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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> achtung ! v EUIPO (Judgment) French Text [2020] EUECJ C-214/19P (03 September 2020) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2020/C21419P.html Cite as: ECLI:EU:C:2020:632, [2020] EUECJ C-214/19P, EU:C:2020:632 |
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ARRÊT DE LA COUR (dixième chambre)
3 septembre 2020 (*)
« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Règlement (CE) no 207/2009 – Article 7, paragraphe 1, sous b) – Caractère distinctif – Absence »
Dans l’affaire C‑214/19 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 7 mars 2019,
achtung ! GmbH, établie à Hambourg (Allemagne), représentée par Mes G. J. Seelig et D. Bischof, Rechtsanwälte,
partie requérante,
l’autre partie à la procédure étant :
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. D. Hanf, en qualité d’agent,
partie défenderesse en première instance,
LA COUR (dixième chambre),
composée de M. I. Jarukaitis, président de chambre, MM. E. Juhász (rapporteur) et M. Ilešič, juges,
avocat général : M. G. Pitruzzella,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi, achtung ! GmbH demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 10 janvier 2019, achtung !/EUIPO (achtung !) (T‑832/17, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2019:2), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), du 23 octobre 2017 (affaire R 490/2017-4), concernant l’enregistrement international désignant l’Union européenne de la marque figurative achtung ! (ci-après la « décision litigieuse »).
Le cadre juridique
2 Le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque [de l’Union européenne] (JO 2009, L 78, p. 1), a été modifié par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015 (JO 2015, L 341, p. 21), lequel est entré en vigueur le 23 mars 2016. Le règlement no 207/2009, tel que modifié par le règlement 2015/2424, a été abrogé et remplacé, avec effet au 1er octobre 2017, par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1). Toutefois, compte tenu de la date d’introduction de la demande en cause en l’espèce, à savoir le 23 juillet 2015, le présent litige est régi par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009, dans sa version initiale (ci-après le « règlement no 207/2009 »).
3 L’article 7, paragraphes 1 et 2, du règlement no 207/2009 dispose :
« 1. Sont refusés à l’enregistrement :
[...]
b) les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ;
c) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ;
[...]
2. Le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de [l’Union]. »
Les antécédents du litige et la décision litigieuse
4 Le 23 juillet 2015, la requérante a désigné l’Union européenne pour l’enregistrement international no 1297433. Cet enregistrement international a été notifié le 12 mai 2016 à l’EUIPO en vertu du règlement no 207/2009.
5 L’enregistrement international pour lequel la protection conférée par la marque de l’Union européenne a été demandée est le signe figuratif suivant :
6 Les produits et services visés par la marque demandée relèvent des classes 9, 16, 35, 37, 38, 41, 42 et 45, au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :
– classe 9 : « Programmes informatiques (enregistrés) ; logiciels informatiques (enregistrés) ; programmes informatiques (téléchargeables) ; publications électroniques (téléchargeables) ; logiciels pour téléphones mobiles » ;
– classe 16 : « Papier ; carton ; blocs (papeterie) ; papier à lettres ; écriteaux en papier ou en carton ; produits d’imprimerie ; photographies ; articles de papeterie ; matériel d’instruction ou d’enseignement (à l’exception d’appareils) » ;
– classe 35 : « Services de gestion des communications, à savoir élaboration et planification de concepts commerciaux professionnels et organisationnels pour la communication sur les entreprises et produits ; services de développement de concepts publicitaires multimédias ; relations publiques ; services d’agences de manifestations, à savoir organisation de salons professionnels à des fins commerciales ou publicitaires ; études de marchés ; marketing, y compris marketing direct ; services de publicité, en particulier publicité télévisée, publicité radiophonique, publicité par Internet, publicité sur services mobiles, publicité sur journaux et revues, publicité sur supports en ligne, affichage, préparation de petites annonces, publicité par correspondance ; promotion des ventes ; services d’organisation et d’animation de séances d’information, présentations et expositions à des fins publicitaires ; services de collecte et mise à jour de données de tous types pour des tiers dans des bases de données ; compilation et systématisation d’informations dans des bases de données informatiques ; services de conseillers commerciaux, gestion d’affaires et administration commerciale, en particulier services de conseillers et organisation des affaires ; services de présentation de produits sur des supports de communication à des fins de vente au détail ; services de présentation d’entreprises sur Internet et autres médias ; services de mise à jour de matériel publicitaire ; rédaction et publication de textes publicitaires ; services de mise en page à des fins publicitaires ; services de production de films publicitaires et publicités radiophoniques » ;
– classe 37 : « Installation et maintenance de matériel informatique pour systèmes de réseaux » ;
– classe 38 : « Télécommunications ; informations en matière de télécommunications ; services de fourniture d’accès à des plateformes de commerce électronique sur Internet ; services de fourniture d’accès à des portails sur Internet pour des tiers ; services téléphoniques par le biais de lignes de téléassistance pour utilisateurs d’Internet ; mise à disposition de lignes de dialogue, sites de dialogue et forums électroniques sur Internet ; services de serveurs de données par courrier électronique ; services de données par courrier électronique ; services de fourniture d’accès à des données et contenus sur Internet ; services d’agences de presse, à savoir agences d’informations sur Internet ; services en ligne, à savoir transmission d’informations et messages de tous types ; services de messagerie sur Internet, à savoir transfert d’informations et messages de tous types vers des adresses Internet ; services de transfert de données de tous types dans des bases de données pour des tiers » ;
– classe 41 : « Services d’instruction, formation et perfectionnement dans le domaine des relations publiques, communication d’entreprise, promotion des ventes, publicité et marketing ; services de publication de livres, brochures (autres qu’à des fins publicitaires) et matériel de cours (publications) sur supports imprimés et sous forme électronique, dans le domaine des relations publiques, communication d’entreprise, promotion des ventes, publicité et marketing ; services d’organisation, mise en place et animation de séminaires et séances d’information ; services de présentations et expositions à des fins culturelles ; services de jeu proposés en ligne à partir d’un réseau informatique ; services de conseillers en matière de rédaction de sites Internet ; services de publication de journaux électroniques, périodiques et revues promotionnelles ; services d’agences de manifestations, à savoir organisation et animation de manifestations sportives et culturelles ; informations en matière de manifestations (divertissement) ; services d’organisation et animation de conférences, concerts, symposiums et congrès ; planification de réceptions (divertissement) ; services d’organisation et animation de spectacles de divertissement (agences artistiques) ; micro-édition électronique ; réalisation de manifestations en direct ; mise à disposition en ligne de publications électroniques non téléchargeables ; services de production de films vidéo ; photographie » ;
– classe 42 : « Recherches et services scientifiques et technologiques ; programmation informatique ; services de développement de logiciels informatiques pour la création de présentations multimédias ; services Internet, à savoir planification, conception et création, ainsi que services de conseillers en matière de planification, conception et création de pages et sites Internet, en particulier pages d’accueil et sites Internet ; services d’entretien et maintenance de contenus Internet (logiciels) ; services de conseillers en logiciels et matériel, ainsi que services de conseillers techniques dans le domaine d’Internet ; services de location de serveurs Internet et mise à disposition et location d’espace mémoire sur Internet (hébergement de sites Internet) ; services d’agences multimédias, à savoir implémentation et maintenance de programmes informatiques, y compris structures en réseau ; services de bases de données, à savoir stockage électronique de données de tous types pour des tiers ; services de création d’arts graphiques ; mise à jour de logiciels informatiques » ;
– classe 45 : « Enregistrement de noms de domaine ».
7 Par décision du 19 janvier 2017, l’examinatrice a refusé l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et services visés au point précédent sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, du règlement no 207/2009.
8 Le 10 mars 2017, la requérante a formé un recours contre la décision de l’examinatrice auprès de l’EUIPO.
9 Par la décision litigieuse, la quatrième chambre de recours de l’EUIPO (ci-après la « chambre de recours ») a rejeté ce recours. La marque demandée serait en effet perçue, par les consommateurs finals et professionnels germanophones, comme un message promotionnel élogieux visant à attirer leur attention pour qu’ils achètent les produits et services commercialisés, message qui serait applicable à tous les services et produits visés par la marque demandée. La marque demandée ne comporterait, en outre, aucun élément figuratif permettant au consommateur de la mémoriser facilement et immédiatement ainsi que de la percevoir comme une indication d’une origine commerciale spécifique. La chambre de recours a ainsi considéré que la marque demandée était dépourvue du caractère distinctif requis.
La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
10 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 22 décembre 2017, la requérante a demandé l’annulation et la réformation de la décision litigieuse. À l’appui de son recours, elle a soulevé deux moyens tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 et, le second, de la violation des principes d’égalité de traitement et de bonne administration.
11 Par l’arrêt attaqué, en premier lieu, le Tribunal a rejeté comme irrecevable la demande de réformation de la décision litigieuse. En second lieu, faisant sien le raisonnement suivi par la chambre de recours, il a également rejeté la demande d’annulation de cette décision. En effet, selon le Tribunal, la requérante n’avait pas établi le caractère distinctif de la marque demandée.
Les conclusions des parties
12 La requérante demande à la Cour :
– d’annuler l’arrêt attaqué ;
– de faire droit aux premier et troisième chefs de conclusions qu’elle a présentés en première instance, et
– de condamner l’EUIPO aux dépens.
13 L’EUIPO demande à la Cour :
– de rejeter le pourvoi et
– de condamner la requérante aux dépens.
Sur le pourvoi
Argumentation des parties
14 À l’appui du pourvoi, la requérante soulève deux moyens.
15 Le premier moyen du pourvoi est tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. Ce moyen comporte deux branches, la première portant sur l’appréciation prétendument erronée du caractère distinctif de la marque demandée et, la seconde, concernant le caractère global de la motivation de la décision litigieuse.
16 Dans le cadre de la première branche du premier moyen du pourvoi, la requérante fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en limitant son examen, aux points 35 à 38 de l’arrêt attaqué, à une seule des significations du signe achtung !, à savoir celle d’« appel ou inscription pour mettre en garde ou sensibiliser », sans tenir compte des autres significations que pouvait revêtir ce signe et qu’elle avait pourtant présentées en détail. Le raisonnement du Tribunal reposerait exclusivement sur cette acception étroite du terme « achtung », méconnaissant ainsi que la marque demandée possède un caractère distinctif et une prégnance particulière, perçus par le public pertinent comme une indication de son origine commerciale.
17 En outre, le Tribunal aurait omis de distinguer le signe achtung !, marque figurative déposée, du mot allemand « Achtung », commençant par une majuscule. Or, conformément à la jurisprudence de la Cour, l’appréciation du caractère distinctif d’un signe doit être fondée sur le signe déposé, sans que certains éléments puissent être modifiés, ajoutés ou enlevés.
18 De surcroît, le Tribunal aurait à tort repris, sans ordonner une mesure d’instruction, l’affirmation figurant dans la décision litigieuse selon laquelle l’élément « achtung ! » est utilisé dans les relations commerciales. D’après la requérante, l’EUIPO ne pouvait fonder son appréciation sur des faits « résultant de l’expérience pratique généralement acquise de la commercialisation de produits de grande consommation, lesquels faits sont susceptibles d’être connus de toute personne et sont notamment connus des consommateurs de ces produits », car les produits et les services désignés par le signe achtung ! étaient principalement des produits et des services qui s’adressent au public spécialisé des secteurs des relations publiques et de la publicité. Les « expériences pratiques » liées aux produits de grande consommation pour les consommateurs finals ne seraient par conséquent pas déterminantes dans ce contexte.
19 Pour pouvoir statuer à cet égard sans ordonner préalablement une mesure d’instruction, le Tribunal aurait dû disposer lui-même des « expériences pratiques nécessaires ». Or, en l’absence de membre de langue maternelle allemande dans la formation de jugement à laquelle l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt attaqué a été attribuée et de toute indication sur la manière selon laquelle cette formation de jugement avait acquis les « expériences pratiques » dans le secteur de la publicité en Allemagne, cet arrêt serait entaché d’un « vice de procédure grave ».
20 Ce serait également à tort que le Tribunal a considéré, au point 47 de l’arrêt attaqué, que la lettre minuscule « a », par laquelle le mot « achtung » commence, ne saurait, en elle-même, conférer un caractère distinctif au signe en cause. Selon la requérante, le Tribunal aurait dû également ordonner une mesure d’instruction à cet égard, cela d’autant plus que la perception visuelle du signe serait déterminante pour les produits et les services en cause.
21 Le Tribunal aurait, par ailleurs, commis une erreur de droit aux points 40 et 41 de l’arrêt attaqué en jugeant que, conformément à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, l’enregistrement d’un signe est exclu dès lors qu’il désigne en au moins une de ses significations potentielles une caractéristique des produits ou services en question. Une telle interprétation serait en contradiction avec la jurisprudence constante de la Cour selon laquelle un signe n’est pas dépourvu de caractère distinctif du seul fait qu’il peut également être utilisé et compris comme un slogan publicitaire, une indication de qualité ou une expression incitant à acheter. En effet, cette interprétation aurait pour conséquence que tous les slogans publicitaires seraient exclus de l’enregistrement en tant que marque de l’Union européenne.
22 Enfin, la jurisprudence citée par le Tribunal dans ce contexte ne corroborerait pas ladite interprétation. Selon la requérante, l’arrêt du Tribunal du 23 janvier 2014, Novartis/OHMI (CARE TO CARE) (T‑68/13, non publié, EU:T:2014:29), ne concernait pas un signe qui pouvait être perçu comme un éloge publicitaire dans l’une de ses nombreuses significations éventuelles, mais un signe qui, en tant que tel, était descriptif des services désignés dans la demande d’enregistrement en cause dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt. De même, le signe en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du Tribunal du 29 avril 2010, Kerma/OHMI (BIOPIETRA) (T‑586/08, non publié, EU:T:2010:171), arrêt auquel l’arrêt du Tribunal du 23 janvier 2014, Novartis/OHMI (CARE TO CARE) (T‑68/13, non publié, EU:T:2014:29), fait référence, désignerait directement les caractéristiques des produits désignés dans la demande d’enregistrement en cause dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt.
23 S’agissant de la seconde branche du premier moyen du pourvoi, ayant trait au caractère global de la motivation de la décision litigieuse, la requérante fait valoir que, certes, lorsque le même motif de refus est opposé pour une catégorie ou un groupe de produits ou de services, la motivation peut être globale pour tous les produits ou services concernés. Toutefois, le Tribunal aurait considéré à tort, au point 61 de l’arrêt attaqué, qu’il suffisait de constater à cet effet que le message promotionnel véhiculé par la marque demandée est applicable à tous les produits et services concernés par la demande d’enregistrement. En effet, une telle constatation pourrait être effectuée pour tous les produits et les services relevant de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, de telle sorte qu’elle ne constituerait pas un moyen susceptible d’établir un « lien direct et concret » entre les produits et les services en cause.
24 Pour ce qui est du second moyen du pourvoi, tiré de la violation des principes d’égalité de traitement et de bonne administration, la requérante fait observer que, au point 69 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a à bon droit exposé que l’EUIPO est tenu de prendre en considération ses décisions déjà prises en ce qui concerne des demandes similaires et de s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens. Toutefois, en se limitant, au point 70 de l’arrêt attaqué, à relever que la chambre de recours avait pris la « bonne décision », le Tribunal n’aurait aucunement démontré que des décisions antérieures de l’EUIPO avaient effectivement été prises en considération et n’aurait pas non plus expliqué les raisons pour lesquelles une décision divergente avait été adoptée.
25 L’EUIPO fait valoir que le pourvoi doit être rejeté.
Appréciation de la Cour
Sur le premier moyen
26 S’agissant de la première branche du premier moyen du pourvoi, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante de la Cour, le caractère distinctif d’une marque, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, signifie que cette marque permet d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises. Ce caractère distinctif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (arrêt du 13 septembre 2018, Birkenstock Sales/EUIPO, C‑26/17 P, EU:C:2018:714, point 31 et jurisprudence citée).
27 Dans le cadre de son appréciation du caractère distinctif de la marque demandée, le Tribunal a, aux points 34 à 38 de l’arrêt attaqué, relevé que le dictionnaire de référence pour la langue allemande, le Duden, définit le terme « achtung » notamment comme étant l’« appel ou inscription pour mettre en garde ou sensibiliser » et que ce terme est utilisé dans la publicité pour attirer l’attention des consommateurs de manière à les convaincre d’acheter des produits et des services qui seraient dotés d’une qualité supérieure ou d’un prix avantageux. Faisant sienne l’affirmation de l’EUIPO, le Tribunal a considéré que les consommateurs ne percevraient pas d’emblée le terme « achtung » comme une indication de l’origine commerciale d’un produit ou d’un service, mais comme un mot accrocheur destiné à diriger leur attention vers les offres ainsi désignées. Selon le Tribunal, la marque demandée est susceptible d’être utilisée par n’importe quel fournisseur afin d’inciter à l’achat de n’importe quels produits ou services, y compris ceux visés par la marque demandée, ce qui rend difficile pour le consommateur l’identification de l’origine commerciale des produits et services ainsi désignés. Le Tribunal a conclu que la marque demandée ne présentait aucune originalité ou prégnance particulière et qu’elle serait d’emblée perçue par le public pertinent comme un message publicitaire ordinaire, « sans profondeur sémantique », et non comme une indication de l’origine commerciale des produits et services ainsi désignés.
28 Cette conclusion n’est pas entachée d’erreur de droit.
29 Il convient de relever à cet égard que, certes, il est vrai, ainsi que la requérante le fait observer, que le terme « achtung » a d’autres significations dans la langue allemande que celle rappelée au point 34 de l’arrêt attaqué, notamment celle d’« estime, appréciation ou respect ». En outre, l’appréciation du caractère distinctif d’un signe dont l’enregistrement en tant que marque est demandé ne saurait être effectuée en se limitant à prendre en compte l’utilisation la plus probable de ce signe, mais doit prendre en considération l’ensemble des usages probables de la marque demandée, c’est-à-dire ceux susceptibles d’être significatifs en pratique [voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2019, Deutsches Patent- und Markenamt (#darferdas ?), C‑541/18, EU:C:2019:725, point 33].
30 Cependant, en l’espèce, l’appréciation du caractère distinctif du signe en cause ne saurait faire abstraction du point d’exclamation dont l’élément verbal « achtung » est assorti. En effet, ce point d’exclamation revêt, sur le plan visuel, une signification d’autant plus grande qu’il figure en couleur orange dans le signe en cause, ce qui renforce encore son importance et exclut qu’il puisse être qualifié d’élément purement accessoire. Il s’ensuit que les significations du signe en cause dont la requérante fait état ne sont, en l’espèce, pas susceptibles d’être significatives en pratique, au sens de la jurisprudence citée au point précédent.
31 Par ailleurs, le Tribunal a explicitement pris en considération le fait que le terme « achtung » peut avoir plusieurs significations, avant de conclure, sur le fondement d’une appréciation d’ensemble de tous les éléments pertinents, que le terme « achtung », dans son utilisation possible et la plus vraisemblable pour les produits et services en cause, serait exclusivement perçu comme un message publicitaire élogieux.
32 Contrairement à ce que la requérante prétend, l’examen du caractère distinctif de la marque demandée par le Tribunal ne fait pas apparaître que cet examen procède d’une compréhension insuffisante des modalités orthographiques du terme « achtung » en langue allemande, qui, notamment, aurait dû être palliée par la réalisation de mesures d’instruction. En effet, le Tribunal a simplement considéré, au point 47 de l’arrêt attaqué, dans le cadre de son appréciation souveraine des faits, que la lettre minuscule « a », par laquelle le mot « achtung » commence, ne saurait, en soi, conférer un caractère distinctif au signe en cause, dans la mesure où il s’agit d’une erreur d’orthographe courante dans la langue allemande, qui ne peut être détectée à l’oral.
33 Cela étant, le Tribunal a fait application, aux points 40 et 41 de l’arrêt attaqué, de sa jurisprudence selon laquelle un signe doit se voir opposer un refus d’enregistrement, en application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés [arrêt du 23 janvier 2014, Novartis/OHMI (CARE TO CARE), T‑68/13, non publié, EU:T:2014:29, point 41 et jurisprudence citée]. Au point 41 de ce dernier arrêt, auquel ces points 40 et 41 font référence, le Tribunal s’est appuyé, d’une part, sur son arrêt du 29 avril 2010, Kerma/OHMI (BIOPIETRA) (T‑586/08, non publié, EU:T:2010:171, point 35), et, d’autre part, « par analogie, concernant l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 », sur l’arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley (C‑191/01 P, EU:C:2003:579, point 32).
34 Sur ce fondement et ayant relevé que l’une des significations potentielles du terme « achtung » correspondait à un terme publicitaire visant à attirer l’attention du consommateur vers l’offre ainsi désignée, il a écarté comme inopérante l’argumentation de la requérante invoquée devant lui selon laquelle le terme « achtung » aurait plusieurs significations et écarté comme non fondée celle selon laquelle la chambre de recours aurait opéré une confusion entre le motif de refus visé à cet article 7, paragraphe 1, sous b), et celui visé à cet article 7, paragraphe 1, sous c).
35 Ce faisant, le Tribunal a commis une erreur de droit. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, certes, les signes descriptifs visés à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 sont également, sans préjudice de la possibilité d’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage, dépourvus de caractère distinctif et que, selon la jurisprudence, si au moins une des significations potentielles du signe désigne une caractéristique des produits concernés, le signe est qualifié de descriptif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 ainsi que, par conséquent, refusé à l’enregistrement (voir, en ce sens, arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, EU:C:2003:579, points 30 et 32).
36 Toutefois, cette jurisprudence établie dans le cadre de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 n’est pas transposable par analogie à l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, comme l’ont d’ailleurs fait valoir tant la requérante que l’EUIPO, cette dernière partie sans préjudice de sa conclusion que le pourvoi doit être rejeté, lorsque le caractère distinctif de la marque demandée, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, est mis en question pour d’autres raisons que son caractère descriptif. Or, en l’espèce, le caractère descriptif de la marque demandée n’a pas été établi ni même examiné. Partant, il ne pouvait être exclu que la requérante ait pu utilement invoquer une argumentation tirée de la pluralité de significations de la marque demandée afin d’établir son caractère distinctif, contrairement à ce que le Tribunal a jugé aux points 40 et 41 de l’arrêt attaqué.
37 Cela étant, la marque demandée pouvait être refusée à l’enregistrement pour d’autres raisons que son caractère descriptif, ce que le Tribunal a jugé en considérant que la marque demandée serait perçue par le public pertinent comme un message publicitaire ordinaire et non pas comme une indication d’origine commerciale.
38 L’erreur de droit commise par le Tribunal en appliquant la jurisprudence citée au point 33 du présent arrêt n’a ainsi pas eu d’incidence sur le dispositif de l’arrêt attaqué, le Tribunal ayant fondé à suffisance de droit, aux points 34 à 38 de l’arrêt attaqué, sa conclusion selon laquelle la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif.
39 Or, les griefs dirigés contre des motifs surabondants d’un arrêt du Tribunal ne sauraient entraîner l’annulation de cet arrêt et doivent, par conséquent, être écartés comme étant inopérants (arrêt du 6 septembre 2017, Intel/Commission, C‑413/14 P, EU:C:2017:632, point 105 et jurisprudence citée).
40 Dès lors, les griefs relatifs aux points 40 et 41 de l’arrêt attaqué doivent être écartés comme étant inopérants.
41 S’agissant de la seconde branche du premier moyen du pourvoi, relative à la motivation globale de la décision litigieuse en ce qui concerne les produits et les services concernés, il suffit de relever que le Tribunal a correctement appliqué la jurisprudence de la Cour à cet égard. En effet, selon cette jurisprudence, l’autorité compétente peut se limiter à une motivation globale pour tous les produits ou services concernés lorsque le même motif de refus est opposé pour une catégorie ou un groupe de produits ou de services, à condition que les produits et les services en cause présentent entre eux un lien suffisamment direct et concret, au point qu’ils forment une catégorie ou un groupe de produits ou de services d’une homogénéité suffisante, cela n’excluant cependant pas a priori que les produits et les services visés par une demande d’enregistrement présentent tous une caractéristique pertinente pour l’analyse d’un motif absolu de refus et puissent être regroupés, aux fins de l’examen de la demande d’enregistrement en cause par rapport à ce motif absolu de refus, dans une seule catégorie ou dans un seul groupe d’une homogénéité suffisante (voir, en ce sens, ordonnance du 11 décembre 2014, FTI Touristik/OHMI, C‑253/14 P, non publiée, EU:C:2014:2445, point 48, ainsi que arrêt du 17 mai 2017, EUIPO/Deluxe Entertainment Services Group, C‑437/15 P, EU:C:2017:380, points 30 et 31).
42 Or, c’est bien l’existence d’une caractéristique commune pertinente pour l’examen du motif absolu de refus en cause, permettant le regroupement des produits et services visés par la marque demandée dans un seul groupe d’une homogénéité suffisante à cette fin, que le Tribunal a identifiée au point 61 de l’arrêt attaqué lorsqu’il y a jugé, à l’instar de la chambre de recours, que tous ces produits et tous ces services pouvaient être présentés comme possédant ou comme fournissant une qualité supérieure et étaient susceptibles de faire l’objet de messages publicitaires.
43 Le premier moyen du pourvoi doit par conséquent être écarté.
Sur le second moyen
44 S’agissant du second moyen du pourvoi, tiré d’une violation des principes d’égalité de traitement et de bonne administration et, plus particulièrement, de ce que, dans la décision litigieuse, la chambre de recours se serait écartée des décisions de l’EUIPO prises antérieurement en la matière, il suffit de relever que le Tribunal, au point 70 de l’arrêt attaqué, a jugé que la chambre de recours avait à bon droit considéré que la demande d’enregistrement de la marque demandée se heurtait au motif de refus tiré de l’absence de caractère distinctif, de telle sorte que la requérante ne saurait utilement invoquer, aux fins d’infirmer cette conclusion, des décisions antérieures de l’EUIPO ou des décisions d’autorités et de juridictions nationales. Or, il ressort de la jurisprudence constante de la Cour que cette appréciation n’est entachée d’aucune erreur de droit [voir, s’agissant de l’autonomie du système des marques de l’Union européenne, qui a pour conséquence que son application est indépendante de tout système national, arrêt du 25 octobre 2007, Develey/OHMI, C‑238/06 P, EU:C:2007:635, points 65 et 66, ainsi que, en ce qui concerne les décisions de l’EUIPO déjà prises concernant des demandes similaires, arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, EU:C:2011:139, points 74 à 76, ainsi que ordonnance du 12 décembre 2013, Getty Images (US)/OHMI, C‑70/13 P, non publiée, EU:C:2013:875, points 42 à 44].
45 De plus, conformément à une jurisprudence constante selon laquelle la motivation du Tribunal peut être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles le Tribunal n’a pas fait droit à leurs arguments et à la Cour de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (arrêt du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI, C‑263/09 P, EU:C:2011:452, point 64 et jurisprudence citée), il ne saurait être considéré que, en statuant ainsi, le Tribunal aurait manqué à son obligation de motivation.
46 Le second moyen du pourvoi doit par conséquent également être écarté.
47 Dans ces conditions, le pourvoi doit être rejeté dans son intégralité.
Sur les dépens
48 En vertu de l’article 137 du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, il est statué sur les dépens dans l’arrêt ou l’ordonnance qui met fin à l’instance. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement de procédure, également applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
49 L’EUIPO ayant conclu à la condamnation de la requérante aux dépens et cette dernière ayant succombé en ses conclusions, il y a lieu de condamner la requérante à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par l’EUIPO.
Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) déclare et arrête :
1) Le pourvoi est rejeté.
2) achtung ! GmbH est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO).
Signatures
* Langue de procédure : l’allemand.
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