NMI Technologietransfer (Judgment) French Text [2020] EUECJ C-516/19 (24 September 2020)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2020/C51619.html
Cite as: [2020] WLR(D) 522, EU:C:2020:754, [2021] PTSR 387, ECLI:EU:C:2020:754, [2020] EUECJ C-516/19

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ARRÊT DE LA COUR (dixième chambre)

24 septembre 2020 (*)

« Renvoi préjudiciel – Aides d’État – Articles 107 et 108 TFUE – Règlement (UE) no 651/2014 – Exemption de certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur – Annexe I – Petites et moyennes entreprises (PME) – Définition – Critère d’indépendance – Article 3, paragraphe 1 – Entreprise autonome – Article 3, paragraphe 4 – Exclusion – Contrôle indirect de 25 % du capital ou des droits de vote par des organismes publics – Notions de “contrôle” et d’“organismes publics” »

Dans l’affaire C‑516/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Verwaltungsgericht Berlin (tribunal administratif de Berlin, Allemagne), par décision du 17 juin 2019, parvenue à la Cour le 9 juillet 2019, dans la procédure

NMI Technologietransfer GmbH

contre

EuroNorm GmbH,

LA COUR (dixième chambre),

composée de M. I. Jarukaitis, président de chambre, M. E. Regan (rapporteur), président de la cinquième chambre, et M. C. Lycourgos, juge,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : Mme M. Krausenböck, administratrice,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 juin 2020,

considérant les observations présentées :

–        pour NMI Technologietransfer GmbH, par Mes A. Holle et C. Lindemann, Rechtsanwälte,

–        pour EuroNorm GmbH, par Mme A. Fuchs ainsi que par MM. M. Netzel et G. Saremba,

–        pour la Commission européenne, par Mme K. Blanck et M. V. Bottka, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement (UE) no 651/2014 de la Commission, du 17 juin 2014, déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 [TFUE] (JO 2014, L 187, p. 1).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant NMI Technologietransfer GmbH (ci-après « NMI TT ») à EuroNorm GmbH au sujet du refus de cette dernière de lui octroyer une subvention en vue du financement d’un projet de recherche et de développement en faveur des petites et moyennes entreprises (PME).

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

 La recommandation 2003/361/CE

3        Les considérants 9 et 13 de la recommandation 2003/361/CE de la Commission, du 6 mai 2003, concernant la définition des micro, petites et moyennes entreprises (JO 2003, L 124, p. 36, ci-après la « recommandation de 2003 »), énoncent ce qui suit :

« (9)      Afin de mieux appréhender la réalité économique des PME et d’exclure de cette qualification les groupes d’entreprises dont le pouvoir économique excéderait celui d’une PME, il convient de distinguer les différents types d’entreprises, selon qu’elles sont autonomes, qu’elles ont des participations qui n’impliquent pas de position de contrôle (entreprises partenaires), ou qu’elles sont liées à d’autres entreprises. Le degré indiqué dans la recommandation 96/280/CE [de la Commission, du 3 avril 1996, concernant la définition des petites et moyennes entreprises (JO 1996, L 107, p. 4),] de 25 % de participation en dessous duquel une entreprise est considérée comme autonome est maintenu.

[...]

(13)       Afin d’éviter des distinctions arbitraires entre les différentes entités publiques d’un État membre, et dans l’intérêt de la sécurité juridique, il s’avère nécessaire de confirmer qu’une entreprise dont 25 % ou plus des droits de capital ou de vote sont contrôlés par un organisme public ou une collectivité publique n’est pas une PME. »

 Le règlement no 651/2014

4        Les considérants 30 et 40 du règlement no 651/2014 sont ainsi libellés :

« (30)      Afin d’éliminer les disparités qui pourraient entraîner des distorsions de concurrence et de faciliter la coordination entre les différentes initiatives nationales et de l’Union concernant les PME, ainsi que par souci de clarté administrative et de sécurité juridique, la définition des PME utilisée dans le présent règlement doit se fonder sur celle contenue dans la recommandation [de 2003].

[...]

(40)      Les PME jouent un rôle décisif dans la création d’emplois et, d’une manière plus générale, représentent un facteur de stabilité sociale et de développement économique. Leur développement peut cependant être entravé par les défaillances du marché, ce qui les expose aux difficultés particulières décrites ci-dessous. Il leur est souvent malaisé d’accéder aux capitaux ou aux prêts, étant donné les réticences de certains marchés financiers à prendre des risques et les garanties parfois limitées qu’elles sont en mesure d’offrir. La modicité de leurs ressources peut aussi restreindre leur accès à l’information, notamment en ce qui concerne les nouvelles technologies et les marchés potentiels. En conséquence, pour faciliter le développement des activités économiques des PME, le présent règlement doit exempter certaines catégories d’aides lorsqu’elles sont octroyées en faveur de PME. [...] »

5        L’article 1er de ce règlement, intitulé « Champ d’application », dispose, à son paragraphe 1 :

« Le présent règlement s’applique aux catégories d’aides suivantes :

[...]

b)      aux aides en faveur des PME prenant la forme d’aides à l’investissement, d’aides au fonctionnement ou d’aides en faveur de l’accès des PME au financement ;

[...] »

6        L’article 2 dudit règlement prévoit :

« Aux fins du présent règlement, on entend par :

[...]

2.      “petites et moyennes entreprises” ou “PME” : les entreprises remplissant les critères énoncés à l’annexe I ;

[...] »

7        L’article 2 de l’annexe I du règlement no 651/2014, intitulée « Définition des PME », est ainsi libellé :

« 1.      La catégorie des micro, petites et moyennes entreprises (PME) est constituée des entreprises qui occupent moins de 250 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 millions [d’euros] ou dont le total du bilan annuel n’excède pas 43 millions [d’euros].

2.       Dans la catégorie des PME, une petite entreprise est définie comme une entreprise qui occupe moins de 50 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel ou le total du bilan annuel n’excède pas 10 millions [d’euros].

3.       Dans la catégorie des PME, une microentreprise est définie comme une entreprise qui occupe moins de dix personnes et dont le chiffre d’affaires annuel ou le total du bilan annuel n’excède pas 2 millions [d’euros]. »

8        L’article 3 de cette annexe, intitulé « Types d’entreprises pris en considération pour le calcul de l’effectif et des montants financiers », est ainsi libellé :

« 1.      Est une “entreprise autonome” toute entreprise qui n’est pas qualifiée comme entreprise partenaire au sens du paragraphe 2 ou comme entreprise liée au sens du paragraphe 3.

2.      Sont des “entreprises partenaires” toutes les entreprises qui ne sont pas qualifiées comme entreprises liées au sens du paragraphe 3 et entre lesquelles existe la relation suivante : une entreprise (entreprise en amont) détient, seule ou conjointement avec une ou plusieurs entreprises liées au sens du paragraphe 3, 25 % ou plus du capital ou des droits de vote d’une autre entreprise (entreprise en aval).

Une entreprise peut toutefois être qualifiée d’autonome, donc n’ayant pas d’entreprises partenaires, même si le seuil de 25 % est atteint ou dépassé, lorsque l’on est en présence des catégories d’investisseurs suivants, et à la condition que ceux-ci ne soient pas, à titre individuel ou conjointement, liés au sens du paragraphe 3 avec l’entreprise concernée :

[...]

b)      universités ou centres de recherche à but non lucratif ;

[...]      

d)      autorités locales autonomes ayant un budget annuel inférieur à 10 millions [d’euros] et moins de 5 000 habitants.

3.      Sont des “entreprises liées” les entreprises qui entretiennent entre elles l’une ou l’autre des relations suivantes :

a)      une entreprise a la majorité des droits de vote des actionnaires ou associés d’une autre entreprise ;

b)      une entreprise a le droit de nommer ou de révoquer la majorité des membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance d’une autre entreprise ;

c)      une entreprise a le droit d’exercer une influence dominante sur une autre entreprise en vertu d’un contrat conclu avec celle-ci ou en vertu d’une clause des statuts de celle-ci ;

d)      une entreprise actionnaire ou associée d’une autre entreprise contrôle seule, en vertu d’un accord conclu avec d’autres actionnaires ou associés de cette autre entreprise, la majorité des droits de vote des actionnaires ou associés de celle-ci.

Il y a présomption qu’il n’y a pas d’influence dominante, dès lors que les investisseurs énoncés au paragraphe 2, [second] alinéa, ne s’immiscent pas directement ou indirectement dans la gestion de l’entreprise considérée, sans préjudice des droits qu’ils détiennent en leur qualité d’actionnaires ou d’associés.

Les entreprises qui entretiennent l’une ou l’autre des relations visées au premier alinéa à travers une ou plusieurs autres entreprises, ou avec des investisseurs visés au paragraphe 2, sont également considérées comme liées.

Les entreprises qui entretiennent l’une ou l’autre de ces relations à travers une personne physique ou un groupe de personnes physiques agissant de concert, sont également considérées comme entreprises liées pour autant que ces entreprises exercent leurs activités ou une partie de leurs activités dans le même marché en cause ou dans des marchés contigus.

[...]

4.      Hormis les cas visés au paragraphe 2, [second] alinéa, une entreprise ne peut pas être considérée comme une PME si 25 % ou plus de son capital ou de ses droits de vote sont contrôlés, directement ou indirectement, par un ou plusieurs organismes publics ou collectivités publiques, à titre individuel ou conjointement.

[...] »

 La directive 2006/111/CE

9        L’article 2 de la directive 2006/111/CE de la Commission, du 16 novembre 2016, relative à la transparence des relations financières entre les États membres et les entreprises publiques ainsi qu’à la transparence financière dans certaines entreprises (JO 2006, L 318, p. 17), prévoit :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

a)       “pouvoirs publics”, tous les pouvoirs publics, y compris l’État, ainsi que les autorités régionales et locales et toutes les autres collectivités territoriales ;

[...] »

 Le droit allemand

 La directive relative au « programme central d’innovation pour les PME »

10      En vertu du point 3.1.1, sous a), de la Richtlinie « Zentrales Innovationsprogramm Mittelstand » (directive relative au « programme central d’innovation pour les PME »), du ministère fédéral de l’Économie et de l’Énergie, dans sa version du 15 avril 2015, les PME ayant un établissement en Allemagne sont éligibles aux projets de recherche et de développement.

11      La note 3 de cette directive indique que les dispositions de l’annexe I du règlement no 651/2014 sont applicables pour déterminer si une entreprise constitue une PME.

 Les statuts du NMI-Institut

12      L’article 2 des statuts du NMI Naturwissenschaftliches und Medizinisches Institut an der Universität Tübingen (ci-après le « NMI-Institut »), dans leur version approuvée le 11 août 2015 par le Regierungspräsidium Tübingen (Préfecture de Tübingen) (ci-après les « statuts du NMI-Institut »), dispose :

« La fondation a pour objet de promouvoir la science et la recherche. Cet objet sera notamment réalisé par :

–        l’exploitation des résultats de la recherche fondamentale dans le domaine des sciences naturelles et de la médecine et leur développement ultérieur jusqu’à un niveau permettant leur mise en œuvre dans la pratique industrielle ;

–        la mise en œuvre de projets de recherche et développement pour le compte de l’État fédéral, des Länder et des organismes de recherche ;

–        la planification, la mise en œuvre et l’évaluation de projets de recherche en coopération étroite entre les pouvoirs adjudicateurs publics, les autres organismes de recherche et les entreprises commerciales ;

–        la mise à disposition appropriée du public spécialisé, des entreprises ainsi que d’autres organismes de recherche des connaissances acquises ;

–        l’organisation d’événements scientifiques. »

13      L’article 5 de ces statuts énonce :

« Les organes de la fondation sont

1.       le conseil de fondation,

2.       le conseil de direction. »

14      Aux termes de l’article 6 desdits statuts :

« (1) Siègent au conseil de fondation en qualité de membres :

a)      un représentant du Ministerium für Finanzen und Wirtschaft Baden-Württemberg (ministère des Finances et de l’Économie du Land de Bade-Wurtemberg) ;

b)      un représentant du Ministerium für Wissenschaft, Forschung und Kunst Baden-Württemberg (ministère des Sciences, de la Recherche et de l’Art du Land de Bade-Wurtemberg) ;

c)      le maire de la ville de Reutlingen ;

d)      le recteur de l’université de Tübingen ;

e)      trois professeurs de l’université de Tübingen ;

f)      le président de la Hochschule Reutlingen (Institut d’enseignement supérieur de Reutlingen) ;

g)      un représentant d’un institut de la Fraunhofer-Gesellschaft zur Förderung der angewandten Forschung e.V. ;

h)      six personnalités du monde des affaires.

Les membres visés aux points e) à h) sont nommés par le ministère des Finances et de l’Économie du Land de Bade-Wurtemberg, les membres visés aux points e) et f) en accord avec le ministère des Sciences, de la Recherche et de l’Art du Land de Bade-Wurtemberg et sur proposition de l’université de Tübingen ou de l’institut d’enseignement supérieur de Reutlingen ; le membre visé au point g) est nommé en accord avec la Fraunhofer-Gesellschaft zur Förderung der angewandten Forschung e.V. Les membres visés au point h) sont nommés en accord avec le conseil de fondation, dont un sur proposition de la chambre de commerce et d’industrie du Bade-Wurtemberg et un sur proposition de la Landesverband der baden-württembergischen Industrie eV (Fédération de l’industrie du Land de Bade-Wurtemberg).

(2)      Le ministère des Finances et de l’Économie peut nommer au conseil de fondation deux personnalités associées au travail de la fondation.

[...]

(5)       L’activité au sein du conseil de fondation est bénévole. »

15      L’article 7 des statuts du NMI-Institut est libellé comme suit :

« (1) Le conseil de fondation définit les principes régissant le travail de la fondation dans le cadre des tâches visées à l’article 2 et veille à leur respect.

(2)       Le conseil de fondation établit après délibération :

a)       la planification à long terme de la fondation en matière de recherche, de développement et d’extension ;

b)       la planification financière à moyen et à long terme ainsi que l’établissement du plan d’entreprise et du tableau des effectifs ;

c)       la nomination et la révocation du conseil de direction ;

d)       la décharge du conseil de direction ;

e)       la nomination du vérificateur aux comptes ;

f)       l’approbation des actes juridiques [...] ;

g)       la modification des statuts de la fondation et la dissolution de la fondation. »

[...] »

16      L’article 13 de ces statuts prévoit :

« (1)       Les statuts peuvent être modifiés et la fondation peut être dissoute par une résolution du conseil de fondation. Le conseil de direction doit être entendu au préalable. Les résolutions requièrent une majorité des deux tiers des membres du conseil de fondation.

(2)       En cas de dissolution volontaire ou forcée de la fondation ou caducité des buts donnant droit à des allègements fiscaux, l’actif de la fondation sera transféré au Land de Bade-Wurtemberg. »

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

17      Le NMI Institut est une fondation de droit civil d’utilité publique disposant de la capacité juridique, dont le siège est établi à Reutlingen (Allemagne) et qui a pour objet la promotion de la science ainsi que de la recherche.

18      NMI TT est une société à responsabilité limitée qui est établie à la même adresse que le NMI Institut, dont le capital est détenu à hauteur de 90 % par celui-ci et qui a pour objet la valorisation de savoir-faire, la fourniture de services de conseil ainsi que la réalisation de recherches sous contrat dans les domaines de l’ingénierie, des sciences et de la médecine. En particulier, NMI TT, dont certains domaines de recherche coïncident également avec ceux du NMI Institut, a pour vocation de mettre en pratique, avec un bénéfice financier, les résultats de la recherche obtenus par ce dernier.

19      Le capital du NMI-Institut est détenu, pour l’essentiel, par des sociétés privées, la ville de Reutlingen en possédant environ 6 %. Le conseil de fondation du NMI-Institut (ci-après le « conseil de fondation »), dont les décisions sont, en principe, prises à la majorité simple, est constitué de 17 membres, parmi lesquels figurent un représentant du ministère des Finances et de l’Économie du Land de Bade-Wurtemberg, un représentant du ministère des Sciences, de la Recherche et de l’Art de ce Land, le maire de la ville de Reutlingen, le recteur et trois professeurs de l’université de Tübingen, le président de l’institut d’enseignement supérieur de Reutlingen et le gérant de la chambre de commerce et d’industrie de cette même ville.

20      Le 26 juillet 2016, EuroNorm, société porteuse de projets, au sens de la directive relative au « programme central d’innovation pour les PME », dans sa version du 15 avril 2015, et qui a été autorisée par la République fédérale d’Allemagne, représentée par le ministère fédéral de l’Économie et de l’Énergie, à effectuer des tâches administratives dans le domaine des subventions en son nom propre et selon les modalités du droit public, a été saisie par NMI TT d’une demande de subvention en vue du financement, pour la période comprise entre le 1er septembre 2016 et le 31 août 2018, d’un projet de recherche et de développement, au titre de ladite directive.

21      Par décision du 28 février 2017, EuroNorm a rejeté cette demande, au motif que NMI TT ne pouvait pas être qualifiée de PME, au sens de l’annexe I du règlement no 651/2014, dès lors que, en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de cette annexe, cette qualification est exclue lorsque 25 % ou plus du capital ou des droits de vote de l’entreprise concernée sont contrôlés, directement ou indirectement, par un ou plusieurs organismes publics, à titre individuel ou conjointement. Certes, selon EuroNorm, un contrôle direct de NMI TT par des organismes publics est exclu, puisque 90 % du capital de celle-ci est détenu par une fondation de droit civil, en l’occurrence le NMI-Institut. Toutefois, l’existence d’un contrôle indirect par des organismes publics pourrait être présumée, dès lors que la majorité des membres du conseil de fondation est constituée de représentants d’un Land, d’une ville, d’une université et d’un établissement d’enseignement supérieur publics ainsi que d’une chambre de commerce et d’industrie, qui a également le statut d’organisme public en droit allemand. Par ailleurs, le NMI-Institut et NMI TT étant des entreprises liées, au sens de l’article 3, paragraphe 3, sous a), de ladite annexe, la règle dérogatoire édictée à l’article 3, paragraphe 2, second alinéa, sous a) à d), de cette même annexe ne serait pas applicable.

22      NMI TT a introduit contre cette décision une réclamation, à l’appui de laquelle elle a fait valoir qu’EuroNorm avait apprécié de manière incorrecte l’influence exercée par les organismes publics sur le NMI-Institut et, partant, sur elle-même. En effet, à la différence d’une association ou d’une société à responsabilité limitée dont les opérations sont déterminées par les décisions prises par la majorité de ses membres ou de ses associés, l’action d’une fondation de droit civil serait fondée uniquement sur la volonté de ses fondateurs. Ainsi, en l’occurrence, le conseil de fondation ne pourrait influencer ni les décisions du NMI-Institut ni celles de NMI TT. Le conseil de fondation devrait plutôt être considéré comme étant une instance spécialisée consultative. De surcroît, les membres du conseil de fondation exerceraient leurs activités à titre bénévole et les réunions de celui-ci n’auraient lieu qu’une seule fois par an.

23      Par décision du 12 juin 2017, EuroNorm a rejeté cette réclamation, en précisant que le conseil de fondation orientait le NMI-Institut à la lumière des tâches qui lui étaient assignées par les statuts de celui-ci. En outre, le domaine d’activité de NMI TT faisant également partie de l’objet du NMI-Institut, l’existence d’une influence suffisante des pouvoirs publics sur cette société devrait être présumée.

24      NMI TT a saisi le Verwaltungsgericht Berlin (tribunal administratif de Berlin, Allemagne) d’un recours contre cette décision, dans le cadre duquel elle souligne les compétences étendues que possède, en général, le conseil de direction d’une fondation. Ainsi, en l’occurrence, au sein du NMI-Institut, le conseil de fondation ne pourrait donner aucune instruction au conseil de direction, y compris quant à l’exercice par le NMI-Institut des droits sociaux dont il dispose dans NMI TT. Pour sa part, EuroNorm réitère que, eu égard aux pouvoirs qui lui sont conférés par les statuts du NMI-Institut, le conseil de fondation, dont la majorité des membres représente des organismes publics, exerce une influence dominante sur le NMI-Institut et, partant, sur NMI TT.

25      La juridiction de renvoi estime que la solution du litige dépend du point de savoir si c’est à bon droit qu’EuroNorm a considéré que NMI TT ne pouvait pas, en application de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, être qualifiée de PME, au sens de cette annexe, et, partant, a rejeté à juste titre la demande de subvention introduite par celle-ci, EuroNorm ayant, par ailleurs, estimé que le projet de recherche et de développement en cause au principal était, en tant que tel, éligible au financement sollicité. Cette juridiction se demande, dès lors, s’il y a lieu, dans les circonstances au principal, de présumer l’existence d’un contrôle indirect exercé sur NMI TT par des organismes publics au travers du NMI-Institut.

26      Dans ces conditions, le Verwaltungsgericht Berlin (tribunal administratif de Berlin) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Une société à responsabilité limitée exerçant une activité économique ne peut-elle pas être considérée, en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, comme une [PME] ne serait-ce que parce que 90 % de son capital social est détenu par une fondation de droit civil dont le conseil de fondation [...], qui n’est pas autorisé à assurer la gestion, est constitué de 17 membres parmi lesquels figurent deux représentants de ministères, le maire d’une ville, le recteur d’une université, trois professeurs de cette université, le président d’un autre établissement d’enseignement supérieur et le directeur d’une chambre de commerce et d’industrie ?

2)      Les universités et établissements d’enseignement supérieur publics ainsi que les chambres de commerce et d’industrie allemandes sont-ils des organismes publics au sens de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014 ?

3)      Les personnes siégeant à titre bénévole au conseil de fondation sont-elles des organismes publics au sens de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, du seul fait qu’elles travaillent à titre principal dans un organisme public ?

4)      Le contrôle exercé par les organismes publics au sens de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014 présuppose-t-il que les organes des organismes publics puissent donner des instructions de vote, sur la base d’un rapport de droit, aux membres du conseil de fondation siégeant à titre bénévole ?

5)      Le contrôle indirect des droits de vote par les organismes publics présuppose-t-il qu’il soit acquis que les organismes publics influencent les membres du conseil de fondation pour que ceux-ci exercent leurs droits de vote de la manière définie par ces organismes publics ?

6)      Existe-t-il déjà un contrôle indirect des droits de vote par les organismes publics s’il est possible que les membres du conseil de fondation siégeant à titre bénévole tiennent compte des intérêts de leurs organismes publics d’origine dans le cadre de leur activité au sein de ce conseil ?

7)      Le “contrôle conjoint”, au sens de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, exige-t-il qu’il soit possible de constater la formation d’une volonté commune des organismes publics en matière de droit de vote ?

8)      Le terme “contrôlé”, au sens de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, fait-il référence à l’application effective des statuts [du NMI-Institut] ou bien à une interprétation possible des termes des statuts ? »

 Sur les questions préjudicielles

 Observations liminaires

27      Par ses huit questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi vise, en substance, à savoir, ainsi qu’il ressort, plus particulièrement, du libellé de la première de ces questions, si l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui exclut qu’une entreprise puisse être considérée comme une PME, dès lors que l’organe de l’entreprise qui en détient l’essentiel du capital, bien qu’il ne soit pas autorisé à en assurer la gestion quotidienne, est majoritairement composé de membres représentant des organismes publics, au sens de cette disposition, de sorte que ces derniers exercent conjointement, de ce seul fait, un contrôle indirect, au sens de cette disposition, sur la première entreprise.

28      À cette fin, cette juridiction cherche, d’une part, à déterminer, ainsi qu’il ressort de ses deuxième et troisième questions, si la notion d’« organisme public » a vocation à inclure des entités, telles que des universités et des établissements d’enseignement supérieur ainsi qu’une chambre de commerce et d’industrie, sans qu’il importe à cet égard que les personnes nommées par ces organismes siègent à titre bénévole dans l’entreprise concernée.

29      D’autre part, par ses quatrième à huitième questions, ladite juridiction demande, en substance, si, aux fins de l’existence d’un contrôle, au sens de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, il suffit que des organismes publics détiennent conjointement, fût-ce indirectement, au moins 25 % du capital ou des droits de vote de l’entreprise concernée, conformément aux termes des statuts de l’entreprise qui exerce le contrôle direct sur celle-ci, sans qu’il soit nécessaire d’examiner, en outre, si ces organismes sont en mesure d’influencer et de coordonner l’exercice effectif par leurs représentants de leurs droits de vote ou si ces derniers tiennent effectivement compte des intérêts desdits organismes.

30      Il ressort des éléments dont dispose la Cour que ces questions sont posées dans le contexte d’une demande de subvention introduite par une entreprise, NMI TT, qui constitue une spin-off d’une fondation de droit civil, le NMI-Institut, lequel détient 90 % du capital ainsi que 88,8 % des droits de vote de cette entreprise et dont le conseil de fondation est composé, notamment, de deux représentants de ministères d’un Land, du maire d’une ville, du recteur et de trois professeurs d’une université ainsi que du président d’un établissement d’enseignement supérieur de cette ville et du directeur d’une chambre de commerce et d’industrie de celle-ci, lesquels forment une majorité au sein de ce conseil de fondation.

31      En vue de l’examen desdites questions, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort, notamment, du considérant 40 du règlement no 651/2014, lequel a pour objet de déclarer certaines catégories d’aides d’État compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 TFUE, la Commission adopte une approche favorable à l’égard des aides d’État aux PME en raison des défaillances du marché qui font que ces entreprises doivent faire face à un certain nombre de handicaps qui limitent un développement socialement et économiquement souhaitable de celles-ci.

32      Conformément aux articles 2 et 3 de l’annexe I du règlement no 651/2014, une entreprise peut être qualifiée de PME, au sens de ce règlement, si elle remplit trois critères, à savoir un critère relatif au nombre de personnes occupées, un critère financier relatif au chiffre d’affaires annuel ou au total du bilan annuel ainsi qu’un critère d’indépendance (voir, par analogie, arrêt du 29 avril 2004, Italie/Commission, C‑91/01, EU:C:2004:244, point 47).

33      En ce qui concerne ce dernier critère, qui est le seul en cause dans l’affaire au principal, la Cour a jugé que celui-ci vise à assurer que les mesures destinées aux PME profitent véritablement aux entreprises pour lesquelles la taille constitue un handicap et non à celles qui appartiennent à un grand groupe et qui ont donc accès aux moyens et aux soutiens dont ne disposent pas leurs concurrentes de taille équivalente (voir, par analogie, arrêt du 29 avril 2004, Italie/Commission, C‑91/01, EU:C:2004:244, point 50).

34      Ce critère vise ainsi à mieux appréhender, comme il ressort, notamment, du considérant 9 de la recommandation de 2003, sur laquelle se fonde, ainsi que l’indique le considérant 30 du règlement no 651/2014, la notion de « PME » définie à l’annexe I de ce règlement, la réalité économique des PME et à exclure de la qualification de PME les groupes d’entreprises dont le pouvoir économique excéderait celui d’une PME, afin de réserver aux entreprises en ayant réellement besoin les avantages découlant pour la catégorie des PME de diverses réglementations ou mesures en leur faveur (voir, par analogie, arrêt du 27 février 2014, HaTeFo, C‑110/13, EU:C:2014:114, point 31).

35      Dans cette perspective, en vertu de l’article 3, paragraphe 1, de l’annexe I du règlement no 651/2014, est considérée comme étant une « entreprise autonome » toute entreprise qui n’est pas qualifiée comme « entreprise partenaire », au sens du paragraphe 2 de cet article, ou comme « entreprise liée », au sens du paragraphe 3 dudit article.

36      Selon l’article 3, paragraphe 3, sous a), de cette annexe, deux entreprises sont dites « liées » lorsque, notamment, l’une d’elles a la majorité des droits de vote des actionnaires de l’autre, tandis que, conformément à l’article 3, paragraphe 2, premier alinéa, de ladite annexe, deux entreprises sont dites « partenaires » lorsqu’elles ne sont pas qualifiées d’« entreprises liées » mais que l’une d’elles détient, seule ou conjointement avec une ou plusieurs entreprises liées, au moins 25 % du capital ou des droits de vote de l’autre, sous réserve des exceptions énumérées à l’article 3, paragraphe 2, second alinéa, sous a) à d), de la même annexe.

37      S’agissant de cette dernière disposition, celle-ci prévoit qu’une entreprise est qualifiée d’« entreprise autonome », au sens de l’article 3, paragraphe 1, de l’annexe I du règlement no 651/2014, même lorsque au moins 25 % de son capital ou de ses droits de vote sont détenus par certaines catégories d’investisseurs, tels que, notamment, en vertu de l’article 3, paragraphe 2, second alinéa, sous b) et d), de cette annexe, les universités et certaines autorités locales autonomes, pour autant que ces investisseurs ne soient pas, individuellement ou conjointement, liés avec cette entreprise, au sens de l’article 3, paragraphe 3, de ladite annexe.

38      Dans ce contexte, l’article 3, paragraphe 4, de cette annexe pose cependant une règle générale d’exclusion de la qualification de PME, en vertu de laquelle une entreprise ne peut être considérée comme étant une PME « si 25 % ou plus de son capital ou de ses droits de vote sont contrôlés, directement ou indirectement, par un ou plusieurs organismes publics ou collectivités publiques, à titre individuel ou conjointement », à moins que ceux-ci relèvent, comme le précise cette même disposition, des catégories d’investisseurs énumérés à l’article 3, paragraphe 2, second alinéa, de ladite annexe.

39      Il résulte de l’ensemble de ces dispositions qu’une entreprise est exclue de la qualification de PME, au sens de l’annexe I du règlement no 651/2014, dès lors qu’au moins 25 % de son capital ou de ses droits de vote sont contrôlés, fût-ce indirectement, par un ou plusieurs organismes publics, individuellement ou conjointement, sauf lorsque ces derniers sont des investisseurs non liés à cette entreprise, au sens de l’article 3, paragraphe 3, de cette annexe, et qui sont mentionnés à l’article 3, paragraphe 2, second alinéa, sous a) à d), de ladite annexe.

40      En l’occurrence, il est constant, ainsi qu’il ressort des réponses aux questions posées par la Cour lors de l’audience, que NMI TT, à laquelle la qualification de PME a été refusée par la décision en cause au principal, est une entreprise liée au NMI-Institut, au sens de l’article 3, paragraphe 3, sous a), de l’annexe I du règlement no 651/2014, dès lors que celui-ci en détient la majorité des droits de vote. Il s’ensuit que NMI TT ne relève pas du champ d’application de l’exception prévue à l’article 3, paragraphe 2, second alinéa, de cette annexe à l’égard de certaines catégories d’investisseurs.

41      Dans ces conditions, il convient uniquement d’examiner si, conformément à la règle générale d’exclusion prévue à l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, une entreprise, telle que NMI TT, peut être exclue de la qualification de PME, au sens de cette annexe, au seul motif qu’elle est indirectement contrôlée par des organismes publics représentés au sein de l’entreprise à laquelle elle est liée et qui exerce un contrôle direct sur elle.

42      À cet égard, il convient, toutefois, de rappeler que l’article 267 TFUE habilite la Cour non pas à appliquer les règles du droit de l’Union à une espèce déterminée, mais seulement à se prononcer sur l’interprétation des traités et des actes pris par les institutions de l’Union. Il n’appartient donc à la Cour ni d’établir les faits qui ont donné lieu au litige au principal et d’en tirer les conséquences pour la décision que la juridiction de renvoi est appelée à rendre ni d’interpréter des dispositions législatives ou réglementaires nationales concernées (arrêt du 14 mai 2020, Bouygues travaux publics e.a., C‑17/19, EU:C:2020:379, points 51 et 52).

43      C’est à la lumière de ces observations liminaires qu’il convient de répondre aux questions posées par la juridiction de renvoi.

 Sur la notion d’« organisme public », au sens de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014

44      Afin de déterminer si la notion d’« organisme public », au sens de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, a vocation à inclure des entités, telles que des universités, des établissements d’enseignement supérieur et une chambre de commerce et d’industrie, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, il découle des exigences tant de l’application uniforme du droit de l’Union que du principe d’égalité que les termes d’une disposition du droit de l’Union qui ne comporte aucun renvoi exprès au droit des États membres pour déterminer son sens et sa portée doivent normalement trouver, dans toute l’Union, une interprétation autonome et uniforme, indépendamment des qualifications utilisées dans les États membres, en tenant compte des termes de la disposition en cause, ainsi que de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie [arrêt du 5 février 2020, Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid (Enrôlement des marins dans le port de Rotterdam), C‑341/18, EU:C:2020:76, point 40 et jurisprudence citée].

45      Il en résulte que, en l’absence de renvoi, à l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, au droit national, la notion d’« organisme public » figurant à cette disposition doit être considérée comme étant une notion autonome du droit de l’Union dont le sens et la portée doivent être identiques dans l’ensemble des États membres. Partant, il appartient à la Cour de donner à cette notion une interprétation uniforme dans l’ordre juridique de l’Union.

46      En premier lieu, en ce qui concerne les termes de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, dès lors que ni cette disposition ni aucune autre disposition de ce règlement, en particulier l’article 2 de celui-ci, ne comportent de définition de la notion d’« organisme public », il convient de déterminer la signification et la portée de cette notion conformément au sens habituel de celle-ci dans le langage courant [voir, par analogie, arrêt du 5 février 2020, Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid (Enrôlement des marins dans le port de Rotterdam), C‑341/18, EU:C:2020:76, point 42 et jurisprudence citée].

47      Or, dans son sens habituel, la notion d’« organisme public » doit être comprise comme faisant référence à l’État, aux collectivités territoriales, ainsi qu’aux organismes qui sont créés pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général, sont dotés de la personnalité juridique et sont soit financés majoritairement, soit contrôlés directement ou indirectement par l’État, par des collectivités territoriales ou par d’autres organismes publics. 

48      Il en ressort que l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, a vocation à inclure l’ensemble des entités et des autorités relevant des pouvoirs publics.

49      En deuxième lieu, en ce qui concerne le contexte dans lequel s’insère ladite disposition, il ressort du considérant 13 de la recommandation de 2003, sur laquelle se fonde, ainsi qu’il a été relevé au point 34 du présent arrêt, la définition de la notion de « PME », au sens de l’annexe I du règlement no 651/2014, que l’exclusion prévue à la même disposition englobe, dans l’intérêt de la sécurité juridique, les différentes entités publiques d’un État membre, afin d’éviter des distinctions arbitraires entre celles-ci.

50      Or, à cet égard, il y a lieu de relever, à l’instar de la Commission, que la directive 2006/111, dont l’objet est d’imposer aux États membres un certain nombre d’obligations en vue d’assurer la transparence des relations financières entre ces États et les entreprises publiques, définit, à son article 2, sous a), la notion de « pouvoirs publics » comme incluant, outre l’État, les autorités régionales et locales ainsi que toutes les autres collectivités territoriales.

51      En troisième lieu, en ce qui concerne l’objectif poursuivi par l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, il convient de rappeler que, ainsi qu’il a été relevé aux points 33 et 34 du présent arrêt, le critère d’indépendance vise à réserver les mesures favorables destinées aux PME aux entreprises qui n’ont pas accès à des ressources leur permettant de surmonter les obstacles liés à leur taille. Or, en raison des divers moyens, notamment économiques et financiers, qu’elles peuvent mobiliser, les entités et les autorités relevant des pouvoirs publics, quelles que soient leur nature ou leurs modalités d’organisation, sont susceptibles de permettre à une entreprise de surmonter de tels obstacles.

52      Il en résulte que la notion d’« organisme public », visée à ladite disposition, doit être comprise comme incluant toute entité ou autorité relevant des pouvoirs publics, y compris, les collectivités territoriales et les organismes créés pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général, dotés de la personnalité juridique et qui sont soit financés majoritairement, soit contrôlés directement ou indirectement par l’État, par des collectivités territoriales ou par d’autres organismes publics.

53      En l’occurrence, il incombe, dès lors, à la juridiction de renvoi, conformément à la jurisprudence rappelée au point 42 du présent arrêt, de déterminer, en tenant compte des dispositions nationales applicables, dont un certain nombre a été invoqué par EuroNorm et la Commission, mais dont l’interprétation ne relève pas de la compétence de la Cour, si l’université de Tübingen, l’institut d’enseignement supérieur de Reutlingen ainsi que la chambre de commerce et d’industrie de cette ville remplissent ces critères.

54      Lors de l’audience, NMI TT a fait valoir, à cet égard, qu’il ressort du « Guide de l’utilisateur pour la définition des PME », publié par la Commission au cours de l’année 2015, en particulier de la page 19 de ce document, que, selon cette institution, les universités, quel que soit le statut qui leur est conféré par le droit national, ne peuvent être considérées comme étant des « organismes publics » relevant de la règle générale d’exclusion prévue à l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014.

55      Toutefois, il convient de relever d’emblée que ce guide précise, à sa page 2, de manière tout aussi claire qu’explicite, qu’« il est dépourvu de force juridique et n’engage en aucune façon la Commission [...], la recommandation [de 2003] [étant] l’unique référence authentique permettant de déterminer les conditions relatives à la qualité de PME ». À plus forte raison, un tel guide non contraignant ne saurait lier la Cour.

56      En tout état de cause, il y a lieu de constater que, à la page 19 dudit guide, la Commission, contrairement à ce que suggère NMI TT, n’indique nullement que les universités ne seraient en aucun cas susceptibles de relever de la règle générale d’exclusion prévue à l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, mais se borne à rappeler que, ainsi qu’il ressort déjà des points 38 à 41 du présent arrêt, les universités, lorsqu’elles relèvent de la notion d’« organisme public », au sens de cette disposition, échappent à cette règle, pour autant qu’elles ne soient pas liées, au sens de l’article 3, paragraphe 3, de cette annexe, avec l’entreprise concernée, condition dont NMI TT a elle-même admis lors de l’audience, ainsi qu’il ressort du point 40 de cet arrêt, qu’elle n’était pas remplie en l’occurrence.

57      Pour le cas où la juridiction de renvoi parviendrait à la conclusion qu’une ou plusieurs des entités mentionnées au point 53 du présent arrêt constituent des organismes publics, au sens de l’article 3, paragraphe 4, de ladite annexe, il convient encore de préciser, en réponse aux interrogations soulevées par la juridiction de renvoi à cet égard, qu’il est indifférent, pour l’application de cette disposition, que les personnes nommées sur proposition de ces organismes publics siègent à titre bénévole au sein de l’entreprise concernée, dès lors que c’est en leur qualité de membres de ceux-ci qu’elles ont été proposées et nommées, ce qu’il incombe à cette juridiction de vérifier.

58      En conséquence, l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014 doit être interprété en ce sens que la notion d’« organisme public » figurant à cette disposition a vocation à inclure des entités, telles que des universités et des établissements d’enseignement supérieur ainsi qu’une chambre de commerce et d’industrie, dès lors que ces entités sont créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général, sont dotées de la personnalité juridique et sont soit financées majoritairement, soit contrôlées directement ou indirectement par l’État, par des collectivités territoriales ou par d’autres organismes publics. Il n’importe pas, pour l’application de ladite disposition, que les personnes nommées sur proposition de ces organismes publics siègent à titre bénévole au sein de l’entreprise concernée, dès lors que c’est en leur qualité de membres de ceux-ci qu’elles ont été proposées et nommées.

 Sur l’existence d’un contrôle, au sens de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014

59      Conformément à la jurisprudence rappelée au point 44 du présent arrêt, il y a lieu de prendre en considération les termes de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, ainsi que le contexte dans lequel celui-ci s’insère et les objectifs poursuivis par la réglementation dont il fait partie, afin de déterminer si l’existence d’un contrôle, au sens de cette disposition exige uniquement que des organismes publics détiennent conjointement, fût-ce indirectement, au moins 25 % du capital ou des droits de vote de l’entreprise concernée, conformément aux termes des statuts de l’entreprise qui exerce le contrôle direct sur celle-ci, ou s’il convient, en outre, d’examiner si ces organismes sont en mesure d’influencer et de coordonner l’exercice effectif par leurs représentants de leurs droits de vote ou si ces derniers tiennent effectivement compte des intérêts desdits organismes.

60      En premier lieu, en ce qui concerne les termes de l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, il convient de constater que cette disposition, conformément au considérant 13 de la recommandation de 2003, sur laquelle, ainsi qu’il a été relevé aux points 34 et 49 du présent arrêt, se fonde cette annexe, se réfère au seul degré de participation des organismes publics dans le capital ou les droits de vote de l’entreprise concernée, sans faire mention, en outre, du comportement effectif adopté par ces organismes ou leurs représentants.

61      En deuxième lieu, en ce qui concerne le contexte dans lequel s’insère ladite disposition, il convient de faire observer que l’article 3 de l’annexe I du règlement no 651/2014 prévoit explicitement, aux fins de déterminer si une entreprise est liée à une autre entreprise, la nécessité d’examiner si, concrètement, la première exerce effectivement une influence déterminante sur la seconde.

62      En particulier, cet article 3 prévoit, à son paragraphe 3, deuxième alinéa, une présomption d’absence d’influence dominante lorsque les investisseurs visés à son paragraphe 2, second alinéa, ne s’immiscent pas directement ou indirectement dans la gestion de l’entreprise considérée, « sans préjudice des droits qu’ils détiennent en leur qualité d’actionnaires ou d’associés ».

63      Inversement, ainsi qu’il ressort de son paragraphe 3, quatrième alinéa, ledit article 3 prévoit que des entreprises peuvent être considérées comme étant liées lorsque, du fait du rôle joué par une personne physique ou par un groupe de personnes physiques qui agissent de concert en se coordonnant afin d’exercer une influence sur les décisions commerciales des entreprises concernées, elles constituent une entité économique unique, alors même que ces entreprises n’entretiennent pas formellement l’une ou l’autre des relations visées au paragraphe 3, premier alinéa, de cet article (voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2014, HaTeFo, C‑110/13, EU:C:2014:114, points 34, 35 et 39, ainsi que ordonnance du 11 mai 2017, Bericap, C‑53/17, non publiée, EU:C:2017:370, point 17).

64      En revanche, il y a lieu de constater que le même article 3 ne comporte pas, à son paragraphe 4, de dispositions analogues s’agissant des organismes publics contrôlant, individuellement ou conjointement, au moins 25 % du capital ou des droits de vote d’une autre entreprise.

65      Or, la définition de la notion de « PME », au sens de l’annexe I du règlement no 651/2014, en ce qu’elle conduit à accorder aux entreprises relevant de cette notion des avantages, le plus souvent, par des règles apportant des exceptions aux règles générales, doit faire l’objet d’une interprétation stricte (voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2014, HaTeFo, C‑110/13, EU:C:2014:114, point 32).

66      En troisième lieu, en ce qui concerne l’objectif poursuivi par l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, il convient de relever que cette disposition vise, conformément au critère d’indépendance sur lequel repose, notamment, la notion de « PME », au sens de cette annexe, à assurer, ainsi qu’il ressort des points 32 à 39 du présent arrêt, que l’entreprise concernée dispose de la capacité de prendre des décisions commerciales de manière autonome.

67      Or, une situation qui se caractérise par l’existence, entre différentes entreprises, de liens structurels, en termes de participations et de droits de vote, exclut que ces entreprises puissent être considérées comme économiquement indépendantes l’une de l’autre, dès lors qu’elle aboutit à ce qu’une entreprise soit en mesure, indépendamment de son comportement réel, d’exercer une influence déterminante sur la prise de décisions par une autre entreprise (voir, par analogie, arrêt du 2 avril 2009, Glückauf Brauerei, C‑83/08, EU:C:2009:228, points 32 à 34).

68      Par ailleurs, il convient de faire observer que tant l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014, ainsi qu’il ressort, notamment, du considérant 30 de ce règlement et du considérant 13 de la recommandation de 2003, que ledit règlement lui-même, qui prévoit une exemption par catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur, sont destinés à accroître la clarté administrative et la sécurité juridique en assurant une surveillance efficace et simplifiée des règles de concurrence en matière d’aides d’État (voir, par analogie, arrêt du 29 juillet 2019, Bayerische Motoren Werke et Freistaat Sachsen/Commission, C‑654/17 P, EU:C:2019:634, point 141 ainsi que jurisprudence citée).

69      Or, la seule prise en compte, aux fins de déterminer si une entreprise est éligible aux règles plus favorables applicables en la matière aux PME, du degré de participation des organismes publics dans le capital ou les droits de vote de cette entreprise, sans qu’il soit besoin d’examiner, en outre, le comportement adopté concrètement par ces organismes ou leurs représentants, est clairement de nature à faciliter l’application par les autorités compétentes de la règle générale d’exclusion prévue à l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014.

70      Il ressort ainsi tant du libellé de cette disposition que du contexte dans lequel elle s’insère et de l’objectif poursuivi par celle-ci ainsi que par la réglementation dont elle fait partie que l’existence d’un contrôle, au sens de ladite disposition, se déduit du seul degré de participation des organismes publics dans le capital ou les droits de vote de l’entreprise concernée.

71      En conséquence, aux fins de l’existence d’un tel contrôle, il suffit que de tels organismes publics détiennent conjointement, fût-ce indirectement, au moins 25 % du capital ou des droits de vote de l’entreprise concernée, conformément aux statuts de l’entreprise qui exerce le contrôle direct sur cette dernière, sans qu’il soit nécessaire d’examiner, en outre, si ces organismes sont en mesure d’influencer et de coordonner l’exercice effectif par leurs représentants de leurs droits de vote ou si ces représentants tiennent effectivement compte des intérêts desdits organismes.

72      En l’occurrence, s’il est constant que le NMI-Institut détient 88,8 % des droits de vote dans NMI TT, il ressort de la décision de renvoi que les statuts du NMI-Institut ne réglementent pas la question de l’exercice de ces droits.

73      Toutefois, il apparaît que, conformément aux articles 2, 7 et 13 de ces statuts, le conseil de fondation, dont il ressort des débats tenus lors de l’audience devant la Cour que tous les membres, ainsi que NMI TT l’a elle-même indiqué explicitement, sont actuellement membres du directoire de cette société, est chargé, d’une part, de définir les principes régissant les travaux du NMI-Institut, concernant, notamment, l’exploitation des résultats de la recherche et la mise en œuvre de projets de recherche et de développement, et, d’autre part, dispose d’une série de pouvoirs consultatifs et décisionnels en matière de planification de contenu et de planification financière ainsi qu’en ce qui concerne la nomination, la révocation et la décharge du conseil de direction, le conseil de fondation étant, en outre, habilité à modifier les statuts du NMI-Institut et à dissoudre celui-ci.

74      Dans ces conditions, il semble, sous réserve, conformément à la jurisprudence rappelée au point 42 du présent arrêt, des vérifications à effectuer par la juridiction de renvoi, que les dispositions contenues dans les statuts du NMI-Institut sont de nature à conférer à des organismes publics, du fait de la présence de leurs représentants au sein du conseil de fondation, la détention indirecte de plus de 25 % des droits de vote dans NMI TT.

75      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux questions posées par la juridiction de renvoi que l’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement no 651/2014 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui exclut qu’une entreprise puisse être considérée comme une PME, dès lors que l’organe de l’entreprise qui en détient l’essentiel du capital, bien qu’il ne soit pas autorisé à en assurer la gestion quotidienne, est majoritairement composé de membres représentant des organismes publics, au sens de cette disposition, de sorte que ces derniers exercent conjointement, de ce seul fait, un contrôle indirect, au sens de celle-ci, sur la première entreprise, étant entendu que :

–        d’une part, la notion d’« organisme public » figurant à ladite disposition a vocation à inclure des entités, telles que des universités et des établissements d’enseignement supérieur ainsi qu’une chambre de commerce et d’industrie, dès lors que ces entités sont créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général, sont dotées de la personnalité juridique et sont soit financées majoritairement, soit contrôlées directement ou indirectement par l’État, par des collectivités territoriales ou par d’autres organismes publics, sans qu’il importe à cet égard que les personnes nommées sur proposition desdites entités siègent à titre bénévole au sein de l’entreprise concernée, dès lors que c’est en leur qualité de membres de celles-ci qu’elles ont été proposées et nommées, et

–        d’autre part, aux fins de l’existence d’un tel contrôle, il suffit que des organismes publics détiennent conjointement, fût-ce indirectement, au moins 25 % du capital ou des droits de vote de l’entreprise concernée, conformément aux termes des statuts de l’entreprise qui exerce le contrôle direct sur celle-ci, sans qu’il soit nécessaire d’examiner, en outre, si ces organismes sont en mesure d’influencer et de coordonner l’exercice effectif par leurs représentants de leurs droits de vote ou si ces représentants tiennent effectivement compte des intérêts desdits organismes.

 Sur les dépens

76      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) dit pour droit :

L’article 3, paragraphe 4, de l’annexe I du règlement (UE) no 651/2014 de la Commission, du 17 juin 2014, déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 [TFUE], doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui exclut qu’une entreprise puisse être considérée comme une petite et moyenne entreprise (PME), dès lors que l’organe de l’entreprise qui en détient l’essentiel du capital, bien qu’il ne soit pas autorisé à en assurer la gestion quotidienne, est majoritairement composé de membres représentant des organismes publics, au sens de cette disposition, de sorte que ces derniers exercent conjointement, de ce seul fait, un contrôle indirect, au sens de celle-ci, sur la première entreprise, étant entendu que :

–        d’une part, la notion d’« organismes publics » figurant à ladite disposition a vocation à inclure des entités, telles que des universités et des établissements d’enseignement supérieur ainsi qu’une chambre de commerce et d’industrie, dès lors que ces entités sont créées pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général, sont dotées de la personnalité juridique et sont soit financées majoritairement, soit contrôlées directement ou indirectement par l’État, par des collectivités territoriales ou par d’autres organismes publics, sans qu’il importe à cet égard que les personnes nommées sur proposition desdites entités siègent à titre bénévole au sein de l’entreprise concernée, dès lors que c’est en leur qualité de membres de celles-ci qu’elles ont été proposées et nommées, et

–        d’autre part, aux fins de l’existence d’un tel contrôle, il suffit que des organismes publics détiennent conjointement, fût-ce indirectement, au moins 25 % du capital ou des droits de vote de l’entreprise concernée, conformément aux termes des statuts de l’entreprise qui exerce le contrôle direct sur celle-ci, sans qu’il soit nécessaire d’examiner, en outre, si ces organismes sont en mesure d’influencer et de coordonner l’exercice effectif par leurs représentants de leurs droits de vote ou si ces représentants tiennent effectivement compte des intérêts desdits organismes.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.

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