre de la demande de modification du programme opérationnel mentionnée au point 113 ci-dessus, les autorités espagnoles se devaient de contrôler l’éligibilité des dépenses à la lumière des règlements nos 1182/2007 et 1580/2007.
122 Ce constat ne saurait être remis en cause par la faculté laissée aux États membres, prévue à l’article 152, paragraphe 2, du règlement no 1580/2007, d’« arrêter toutes les dispositions nécessaires pour permettre aux organisations de producteurs de modifier leurs programmes opérationnels le plus rapidement possible après l’entrée en vigueur du présent règlement en vue de l’application de l’article 55, paragraphe 3, [sous] b) et c), du règlement […] no 1182/2007 ».
123 Certes, le Royaume d’Espagne se fonde sur une réglementation espagnole pour justifier la possibilité de modifier un programme opérationnel qui ne serait pas adapté à la nouvelle réglementation. En ce sens, les autorités espagnoles soutiennent qu’« il [est] possible d’apporter des modifications pour l’année en cours, à condition que la modification ne comporte pas d’autorisation préalable » et qu’elle ne concerne pas un exercice non commencé.
124 Il n’en reste pas moins que l’article 55, paragraphe 3, du règlement no 1182/2007 ne prévoit pas, en cas de continuation du programme opérationnel sous l’empire de l’ancienne réglementation, la possibilité d’y apporter des modifications, quand bien même ces dernières ne seraient pas soumises à une autorisation préalable.
125 Partant, le Royaume d’Espagne se devait d’apprécier, au jour de la demande de modification de son programme opérationnel introduite par l’organisation de producteurs Fruits secs catalans, l’éligibilité des dépenses à la lumière des dispositions des règlements nos 1182/2007 et 1580/2007.
126 En second lieu, s’agissant de l’éligibilité des dépenses, force est de constater que certaines dépenses prévues par le programme opérationnel qui concernent des investissements réalisés en dehors des locaux de l’organisation de producteurs Fruits secs catalans n’étaient pas éligibles en application de l’annexe VIII, point 22, du règlement no 1580/2007 fixant la liste des opérations et dépenses non admissibles au titre des programmes opérationnels visés à l’article 61 dudit règlement.
127 En effet, parmi les dépenses considérées comme non admissibles, visées à l’annexe VIII, point 22, du règlement no 1580/2007, figurent notamment les investissements ou autres types d’actions similaires qui ne sont pas réalisées dans l’exploitation de l’organisation de producteurs, de l’association d’organisations de producteurs ou de l’une de leurs filiales.
128 Or, d’une part, ainsi que le relève à juste titre la Commission, une partie des machines, objet de l’investissement concerné, ont été remises à des entreprises prestataires de services, lesquelles sont la propriété du président de l’organisation de producteurs Fruits secs catalans et de son frère, ce que ne conteste pas le Royaume d’Espagne.
129 D’autre part, le 21 janvier 2009, la demande de modification du programme opérationnel de l’organisation de producteurs Fruits secs catalans a été approuvée par le gouvernement régional de Catalogne (voir point 113 ci‑dessus).
130 Ainsi, la Commission était en droit de faire état de carences dans les contrôles relatifs à l’éligibilité des dépenses et d’appliquer une correction financière conformément à l’article 52, paragraphes 1 et 2, du règlement no 1306/2013.
131 Cette conclusion ne saurait être remise en cause ni par le fait qu’une partie des machines, objet de l’investissement en cause, ont été utilisées par des entreprises prestataires de services, moyennant le versement d’un loyer, ni par le fait qu’un tel investissement a procuré un avantage quelconque à l’organisation de producteur Fruits secs catalans.
132 En effet, comme le souligne à juste titre la Commission, sans être contredite sur ce point par le Royaume d’Espagne, rien ne garantit que cet investissement a servi uniquement à mettre en œuvre le programme opérationnel ou qu’il a uniquement bénéficié à l’organisation de producteurs Fruits secs catalans ou à ses membres.
133 Par conséquent, il convient de rejeter le deuxième moyen du recours comme étant non fondé.
Sur le troisième moyen, tiré du caractère illicite de la correction financière forfaitaire appliquée au titre de faiblesses dans l’approbation des programmes opérationnels et dans l’ordonnancement des dépenses
134 Le troisième moyen du recours est composé de deux branches.
135 Dans le cadre d’une première branche, le Royaume d’Espagne invoque le caractère illicite de la correction forfaitaire au titre de faiblesses dans la mise en œuvre des contrôles effectués dans la phase d’approbation des programmes opérationnels. Dans le cadre d’une seconde branche, le Royaume d’Espagne fait valoir le caractère illicite de la correction forfaitaire au titre de faiblesses dans la mise en œuvre des contrôles au stade de l’autorisation des dépenses.
136 Dans le cadre de chacune de ces branches, le Royaume d’Espagne soutient que la Commission a violé l’article 52, paragraphes 1 et 2, du règlement no 1306/2013, lu en combinaison avec l’article 103, l’article 105, paragraphe 2, sous d), l’article 106, l’article 107, paragraphe 1, sous c) à e), l’article 108, paragraphe 1, sous b), et l’article 109, paragraphe 1, sous a) à c), du règlement no 1580/2007.
– Sur la première branche du troisième moyen, tirée du caractère illicite de la correction financière forfaitaire appliquée au titre de faiblesses dans la mise en œuvre des contrôles au stade de l’approbation des programmes opérationnels
137 Le Royaume d’Espagne soutient que l’approbation des programmes opérationnels s’est déroulée conformément aux exigences actuellement posées par l’article 105, paragraphe 2, sous d), du règlement no 1580/2007.
138 En effet, en vue de l’approbation du programme opérationnel de l’organisation de producteurs Unió Agrària Cooperativa, plusieurs demandes des autorités espagnoles ont, tout d’abord, été formulées relativement aux aspects tant financiers que techniques du programme, en particulier pour la construction de nouvelles installations, auxquelles a répondu l’organisation de producteurs Unió Agrària Cooperativa, ainsi que cela ressort du rapport joint à la décision d’approbation du ministère de l’Agriculure du 26 octobre 2004.
139 Ensuite, le Royaume d’Espagne fait observer que les projets d’ingénierie ont été validés par le Colegio de Ingenieros Agrónomos de Cataluña [ordre professionnel des ingénieurs agronomes de Catalogne (Espagne), ci-après l’« ordre professionnel »], pour ce qui concerne tant leur viabilité que leur qualité technique.
140 À cet égard, il souligne que l’ordre professionnel est une société de droit public chargé de missions de service public, notamment celles que lui confie la loi consistant à valider des projets de génie civil en veillant à ce qu’ils répondent aux exigences de qualité nécessaires et en vérifiant le caractère raisonnable de leurs coûts.
141 Un projet visé par un ordre professionnel bénéficie, selon les autorités espagnoles, d’une garantie de contrôle quant aux aspects sur lesquels ledit ordre s’est prononcé ou qu’il a validés, ainsi que l’a relevé notamment l’organe de conciliation.
142 En outre, le Royaume d’Espagne précise que le programme opérationnel a fait l’objet d’un contrôle financier par l’Intervención delegada (inspection déléguée, Espagne) pour les campagnes 2006 et 2008. À cette occasion, une attention particulière a été, en substance, portée à la conformité du programme opérationnel.
143 Il ajoute que le rapport de contrôle pour la campagne 2006 a fait l’objet d’une publication en novembre 2009 puis a été remis à la Commission tandis que celui pour la campagne 2008 a été approuvé en septembre 2011, sans que des infractions lors de la phase d’approbation des programmes y soient constatées.
144 Enfin, le Royaume d’Espagne souligne que le gouvernement régional de Catalogne a commandé une expertise en 2015 sur la mise en œuvre du programme opérationnel pour la période 2005-2008, laquelle commande a débouché sur la présentation d’un rapport en 2016 faisant état de contrôles sur la solidité du plan de financement du programme opérationnel.
145 La Commission conteste le bien-fondé de l’ensemble des arguments avancés par le Royaume d’Espagne et considère que la première branche du troisième moyen du recours doit être rejetée comme étant non fondée.
146 Elle soutient, en l’espèce, que le Royaume d’Espagne n’a pas procédé aux contrôles requis préalablement à l’approbation du programme opérationnel de l’organisation de producteurs Unió Agrària Cooperativa, à savoir ceux permettant de vérifier la qualité technique et la solidité du plan de financement du programme opérationnel.
147 Elle invoque notamment l’absence de contrôles de la qualité technique et de la solidité financière d’un projet visant à la construction d’un centre de stockage, lequel projet renvoie à l’une des actions du programme opérationnel.
148 À cet égard, il convient, en l’espèce, d’apprécier si le programme opérationnel présenté par l’organisation de producteurs Unió Agrària Cooperativa a été approuvé conformément à la réglementation applicable.
149 À titre liminaire, il y a lieu de relever que l’organisation de producteurs Unió Agrària Cooperativa a déposé le 15 septembre 2004 une demande d’approbation de son programme opérationnel pour la période 2005-2007, qui a été approuvée par décision du ministère de l’Agriculture du 26 octobre 2004.
150 Aussi l’approbation dudit programme était-elle à cette date régie par les dispositions du règlement no 1433/2003 et non par les dispositions du règlement no 1580/2007, lequel est devenu applicable à compter du 1er janvier 2008.
151 Aux termes de l’article 12, sous d), du règlement no 1433/2003, « [l]’autorité nationale compétente s'assure par tous les moyens utiles, y compris par des contrôles sur place : d) de la cohérence économique et de la qualité technique des programmes, du bien-fondé des estimations et du plan de financement, ainsi que de la programmation de son exécution ». L’article 13, paragraphe 1, sous a), dudit règlement précise que « l’autorité nationale compétente approuve, selon le cas, les montant des fonds et les programmes qui satisfont […] aux conditions du présent chapitre », y compris celles posées à l’article 12.
152 L’article 105, paragraphe 2, du règlement no 1580/2007, lequel a remplacé, à compter du 1er janvier 2008, l’article 12 du règlement no 1433/2003, précise que, « [a]vant d’approuver un programme opérationnel en application de l’article 65 [du règlement no 1580/2007], l’autorité nationale compétente vérifie par tous les moyens utiles, y compris les contrôles sur place, le programme opérationnel soumis pour approbation et, le cas échéant, les demandes de modification ».
153 Par ailleurs, l’article 105, paragraphe 2, sous d), du règlement no 1580/2007, ajoute que ces contrôles portent en particulier sur « la cohérence et la qualité technique des programmes, le sérieux des estimations, la solidité du plan de financement ainsi que la programmation de son exécution » et que « [l]es contrôles permettent de vérifier si des objectifs quantifiables ont été fixés pour qu’il soit possible de contrôler leur bonne réalisation et si les objectifs fixés peuvent être atteints grâce à la mise en œuvre des actions proposées ».
154 Or, en premier lieu, s’agissant de la validation par l’ordre professionnel du projet relatif à la construction de centres de stockage, il est constant que l’ordre professionnel a procédé à ladite validation le 31 juillet 2007, soit près de trois ans après la décision d’approbation du programme opérationnel du ministère de l’Agriculture, laquelle est datée du 26 octobre 2004.
155 Ce constat n’a pas été remis en cause par le Royaume d’Espagne lors de l’audience de plaidoiries, au cours de laquelle celui-ci a précisé que l’ordre professionnel n’était intervenu que postérieurement à l’approbation du programme opérationnel.
156 Partant, le Royaume d’Espagne ne saurait valablement se fonder sur la validation du projet en cause par l’ordre professionnel ni pour démontrer le respect des exigences posées par l’article 12, sous d), du règlement no 1433/2003, ni, en tout état de cause, pour soutenir que la Commission a violé l’article 105, paragraphe 2, sous d), du règlement no 1580/2007.
157 En deuxième lieu, il en va de même du rapport d’expertise commandé par le gouvernement régional de Catalogne en 2015, lequel permet certes de faire état à tout le moins d’un contrôle sur la solidité du plan de financement du programme opérationnel. Il n’en reste pas moins que, sans préjudice de la recevabilité des preuves relatives à ladite commande, celle-ci est postérieure à l’adoption de la décision d’approbation du programme opérationnel du ministère de l’Agriculture du 26 octobre 2004.
158 En troisième lieu, il convient d’apprécier la pertinence du contrôle financier réalisé par l’inspection déléguée, laquelle est intervenue pour certifier les comptes de l’organisme payeur pour les campagnes de financement 2006 et 2008.
159 Le Royaume d’Espagne soutient notamment « qu’aucune infraction n’[a] été constatée [par l’inspection déléguée] lors des contrôles effectués dans la phase d’approbation des programmes ».
160 Or, aux termes de l’article 7 du règlement (CE) no 1290/2005 du Conseil, du 21 juin 2005, relatif au financement de la politique agricole commune (JO 2005, L 209, p. 1), « [l]’organisme de certification est une entité de droit public ou privé désignée par l’État membre en vue de certifier les comptes de l’organisme payeur agréé quant a' leur véracité, leur intégralité et leur exactitude, en prenant en compte le système de gestion et de contrôle mis en place ».
161 Aussi l’inspection déléguée était-elle seulement tenue de certifier les comptes de l’organisme payeur et non de vérifier que les contrôles relatifs à la régularité et la légalité des dépenses avaient été correctement effectués.
162 Certes, l’office des organismes de certification a été étendu par l’article 9 du règlement no 1306/2013.
163 L’article 9 du règlement no 1306/2013 dispose en effet que « l’organisme de certification émet un avis sur [...] la légalité et la régularité des dépenses dont le remboursement a été demandé à la Commission ».
164 Il n’en reste pas moins que, au moment de l’adoption des rapports de contrôle de l’inspection déléguée, à savoir en novembre 2009 et en septembre 2011, l’article 9 du règlement no 1306/2013 n’était pas entré en vigueur, conformément à l’article 121 dudit règlement.
165 Partant, le Royaume d’Espagne ne saurait valablement se fonder sur les rapports de contrôle de l’inspection déléguée pour justifier d’avoir satisfait aux conditions posées par l’article 12, sous d), du règlement no 1433/2003 et précisées par l’article 105, paragraphe 2, sous d), du règlement no 1580/2007.
166 En quatrième lieu, les autorités espagnoles soutiennent, en substance, que la décision d’approbation du ministère de l’Agriculture du 26 octobre 2004 s’accompagnait d’un rapport prouvant que des analyses portant sur la qualité et la spécificité technique du projet concerné ainsi que sur ses aspects financiers avaient été menées.
167 À cet égard, premièrement, le titre du rapport spécifie, certes, que le rapport a été émis à la suite d’une analyse de la documentation fournie par l’organisation de producteurs Unió Agrària Cooperativa conformément aux règlements nos 2200/96 et 1433/033.
168 Deuxièmement, il contient plusieurs tableaux illustrant le plan de financement du programme opérationnel.
169 Troisièmement, le rapport affirme que le programme opérationnel en cause remplit plusieurs des objectifs visés à l’article 15, paragraphe 4, du règlement no 2200/96, à savoir notamment que les actions à entreprendre pour atteindre les objectifs sont éligibles et comprennent des mesures visant à protéger l’environnement.
170 Il n’en reste pas moins qu’une lecture approfondie du rapport ne révèle aucune analyse précise de la cohérence économique et de la qualité technique du programme opérationnel en cause, du bien-fondé des estimations et du plan de financement.
171 Au surplus, si le rapport fait référence à l’article 12, sous b) et c), du règlement no 1433/2003, lesquels concernent les exigences tenant respectivement à la conformité des objectifs du programme opérationnel avec l’article 15 du règlement no 2200/96 et à l’éligibilité des actions et des dépenses proposées, compte tenu de l’article 8, paragraphes 2 et 3 du règlement no 1433/2003, il ne contient aucune référence à l’article 12, sous d), du règlement no 1433/2003, lequel concerne les exigences relatives à la cohérence économique et à la qualité technique du programme opérationnel, du bien-fondé des estimations et du plan de financement ainsi que de la programmation de son exécution.
172 Partant, le rapport annexé à la décision du ministère de l’Agriculture du 26 octobre 2004 d’approbation du programme opérationnel présenté par l’organisation de producteurs Unió Agrària Cooperativa ne saurait suffire pour attester de la régularité des contrôles, de sorte que la Commission a, à suffisance de droit, démontré l’existence de faiblesses dans les contrôles devant être mis en œuvre préalablement à l’approbation dudit programme.
173 Par conséquent, il convient de rejeter la première branche du troisième moyen comme étant non fondée.
– Sur la seconde branche du troisième moyen, tirée du caractère illicite de la correction financière forfaitaire appliquée au titre de faiblesses des contrôles dans l’ordonnancement des dépenses
174 Le Royaume d’Espagne affirme que la totalité des demandes d’aide ont été soumises à un contrôle administratif, dans le respect notamment des exigences posées par les articles 106 et 107 du règlement no 1580/2007.
175 S’agissant des contrôles devant être effectués sur place, le Royaume d’Espagne précise que ces derniers ont été effectués, dans le cas de l’organisation de producteurs Unió Corporación Alimentaria, SCCL, en partie, par une société spécialisée engagée par l’organisme payeur de Catalogne, laquelle a rendu un rapport portant, en substance, sur la conformité des actions mises en œuvre.
176 Le Royaume d’Espagne souligne également qu’une autre partie des contrôles a été effectuée en 2010 par les services territoriaux de Tarragone, lesquels ont dressé des procès-verbaux n’attestant pas d’une quelconque anomalie.
177 À cela s’ajoute le certificat d’achèvement des travaux, validé par l’ordre professionnel, dont l’action relève de missions de service public, qui prouve que les travaux ont été exécutés conformément aux dispositions du projet approuvé.
178 La Commission conteste le bien-fondé de l’ensemble des arguments avancés par le Royaume d’Espagne et considère que la seconde branche du troisième moyen du recours doit être rejetée comme étant non fondée.
179 La Commission fait état, en l’espèce, de faiblesses dans les contrôles administratifs et les contrôles sur place devant être effectués avant tout paiement de l’aide, et ce conformément aux articles 106 à 109 du règlement no 1580/2007.
180 En particulier, elle considère que le Royaume d’Espagne n’a pas vérifié « la mise en œuvre des actions indiquées dans le programme opérationnel et la conformité de l’action avec l’utilisation décrite dans le programme opérationnel approuvé ».
181 Elle ajoute qu’« [u]n certificat de conformité établi par une société d’ingénierie payée par l’organisation de producteurs a été présenté [par les autorités espagnoles] comme pièce justificative [...], mais l’inspection technique [du gouvernement régional de Catalogne] n’a pas procédé à ses propres contrôles pour vérifier si l’investissement avait été réalisé selon les plans présentés et, une fois de plus, les spécifications techniques et les coûts correspondants n’ont pas été examinés ».
182 À cet égard, il convient de vérifier, à la lumière des pièces justificatives transmises au Tribunal par le Royaume d’Espagne, si ce dernier a satisfait aux exigences posées par les articles 106 à 109 du règlement no 1580/2007.
183 À cet égard, en application de l’article 106 du règlement no 1580/2007, les États membres doivent procéder tant à des contrôles administratifs qu’à des contrôles sur place par sondage.
184 S’agissant des contrôles administratifs, ceux-ci doivent, conformément à l’article 107, paragraphe 1, sous d), du règlement no 1580/2007, porter sur « la conformité des actions exécutées avec celles figurant dans le programme opérationnel approuvé ». Il en va de même des contrôles sur place, lesquels portent, conformément à l’article 109, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1580/2007, sur « la conformité de la mise en œuvre ou de la mise en œuvre prévue de l’action avec l’utilisation décrite dans le programme opérationnel approuvé ».
185 En l’espèce, premièrement, le Royaume d’Espagne se fonde sur un rapport émis par Grupo NC, qui est une société externe spécialisée effectuant des contrôles sur place. Ce rapport est « relatif à la vérification du maintien des conditions de reconnaissance en tant qu’organisation de producteurs et au contrôle comptable de l’aide du fonds opérationnel de 2008 ».
186 Certes, ledit rapport comprend notamment un tableau synthétique comparant les montants initialement prévus et approuvés par action avec les dépenses finalement encourues et justifiées par des factures. Il indique également les contrôles effectués au sujet des dépenses correspondant à des coûts de personnel et à des coûts administratifs.
187 Il n’en reste pas moins que le rapport en cause ne contient notamment aucune analyse précise de la mise en œuvre des actions indiquées dans le programme opérationnel présenté par l’organisation de producteurs concernée ni non plus de la conformité de la mise en œuvre ou de la mise en œuvre prévue de l’action avec l’utilisation décrite dans le programme opérationnel approuvé, telle qu’exigée par l’article 109, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement no 1580/2007.
188 Deuxièmement, le Royaume d’Espagne se fonde sur quatre contrôles sur place effectués en 2010 par les techniciens des services territoriaux de Tarragone, desquels il ne découle, selon les autorités espagnoles, « aucune anomalie constatée ».
189 Toutefois, tant dans sa requête que dans sa réplique, le Royaume d’Espagne n’étaye aucunement son affirmation relative au caractère suffisant des contrôles sur place évoqués, ne permettant notamment pas ainsi de vérifier l’étendue desdits contrôles.
190 Sur ce point, la Commission évoque, dans sa défense, la réponse du Royaume d’Espagne aux constatations de la Commission postérieurement à l’enquête, conformément à la procédure prévue à l’article 11, paragraphe 1, du règlement (CE) no 885/2006 de la Commission, du 21 juin 2006, portant modalités d’application du règlement no 1290/2005 du Conseil en ce qui concerne l’agrément des organismes payeurs et autres entités ainsi que l’apurement des comptes du FEAGA et du Feader (JO 2006, L 171, p. 90).
191 En effet, dans sa réponse aux constatations de la Commission transmises après l’enquête, le Royaume d’Espagne a notamment reconnu que « [l]es procès-verbaux de contrôle [étaient] génériques et qu’ils précis[ai]ent surtout les incidences, et si des divergences [n’étaient pas] observées entre les mesures approuvées par décision et celles réellement exécutées et vérifiées, il n’[était] pas fait référence de manière détaillée à chacune des notions d’investissement ou dépenses de l’exercice contrôlé ».
192 Ainsi, la communication de procès-verbaux « génériques » ne saurait permettre d’attester du respect par les autorités espagnoles des conditions posées aux articles 106 à 109 du règlement no 1580/2007.
193 Troisièmement, le Royaume d’Espagne se fonde tant sur la validation du projet en cause par l’ordre professionnel que sur l’émission d’un certificat d’achèvement des travaux.
194 S’agissant, d’une part, du certificat d’achèvement des travaux, force est de constater qu’un tel certificat ne permet pas d’attester la conformité des actions envisagées avec le programme opérationnel approuvé. Comme le souligne à juste titre la Commission, ledit certificat se limite à attester la date d’achèvement des travaux et la conformité de ces derniers avec le projet concerné, mais ne rend compte d’aucune analyse du programme opérationnel dans lequel était incluse l’action exécutée, ni de la conformité de celle-ci avec ledit programme.
195 Cette lecture émane, au demeurant, directement du Royaume d’Espagne, ainsi qu’il ressort de sa réponse aux constatations de la Commission transmises après l’enquête.
196 S’agissant, d’autre part, de la validation du projet en cause par l’ordre professionnel, ainsi que le relève le Royaume d’Espagne, « la validation porte, en ce qui concerne le travail professionnel présenté, sur ‘l’identité, l’habilitation professionnelle de l’auteur du travail ainsi que l’exactitude et le caractère exhaustif formel de la documentation du travail professionnel conformément à la réglementation applicable au travail concerné’ ».
197 En d’autres termes, la validation du projet concerné par l’ordre professionnel ne portait pas sur les contrôles à mettre en œuvre conformément aux articles 106 à 109 du règlement no 1580/2007.
198 Partant, il convient de relever que ces derniers ne sauraient valablement attester du respect par les autorités espagnoles des contrôles à mettre en œuvre avant tout ordonnancement des dépenses.
199 Au surplus, dans son mémoire en défense, la Commission discute les conclusions du rapport technique du 22 septembre 2009 élaboré par l’unité de gestion du gouvernement régional de Catalogne, lequel rapport ne figure aucunement ni dans la requête ni dans la réplique et, en tout état de cause, ne sert pas de fondement aux prétentions des autorités espagnoles.
200 Partant, c’est à juste titre que la Commission a constaté des faiblesses dans la mise en œuvre des contrôles préalables à tout paiement des aides.
201 Par conséquent, il convient de rejeter la seconde branche du troisième moyen comme étant non fondée et, partant, le troisième moyen dans son ensemble.
Sur le quatrième moyen, tiré du caractère disproportionné de la correction financière forfaitaire
202 Le Royaume d’Espagne soutient, à titre subsidiaire, dans l’hypothèse du rejet du troisième moyen, qu’une correction forfaitaire de 5 % est disproportionnée, puisque des contrôles ont été effectués, et ce quand bien même ils n’auraient pas été effectués dans le respect de la réglementation.
203 En effet, en imposant une correction financière forfaitaire de 5 %, la Commission aurait violé l’article 52, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013, lu en combinaison avec les orientations énoncées dans le document VI/5330/97, du 23 décembre 1997, intitulé « Orientations concernant le calcul des conséquences financières lors de la préparation de la décision d’apurement des comptes du FEOGA-Garantie (ci-après le « document VI/5330/97 ». Aussi le Royaume d’Espagne estime-t-il proportionné un taux de correction forfaitaire de 2 %.
204 Le Royaume d’Espagne ajoute que cette position était partagée par l’organe de conciliation, lequel a suggéré de revoir le taux de la correction forfaitaire proposé.
205 Il précise que, selon les autorités de la communauté autonome de Catalogne, les carences portaient sur des contrôles secondaires.
206 En tout état de cause, le Royaume d’Espagne fait valoir que la Commission se devait de motiver les raisons qui l’ont conduite à ne pas tenir compte des observations de l’organe de conciliation, et ce conformément à l’article 52, paragraphe 3, du règlement no 1306/2013.
207 La Commission conteste le bien-fondé de l’ensemble des arguments avancés par le Royaume d’Espagne et considère que le quatrième moyen du recours doit être rejeté comme étant non fondé.
208 À cet égard, en premier lieu, il convient de rappeler, aux termes de l’article 52, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013, ce qui suit :
« La Commission évalue les montants à exclure au vu, notamment, de l’importance de la non-conformité constatée. [Elle] tient compte de la nature de l’infraction, ainsi que du préjudice financier causé à l’Union. Elle fonde l’exclusion sur la mise en évidence des montants indûment dépensés et, lorsque ceux-ci ne peuvent être mis en évidence en déployant des efforts proportionnés, elle peut appliquer des corrections extrapolées ou forfaitaires. Des corrections forfaitaires ne sont appliquées que lorsque, en raison de la nature du cas ou parce que l’État membre n’a pas fourni les informations nécessaires à la Commission, il n’est pas possible, en déployant des efforts proportionnés, de déterminer plus précisément le préjudice financier causé à l’Union. »
209 S’agissant de l’application d’une correction financière forfaitaire, le document VI/5330/97 précise que, « [p]our déterminer si une correction financière s’impose et, dans l’affirmative, de quel taux, l’essentiel consistera généralement à évaluer le degré de risque de pertes pour les fonds [de l’Union] par suite d’une carence de contrôle ».
210 Selon le document VI/5330/97, ce taux variera selon la nature des contrôles pour lesquels une carence a été constatée. Schématiquement, il ressort du document VI/5330/97 qu’une distinction est opérée entre les contrôles essentiels et les contrôles secondaires. Pour les premiers, un taux de 5 % sera appliqué tandis que pour les seconds ce taux ne sera que de 2 %.
211 Aux termes du document VI/5330/97, un contrôle essentiel est un contrôle portant sur « les vérifications physiques et administratives requises pour contrôler les éléments quant au fond, en particulier la réalité de l’objet de la demande, la quantité et les conditions qualitatives, y compris le respect des délais » et un contrôle secondaire est un contrôle portant sur « les actes administratifs nécessaires pour traiter correctement les demandes ».
212 En l’espèce, les carences constatées par la Commission concernent assurément des contrôles essentiels et non des contrôles secondaires.
213 En effet, les carences concernent les contrôles devant être effectués préalablement à l’approbation d’un programme opérationnel et préalablement à l’ordonnancement des dépenses.
214 Aussi un taux de 5 % est-il, en l’espèce, justifié.
215 Au surplus, si l’organe de conciliation s’est certes prononcé en l’espèce pour un taux révisé, sur la base de la validation par l’ordre professionnel du projet contenu dans le programme opérationnel concerné, il n’en reste pas moins qu’une telle validation ne pouvait être prise en compte, dans la mesure où elle est intervenue postérieurement à l’approbation du programme opérationnel, ainsi que la Commission en a informé à juste titre le Royaume d’Espagne lors de la communication de sa position finale.
216 Partant, le taux de 5 % n’est pas, dans les circonstances de l’espèce, disproportionné.
217 En second lieu, aux termes de l’article 52, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement no 1306/2013 :
« [S]i aucun accord ne peut être dégagé, l’État membre peut demander l’ouverture d’une procédure destinée à concilier la position de chaque partie dans un délai de quatre mois. Un rapport sur l’issue de la procédure est présenté à la Commission. La Commission tient compte des recommandations du rapport avant de se prononcer sur un refus de financement et si elle décide de ne pas suivre ces recommandations, elle en indique les raisons. »
218 Or, en l’espèce, il ressort de la position finale de la Commission relativement à la deuxième correction financière, transmise au Royaume d’Espagne le 22 juillet 2016, que la Commission a indiqué les raisons l’ayant conduite à ne pas suivre les recommandations de l’organe de conciliation.
219 Partant, la Commission ne saurait avoir violé l’article 52, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement no 1306/2013.
220 Par conséquent, il y a lieu de rejeter le quatrième moyen comme étant non fondé.
Sur le cinquième moyen, tiré d’un cumul illicite des corrections financières unique et forfaitaire
221 Le Royaume d’Espagne soutient, à titre subsidiaire, dans l’hypothèse du rejet des deuxième et troisième moyens, que la correction financière unique aurait dû soit être englobée dans la correction forfaitaire de 5 % soit être déduite de cette dernière.
222 Il en va ainsi, selon le Royaume d’Espagne, dans la mesure où ces deux corrections financières résultent chacune d’une violation des articles 105 et 106 du règlement no 1580/2007. Un tel cumul se révèle contraire à l’article 52, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013, ainsi que le reconnaît la Commission dans le document VI/5330/97 et que l’a suggéré l’organe de conciliation.
223 La Commission conteste le bien-fondé de l’ensemble des arguments avancés par le Royaume d’Espagne et considère que le cinquième moyen du recours doit être rejeté comme étant non fondé.
224 À cet égard, le grief tiré d’un cumul illicite des corrections financières unique et forfaitaire ne saurait, en l’espèce, prospérer.
225 Comme le souligne à juste titre la Commission, l’assiette des dépenses en application de laquelle la correction financière forfaitaire a été appliquée correspond aux dépenses initiales, déduction faite de la correction financière unique.
226 Si la Commission a certes appliqué deux corrections financières, l’une unique et l’autre forfaitaire, il n’en reste pas moins que, en réduisant l’assiette des dépenses de la correction financière forfaitaire, la Commission n’a pas procédé à un cumul des deux corrections financières.
227 Il en eût été différemment, dans l’hypothèse où la Commission aurait appliqué deux corrections financières identiques, à savoir deux corrections financières forfaitaires pour une même carence.
228 Partant, il convient de rejeter le cinquième moyen du recours comme étant non fondé.
Sur les moyens dirigés contre la troisième correction financière
229 Les sixième, septième et huitième moyens du recours sont dirigés contre la troisième correction financière.
230 Par le sixième moyen, le Royaume d’Espagne fait valoir, à titre principal, le caractère illicite de la correction financière forfaitaire appliquée. Par le septième moyen, il soutient, à titre subsidiaire, que le taux de la correction financière forfaitaire appliquée est disproportionné. Par le huitième moyen, il prétend que la Commission a violé son obligation de motivation en ne précisant pas les motifs justifiant l’application d’une telle correction financière forfaitaire.
231 Il convient dès lors d’apprécier le bien-fondé des moyens dirigés contre la troisième correction financière à la lumière des principes énoncés aux points 88 à 95 ci-dessus, relatifs à l’examen des moyens dirigés contre la deuxième correction financière, applicables, dans les mêmes termes, à l’examen des moyens dirigés contre la troisième correction financière.
Sur le huitième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation
232 Le Royaume d’Espagne rappelle que, dans les cas où une institution dispose d’un large pouvoir d’appréciation, le contrôle du respect des garanties dans les procédures administratives revêt une importance fondamentale.
233 Parmi ces garanties figurent notamment pour l’institution compétente l’obligation d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce et celle de motiver sa décision de façon suffisante.
234 Aussi le Royaume d’Espagne estime-t-il, dans sa requête, que le Tribunal se doit de « vérifier d’office » si la Commission a motivé la pondération et l’évaluation qu’elle a faite des facteurs pris en considération pour justifier l’application d’une correction financière forfaitaire.
235 Lors de l’audience de plaidoiries, en réponse à une question du Tribunal, le Royaume d’Espagne a précisé que la décision attaquée était entachée d’un défaut de motivation, en ce que la Commission, d’une part, n’avait pas répondu ou pris en compte ses arguments relatifs à la baisse du nombre d’infractions constatées en 2013 et à l’existence de contrôles adéquats pour des exigences réglementaires en matière de gestion, lesquelles sont énumérées à l’annexe II du règlement (CE) no 73/2009 du Conseil, du 19 janvier 2009, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements no 1290/2005, (CE) no 247/2006 et (CE) no 378/2007, et abrogeant le règlement (CE) no 1782/2003 (JO 2009, L 30, p. 16) (ci-après les « ERG « ), à savoir les ERG 9 et 11, et, d’autre part, avait ignoré ses calculs précis du risque financier.
236 Pour sa part, la Commission soutient avoir suffisamment motivé sa décision.
237 À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé de la motivation, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux.
238 Selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle (voir arrêt du 29 avril 2004, Pays-Bas/Commission, C‑159/01, EU:C:2004:246, point 65 et jurisprudence citée).
239 Les décisions de la Commission en matière d’apurement des comptes des fonds agricoles européens sont prises sur le fondement d’un rapport de synthèse ainsi que d’une correspondance entre la Commission et l’État membre concerné (arrêt du 14 mars 2002, Pays-Bas/Commission, C‑132/99, EU:C:2002:168, point 39).
240 Dans ces conditions, la motivation d’une décision refusant de retenir à la charge de celui-ci une partie des dépenses déclarées doit être considérée comme suffisante dès lors que l’État destinataire a été étroitement associé au processus d’élaboration de cette décision et qu’il connaissait les raisons pour lesquelles la Commission estimait ne pas devoir mettre à la charge du fonds agricole européen en cause la somme litigieuse (arrêts du 20 septembre 2001, Belgique/Commission, C‑263/98, EU:C:2001:455, point 98, et du 17 mai 2013, Grèce/Commission, T‑294/11, non publié, EU:T:2013:261, point 94).
241 En l’espèce, il y a lieu de constater que le Royaume d’Espagne a été étroitement associé au processus d’élaboration de la décision attaquée.
242 Par ailleurs, dans sa requête, ce dernier a été en mesure de contester l’ensemble des appréciations de la Commission, y compris les facteurs pris en compte en vue de l’application d’une correction financière forfaitaire, de même que le Tribunal est en mesure sur ces points d’exercer son contrôle.
243 Au surplus, s’agissant des précisions apportées par le Royaume d’Espagne durant l’audience de plaidoiries relatives au manquement par la Commission à son obligation de motivation, force est de constater que les autorités espagnoles font, en substance, grief à la Commission de n’avoir pas répondu à certains arguments avancés durant la procédure administrative au soutien de leurs prétentions.
244 Or, indépendamment de la question de l’obligation pour la Commission de répondre à l’ensemble des arguments avancés par le Royaume d’Espagne durant la procédure administrative, force est de constater que la décision attaquée présente une motivation relative aux données du tableau transmis à la Commission par le Royaume d’Espagne comparant le nombre d’infractions en 2013 par rapport à ceux des années 2011 et 2012, dans la mesure où le rapport de synthèse indique que, selon la Commission, le nombre d’infractions pour l’année 2013 se révèle en hausse.
245 D’une part, s’agissant des arguments avancés par le Royaume d’Espagne pour les contrôles menés relativement aux ERG 9 et 11, en ce que le rapport de synthèse sur lequel se fonde la décision attaquée présente une motivation sur ce point, le même constat se doit d’être fait.
246 D’autre part, s’agissant des calculs précis présentés par le Royaume d’Espagne pour établir le risque financier, ces derniers ont été appréciés et, le cas échéant, écartés par la Commission, ainsi qu’il ressort des motifs de la communication officielle transmise au Royaume d’Espagne, antérieurement à la saisine de l’organe de conciliation, le 12 juin 2015.
247 Par conséquent, il convient de rejeter le huitième moyen comme étant non fondé.
Sur le sixième moyen, tiré du caractère illicite de la correction financière forfaitaire appliquée au titre de carences dans l’analyse des risques et de l’absence d’orientations ou d’instructions de contrôle à l’usage des inspecteurs en matière de conditionnalité
248 En premier lieu, le Royaume d’Espagne fait valoir que l’application d’une correction financière forfaitaire n’était pas, en l’espèce, justifiée, puisque les preuves produites pendant la procédure administrative attestent que le fonds en cause n’avait pas encouru de pertes résultant de carences détectées liées à l’inexistence de contrôles et que les pertes pouvaient, en tout état de cause, être quantifiées et évaluées avec précision.
249 Il précise que, en imposant une correction financière forfaitaire, la Commission, d’une part, a violé l’article 52, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013 et, d’autre part, n’a pas respecté ses propres orientations énoncées dans le document VI/5330/97 et dans le document AGRI/2005/64043, intitulé « Communication de la Commission sur le traitement, par la Commission, dans le contexte de l’apurement des comptes du FEOGA, section ‘Garantie’, des insuffisances constatées dans les systèmes de contrôle de la conditionnalité mis en œuvre par les États membres » (ci-après le « document AGRI-2005-64043 »).
250 Premièrement, s’agissant de l’absence d’orientations ou d’instructions relatives aux contrôles sur place à l’usage des inspecteurs en matière de conditionnalité, le Royaume d’Espagne objecte qu’il existe des manuels à caractère général sur la conditionnalité dans la communauté autonome de Castille et Léon qui fournissent la base juridique du régime de conditionnalité et les différentes procédures administratives. Par ailleurs, à ces manuels s’ajoutent des sessions de formation et la fourniture, pour certains contrôles, d’instructions sectorielles.
251 Aussi le Royaume d’Espagne fait-il observer que la Commission ne pouvait conclure à « une omission totale de ce contrôle essentiel ».
252 Au demeurant, il ajoute que ni l’article 8, paragraphe 1, ni l’article 26 du règlement (CE) no 1122/2009 de la Commission, du 30 novembre 2009, fixant les modalités d’application du règlement (CE) no 73/2009 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité, la modulation et le système intégré de gestion et de contrôle dans le cadre des régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs prévus par ce règlement ainsi que les modalités d’application du règlement (CE) no 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité dans le cadre du régime d’aide prévu pour le secteur vitivinicole (JO 2009, L 316, p. 65) ne disposent qu’il est nécessaire que des instructions de contrôle spécifiques soit adressées aux inspecteurs chargés d’effectuer les contrôles sur place.
253 Deuxièmement, s’agissant de la mise en œuvre défaillante des contrôles concernant l’utilisation des « produits phytopharmaceutiques » (ERG 9), le Royaume d’Espagne souligne que ces derniers ont bien été mis en œuvre, et ce quand bien même l’utilisation correcte desdits produits ne figure pas expressément dans le procès-verbal de contrôle, dans la mesure où les contrôles portaient également sur les registres des agriculteurs consignant l’utilisation par ces derniers desdits produits.
254 Troisièmement, il en va de même d’une carence dans les contrôles relatifs au respect de la « législation alimentaire » (ERG 11).
255 Quatrièmement, s’agissant d’une carence dans les contrôles relatifs à la « protection des veaux » (ERG 16), le Royaume d’Espagne, d’une part, souligne son incidence nulle pour le fonds en raison de son application limitée dans la communauté autonome de Castille et Léon et, d’autre part, fait valoir la possibilité, à tout le moins, de la quantifier.
256 Il ajoute que les procès-verbaux rendent compte du contrôle du caractère adéquat de la litière pour les veaux en général, y compris les veaux de moins de deux semaines.
257 Cinquièmement, s’agissant d’une carence dans le contrôle relatif à la « protection des eaux souterraines » (ERG 2), il souligne que ledit contrôle a été effectué dans les parcelles agricoles jugées les plus significatives en raison du risque encouru. Par ailleurs, s’agissant du contrôle des installations agricoles, le Royaume d’Espagne précise que cette obligation spécifique était à la disposition des inspecteurs, de sorte qu’aucune carence dans ce contrôle n’aurait dû être constatée.
258 Sixièmement, il en va tout autant pour ce qui concerne les carences dans le contrôle des nitrates (ERG 4). Le Royaume d’Espagne fait principalement observer que les bénéficiaires des aides sont tenus de respecter les plafonds autorisés pour l’utilisation de l’azote et sont soumis à un contrôle, au travers de la vérification des factures d’engrais, de l’inspection visuelle des sites de stockage et de la vérification des registres utilisés pour la gestion de l’installation. Les autorités espagnoles soulignent, en tout état de cause, l’existence d’un risque limité pour le fonds.
259 Septièmement, s’agissant des carences dans les contrôles relatifs à la « protection des porcs » (ERG 17) et à la « protection des animaux » (ERG 18), le Royaume d’Espagne précise que les petits élevages d’animaux sont exemptés de contrôles, dans la mesure où ils n’ont aucun rapport avec les exploitations de production.
260 Huitièmement, pour ce qui concerne les divergences constatées par la Commission entre les procès-verbaux des contrôles effectués sur place et les exigences contenues dans le rapport de contrôle, le Royaume d’Espagne précise que ces divergences s’expliquent soit par l’existence d’un contrôle administratif supplémentaire soit par les contraintes liées au système d’administration électronique. En tout état de cause, aucun risque financier pour le fonds ne saurait en découler.
261 En deuxième lieu, le Royaume d’Espagne fait observer que l’organe de conciliation a lui-même reconnu l’existence de contrôles mis en œuvre dans la communauté autonome de Castille et Léon. Si ces derniers demeurent certes perfectibles, ils ne peuvent justifier l’application d’une correction financière, puisque, ainsi que cela ressort des orientations de la Commission, seule une « carence significative » exposant le fonds à un « risque réel de pertes et d’irrégularité » le justifie.
262 En troisième lieu, les autorités espagnoles ajoutent que, à supposer établie l’existence de pertes pour le fonds, ces dernières pouvaient être quantifiées et évaluées avec précision, de sorte que les conditions pour l’application d’une correction financière forfaitaire n’étaient pas réunies.
263 Les évaluations précises effectuées par le Royaume d’Espagne pour les carences dans les contrôles portant sur l’identification et l’enregistrement des bovins (ERG 7) et des animaux des espèces ovines et caprines (ERG 8) pour les années 2011 à 2013, lesquelles ont été validées par la Commission, illustreraient leur caractère quantifiable et, par conséquent, l’absence de fondement pour l’application d’une correction financière forfaitaire.
264 En tout état de cause, d’une part, le Royaume d’Espagne soutient que, à supposer que les carences dans les contrôles soient établies, ces dernières ne présentaient aucun risque pour le fonds. En substance, le Royaume d’Espagne précise que le nombre d’infractions relevées en 2013, année au cours duquel les orientations sur la conditionnalité étaient disponibles, était inférieur au nombre d’infractions relevées en 2012 et en 2011.
265 D’autre part, le Royaume d’Espagne souligne que l’organisme payeur de Castille et Léon est l’un des organismes payeurs appliquant le plus de réductions pour non-respect de la conditionnalité en Espagne, ce qui démontre la fiabilité de son système de contrôle.
266 La Commission conteste le bien-fondé de l’ensemble des arguments avancés par le Royaume d’Espagne et considère que le sixième moyen du recours doit être rejeté comme étant non fondé.
267 À cet égard, il y a lieu d’emblée de relever que, si le Royaume d’Espagne s’efforce certes de démontrer l’absence de conséquences financières pour les fonds, certains arguments tendent à remettre en cause l’existence même de carences dans les contrôles.
268 Aussi convient-il de vérifier l’existence de carences dans les contrôles puis, dans l’affirmative, d’apprécier si le Royaume d’Espagne est parvenu à démontrer que la Commission avait commis une erreur quant aux conséquences financières à en tirer.
269 En premier lieu, s’agissant de l’existence de carences dans les contrôles, une distinction doit être faite entre les différentes ERG.
270 Premièrement, pour ce qui concerne l’absence d’orientations ou d’instructions spécifiques relatives aux contrôles sur place à l’usage des inspecteurs en matière de conditionnalité, le Royaume d’Espagne affirme qu’il n’y a pas eu une « omission totale de ce contrôle essentiel ».
271 En d’autres termes, force est de constater que le Royaume d’Espagne reconnaît, à tout le moins, l’existence d’une carence sur ce point.
272 Il n’en reste pas moins qu’il soutient que la méthode mise en place, à savoir celle consistant en la publication de manuels généraux, en l’organisation de sessions de formation pour les inspecteurs, en la communication d’instructions sectorielles avant la réalisation des contrôles sur place, permettait d’effectuer un contrôle efficace de la conditionnalité, et ce conformément aux articles 8 et 26 du règlement no 1122/2009.
273 À cet égard, ainsi que le souligne à juste titre la Commission, les contrôles ont été menés sur la base des points de contrôle mentionnés dans les procès-verbaux ou les rapports de contrôle, lesquels ne contenaient qu’un résumé des exigences et des règles à vérifier et « non une liste exhaustive ou globale des éléments soumis à contrôle », ce que le Royaume d’Espagne, au demeurant, ne conteste pas.
274 Ainsi, la Commission a suffisamment fait état d’une carence sur ce point.
275 Deuxièmement, pour ce qui concerne l’existence de carences dans les contrôles des produits phytopharmaceutiques (ERG 9) et dans les contrôles liés à la législation alimentaire (ERG 11), le Royaume d’Espagne reconnaît expressément que plusieurs points de contrôle n’étaient pas mentionnés dans les procès-verbaux de contrôle sur place.
276 Il tempère toutefois ce manquement en précisant que ces points de contrôle étaient tout de même vérifiés, ainsi qu’il ressort des rapports de contrôle, de sorte que leur absence de mention dans les procès-verbaux de contrôle sur place relevait simplement d’une erreur de forme.
277 À cet égard, l’absence de mention de certains points de contrôle relatifs aux ERG 9 et ERG 11 dans les procès-verbaux de contrôle sur place fait naître un doute sérieux quant à la mise en place d’un système de contrôle adéquat, et ce en violation de l’article 26, paragraphe 1, du règlement no 1122/2009.
278 En effet, force est de relever que, en l’absence de telles mentions, il existe un risque d’une absence de vérification de ces points de contrôle lors des contrôles sur place.
279 Ainsi, la Commission a suffisamment fait état d’une carence sur ce point.
280 Troisièmement, pour ce qui concerne l’existence de carences dans les contrôles relatives à la protection des veaux (ERG 16), force est de constater que le Royaume d’Espagne reconnaît l’absence de point de contrôle portant sur le caractère adéquat de la litière pour les veaux de moins de deux semaines.
281 Quatrièmement, il en va de même de la carence constatée par la Commission dans les contrôles relatifs à la protection des eaux souterraines, lesquels s’étaient limités aux seules parcelles agricoles (ERG 2).
282 En effet, le Royaume d’Espagne reconnaît que les contrôles sur place ne visaient, avant 2013, que les parcelles agricoles et non l’ensemble de l’exploitation agricole, à savoir le lieu et les installations de stockage des machines, du carburant, des lubrifiants et d’autres polluants possibles.
283 Il objecte toutefois s’être conformé à l’article 53, paragraphe 2, du règlement no 1122/2009, lequel indiquerait uniquement que la totalité des terres agricoles de l’exploitation est soumise, s’il y a lieu, à des contrôles sur place, de sorte que l’absence de contrôle de l’exploitation agricole durant les années 2011 et 2012 ne saurait être considérée comme une carence.
284 Il n’en reste pas moins que l’article 4 du règlement no 73/2009, lequel indique les ERG à respecter par les agriculteurs, précise que les obligations visées au paragraphe 1, premier alinéa, dudit article ne s’appliquent qu’en ce qui concerne l’activité agricole de l’agriculteur ou la surface agricole de l’exploitation.
285 Aussi le Royaume d’Espagne ne saurait-il interpréter de manière restrictive le périmètre des contrôles à mener s’agissant de l’ERG 2, en ce que l’activité agricole ne saurait se limiter aux seules terres agricoles, stricto sensu.
286 En effet, en tant qu’ils se rapportent à l’activité agricole de l’exploitation, le lieu et les installations de stockage des machines, du carburant, des lubrifiants et d’autres polluants, qui n’étaient pas visés avant 2013 par les contrôles sur place, auraient dû néanmoins faire partie du périmètre de ces contrôles.
287 Ainsi, la Commission a suffisamment fait état d’une carence sur ce point.
288 Cinquièmement, il y a lieu de constater que le Royaume d’Espagne confirme les carences constatées par la Commission dans les contrôles relatifs à l’identification et l’enregistrement des bovins (ERG 7) ainsi que des animaux des espèces ovines et caprines (ERG 8).
289 Sixièmement, s’agissant des contrôles à mener quant aux ERG relatives au bien-être des porcs et des animaux (ERG 17 et 18), le Royaume d’Espagne reconnaît tout autant les carences constatées par la Commission, en particulier l’exemption de contrôles pour les exploitations de moins de cinq porcs et de 350 poules.
290 Septièmement, pour ce qui concerne les carences constatées dans le contrôle des nitrates (ERG 4), le Royaume d’Espagne admet l’absence de tenue d’un registre de l’utilisation de l’azote dans les cultures, tout en en minimisant les conséquences, dans la mesure où des contrôles étaient tout de même réalisés.
291 Toutefois, dans sa réplique, le Royaume d’Espagne souligne que « l’organisme payeur, bien qu’ayant agi conformément à la réglementation régionale, a reconnu l’anomalie, a modifié les procédures pour l’année 2013 ». Autrement dit, le Royaume d’Espagne reconnaît expressément qu’il s’agissait, en l’espèce, d’une « anomalie ».
292 Huitièmement, s’agissant des divergences entre les procès-verbaux de contrôle sur place et le rapport de contrôle concernant les éléments inscrits comme étant vérifiés, force est à nouveau de constater que le Royaume d’Espagne reconnaît l’existence de telles divergences, ce qui, comme le souligne à juste titre la Commission, ne permet pas de s’assurer que tous les points de contrôle mentionnés dans le rapport de contrôle ont effectivement été vérifiés.
293 Ainsi, la Commission a suffisamment fait état d’une carence sur ce dernier point.
294 Partant, il y a lieu de considérer que le Royaume d’Espagne n’est pas parvenu à démontrer l’inexactitude des constatations de la Commission en ce qui concerne l’existence de carences dans les contrôles.
295 Au demeurant, l’organe de conciliation a considéré dans son rapport que le système de contrôle mis en place par les autorités espagnoles était perfectible, ainsi que le souligne lui-même le Royaume d’Espagne.
296 En deuxième lieu (voir point 268 ci-dessus), il convient de vérifier si ces carences dans les contrôles ont exposé le fonds à un risque réel de pertes. Selon le Royaume d’Espagne, les faiblesses dans les contrôles n’ont engendré aucun risque pour le fonds.
297 À cet égard, il convient, tout d’abord, de relever que la Commission a, à bon droit, fait état de carences dans les contrôles, ainsi qu’il ressort du point 294 ci-dessus.
298 Or, le constat de carences dans les contrôles, en particulier en matière de conditionnalité, engendre, de manière objective, un risque financier pour le fonds. En effet, en présence desdites carences, il ne saurait être exclu que des aides aient pu être versées à tort ou des sanctions non prononcées, de sorte que l’absence d’un système de contrôle effectif implique, en soi, un risque financier.
299 Ce constat ne saurait, ensuite, être remis en cause, contrairement à ce que soutient dans sa réplique le Royaume d’Espagne, par le fait que le nombre d’infractions constatées pour l’année 2013, année au cours de laquelle des mesures correctives acceptées par la Commission ont été mises en place, est, d’une part, légèrement supérieur à celui pour l’année 2011 et, d’autre part, inférieur à celui pour l’année 2012.
300 En effet, indépendamment de la contestation par la Commission de la sincérité des données chiffrées qu’invoque le Royaume d’Espagne, il convient de relever que l’absence d’augmentation significative du nombre d’infractions constatées pour l’année 2013, à la supposer établie, n’implique aucunement que le nombre d’infractions constatées pour les années 2012 et 2011 aurait été identique en l’absence des carences constatées dans les contrôles.
301 Par ailleurs, les autorités espagnoles font certes état, au stade de la réplique, du montant des sanctions pour non-respect de la conditionnalité infligées en 2011, 2012 et 2013. Il en ressort que le montant des sanctions infligées par l’organisme payeur pour l’année 2013 est inférieur à celui de 2012 et légèrement supérieur à celui de 2011.
302 Il n’en reste pas moins que ces données n’ont jamais été discutées durant la procédure administrative ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée.
303 Or, il y a lieu de rappeler que la légalité d’une décision de la Commission doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée (arrêt du 22 janvier 2013, Grèce/Commission, T‑46/09, EU:T:2013:32, point 149).
304 De même, le Royaume d’Espagne se limite à présenter dans sa réplique des données chiffrées sans fournir d’autres éléments de preuve à l’appui de son affirmation.
305 Partant, de telles données ne sauraient être prises en compte pour apprécier la légalité de la décision attaquée.
306 Enfin, le Royaume d’Espagne fait grief à la Commission, à plusieurs reprises, de n’avoir produit « aucun élément de preuve permettant de conclure [à l’existence] d’une perte pour le fonds ».
307 Or, il incombe non à la Commission mais à l’État membre de démontrer qu’une carence qui a été constatée n’a pas exposé le fonds à un risque financier.
308 Au surplus, si le Royaume d’Espagne fait état de l’absence de risque pour le fonds, force est de relever que ce dernier a lui-même quantifié les pertes pour certaines des carences constatées par la Commission.
309 Partant, il ne saurait être considéré que les faiblesses dans les contrôles n’ont engendré aucun risque pour le fonds.
310 En troisième lieu, le Royaume d’Espagne reproche à la Commission d’avoir appliqué pour les années 2011 et 2012 une correction financière forfaitaire, alors même que les pertes étaient quantifiables.
311 Aux termes de l’article 52, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013, « [d]es corrections forfaitaires ne sont appliquées que lorsque, en raison de la nature du cas ou parce que l’État membre n’a pas fourni les informations nécessaires a' la Commission, il n’est pas possible, en déployant des efforts proportionnés, de déterminer plus précisément le préjudice financier causé a' l’Union ».
312 Or, en l’espèce, le Royaume d’Espagne ne fait pas état de la possibilité de quantifier les pertes pour toutes les carences. En effet, la Commission souligne que les autorités espagnoles ont seulement proposé un calcul du risque pour les fonds pour ce qui concerne les ERG 4, 7, 8, 17, 18, ce que ces dernières ne contestent pas.
313 De même, ainsi que le relève à juste titre la Commission, les différents calculs proposés, d’une part, ne tenaient pas suffisamment compte de la répétition des infractions et, d’autre part, ne permettaient pas d’identifier les demandeurs d’aides concernés seulement par certaines carences.
314 Par ailleurs, si la Commission a certes admis que le Royaume d’Espagne avait, pour les années 2011 et 2012, proposé un calcul précis pour les carences constatées pour les ERG 7 et 8, il n’en reste pas moins que le montant proposé a été englobé dans la correction financière forfaitaire.
315 Ainsi, l’application d’une correction financière forfaitaire était, dans les circonstances de l’espèce, justifiée.
316 Par conséquent, il convient de rejeter le sixième moyen du recours comme étant non fondé.
Sur le septième moyen, tiré d’une correction financière forfaitaire disproportionnée
317 Le Royaume d’Espagne considère qu’une correction financière forfaitaire de 5 % est disproportionnée en raison du caractère partiel des carences et de l’existence de circonstances atténuantes, lesquelles résultent de l’amélioration significative du système de contrôle de la conditionnalité pour l’année 2013, comme le reconnaît au demeurant la Commission.
318 Aussi soutient-il que la Commission a violé l’article 52, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013, lu en combinaison avec le document VI/5530/97.
319 En tout état de cause, les autorités espagnoles soutiennent que, si l’estimation du risque faite par l’organisme payeur n’est pas acceptée, elle doit se trouver dans une position d’égalité par rapport aux autres organismes, qui, en dépit de la constatation de carences dans des contrôles essentiels, se sont vu imposer une correction financière de 2 %.
320 La Commission conteste le bien-fondé de l’ensemble des arguments avancés par le Royaume d’Espagne et considère que le septième moyen du recours doit être rejeté comme étant non fondé.
321 À cet égard, aux termes de l’article 52, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013 :
« La Commission évalue les montants à exclure au vu, notamment, de l’importance de la non-conformité constatée. [Elle] tient compte de la nature de l’infraction, ainsi que du préjudice financier causé à l’Union. Elle fonde l’exclusion sur la mise en évidence des montants indûment dépensés et, lorsque ceux-ci ne peuvent être mis en évidence en déployant des efforts proportionnés, elle peut appliquer des corrections extrapolées ou forfaitaires. Des corrections forfaitaires ne sont appliquées que lorsque, en raison de la nature du cas ou parce que l’État membre n’a pas fourni les informations nécessaires à la Commission, il n’est pas possible, en déployant des efforts proportionnés, de déterminer plus précisément le préjudice financier causé à l’Union. »
322 S’agissant de l’application d’une correction financière forfaitaire, le document VI/5330/97 précise que, « [p]our déterminer si une correction financière s’impose et, dans l’affirmative, de quel taux, l’essentiel consistera généralement à évaluer le degré de risque de pertes pour les fonds [de l’Union] par suite d’une carence de contrôle ».
323 S’agissant du taux de la correction financière forfaitaire, le document AGRI/2005/64043 prévoit que « [l]orsque les obligations à respecter dans le cadre de la conditionnalité, établies dans un acte […], ou dans une norme […] sont contrôlées mais sans respecter le nombre, la fréquence ou la rigueur préconisés par les règlements ou la législation nationale […] ou quand les contrôles n’entraînent pas l’application des sanctions réglementaires prévues, il convient d’appliquer une correction de 5 % ».
324 Or, en l’espèce, d’une part, les carences concernent des contrôles essentiels.
325 D’autre part, si les contrôles mis en place par les autorités espagnoles étaient certes perfectibles, cette circonstance ne permet pas de remettre en cause l’application d’un taux de correction financière forfaitaire de 5 %, et ce conformément au document AGRI/2005/64043.
326 Partant, la Commission n’a pas appliqué un taux disproportionné.
327 Par conséquent, il convient de rejeter le septième moyen du recours comme étant non fondé et, dès lors, le recours dans son ensemble.
Sur les dépens
328 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
329 Le Royaume d’Espagne ayant succombé, il convient de le condamner aux dépens conformément aux conclusions de la Commission.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (cinquième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Le Royaume d’Espagne est condamné aux dépens.
Gratsias | Labucka | Ulloa Rubio |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 mai 2019.
Signatures
Table des matières
Antécédents du litige
Correction financière appliquée à la communauté autonome d’Andalousie
Correction financière appliquée à la communauté autonome de Catalogne
Correction financière appliquée à la communauté autonome de Castille et Léon
Procédure et conclusions des parties
En droit
Sur le premier moyen, dirigé contre la première correction financière et tiré d’une violation de l’article 3, paragraphe 6, du règlement n o 320/2006
Sur les moyens dirigés contre la deuxième correction financière
Considérations liminaires
Sur le deuxième moyen, tiré du caractère illicite de la correction financière unique appliquée au titre de carences dans l’éligibilité des dépenses
Sur le troisième moyen, tiré du caractère illicite de la correction financière forfaitaire appliquée au titre de faiblesses dans l’approbation des programmes opérationnels et dans l’ordonnancement des dépenses
– Sur la première branche du troisième moyen, tirée du caractère illicite de la correction financière forfaitaire appliquée au titre de faiblesses dans la mise en œuvre des contrôles au stade de l’approbation des programmes opérationnels
– Sur la seconde branche du troisième moyen, tirée du caractère illicite de la correction financière forfaitaire appliquée au titre de faiblesses des contrôles dans l’ordonnancement des dépenses
Sur le quatrième moyen, tiré du caractère disproportionné de la correction financière forfaitaire
Sur le cinquième moyen, tiré d’un cumul illicite des corrections financières unique et forfaitaire
Sur les moyens dirigés contre la troisième correction financière
Sur le huitième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation
Sur le sixième moyen, tiré du caractère illicite de la correction financière forfaitaire appliquée au titre de carences dans l’analyse des risques et de l’absence d’orientations ou d’instructions de contrôle à l’usage des inspecteurs en matière de conditionnalité
Sur le septième moyen, tiré d’une correction financière forfaitaire disproportionnée
Sur les dépens
* Langue de procédure : l’espagnol.
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