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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> France v Commission (Judgment) French Text [2020] EUECJ T-479/11RENV (05 October 2020) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2020/T47911RENV.html Cite as: EU:T:2020:461, [2020] EUECJ T-479/11RENV, ECLI:EU:T:2020:461 |
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ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)
5 octobre 2020 (*)
« Aides d’État – Recherche pétrolière – Régime d’aides mis à exécution par la France ‐ Garantie implicite et illimitée de l’État conférée à l’IFPEN par l’octroi du statut d’EPIC – Avantage – Présomption d’existence d’un avantage – Proportionnalité »
Dans les affaires jointes T‑479/11 RENV et T‑157/12 RENV,
République française, représentée par M. P. Dodeller, en qualité d’agent,
partie requérante dans l’affaire T‑479/11 RENV,
IFP Énergies nouvelles, établi à Rueil-Malmaison (France), représenté par Mes E. Lagathu et É. Barbier de La Serre, avocats,
partie requérante dans l’affaire T‑157/12 RENV,
contre
Commission européenne, représentée par MM. B. Stromsky et D. Grespan, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision 2012/26/UE de la Commission, du 29 juin 2011, concernant l’aide d’État C 35/08 (ex NN 11/08) accordée par la France à l’établissement public « Institut français du pétrole » (JO 2012, L 14, p. 1),
LE TRIBUNAL (huitième chambre),
composé de M. A. M. Collins, président, Mme M. Kancheva (rapporteure) et M. G. De Baere, juges,
greffier : M. L. Ramette, administrateur,
vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 28 novembre 2019,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Par leurs recours, la République française et IFP Énergies nouvelles (ci-après l’« IFPEN »), dénommé antérieurement au 13 juillet 2010 Institut français du pétrole, demandent l’annulation intégrale de la décision 2012/26/UE de la Commission, du 29 juin 2011, concernant l’aide d’État C 35/08 (ex NN 11/08) accordée par la France à l’établissement public « Institut français du pétrole » (JO 2012, L 14, p. 1, ci-après la « décision attaquée »).
2 L’IFPEN est un établissement public de recherche chargé de trois missions d’intérêt général, à savoir une mission de recherche et de développement dans les domaines de la prospection pétrolière et gazière, des technologies de raffinage et de la pétrochimie, une mission de formation d’ingénieurs et de techniciens et une mission d’information et de documentation des secteurs (considérant 14 de la décision attaquée).
3 Par ailleurs, l’IFPEN détient directement et indirectement le contrôle de trois sociétés commerciales, Axens, Beicip-Franlab et Prosernat, avec lesquelles il a conclu des accords exclusifs de recherche et de licence.
4 Jusqu’en 2006, l’IFPEN était constitué sous forme d’une personne morale de droit privé, placée, conformément aux dispositions internes françaises, sous le contrôle économique et financier du gouvernement français. En vertu de la loi 2005-781, du 13 juillet 2005, de programme fixant les orientations de la politique énergétique (JORF du 14 juillet 2005, p. 11570), l’IFPEN a été transformé, avec effet au 6 juillet 2006, en une personne morale de droit public, plus précisément en établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) (considérants 21 à 23 de la décision attaquée).
5 Il ressort du dossier, d’une part, que cette transformation a été motivée par la volonté des autorités françaises de mettre en cohérence la nature et le mode de fonctionnement de l’IFPEN avec son mode de financement. En effet, dans la mesure où l’IFPEN était principalement financé par une dotation budgétaire, la transformation avait pour objectif de réduire le décalage entre le statut privé de cet établissement et la provenance publique d’une partie importante de ses ressources. D’autre part, cette transformation s’inscrivait dans le processus d’uniformisation des statuts des établissements français de recherche.
6 En ce qui concerne le statut juridique des EPIC en droit français, il importe de préciser que ces établissements constituent une catégorie de personnes morales de droit public exerçant des activités de nature économique. Ils disposent d’une personnalité juridique distincte de l’État et d’une autonomie financière ainsi que de compétences d’attribution spéciales, lesquelles incluent généralement l’exercice d’une ou de plusieurs missions de service public. Selon le droit français, les personnes morales de droit public ne relèvent pas du droit commun des procédures d’insolvabilité en vertu du principe général d’insaisissabilité des biens publics. L’inapplicabilité des procédures d’insolvabilité aux EPIC a été confirmée par la jurisprudence de la Cour de cassation française formulée sur la base de la loi 85-98, du 25 janvier 1985, relative au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises (JORF du 26 janvier 1985, p. 1097).
7 Les spécificités du statut juridique des EPIC ont attiré l’attention de la Commission européenne, qui, dans la décision 2010/605/UE, du 26 janvier 2010, concernant l’aide d’État C 56/07 (ex E 15/05) accordée par la France à La Poste (JO 2010, L 274, p. 1, ci-après la « décision La Poste »), a pour la première fois examiné ce statut au regard des règles régissant les aides d’État dans l’Union européenne. Dans cette décision, la Commission a conclu que, du fait de leur statut, les EPIC bénéficiaient d’une garantie implicite et illimitée de l’État sur leurs activités économiques mobilisant des ressources publiques. Cette conclusion était fondée sur les éléments suivants (considérant 25 de la décision attaquée et considérants 20 à 37 de la décision La Poste) :
– les procédures d’insolvabilité de droit commun ne sont pas applicables aux EPIC ;
– en revanche, les EPIC sont soumis aux dispositions de la loi 80‑539, du 16 juillet 1980, relative aux astreintes prononcées en matière administrative et à l’exécution des jugements par les personnes morales de droit public (JORF du 17 juillet 1980, p. 1799) et de ses textes d’application. Or, celles-ci désignent expressément l’État comme l’autorité compétente pour le recouvrement des dettes des établissements publics, lui confèrent des pouvoirs importants tels que le mandatement d’office et la création de ressources suffisantes, et organisent un principe de responsabilité en dernier recours de l’État pour les dettes des personnes morales de droit public ;
– dans l’hypothèse d’une dissolution d’un EPIC, le principe du transfert des dettes à l’État ou à une autre entité publique est généralement applicable, de sorte que tout créancier d’un EPIC est assuré de ne jamais perdre la créance qu’il détient sur ce type d’établissement ;
– les EPIC pourraient disposer d’un accès privilégié aux « comptes d’avance du Trésor ».
8 Dans la décision La Poste, la Commission a considéré que la garantie implicite et illimitée de l’État inhérente au statut d’EPIC de La Poste constituait une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, en ce qu’elle permettait à La Poste d’obtenir des conditions de crédit plus favorables que celles qu’elle aurait obtenues si elle avait été jugée sur ses seuls mérites (considérants 256 à 300 de la décision La Poste).
9 C’est dans le contexte de la procédure qui a conduit à l’adoption de la décision La Poste que, au cours de l’année 2006, les autorités françaises ont informé la Commission de la transformation de l’IFPEN en EPIC. Cette information a été transmise à la Commission dans le cadre d’une procédure ouverte en 2005 et portant sur l’examen, au regard des règles régissant les aides d’État, d’un financement public accordé à l’IFPEN par les autorités françaises (considérants 1 à 3 de la décision attaquée).
10 La Commission a alors décidé de séparer l’examen de la question de savoir si la transformation de l’IFPEN en EPIC pouvait constituer une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, de l’examen du financement public de l’IFPEN. Ainsi, le 16 juillet 2008, elle a clôturé l’examen du financement public accordé à l’IFPEN par adoption de la décision 2009/157/CE concernant la mesure d’aide mise à exécution par la France en faveur du groupe IFPEN [C 51/05 (ex NN 84/05)] (JO 2009, L 53, p. 13). Le même jour, par une décision publiée au Journal officiel de l’Union européenne (JO 2008, C 259, p. 12, ci-après la « décision d’ouverture de la procédure formelle »), elle a décidé d’ouvrir une procédure formelle d’examen relative à la garantie illimitée de l’État en faveur de l’IFPEN et a invité les parties intéressées à présenter des observations.
11 Dans la décision d’ouverture de la procédure formelle, la Commission a relevé, notamment, que l’IFPEN tirait un avantage de sa transformation en EPIC principalement au travers des conditions de financement réputées plus favorables dont il bénéficiait sur les marchés financiers. Cet avantage, financé au moyen des ressources de l’État, constituerait, selon la Commission, une aide d’État au sens de sa communication sur l’application des articles [107] et [108 TFUE] aux aides d’État sous forme de garanties (JO 2008, C 155, p. 10, ci-après la « communication sur les garanties »).
12 Les autorités françaises ont présenté leurs observations sur cette décision par lettre du 14 octobre 2008. Par la suite, elles ont encore répondu à des questions supplémentaires de la Commission et fourni des informations concernant les relations entre l’IFPEN et différents groupes de créanciers. Une réunion entre la Commission et les autorités françaises a également été organisée le 20 mai 2010.
13 En outre, un concurrent d’Axens, UOP Limited, qui est une société anglaise établie à Guilford (Royaume-Uni), a présenté ses commentaires en réponse à la décision d’ouverture de la procédure formelle. Les autorités françaises ont pu présenter leurs observations sur ces commentaires.
14 Le 29 juin 2011, la Commission a adopté la décision attaquée.
15 En premier lieu, en appliquant le même raisonnement que celui développé dans la décision La Poste, et, par ailleurs, en opérant de nombreux renvois vers ladite décision (voir, notamment, les considérants 98 et suivants de la décision attaquée), dans la décision attaquée, la Commission a considéré que la transformation de l’IFPEN en EPIC, en juillet 2006, a conféré à celui-ci le bénéfice d’une garantie illimitée et implicite de l’État. La Commission a estimé, en outre, que ladite garantie a induit un transfert de ressources de l’État au sens du point 2.1 de la communication sur les garanties, dans la mesure où l’IFPEN ne payait aucune prime pour cette garantie. De cette façon, il existait, selon la Commission, à la fois un avantage pour l’entreprise et une ponction sur les ressources publiques, puisque l’État renonçait à la rémunération qui normalement accompagnait les garanties. En outre, selon la Commission, la garantie créerait un risque d’engagement potentiel et futur sur les ressources de l’État, ce dernier pouvant se voir obligé de payer les dettes de l’IFPEN (considérants 134 et 135 de la décision attaquée).
16 En revanche, en ce qui concerne les sociétés filiales de l’IFPEN, la Commission a observé que, en tant que sociétés commerciales, elles étaient soumises aux procédures d’insolvabilité de droit commun et que, en outre, leurs créanciers ne pouvaient pas engager automatiquement la responsabilité de leur actionnaire principal. Elle en a conclu que ces filiales n’étaient pas couvertes par la garantie illimitée de l’État dont bénéficiait l’IFPEN du fait de son statut d’EPIC (considérants 176 et 177 de la décision attaquée).
17 En deuxième lieu, la Commission a précisé que la garantie illimitée de l’État découlant du statut d’EPIC de l’IFPEN pouvait constituer une aide d’État pour autant qu’elle couvrait des activités économiques de celui-ci. Elle a donc décidé de limiter la portée de son examen de l’existence de l’aide d’État aux seules activités ayant une nature économique menées par l’IFPEN, par opposition, d’une part, aux activités de ses filiales, qui n’étaient pas couvertes par ladite garantie, et, d’autre part, aux activités non économiques de l’IFPEN. La Commission a indiqué que les activités économiques de l’IFPEN se limitaient aux activités de recherche contractuelle qu’il menait pour le compte de ses filiales et pour le compte de tiers, aux activités de transfert de technologies dans les domaines d’activités exclusifs des filiales Axens, Prosernat et Beicip-Franlab ainsi qu’aux activités de location d’infrastructures, de mise à disposition de personnel et de fourniture de services juridiques au profit de ses filiales (considérants 187 et 189 à 191 de la décision attaquée).
18 En troisième lieu, la Commission a examiné, notamment, la question de savoir si la garantie implicite et illimitée en cause a apporté un avantage sélectif au groupe constitué par l’IFPEN et ses filiales (ci-après le « groupe IFPEN »).
19 À cet égard, la Commission a décidé, dans un premier temps, d’examiner la question de savoir si l’IFPEN a pu lui-même tirer un avantage de la garantie implicite et illimitée de l’État et, dans un second temps, de vérifier s’il a pu transférer cet avantage à ses filiales (considérant 192 de la décision attaquée).
20 En ce qui concerne l’avantage dont aurait bénéficié l’IFPEN, la Commission a décidé d’examiner les relations de cet EPIC avec les institutions bancaires et financières, les fournisseurs et les clients (considérants 193 et 194 de la décision attaquée).
21 Tout d’abord, en ce qui concerne les relations de l’IFPEN avec les institutions bancaires et financières, la Commission a conclu que cet établissement n’avait pas tiré d’avantage économique réel de la garantie de l’État inhérente à son statut d’EPIC pendant la période allant de sa transformation en EPIC, au mois de juillet 2006, jusqu’à la fin de l’année 2010 (ci-après la « période concernée ») (considérants 195 à199 de la décision attaquée). La Commission a toutefois souligné qu’une telle conclusion ne valait que pour le passé, puisqu’elle ne pouvait présumer des comportements futurs des opérateurs de marché, ni de l’évolution de leur perception de l’impact de la garantie de l’État sur le risque de défaut de l’IFPEN (considérant 200 de la décision attaquée). En conséquence, la Commission a décidé d’imposer à la République française l’obligation de lui communiquer des informations relatives au niveau et aux conditions d’endettement de l’IFPEN et de rapporter la preuve que ces prêts étaient conformes aux conditions du marché ou d’ajouter l’équivalent de l’aide correspondante dans l’estimation des montants maximaux des effets de la garantie. La Commission a indiqué que les obligations imposées à la République française et l’engagement pris par cette dernière d’insérer pour chaque opération, dans le contrat de financement, une mention écrite excluant que l’État se substitue financièrement à l’IFPEN pour le paiement de la créance en cas d’insolvabilité de celui-ci, sans régler tous les problèmes de la garantie, permettrait de faire jouer l’exception de risque accepté et de limiter les éventuelles répercussions négatives de la garantie (considérants 201 et 202 de la décision attaquée).
22 Ensuite, s’agissant des relations de l’IFPEN avec ses fournisseurs, la Commission a conclu que l’IFPEN avait bénéficié d’un avantage économique réel, consistant en une baisse des prix pratiqués par ses fournisseurs. Cette baisse de prix aurait résulté d’une appréciation plus favorable par ces derniers du risque de défaut de l’IFPEN, en raison de la garantie illimitée de l’État que lui conférait son statut d’EPIC (considérants 203 à 215 de la décision attaquée).
23 Enfin, pour ce qui est des relations de l’IFPEN avec ses clients, la Commission a considéré que, compte tenu de la garantie apportée par l’État à l’IFPEN, ses clients étaient assurés que ce dernier ne serait jamais en situation de liquidation judiciaire et serait donc toujours en mesure de remplir ses obligations contractuelles, ou, dans l’hypothèse où il ne le ferait pas, d’être indemnisés pour ce manquement. Or, en l’absence de cette garantie, un client souhaitant bénéficier du même niveau de protection serait contraint de souscrire une garantie de bonne fin auprès d’un intermédiaire financier. Dès lors, l’IFPEN aurait bénéficié d’un avantage économique réel, consistant en l’absence de paiement d’une prime correspondant à une garantie de bonne fin ou, à tout le moins, à une garantie de meilleur effort, avantage qu’il aurait offert à ses clients (considérants 216 à 237 de la décision attaquée).
24 La Commission a considéré que l’avantage économique tiré par l’IFPEN du fait de la garantie de l’État était sélectif, dans la mesure où les concurrents de l’IFPEN, soumis aux procédures d’insolvabilité de droit commun, ne bénéficiaient pas d’une garantie de l’État comparable (considérants 215 et 238 de la décision attaquée).
25 En ce qui concerne un éventuel transfert de l’avantage créé pour l’IFPEN vers ses filiales de droit privé, en se référant à l’analyse des relations entre l’IFPEN et ses filiales effectuée dans la décision 2009/157, la Commission a conclu que, si les relations entre l’IFPEN et Beicip-Franlab étaient réalisées dans des conditions normales de marché, les filiales Axens et Prosernat avaient pu, dans une certaine mesure, bénéficier de l’avantage économique né pour l’IFPEN du fait de la garantie que celui-ci tirait de son statut d’EPIC. Elle a qualifié cet avantage de sélectif au motif que les concurrents d’Axens et de Prosernat n’avaient pas d’accès aux technologies et aux moyens humains et matériels de l’IFPEN dans des conditions aussi favorables (considérants 226 et 243 à 250 de la décision attaquée).
26 En quatrième lieu, la Commission a examiné la question de la distorsion de la concurrence et de l’affectation des échanges. La Commission a relevé que la garantie de l’État était « […] susceptible de conduire à une réduction des coûts de fonctionnement de l’[IFPEN] pour les prestations qu’il délivre à des tiers (recherche contractuelle), et à une réduction du coût de fonctionnement d’Axens et de Prosernat pour les prestations qu’elles acquièrent de leur société mère (recherche dans leur domaine exclusif, recherche contractuelle, mise à disposition de personnel et de matériel, prestation de services administratifs), ce qui a pour effet de favoriser le groupe IPF[EN] et donc de fausser la concurrence au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE ». Selon la Commission, dans la mesure où les marchés sur lesquels le groupe IFPEN est actif sont largement ouverts aux échanges au sein de l’Union, l’octroi de la garantie de l’État à l’IFPEN est susceptible d’avoir un impact défavorable sur les entreprises concurrentes qui ont, ou qui souhaitent développer, des activités économiques similaires sur les marchés concernés et, partant, de fausser la concurrence et d’affecter les échanges au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (considérants 251 à 153).
27 La Commission en a conclu que cette garantie constituait une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (considérant 255).
28 En cinquième lieu, la Commission a examiné la compatibilité de cette aide en distinguant, d’une part, l’aide dans le domaine de la recherche contractuelle et des prestations de services menées par l’IFPEN tant pour le compte de tiers que pour le compte de ses filiales et, d’autre part, l’aide au groupe IFPEN dans les domaines d’activité exclusifs d’Axens et de Prosernat. Elle a conclu que l’aide d’État accordée au groupe IFPEN était compatible avec le marché intérieur, sous réserve de certaines conditions, précisées dans la décision attaquée.
29 Les points essentiels du dispositif de la décision attaquée sont reproduits ci-après :
« Article premier
1. L’octroi par la France du statut d’établissement public à caractère industriel et commercial à l’[IFPEN] a conféré à ce dernier, à compter du 7 juillet 2006, une garantie publique illimitée (ci-après la “garantie [de l]’État”) sur l’ensemble de ses activités.
2. La couverture par la garantie [de l]’État des activités non économiques de l’[IFPEN], en particulier de ses activités de formation en vue de ressources humaines accrues et plus qualifiées, ses activités de [recherche et de développement] indépendantes en vue de connaissances plus étendues et d’une meilleure compréhension, et de ses activités de diffusion des résultats de recherche, ne constitue pas une aide d’État au titre de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.
3. La couverture par la garantie [de l]’État des activités de transferts technologiques menées par l’[IFPEN] dans les domaines prévus par la convention exclusive de développement, de commercialisation et d’utilisation conclue avec sa filiale Beicip-Franlab ne constitue pas une aide d’État au titre de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.
4. La couverture par la garantie [de l]’État des activités de transferts technologiques menées par l’[IFPEN] dans les domaines prévus par les conventions exclusives conclues avec ses filiales Axens et Prosernat mentionnés à l’article 3, paragraphe 1, de la décision [2009/157] constitue une aide d’État au titre de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.
5. La couverture par la garantie [de l]’État des prestations de recherche contractuelle et de services menées par l’[IFPEN], tant pour le compte de tiers que pour le compte des filiales, constitue une aide d’État au titre de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.
[…]
Article 3
Pour la période comprise entre le 7 juillet 2006 et le 31 décembre 2009, la couverture par la garantie [de l]’État des activités économiques mentionnées à l’article premier, paragraphes 4 et 5, de la présente décision, a constitué une aide compatible avec le marché intérieur.
Article 4
À compter du 1er janvier 2010, et jusqu’au terme des accords exclusifs entre l’[IFPEN] et ses filiales Axens et Prosernat mentionnés à l’article 3, paragraphe 1, de la décision [2009/157], la couverture par la garantie [de l]’État des activités économiques mentionnées à l’article premier, paragraphe 4, de la présente décision, constitue une aide compatible avec le marché intérieur, sous réserve du respect des conditions prévues aux articles 5 et 6 de la présente décision.
Article 5
1. Le rapport financier annuel mentionné à l’article 4, paragraphe 2, de la décision [2009/157] comporte, outre les éléments déjà mentionnés à l’article 5, paragraphe 1, de ladite décision, les éléments listés aux paragraphes 2, 3 et 4 du présent article.
2. Le rapport financier annuel comporte le montant, le taux d’intérêt et les conditions contractuelles des emprunts souscrits par l’[IFPEN] au cours de la période annuelle considérée, ainsi qu’une estimation de l’équivalent-subvention brut de l’éventuelle bonification d’intérêts liée à la garantie [de l]’État, sauf à apporter la preuve que ces contrats de prêts sont conformes aux conditions normales du marché, soit en comparant leurs conditions à celles obtenues par l’[IFPEN] avant son changement de statut, soit sur la base d’une méthodologie plus précise préalablement approuvée par la Commission.
3. Le rapport financier annuel comporte le montant des biens et services acquis par l’[IFPEN] auprès de fournisseurs pour mener des prestations économiques mentionnées à l’article premier, paragraphes 4 et 5, de la présente décision, au cours de la période annuelle considérée, ainsi qu’une estimation maximale de l’équivalent-subvention brut de l’aide résultant d’une appréciation plus favorable par les fournisseurs du risque de défaillance de l’entreprise. Cette estimation est réalisée soit en appliquant un taux forfaitaire de 2,5 % au montant des acquisitions réalisées, soit sur la base d’une méthodologie plus précise préalablement approuvée par la Commission.
4. Le rapport financier annuel comporte le montant des activités économiques, mentionnées à l’article premier, paragraphes 4 et 5, de la présente décision, réalisées par l’[IFPEN] au cours de la période annuelle considérée, ainsi qu’une estimation maximale de l’équivalent-subvention brut de l’aide résultant de l’absence de paiement d’une prime correspondant à une garantie de bonne fin, ou à tout le moins, de meilleur effort, offerte aux bénéficiaires desdites prestations économiques. Cette estimation est réalisée soit en appliquant un taux forfaitaire de 5 % au montant des prestations réalisées, soit sur la base d’une méthodologie plus précise préalablement approuvée par la Commission.
Article 6
1. Le montant total des fonds publics alloués aux activités de l’[IFPEN] dans les domaines d’activité exclusifs d’Axens et de Prosernat, y compris l’impact maximal de la garantie [de l]’État tel qu’estimé à l’article 5, paragraphes 2, 3 et 4, de la présente décision, devra être inférieur à l’intensité maximale autorisée par l’Encadrement communautaire des aides d’État à la recherche, au développement et à l’innovation.
2. En cas de dépassement du seuil mentionné au paragraphe 1 du présent article, l’excédent d’aide sera le cas échéant remboursé par la filiale Axens ou Prosernat concernée à l’[IFPEN].
Article 7
À compter du 1er janvier 2010, la couverture par la garantie [de l]’État des activités économiques mentionnées à l’article premier, paragraphe 5, constitue une aide d’État compatible avec le marché intérieur sous réserve du respect des conditions prévues à l’article 8 de la présente décision.
Article 8
1. Les activités de recherche contractuelle et de prestations de services réalisées par l’[IFPEN], mentionnées à l’article premier, paragraphe 5, de la présente décision, doivent demeurer accessoires à son activité principale de recherche publique indépendante.
[…]
3. La France remet chaque année à la Commission un rapport sur les activités de recherche contractuelle et de prestations de services menées par l’[IFPEN], qui précise le ratio de leur montant dans le budget consacré par l’[IFPEN] à ses activités de recherche publique indépendante.
Article 9
1. Les autorités françaises et l’[IFPEN] font porter la mention suivante, pour chaque opération, dans le contrat de financement (pour tout instrument couvert par un contrat) :
“L’émission/le programme/l’emprunt ne bénéficient d’aucune garantie [de l]’aucune sorte, directe ou indirecte, de la part de l’État. En cas d’insolvabilité, l’État ne serait pas tenu de se substituer financièrement à l’[IFPEN] pour le paiement de la créance.”
2. Les autorités françaises font insérer une clause analogue, écartant la responsabilité de l’État, dans tout contrat relatif aux prestations de recherche contractuelle ou de services mentionnées à l’article premier, paragraphe 5, de la présente décision.
3. Les autorités françaises font insérer une clause analogue, écartant la responsabilité de l’[IFPEN] et de l’État, dans tout contrat impliquant une créance conclu par les sociétés anonymes Axens, Beicip-Franlab et Prosernat.
4. L’[IFPEN] s’abstient de délivrer toute forme de caution, aval, garantie, lettre d’intention ou de confort au bénéfice des sociétés anonymes Axens, Beicip-Franlab et Prosernat qui serait non conforme aux conditions normales du marché.
[…] »
Procédures antérieures devant le Tribunal et la Cour
30 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 septembre 2011, la République française a introduit un recours contre la décision attaquée, enregistré sous le numéro T‑479/11.
31 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 avril 2012, l’IFPEN a introduit un recours contre la décision attaquée enregistré sous le numéro T‑157/12.
32 Par ordonnance du 2 décembre 2013, après avoir entendu les parties, le président de la huitième chambre du Tribunal a suspendu la procédure dans les affaires ayant donné lieu, depuis lors, à l’arrêt du 26 mai 2016, France et IFP Énergies nouvelles/Commission (T‑479/11 et T‑157/12, ci-après l’« arrêt initial », EU:T:2016:320), jusqu’à la décision de la Cour mettant fin à l’instance dans l’affaire ayant donné lieu, depuis lors, à l’arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217).
33 La Cour ayant rejeté, par arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217), le pourvoi introduit par la République française à l’encontre de l’arrêt du 20 septembre 2012, France/Commission (T‑154/10, EU:T:2012:452), par lequel le Tribunal avait rejeté le recours de cette dernière à l’encontre de la décision La Poste, le Tribunal a demandé à la République française, à l’IFPEN et à la Commission de présenter leurs observations sur les conséquences qu’il convenait de tirer de l’arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217), pour les recours dans les affaires ayant donné lieu, depuis lors, à l’arrêt initial.
34 Par lettre du 5 mai 2014, la République française a renoncé aux moyens par lesquels elle contestait l’existence d’une garantie implicite et illimitée de l’État inhérente au statut d’EPIC, ainsi que le lien de connexité entre le prétendu avantage bénéficiant à l’IFPEN au titre de ladite garantie et le transfert de ressources d’État. Par lettre du même jour, l’IFPEN a également renoncé au moyen par lequel il contestait l’existence d’une garantie implicite et illimitée de l’État inhérente au statut d’EPIC.
35 Par décision du 8 septembre 2015, après avoir entendu les parties, le président de la huitième chambre du Tribunal a joint les affaires ayant donné lieu, depuis lors, à l’arrêt initial aux fins de la phase orale de la procédure et de la décision mettant fin à l’instance.
36 Les parties aux affaires jointes ont été entendues en leurs plaidoiries et leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l’audience qui s’est déroulée le 8 octobre 2015.
37 Par l’arrêt initial, prononcé le 26 mai 2016, le Tribunal a accueilli partiellement les recours introduits par la République française et par l’IFPEN et a annulé la décision attaquée en ce qu’elle avait qualifié d’« aide d’État », au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, la garantie découlant du statut d’EPIC de l’IFPEN et déterminé les conséquences de cette qualification. Le Tribunal a rejeté les recours pour le surplus.
38 En particulier, le Tribunal a jugé que, s’agissant de la définition de l’avantage dans la relation de l’IFPEN avec ses fournisseurs et ses clients, la Commission avait violé son obligation de motivation ainsi que son obligation de rapporter la preuve de cet avantage et commis des erreurs de droit en choisissant de recourir à l’affacturage et à la garantie de bonne fin pour calculer le montant de l’avantage en question. Le Tribunal a également jugé que, pour rapporter la preuve de cet avantage, la Commission ne pouvait pas recourir à la présomption d’avantage conféré à un EPIC par la garantie implicite et illimitée de l’État attachée à son statut, établie par la Cour dans l’arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217). Le Tribunal a en effet jugé que, d’une part, l’hypothèse sur laquelle reposait cette présomption n’était pas plausible s’agissant de la relation entre l’IFPEN et ses fournisseurs et, d’autre part, la Commission n’ayant pas défini l’avantage qui découlerait de la garantie pour l’IFPEN dans ses relations avec ses clients, la présomption dont elle entendait se prévaloir était dépourvue d’objet. Au surplus, le Tribunal a jugé que cette présomption d’avantage était limitée aux opérations qui impliquent un financement, un prêt ou plus largement un crédit et ne pouvaient donc pas s’étendre aux relations d’un EPIC avec ses fournisseurs et ses clients. Le Tribunal a également jugé que, si la Commission pouvait se prévaloir de la présomption établie par la Cour dans l’arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217) pour rapporter la preuve de l’existence de l’avantage que l’IFPEN tirait de son statut d’EPIC dans ses relations avec les institutions bancaires et financières, cette présomption avait en l’espèce été renversée. Le Tribunal a en effet relevé que, depuis la transformation de l’IFPEN en EPIC, en juillet 2006, jusqu’à la fin de la période examinée dans la décision attaquée, à savoir la fin de l’année 2010, l’IFPEN n’avait tiré de son statut d’EPIC aucun avantage économique réel prenant la forme de conditions de crédit plus favorables qui lui auraient été accordées par les institutions bancaires et financières. Le Tribunal a également considéré que, dès lors que la présomption avait été renversée pour la période considérée, elle ne pouvait pas à nouveau être invoquée pour rapporter la preuve que la garantie en question conférerait un avantage à l’IFPEN dans ses relations avec les institutions bancaires et financières dans le futur sans un changement substantiel des circonstances dans lesquelles elle avait été renversée. À cet égard, le Tribunal a estimé que la Commission ne pouvait pas se prévaloir de la simple possibilité statutaire de s’endetter pour considérer que l’avantage futur pour l’IFPEN pouvait être établi au moyen de la présomption.
39 À la suite du pourvoi de la Commission, la Cour, par son arrêt du 19 septembre 2018, Commission/France et IFP Énergies nouvelles (C‑438/16 P, ci-après l’« arrêt sur pourvoi », EU:C:2018:737), a annulé l’arrêt initial et a renvoyé l’affaire devant le Tribunal.
40 Ainsi, la Cour a accueilli le deuxième moyen invoqué par la Commission en estimant que le Tribunal avait commis des erreurs de droit en jugeant que la possibilité de se prévaloir de la présomption établie dans l’arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217), reposait sur l’existence d’effets réels au profit du bénéficiaire de la garantie et que, en ce qui concerne les relations entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières, cette présomption avait été renversée. La Cour a précisé que la présomption en question ne pouvait être renversée que dans la mesure où il était démontré que, compte tenu du contexte économique et juridique dans lequel s’insérait la garantie rattachée au statut de l’EPIC concerné, ce dernier n’avait pas obtenu dans le passé et, selon toute plausibilité, n’obtiendrait pas dans l’avenir un quelconque avantage économique réel de cette garantie.
41 La Cour a également accueilli le troisième moyen de la Commission. La Cour a ainsi jugé que le Tribunal avait commis une erreur de droit en jugeant que la présomption établie dans l’arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217), était limitée aux relations qui impliquent une opération de financement, un prêt ou, plus largement, un crédit de la part du créancier d’un EPIC, notamment aux relations entre cet EPIC et les institutions bancaires et financières. Toutefois, la Cour a précisé que, la présomption établie dans l’arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217), étant fondée sur l’hypothèse selon laquelle, grâce à la garantie attachée à son statut, l’EPIC concerné bénéficiait ou pouvait bénéficier de conditions financières plus avantageuses que celles qui étaient normalement consenties sur les marchés financiers, cette présomption ne pouvait être appliquée aux relations de l’EPIC avec ses fournisseurs et ses clients que si de telles conditions se présentaient dans les relations avec ces derniers sur les marchés intéressés, ce qu’il appartenait à la Commission de vérifier.
42 Par ailleurs, la Cour a rejeté l’intégralité du premier moyen de la Commission. En particulier, elle a considéré que le Tribunal n’avait pas commis d’erreur de droit en jugeant que, dans la mesure où la transformation de l’IFPEN en EPIC pouvait être qualifiée d’« aide d’État », elle constituait une aide individuelle au sens de l’article 1er, sous e), du règlement n° 659/1999.
43 La Cour a également observé que, contrairement à ce que faisait valoir la Commission, la République française et l’IFPEN avaient bien contesté, à plusieurs reprises et de manière suffisamment détaillée, les conclusions de la Commission portant sur l’existence d’un avantage pour l’IFPEN dans ses relations avec les institutions bancaires et financières.
Procédure et conclusions des parties après renvoi
44 Par décision du 19 septembre 2018, le Tribunal a joint les affaires T‑479/11 RENV et T‑157/12 RENV aux fins de la phase écrite de la procédure, de l’éventuelle phase orale de cette dernière et de la décision mettant fin à l’instance. Ces affaires ont été attribuées à la huitième chambre du Tribunal.
45 Conformément à l’article 217, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, la République française et l’IFPEN ainsi que la Commission ont chacun déposé des observations écrites. Les observations de l’IFPEN ont été déposées le 28 novembre 2018, tandis que celles de la République française et celles de la Commission ont été déposées le 29 novembre 2018.
46 Conformément à l’article 217, paragraphe 3, du règlement de procédure, la République française et l’IFPEN ainsi que la Commission ont également chacun déposé un mémoire complémentaire le 21 février 2019.
47 Par courrier du 12 mars 2019, l’IFPEN a demandé la tenue d’une audience.
48 Dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure, le Tribunal a posé des questions écrites aux parties. Les parties ont répondu dans le délai imparti.
49 Le 28 novembre 2019, les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et ont répondu aux questions du Tribunal.
50 La République française conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée dans sa totalité ;
– condamner la Commission aux dépens.
51 L’IFPEN conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– à titre principal, annuler la décision attaquée ;
– à titre subsidiaire, annuler les parties viciées du dispositif de la décision attaquée ;
– condamner la Commission aux dépens.
52 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours comme non fondé ;
– condamner la République française et l’IFPEN aux dépens de l’instance.
En droit
53 Dans l’affaire T‑479/11, la République française invoque désormais deux moyens au soutien de son recours. Le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, en ce que la Commission n’a pas établi à suffisance de droit l’existence d’une aide d’État. Le second moyen est tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, en ce que la Commission a méconnu la notion d’avantage sélectif. Par ce moyen, divisé en deux branches, d’une part, la République française soutient que la Commission a conclu erronément que l’existence d’une garantie créerait un avantage au profit de l’IFPEN tant dans ses relations avec ses fournisseurs et ses clients que dans ses relations avec les institutions bancaires et financières. D’autre part, et à titre subsidiaire, elle conteste les conclusions de la Commission relatives au transfert dudit avantage aux filiales de droit privé d’IFPEN, Axens et Prosernat.
54 Dans l’affaire T‑157/12, l’IFPEN invoque désormais quatre moyens au soutien de son recours.
55 Le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, en ce que la Commission n’a pas établi l’existence d’un avantage économique réel en faveur de l’IFPEN et de ses filiales. Par ce moyen, divisé en trois branches, l’IFPEN soutient, tout d’abord, que la Commission n’est pas parvenue à démontrer, dans le respect du standard de preuve imposé par la jurisprudence, l’existence d’un avantage économique réel né en sa faveur du fait de la garantie en cause, notamment en ce qui concerne ses relations avec les fournisseurs et ses relations avec les clients. Ensuite, il soutient que la Commission n’a pas démontré à suffisance de droit le transfert dudit avantage économique vers ses filiales de droit privé Axens et Prosernat. Enfin, il estime qu’il n’existe pas de lien de connexité suffisant entre ledit avantage économique et le transfert de ressources de l’État provenant de la garantie en cause.
56 Le deuxième moyen est tiré d’une violation de la communication sur les garanties ou, à titre subsidiaire, de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Par ce moyen, l’IFPEN soutient, en substance, que le point 1.2 de la communication sur les garanties ne saurait être interprété comme validant l’existence d’un lien automatique entre, d’une part, l’impossibilité légale et statutaire de faire l’objet d’une procédure de faillite et, d’autre part, le bénéfice de conditions de financement plus favorables sur les marchés, constitutif d’un avantage sélectif.
57 Le troisième moyen est tiré d’erreurs d’appréciation en ce qui concerne la détermination du montant de l’avantage accordé à l’IFPEN. Par ce moyen, divisé en deux branches, d’une part, l’IFPEN conteste la pertinence du recours à l’affacturage et aux garanties de bonne fin ou aux garanties de meilleur effort afin d’estimer le montant de l’avantage qu’il aurait retiré de la garantie en cause dans ses relations avec les fournisseurs et les clients. D’autre part, il soutient que la Commission a erronément déterminé l’intensité de l’aide d’État prétendument identifiée tant pour lui que pour ses filiales.
58 Enfin, le quatrième moyen est tiré d’une violation du principe de proportionnalité. Par ce moyen, l’IFPEN fait valoir, en substance, que les conséquences qui découlent d’une reconnaissance de l’existence d’une garantie implicite et illimitée de l’État en faveur des EPIC qui constituerait une aide d’État, notamment l’obligation de notification préalable et d’autres obligations imposées à lui et à la République française, sont disproportionnées.
59 À titre liminaire, il convient d’observer que l’existence de la garantie implicite et illimitée d’État inhérente au statut d’EPIC n’étant plus remise en cause dans le cadre du présent litige, eu égard aux moyens soulevés par la République française et l’IFPEN, il revient au Tribunal, dans un premier temps, d’examiner la question de savoir si c’est sans commettre d’erreur que la Commission a conclu que la couverture par cette garantie, d’une part, des activités de transferts technologiques menées par l’IFPEN dans les domaines prévus par les conventions exclusives conclues avec ses filiales Axens et Prosernat et, d’autre part, des prestations de recherche contractuelle et de services menées par l’IFPEN, tant pour le compte de tiers que pour le compte des filiales, constituaient des aides d’État au titre de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.
60 Dans ce cadre, le Tribunal examinera tout d’abord la question de savoir si c’est à bon droit que la Commission a considéré, en l’espèce, que l’IFPEN bénéficiait d’un avantage dans ses relations avec les institutions bancaires et financières, ses clients et ses fournisseurs, découlant de la garantie implicite et illimitée de l’État attachée à son statut, ainsi que la question de savoir si la Commission a démontré à suffisance de droit que cet avantage avait été transféré aux filiales de l’IFPEN, Axens et Prosernat. Ensuite, le cas échéant, il appartiendra au Tribunal d’examiner les moyens par lesquels la République française et l’IFPEN contestent que cet avantage implique le transfert de ressources d’État.
61 Dans l’hypothèse où le Tribunal constaterait que c’est à bon droit que la Commission a conclu à l’existence d’une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, en l’espèce, il appartiendra au Tribunal, dans un second temps, de vérifier si les conditions de compatibilité de cette aide avec le marché intérieur imposées par la Commission violent le principe de proportionnalité comme le fait valoir l’IFPEN.
Sur les moyens tirés d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et relatifs à l’existence et au calcul de l’avantage pour l’IFPEN
62 La première branche du deuxième moyen et le quatrième moyen du recours dans l’affaire T‑157/12 ainsi que la deuxième branche du premier moyen et la première branche du troisième moyen du recours dans l’affaire T‑479/11 portent essentiellement sur l’existence de l’avantage que l’IFPEN aurait tiré de la garantie de l’État inhérente à son statut d’EPIC et, dans une moindre mesure, sur l’estimation du montant de cet avantage.
63 Les arguments de la République française et de l’IFPEN concernent, pour l’essentiel, la démonstration par la Commission de l’existence d’un avantage dans les relations de l’IFPEN avec ses clients et ses fournisseurs. La République française conteste toutefois également certaines observations de la Commission relatives à l’avantage qui pourrait se matérialiser dans les relations entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières.
64 Il convient donc d’examiner, dans un premier temps, les arguments relatifs à l’avantage né dans les relations entre l’IFPEN et ses fournisseurs et clients et, dans un second temps, l’avantage qui pourrait naître dans les relations entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières.
Sur l’avantage en ce qui concerne les relations entre l’IFPEN et ses fournisseurs et clients
65 En premier lieu, dans leurs requêtes, la République française et l’IFPEN font valoir que la Commission n’est pas parvenue à démontrer, dans le standard de la preuve imposée par la jurisprudence, l’existence d’un avantage économique réel en faveur de l’IFPEN en ce qui concerne ses relations avec ses fournisseurs et ses clients. Ils affirment ainsi que, si l’analyse de la Commission peut être prospective, elle ne peut être entièrement hypothétique, mais doit, au contraire, permettre de définir un avantage économique réel.
66 Or, selon la République française et l’IFPEN, en l’espèce, la démonstration de l’existence de l’avantage dans les relations de l’IFPEN avec ses fournisseurs et ses clients était fondée sur des hypothèses non étayées par des éléments de preuve. La République française et l’IFPEN soulignent en particulier que la Commission n’a apporté aucun témoignage d’un fournisseur ou d’un client et n’a, a fortiori, pas démontré le caractère habituel et systématique de l’anticipation par les fournisseurs et par les clients de l’impossibilité de soumettre un EPIC à une procédure d’insolvabilité. En outre, s’agissant des relations entre l’IFPEN et ses clients, la République française et l’IFPEN soulignent le caractère confus, voire incompréhensible, de certains passages de la motivation de la décision attaquée. La République française et l’IFPEN en concluent que la Commission n’a pas respecté ses obligations en matière d’instruction lorsqu’elle a raisonné par supposition au lieu de rechercher auprès des fournisseurs et des clients de l’IFPEN d’éventuelles preuves tangibles des comportements qui leur sont imputés.
67 Dans leurs observations écrites sur les conclusions à tirer de l’arrêt sur pourvoi pour la solution du litige, la République française et l’IFPEN font valoir que la Commission ne pouvait pas se prévaloir de la présomption d’avantage établie par la Cour dans l’arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217), pour démontrer l’existence de l’avantage tiré par l’IFPEN de la garantie illimitée de l’État dans ses relations avec ses fournisseurs et ses clients sans avoir, au préalable, vérifié que le comportement des acteurs sur le marché justifiait une hypothèse d’avantage analogue à celle qui se trouve dans les relations de l’IFPEN avec les institutions bancaires et financières. Selon la République française et l’IFPEN, une telle vérification ferait défaut dans la décision attaquée.
68 En outre, selon la République française, l’examen du contexte économique et juridique dans lequel s’insère le marché affecté par les relations de l’IFPEN avec ses fournisseurs et ses clients permet d’exclure la plausibilité d’une hypothèse d’avantage analogue à celle qui se trouve dans les relations de l’IFPEN avec les institutions bancaires et financières. La République française et l’IFPEN avancent ensuite dans leurs observations divers éléments factuels en vue de démontrer que la présomption d’avantage dans les relations entre l’IFPEN et ses fournisseurs et ses clients est, en tout état de cause, renversée.
69 En second lieu, la République française et l’IFPEN contestent la méthode choisie par la Commission pour estimer le montant de l’avantage procuré à l’IFPEN par la garantie en cause dans ses relations avec ses fournisseurs et ses clients. En particulier, ils soutiennent que l’affacturage et les garanties de bonne fin ou de meilleur effort, que la Commission a choisis comme indicateurs de comparaison, ne sont pas pertinents pour effectuer une telle estimation.
70 La Commission fait valoir, dans ses observations écrites sur les conclusions à tirer de l’arrêt sur pourvoi pour la solution du litige, que le recours à une présomption était justifié pour démontrer l’existence de l’avantage dans les relations entre l’IFPEN et ses clients et ses fournisseurs. La Commission observe que, s’agissant du marché sur lequel opère l’IFPEN, les activités économiques des organismes de recherche comprennent, notamment, des contrats de recherche et de fourniture de services à des entreprises ou encore, comme c’est le cas pour l’IFPEN, des activités de transfert de technologie. La Commission souligne ainsi qu’un organisme de recherche peut acquérir des instruments, des équipements et divers moyens de recherche pour ses laboratoires auprès de fournisseurs. En ce qui concerne les clients de l’IFPEN, la Commission relève qu’ils concluent avec celui-ci des contrats de recherche. Or, selon la Commission, la simple circonstance que les projets de recherche de l’IFPEN se caractérisent par un niveau élevé d’incertitude et donc par l’acceptation d’un risque élevé par les partenaires commerciaux de l’organisme de recherche n’implique pas pour autant que ces partenaires soient indifférents au risque de faillite de leur cocontractant. La longue durée des contrats de recherche et de développement soulignerait au contraire l’intérêt que peut présenter pour les clients de l’IFPEN une protection contre la faillite de leur cocontractant, particulièrement lorsqu’ils s’engagent à long terme dans une recherche complexe. Selon la Commission, une distinction doit être faite entre le risque inhérent au projet de recherche et le risque de faillite du cocontractant. La garantie dont bénéficie l’IFPEN pourrait donc constituer un avantage concurrentiel par rapport aux autres organismes de recherche en ce qui concerne les contrats à long terme. En outre, certains contrats de recherche et de développement impliqueraient d’importants services après-vente, de sorte que les partenaires commerciaux demeureraient beaucoup plus dépendants les uns des autres que dans le cadre de l’achat d’un produit ou d’un service plus standardisé. Un raisonnement similaire pourrait être tenu en ce qui concerne les relations de l’IFPEN avec ses fournisseurs. Là encore, même si une partie des fournitures est standardisée, d’autres contrats de fournitures pourraient porter sur des instruments très spécialisés qui ne pourraient être livrés qu’à l’issue d’une période prolongée. Cette circonstance pourrait inciter les fournisseurs d’un organisme de recherche à tenter de se prémunir contre le risque de faillite de leur cocontractant. De la même façon, selon la Commission, le prix élevé de tels instruments pourrait conduire à un paiement différé par tranches qui, lui aussi, ferait courir un risque au fournisseur et produirait la même incitation. La Commission en conclut que le recours à une présomption pour démontrer l’existence d’un avantage découlant de la garantie illimitée de l’État conféré à l’IFPEN dans ses relations avec ses clients et ses fournisseurs était pleinement justifié.
71 La Commission conteste également dans ses observations complémentaires l’argument de la République française et de l’IFPEN selon lequel l’examen du contexte économique et juridique du marché sur lequel évolue l’IFPEN aurait conduit à priver de plausibilité l’hypothèse selon laquelle la garantie illimitée de l’État permettrait à l’IFPEN de bénéficier dans ses relations avec ses fournisseurs et ses clients d’un avantage analogue à celui qui se trouve dans les relations d’un EPIC avec les institutions bancaires et financières. La Commission conteste en outre que la présomption d’avantage dans les relations entre l’IFPEN et ses fournisseurs et clients aurait été renversée en l’espèce.
72 Par ailleurs, la Commission soutient que, contrairement à ce que font valoir la République française et l’IFPEN, le recours à l’affacturage et à la garantie de bonne fin pour calculer l’avantage tiré par l’IFPEN de la garantie illimitée de l’État dans ses relations avec ses fournisseurs et ses clients serait approprié. La Commission souligne à cet égard que le recours au « raisonnement en termes du coût de couverture du risque équivalent » aux fins de l’estimation de la valeur de l’avantage que l’IFPEN aurait pu tirer de la garantie en cause était justifié par les difficultés qu’elle avait dû surmonter en exécutant cette estimation, difficultés découlant, notamment, de l’absence sur le marché d’un service comparable à une garantie contre le risque d’insolvabilité qui serait commercialisée en tant que telle.
73 Tout d’abord, il y a lieu de rappeler que la qualification d’aide d’État, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, d’une mesure prise à l’égard d’une entreprise requiert la réunion de quatre conditions. Premièrement, il doit s’agir d’une intervention de l’État ou au moyen de ressources de l’État. Deuxièmement, cette intervention doit être susceptible d’affecter les échanges entre les États membres. Troisièmement, elle doit accorder un avantage au bénéfice exclusif de certaines entreprises ou de certains secteurs d’activités. Quatrièmement, elle doit fausser ou menacer de fausser la concurrence (voir, en ce sens, arrêt du 23 mars 2006, Enirisorse, C‑237/04, EU:C:2006:197, points 38 et 39 et jurisprudence citée, et du 29 septembre 2000, CETM/Commission, T‑55/99, EU:T:2000:223, point 39 et jurisprudence citée).
74 La notion d’aide comprend non seulement des prestations positives, mais également les interventions qui, sous des formes diverses, allègent les charges qui normalement grèvent le budget d’une entreprise et qui, ainsi, sans être des subventions au sens strict du mot, sont de même nature et ont des effets identiques. Sont ainsi considérées comme des aides toutes les interventions d’État qui, sous quelque forme que ce soit, sont susceptibles de favoriser directement ou indirectement des entreprises ou qui sont à considérer comme un avantage économique que l’entreprise bénéficiaire n’aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché (voir arrêt du 3 avril 2014, France/Commission, C‑559/12 P, EU:C:2014:217, point 94 et jurisprudence citée).
75 Ensuite, il convient de rappeler que c’est à la Commission qu’il appartient d’apporter la preuve de l’existence d’une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2007, Olympiaki Aeroporia Ypiresies/Commission, T‑68/03, EU:T:2007:253, point 34 et jurisprudence citée). À cet égard, selon la jurisprudence, pour vérifier si l’entreprise bénéficiaire perçoit un avantage économique qu’elle n’aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché, la Commission est tenue d’effectuer une analyse complète de tous les éléments pertinents de l’opération litigieuse et de son contexte, y compris de la situation de l’entreprise bénéficiaire et du marché concerné (arrêts du 6 mars 2003, Westdeutsche Landesbank Girozentrale et Land Nordrhein-Westfalen/Commission, T‑228/99 et T‑233/99, EU:T:2003:57, point 251, et du 3 mars 2010, Bundesverband deutscher Banken/Commission, T‑163/05, EU:T:2010:59, point 37).
76 En ce qui concerne l’administration de la preuve dans le secteur des aides d’État, il ressort d’une jurisprudence constante que la Commission est tenue de conduire la procédure d’examen des mesures incriminées de manière diligente et impartiale, afin qu’elle dispose, lors de l’adoption d’une décision finale établissant l’existence et, le cas échéant, l’incompatibilité ou l’illégalité de l’aide, des éléments les plus complets et fiables possibles pour le faire (voir arrêt du 3 avril 2014, France/Commission, C‑559/12 P, EU:C:2014:217, point 63 et jurisprudence citée).
77 Toutefois, ainsi que la Cour l’a jugé, dans le cadre dudit examen, la Commission peut se prévaloir d’une présomption simple selon laquelle l’octroi d’une garantie implicite et illimitée de l’État en faveur d’une entreprise qui n’est pas soumise aux procédures ordinaires de redressement et de liquidation a pour conséquence une amélioration de sa position financière par un allégement des charges qui, normalement, grèvent son budget. Dès lors, dans le cadre d’une procédure relative à des aides existantes, pour prouver l’avantage procuré par une telle garantie à l’entreprise bénéficiaire, il suffit à la Commission d’établir l’existence même de cette garantie, sans devoir démontrer les effets réels produits par celle-ci à partir du moment de son octroi (arrêt du 3 avril 2014, France/Commission, C‑559/12 P, EU:C:2014:217, points 98 et 99, et arrêt sur pourvoi, point 110).
78 S’agissant de la portée du contrôle juridictionnel de la décision attaquée au regard de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, il ressort de la jurisprudence que la notion d’aide d’État, telle qu’elle est définie dans cette disposition, présente un caractère juridique et doit être interprétée sur la base d’éléments objectifs. Pour cette raison, le juge de l’Union doit, en principe et compte tenu tant des éléments concrets du litige qui lui est soumis que du caractère technique ou complexe des appréciations portées par la Commission, exercer un entier contrôle en ce qui concerne la question de savoir si une mesure entre dans le champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (voir arrêt du 2 mars 2012, Pays-Bas et ING Groep/Commission, T‑29/10 et T‑33/10, EU:T:2012:98, point 100 et jurisprudence citée).
79 Il ressort également de la jurisprudence que le contrôle juridictionnel est limité en ce qui concerne la question de savoir si une mesure entre dans le champ d’application de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, lorsque les appréciations portées par la Commission présentent un caractère technique ou complexe. Il appartient toutefois au Tribunal de déterminer si tel est le cas (voir arrêt du 2 mars 2012, Pays-Bas et ING Groep/Commission, T‑29/10 et T‑33/10, EU:T:2012:98, point 101 et jurisprudence citée).
80 À cet égard, si la Commission jouit d’un large pouvoir d’appréciation dont l’exercice implique des évaluations d’ordre économique qui doivent être effectuées dans le contexte de l’Union, cela n’implique pas que le juge de l’Union doive s’abstenir de contrôler l’interprétation effectuée par la Commission de données de nature économique. En effet, selon la jurisprudence, le juge de l’Union doit notamment vérifier non seulement l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées (voir arrêt du 2 mars 2012, Pays-Bas et ING Groep/Commission, T‑29/10 et T‑33/10, EU:T:2012:98, point 102 et jurisprudence citée).
81 Or, d’une part, ainsi que la Cour l’a jugé dans l’arrêt sur pourvoi, la mesure en cause, à savoir la transformation de l’IFPEN en EPIC, ne relève pas de la notion de régime d’aides, visée à l’article 1er, sous d), du règlement no 659/1999, mais, dans la mesure où elle pouvait être qualifiée d’« aide d’État », elle constituait une aide individuelle au sens de l’article 1er, sous e), du règlement no 659/1999. Il s’ensuit que la Commission ne pouvait se borner à examiner les caractéristiques générales de cette mesure pour démontrer qu’elle constituait une aide d’État (arrêt sur pourvoi, points 64 à 73 et 82).
82 D’autre part, il convient de relever que la présomption d’avantage établie par la Cour dans l’arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217), énoncée au point 77 ci-dessus, est fondée sur l’hypothèse selon laquelle, grâce à la garantie attachée à son statut, l’EPIC concerné bénéficie ou pourrait bénéficier de conditions financières plus avantageuses que celles qui sont normalement consenties sur les marchés financiers. Ainsi, l’application de ladite présomption aux relations de l’EPIC avec les fournisseurs et les clients ne se justifie que dans la mesure où de telles conditions plus avantageuses se présentent également dans les relations avec ces derniers sur les marchés intéressés (arrêt sur pourvoi, point 150).
83 Par conséquent, lorsque la Commission veut appliquer ladite présomption, elle doit examiner le contexte économique et juridique dans lequel s’insère le marché affecté par les relations en question. En particulier, la Commission est tenue de vérifier si les comportements des acteurs sur le marché concerné justifient une hypothèse d’avantage analogue à celle qui se trouve dans les relations de l’EPIC avec les institutions bancaires et financières (arrêt sur pourvoi, point 150).
84 C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier les griefs avancés par la République française et l’IFPEN.
– Sur le grief pris de l’absence de preuve de l’avantage dans les relations entre l’IFPEN et ses fournisseurs
85 Il convient de relever qu’il ressort des considérants 203 et 214 de la décision attaquée que, selon la Commission, il existe un phénomène de baisse des prix qui résulte de l’appréciation plus favorable par ses cocontractants du risque de défaut d’une entité dont ils savent qu’elle est protégée du risque de liquidation judiciaire par son statut d’établissement public.
86 Au considérant 204 de la décision attaquée, la Commission a exposé la méthode à laquelle elle avait recouru pour évaluer le montant de la baisse de prix dans ces termes :
« Pour estimer la baisse de prix résultant de l’appréciation plus favorable du risque de défaut d’un EPIC par ses fournisseurs, la Commission entend raisonner en termes de coût de la couverture du risque équivalent. En effet, en l’absence de garantie de l’État, un fournisseur de l’IFPEN qui souhaiterait bénéficier d’une garantie comparable (c’est-à-dire se couvrir totalement contre le risque de défaut de son cocontractant) pourrait recourir aux services d’un établissement de crédit ou d’assurance spécialisé. Une telle prise en charge du risque de défaut est notamment couramment proposée par les sociétés spécialisées dans l’affacturage. »
87 Les observations exposées dans les considérants 203 et 204 de la décision attaquée, lus conjointement avec le considérant 214 de ladite décision, mettent en exergue le fait que la Commission a postulé l’existence d’une baisse de prix qui serait due à une appréciation plus favorable, par les fournisseurs, du risque de défaut de l’IFPEN, sans vérifier le bien-fondé de ce postulat, et qu’elle s’est ensuite employée à évaluer l’ampleur de cette baisse de prix au moyen d’un indicateur qui ne mesurait pas la baisse de prix elle-même, mais seulement la valeur d’une garantie qu’elle a considérée comme comparable à celle dont bénéficiait l’IFPEN. Cette conclusion est renforcée par l’absence dans la décision attaquée de toute étude concernant l’évolution des prix réellement pratiqués par les fournisseurs de l’IFPEN avant et pendant la période considérée.
88 La Commission a été invitée par une mesure d’organisation de la procédure à préciser si l’affirmation selon laquelle l’avantage dont avait bénéficié l’IFPEN dans ses relations avec ses fournisseurs avait consisté en une baisse de prix pratiqués par ces derniers reposait sur un tel examen et, le cas échéant, dans quelle partie de la décision attaquée cet examen avait été conduit.
89 En réponse à cette mesure d’organisation de la procédure, la Commission a précisé que, aux considérants 203 et 204 de la décision attaquée, « [elle] a[vait] présumé que l’existence d’une garantie implicite et illimitée était de nature à influer sur la perception, par les fournisseurs de l’IFP[EN], du risque de défaut de paiement de [ce dernier], ce qui devrait se traduire logiquement par une série d’avantages accordés en retour au bénéficiaire de la garantie (et notamment par une baisse de prix) ». Dans sa réponse, la Commission a également indiqué que « la conclusion de l’existence d’un avantage économique réel pour l’IFPEN dans ses relations avec ses fournisseurs de la garantie en cause, et consistant en une baisse de prix pratiqués par ces derniers, repos[ait] non pas sur une analyse empirique et concrète de la détermination des prix par les fournisseurs de l’IFP[EN] sur ce marché, mais sur une présomption complétée par certaines observations empiriques » et que, « [e]n d’autres termes, il s’agi[ssai]t d’une démonstration indirecte largement fondée sur des éléments logiques ». En conclusion, la Commission a indiqué que ses services étaient en train de réexaminer la motivation de la décision attaquée au regard des exigences établies par l’arrêt sur pourvoi.
90 Il convient également de relever que, à l’audience, la Commission a elle-même déclaré que, s’agissant des relations entre l’IFPEN et ses fournisseurs et ses clients, se trouvaient dans la décision attaquée des éléments qui suggéraient qu’elle avait raisonné par présomption, ainsi que certains éléments de marché, mais qu’il n’y figurait pas une démonstration en bonne et due forme complète de ce que la Cour avait considéré comme nécessaire dans le cadre de l’arrêt sur pourvoi. Selon la Commission, c’est cette circonstance qui expliquait la conclusion de sa réponse à la question du Tribunal citée au point 89 ci-dessus.
91 Force est donc de constater que, ainsi que la Commission l’a reconnu dans ses écritures devant le Tribunal et l’a ensuite déclaré à l’audience, la décision attaquée ne contient pas la démonstration que le comportement des acteurs sur le marché concerné justifiait l’hypothèse d’un avantage analogue dans les relations entre l’IFPEN et ses fournisseurs à celui existant dans les relations entre un EPIC et les institutions bancaires et financières, exigée par la Cour dans l’arrêt sur pourvoi.
92 C’est donc à tort que la Commission a conclu, aux considérants 203 et 214 de la décision attaquée, que l’IFPEN avait bénéficié d’un avantage économique réel, consistant en une baisse des prix pratiqués par ses fournisseurs et résultant d’une appréciation plus favorable par ces derniers de son risque de défaut.
93 Il résulte de ce qui précède qu’il n’y a pas lieu d’examiner les arguments par lesquels la République française et l’IFPEN contestent le caractère pertinent du recours à l’affacturage pour estimer le montant de l’avantage procuré à l’IFPEN par la garantie en cause dans ses relations avec ses fournisseurs. En effet, la Commission ne pouvait pas procéder à l’estimation d’un avantage dont l’existence n’a été aucunement démontrée.
– Sur le grief pris de l’absence de preuve de l’avantage dans les relations entre l’IFPEN et ses clients
94 Il ressort de la décision attaquée que la Commission a défini l’avantage que l’IFPEN a pu retirer de la garantie de l’État inhérente à son statut d’EPIC dans ses relations avec ses clients comme étant l’absence de paiement d’une prime correspondant à une garantie de bonne fin ou, à tout le moins, de meilleur effort qu’il a pu offrir à ses clients.
95 Cette définition est fondée sur un constat étayé par les seules observations d’UOP Limited, selon lesquelles, en matière de cession de technologies, les acquéreurs étaient particulièrement sensibles aux garanties que leurs prestataires étaient en mesure d’offrir, en termes de couverture de responsabilité contractuelle et extracontractuelle (considérant 216 de la décision attaquée). En partant de ce constat, et ayant exclu comme non pertinente l’absence de couverture par la garantie en cause de la responsabilité extracontractuelle de l’IFPEN, la Commission a indiqué ce qui suit :
« (220) […] compte tenu de la garantie apportée par l’État à l’[IFPEN], ses clients sont assurés que ce dernier ne sera jamais en situation de liquidation judiciaire et sera donc toujours en mesure de remplir ses obligations contractuelles où, dans l’hypothèse où il ne le ferait pas, d’être indemnisés pour ce manquement […]
(221) À l’instar du raisonnement […] exposé aux considérants 204 et suivants en ce qui concerne les relations avec les fournisseurs, la Commission considère qu’en l’absence de garantie de l’État, un client qui souhaiterait bénéficier du même niveau de protection serait amené à souscrire auprès d’un intermédiaire financier (un établissement bancaire ou une compagnie d’assurances par exemple) une garantie de bonne fin (en anglais, “performance bond”) pour s’assurer du dénouement du contrat qui le lie avec l’[IFPEN]. Le but d’une telle protection serait de garantir à ce client une compensation financière en cas de préjudice engendré du fait d’une inexécution (totale ou partielle) du contrat. »
96 Aux considérants suivants de la décision attaquée, la Commission a effectué l’estimation du coût d’une garantie de bonne fin ou d’une garantie de meilleur effort et a considéré qu’une telle garantie impliquerait un taux maximal de 5 % du chiffre d’affaires généré par la prestation couverte (considérants 223 à 225 de la décision attaquée). Elle a également tenté de déterminer, parmi les activités économiques de l’IFPEN, des prestations qui seraient couvertes par « une telle garantie » (considérants 226 à 235 de la décision attaquée). Au considérant 236 de la décision attaquée, la Commission a constaté ce qui suit :
« […] pour l’exercice de ses activités économiques, l’[IFPEN] a bénéficié d’un avantage économique réel, consistant en l’absence de paiement d’une prime correspondant à une garantie de bonne fin [ou], à tout le moins, de meilleur effort, qu’il a pu offrir à ses clients sur ses activités de recherche, y compris ses filiales Axens et Prosernat dans leur domaine exclusif. Sans être précisément en mesure de quantifier le montant exact de cet avantage, compte tenu de la spécificité du risque couvert, la Commission considère qu’en tout état de cause, il n’est pas susceptible de dépasser, prestation par prestation, année par année, les sommes portées dans le tableau 5 figurant au présent considérant [...] »
97 Il ressort des considérants de la décision attaquée cités aux points 95 et 96 ci-dessus que l’avantage dont bénéficierait l’IFPEN dans ses relations avec ses clients résulte du fait que, eu égard à la garantie illimitée de l’État attachée à son statut d’EPIC, il leur offre l’assurance qu’il ne fera pas l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire et, par conséquent, qu’il sera toujours en mesure de faire face à ses obligations contractuelles, ou, dans l’hypothèse où il ne le ferait pas, d’être indemnisés pour ce manquement, alors que, en l’absence d’une telle assurance, lesdits clients seraient contraints de souscrire une garantie de bonne fin auprès d’un intermédiaire financier.
98 Ainsi que le relèvent la République française et l’IFPEN, le raisonnement appliqué par la Commission pour définir l’avantage dont a bénéficié l’IFPEN dans ses relations avec ses clients repose sur l’hypothèse que, dans les conditions normales du marché, les clients des instituts de recherche tels que l’IFPEN recourent aux garanties de bonne fin ou à des garanties de meilleur effort pour se protéger contre le risque d’insolvabilité de leur cocontractant et que, en présence d’une garantie telle que celle dont bénéficie l’IFPEN, les clients de ce dernier n’ont plus besoin de recourir à une telle garantie de bonne fin ou de meilleur effort.
99 Or, à l’exception des observations de la société UOP Limited figurant au considérant 216 de la décision attaquée, selon lesquelles « […] en matière de cession de technologie les acquéreurs sont particulièrement sensibles aux garanties que leurs prestataires sont en mesure de leur fournir, en termes de couverture de la responsabilité contractuelle aussi bien qu’extracontractuelle », la Commission ne fait état d’aucun élément de marché de nature à justifier le bien-fondé des hypothèses, résumées au point 98 ci-dessus.
100 Si la décision attaquée contient bien des développements relatifs à la garantie de meilleur effort ou à la garantie de bonne fin aux considérants 221 à 236, force est de constater que ceux-ci visaient uniquement à quantifier le montant de l’avantage présumé, ainsi qu’il ressort du renvoi au raisonnement figurant aux considérants 204 et suivant de la décision attaquée concernant la quantification de l’avantage présumé dans les relations entre l’IFPEN et ses fournisseurs. Il convient de relever à cet égard que la Commission a indiqué dans sa défense que la garantie de meilleur effort et la garantie de bonne fin ne sauraient être assimilées à la garantie illimitée de l’État dont bénéficie l’IFPEN, qui couvre un champ beaucoup plus vaste que ces deux garanties et qu’il ressort très clairement de la décision attaquée qu’elle a utilisé ces types de garanties en tant qu’outils de comparaison, afin d’obtenir l’approximation la plus juste possible de la valeur de l’avantage conféré à l’IFPEN par la garantie de l’État dans ses relations avec ses clients. La Commission précise ainsi que, dans le considérant 236 de la décision attaquée, elle a conclu cette partie de son raisonnement sur une possible quantification de l’avantage déjà reçu, et non sur la capacité de la mesure à procurer un avantage.
101 Force est donc de constater que la Commission a eu recours à un raisonnement hypothétique. Cependant, il convient de relever que la Commission ne saurait, en l’espèce, justifier un tel raisonnement en se prévalant de la présomption d’avantage établie par la Cour dans l’arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217).
102 En effet, il y a lieu de relever que la décision de la Commission ne contient pas d’examen préalable du contexte économique et juridique du marché en cause, au sens de la jurisprudence citée au point 83 ci-dessus, qui permettrait d’admettre la plausibilité d’une hypothèse d’avantage dans les relations entre l’IFPEN et ses clients, analogue à celui qui se trouve dans les relations entre un EPIC et les institutions bancaires et financières, ce que la Commission a d’ailleurs expressément admis à l’audience, comme le Tribunal l’a rappelé au point 90 ci-dessus.
103 Il s’ensuit que, s’agissant de la définition de l’avantage tiré par l’IFPEN de la garantie implicite et illimitée de l’État que lui confère son statut d’EPIC dans ses relations avec ses clients, la Commission a manqué à son obligation de rapporter la preuve de cet avantage conformément à la jurisprudence citée au point 75 ci-dessus. C’est donc à tort que la Commission a conclu, au considérant 236 de la décision attaquée, que, grâce à la garantie en cause, l’IFPEN avait bénéficié d’un avantage économique réel, consistant en l’absence de paiement d’une prime correspondant à une garantie de bonne fin ou, à tout le moins, de meilleur effort, qu’il a pu offrir à ses clients sur ses activités de recherche, y compris à ses filiales Axens et Prosernat dans leur domaine exclusif.
104 Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu d’examiner les arguments par lesquels la République française et l’IFPEN contestent le caractère pertinent du recours aux garanties de bonne fin ou aux garanties de meilleur effort pour estimer le montant de l’avantage procuré à l’IFPEN par la garantie en cause dans ses relations avec les clients.
105 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que, en ce qui concerne l’existence d’un avantage que l’IFPEN a pu retirer de la garantie en cause dans ses relations avec ses fournisseurs et ses clients, la Commission n’a pas satisfait à la charge de la preuve, telle que définie par la jurisprudence citée au point 75 ci-dessus.
Sur l’avantage en ce qui concerne les relations de l’IFPEN avec les institutions bancaires et financières
106 Dans le recours de l’affaire T‑157/12, l’IFPEN soutenait qu’il n’avait tiré aucun avantage de la garantie de l’État en ce qui concerne ses relations avec les institutions bancaires et financières, ce que la Commission avait elle-même reconnu au considérant 199 de la décision attaquée. Partant, il faisait valoir qu’il n’y avait pas lieu de revenir sur cette question.
107 Dans l’affaire T‑479/11, la République française relevait également que la Commission avait reconnu au considérant 199 de la décision attaquée que, sur la période comprise entre son changement de statut et l’année 2010, l’IFPEN n’avait pas tiré d’avantage économique réel de son statut d’EPIC dans ses relations avec les institutions bancaires et financières.
108 En outre, la République française soutenait que l’affirmation de la Commission, au considérant 200 de la décision attaquée, qu’elle contestait par ailleurs, selon laquelle un avantage économique réel pourrait se manifester à l’avenir dans les relations entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières ne reposait sur aucune démonstration.
109 La République française contestait à cet égard l’affirmation de la Commission dans la défense selon laquelle il revenait aux autorités françaises de démontrer que, à partir du 1er janvier 2011, les conditions d’emprunts de l’IFPEN seraient toujours comparables à celles qu’il obtenait avant son changement de statut. La République française soutenait qu’une telle preuve était impossible à rapporter en raison du caractère imprévisible de la conjoncture économique. La République française soulignait que la Commission avait elle-même admis qu’elle ne pouvait pas présumer des comportements futurs des opérateurs de marché.
110 Lors de l’audience du 8 octobre 2015, la République française avait invoqué l’article 12 de la loi 2010/1645, du 28 décembre 2010, de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 (JORF du 29 décembre 2010, p. 22868), aux termes duquel « [n]onobstant toute disposition contraire des textes qui leur sont applicables, ne peuvent contracter auprès d’un établissement de crédit un emprunt dont le terme est supérieur à douze mois, ni émettre un titre de créance dont le terme excède cette durée les organismes français relevant de la catégorie des administrations publiques centrales, au sens du règlement (CE) n° 2223/96 du Conseil, du 25 juin 1996, relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux dans la Communauté, autres que l’État, la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la Caisse de la dette publique et la Société de prises de participation de l’État » et « [u]n arrêté conjoint du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé du budget établit la liste des organismes auxquels s’applique cette interdiction ». Selon la République française, il découlait de cette disposition que l’IFPEN ne pouvait contracter auprès d’un établissement de crédit un emprunt dont le terme était supérieur à douze mois, ce qui excluait, en tout état de cause, qu’un avantage se matérialise à l’avenir dans les relations entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières. La Commission avait excipé de l’irrecevabilité de cet argument en soutenant que les autorités françaises n’avaient pas invoqué ce texte de loi lors de la procédure formelle d’examen.
111 Dans le cadre de ses observations sur les conclusions à tirer de l’arrêt sur pourvoi, la République française fait valoir que la jurisprudence invoquée par la Commission pour contester la recevabilité de l’argument tiré de l’article 12 de la loi du 28 septembre 2010 est dénuée de pertinence eu égard au caractère objectif et public de ladite loi. Au demeurant, la République française soutient que, conformément à la jurisprudence, le contrôle opéré par le Tribunal doit s’étendre à l’ensemble des données pertinentes soumises par la partie requérante, que celles-ci soient antérieures ou postérieures à la décision attaquée, qu’elles aient été préalablement présentées dans le cadre de la procédure administrative ou, pour la première fois, dans le cadre du recours dont le Tribunal est saisi. À cet égard, la République française souligne, notamment, que ni l’existence d’une présomption d’avantage ni la nécessité de renverser cette présomption pour le futur n’ayant été débattues lors de la procédure administrative, il ne saurait lui être reproché de n’avoir pas porté à la connaissance de la Commission l’article 12 de la loi du 28 septembre 2010.
112 La République française ajoute que l’interdiction prévue par l’article 12 de la loi du 28 septembre 2010 a été reprise dans la loi 2014-1653, du 29 décembre 2014, de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 (JORF du 30 décembre 2014, texte n° 1), ainsi que dans la loi 2018-32, du 22 janvier 2018, de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (JORF du 23 janvier 2018, texte n° 1). La République française fait également état de l’arrêté du 4 septembre 2018 fixant la liste des organismes divers d’administration centrale ayant interdiction de contracter auprès d’un établissement de crédit un emprunt dont le terme est supérieur à douze mois ou d’émettre un titre de créance dont le terme excède cette durée (JORF no 230 du 5 octobre 2018, texte n° 22).
113 Dans ses observations sur les conclusions à tirer de l’arrêt sur pourvoi, l’IFPEN soutient que la Commission a elle-même écarté l’application de la présomption d’avantage dégagée par la Cour dans l’arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217), y compris pour l’avenir. Cela ressortirait du considérant 200 de la décision attaquée, dans lequel la Commission a conclu son examen de l’éventuel avantage pour l’IFPEN dans ses relations avec les institutions bancaires et financières en précisant, s’agissant des relations postérieures à la décision attaquée, que la Commission « ne pouva[i]t présumer des comportements futurs des opérateurs du marché, ni de l’évolution de leur perception de l’impact de la garantie de l’État sur le risque de défaut de l’établissement public IFP ». Selon l’IFPEN, cette conclusion quant à l’absence de recours à une présomption s’imposerait d’autant plus que, dans la décision attaquée, la Commission ne serait arrivée à aucune conclusion claire quant à l’existence d’un avantage en sa faveur. Ainsi, alors même que l’article 107 TFUE impose à la Commission, sur laquelle repose la charge de la preuve, de prouver un avantage et non une possibilité d’avantage, la Commission se serait contentée d’évoquer, pour le passé, un avantage potentiel non matérialisé, au considérant 199 de la décision attaquée, et, pour l’avenir, au considérant 200 de cette décision, l’impossibilité de présumer les comportements futurs des opérateurs pertinents sur le marché.
114 En tout état de cause, l’IFPEN estime que la présomption simple d’avantage est renversée non seulement pour le passé, comme le démontre l’analyse du coût des emprunts qu’il a contractés depuis son changement de statut jusqu’au mois de novembre 2018, mais également pour le futur.
115 À ce dernier égard, l’IFPEN soutient que le défaut de plausibilité d’un avantage futur à son bénéfice est confirmé par l’ensemble des éléments de contexte soumis par les autorités françaises à la Commission pendant la procédure administrative. L’IFPEN se réfère ainsi à trois éléments particuliers. Premièrement, l’absence d’impact de sa transformation en EPIC sur sa situation financière ou sur ses conditions de financement, conformément à un principe de continuité générale, consacré à l’article 95-VI de la loi du 13 juillet 2005. Deuxièmement, l’excellente gestion financière de l’IFPEN se traduisant par une augmentation continue de ses ressources propres. Troisièmement, l’absence d’emprunt à plus d’un an sur les cinq dernières années et l’existence d’un seul emprunt d’un montant négligeable à échéance de moins d’un an, relevées aux considérants 197 et 198 de la décision attaquée.
116 Selon une argumentation similaire à celle de la République française, l’IFPEN soutient que le défaut de plausibilité d’un avantage futur au bénéfice de l’IFPEN est en outre démontré par l’article 12 de la loi du 28 septembre 2010.
117 Par ailleurs, selon l’IFPEN, il ne saurait être soutenu que la République française et lui ont eu maintes occasions d’informer la Commission de l’existence de ce texte au cours de la procédure administrative, celui-ci ayant été publié le 29 décembre 2010, soit plus d’un mois après la réponse des autorités françaises à la dernière demande d’informations qui leur avait été adressée dans le cadre de la procédure administrative, ni que l’absence de production de ce texte pendant la procédure administrative s’expliquerait par la volonté de l’utiliser dans le cadre d’une procédure contentieuse.
118 Enfin, l’IFPEN fait valoir que l’argument de la Commission selon lequel l’article 12 de la loi du 28 décembre 2010, bien que réduisant structurellement ses possibilités d’emprunt, ne ferait pas obstacle à la possibilité qu’un emprunt d’un montant élevé lui procure un avantage sur un an est infirmé par les données produites par trois établissements bancaires.
119 La Commission fait valoir, dans ses observations sur les conclusions à tirer de l’arrêt sur pourvoi, que la Cour a confirmé qu’elle n’était pas tenue de démontrer les effets réels produits par la garantie dans les relations entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières, dans la mesure où il existait une présomption simple selon laquelle cette garantie constituait un avantage dans lesdites relations. Selon la Commission, il ressort de l’arrêt sur pourvoi que, afin de renverser cette présomption, il ne suffisait pas de constater que la garantie n’avait eu aucun effet réel par le passé sur la relation entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières, mais il fallait également démontrer que, compte tenu du contexte économique et juridique dans lequel s’insère la garantie rattachée au statut de l’EPIC concerné, ce dernier, selon toute plausibilité, n’obtiendrait pas dans l’avenir un quelconque avantage économique réel de cette garantie.
120 La Commission a contesté à l’audience l’argument de l’IFPEN selon lequel elle n’aurait pas fait usage d’une présomption dans la décision attaquée concernant l’avantage relatif aux relations entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières.
121 En outre, la Commission fait valoir que, conformément à la jurisprudence, les arguments de la République française et de l’IFPEN visant à renverser cette présomption pour le futur doivent être rejetés comme irrecevables, dans la mesure où ils reposent sur des éléments de faits postérieurs à la décision attaquée ou qui n’avaient pas été portés à sa connaissance par la République française et l’IFPEN lors de la procédure administrative, alors même que celle-ci avait donné lieu à de nombreux échanges concernant la législation nationale applicable à l’IFPEN.
122 Par ailleurs, la Commission conteste l’argumentation de la République française et de l’IFPEN, à la supposer recevable, selon laquelle l’article 12 de la loi du 28 décembre 2010 était de nature à renverser la présomption d’avantage dans les relations entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières pour le futur.
123 À cet égard, il convient de relever que, ainsi que la Cour l’a jugé dans l’arrêt sur pourvoi, la seule circonstance que l’IFPEN bénéficie d’une garantie de l’État était de nature à permettre à la Commission de se prévaloir de la présomption d’avantage, telle que dégagée par la Cour dans l’arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217), cette présomption étant fondée sur l’idée que, grâce à la garantie attachée à son statut, un EPIC bénéficie ou pourrait bénéficier de conditions financières plus avantageuses que celles qui sont normalement consenties sur les marchés financiers (arrêt sur pourvoi, point 116).
124 Il convient également de relever que, contrairement à ce que l’IFPEN fait valoir, la Commission a bien eu recours en l’espèce à un raisonnement fondé sur une présomption concernant l’existence d’un avantage dans les relations entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières.
125 Ainsi, dans un premier temps, après avoir examiné les données fournies par la République française aux considérants 196 à 198 de la décision attaquée, la Commission a conclu, au considérant 199 de cette décision, qu’un tel avantage n’avait pas trouvé à se matérialiser sur la période allant du changement de statut de l’IFPEN à l’année 2010.
126 Dans un second temps, au considérant 200 de la décision attaquée, la Commission a précisé que la conclusion selon laquelle la garantie de l’État n’avait pas conféré d’avantage à l’IFPEN dans ses relations avec les institutions bancaires et financières sur la période considérée ne valait que pour le passé dans la mesure où elle « ne pouva[i]t présumer des comportements futurs des opérateurs de marché, ni de l’évolution de leur perception de l’impact de la garantie de l’État sur le risque de défaut de l’[IFPEN] ».
127 Toujours au considérant 200 de la décision attaquée, la Commission a précisé que, « dans le cadre des rapports annuels que les autorités françaises seront appelées à communiquer à la Commission à l’avenir, [il conviendra] que [c]es autorités […] fournissent des informations relatives aux niveaux et aux conditions d’endettement de l’[IFPEN], et apportent la preuve que ces prêts sont conformes aux conditions du marché, ou ajoutent l’équivalent-brut de l’aide correspondante dans l’estimation des montants maxima des effets de la garantie selon une méthodologie analogue à celle décrite dans [la décision attaquée] ».
128 Il ressort ainsi du considérant 200 de la décision attaquée que la Commission a implicitement, mais nécessairement, présumé l’existence de l’avantage dans les relations entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières en considérant qu’elle ne pouvait pas exclure un tel avantage pour le futur et en prévoyant, en conséquence, l’obligation pour les autorités françaises de démontrer que cet avantage ne se produirait pas et que, s’il se produisait, il resterait dans les limites des effets maximaux autorisés de la garantie.
129 Il convient de rappeler que, ainsi que la Cour l’a précisé dans l’arrêt sur pourvoi, pour renverser une telle présomption, il doit être démontré que, compte tenu du contexte économique et juridique dans lequel s’insère la garantie rattachée au statut de l’EPIC concerné, ce dernier n’a pas obtenu dans le passé et, selon toute plausibilité, n’obtiendra pas dans l’avenir un quelconque avantage économique réel de cette garantie (arrêt sur pourvoi, point 117).
130 En l’espèce, il y a lieu de relever que la Commission a elle-même constaté au considérant 199 de la décision attaquée que l’avantage dans les relations entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières n’avait pas trouvé à se matérialiser pendant la période allant de la transformation de l’IFPEN en EPIC à l’année 2010 et, partant, admis que la présomption d’avantage avait été renversée pour le passé.
131 Il convient donc de vérifier si les arguments avancés par la République française et l’IFPEN sont de nature à renverser la présomption d’avantage pour le futur dans les conditions établies par la Cour dans l’arrêt sur pourvoi et rappelées au point 129 ci-dessus.
132 À cet égard, il est de jurisprudence constante que la légalité d’une décision en matière d’aides d’État doit être appréciée en fonction des éléments d’informations dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée (voir arrêt du 23 novembre 2017, SACE et Sace BT/Commission, C‑472/15 P, non publié, EU:C:2017:885, point 76 et jurisprudence citée).
133 Par conséquent, il convient de rejeter comme irrecevables les arguments de l’IFPEN tirés d’une analyse des conditions de financement qui lui auraient été accordées par les établissements bancaires entre 2011 et 2018, ainsi que d’une démarche effectuée par l’IFPEN auprès des banques pour démontrer qu’une ligne de crédit à court terme lui aurait été accordée en 2016 à des conditions commerciales de marché, dès lors que ces arguments reposaient sur des éléments d’informations postérieurs à l’adoption de la décision attaquée. Il en va de même de l’argument de la République française selon lequel l’interdiction pour certains organismes publics de contracter auprès d’un établissement de crédit un emprunt dont le terme était supérieur à douze mois, instaurée par l’article 12 de la loi du 28 décembre 2010, a été systématiquement reprise dans les lois de programmation des finances publiques postérieures à la décision attaquée.
134 S’agissant de l’argument de la République française tiré de l’article 12 de la loi du 28 décembre 2010, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence, la Commission est tenue de conduire la procédure d’examen des mesures incriminées de manière diligente et impartiale, afin qu’elle dispose, lors de l’adoption de la décision finale, des éléments les plus complets et fiables possibles pour ce faire (voir arrêt du 13 décembre 2018, Ryanair et Airport Marketing Services/Commission, T‑53/16, EU:T:2018:943, points 223 et 224 et jurisprudence citée).
135 Toutefois, il convient également de rappeler que, selon la jurisprudence, il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir tenu compte d’éventuels éléments de fait ou de droit qui auraient pu lui être présentés pendant la procédure administrative, mais qui ne l’ont pas été, la Commission n’étant pas dans l’obligation d’examiner d’office et par supputation les éléments qui auraient pu lui être soumis (voir arrêt du 13 décembre 2018, Ryanair et Airport Marketing Services/Commission, T‑53/16, EU:T:2018:943, point 223 et jurisprudence citée).
136 En l’espèce, il convient de relever qu’il est constant entre les parties que la République française et l’IFPEN n’ont pas porté ce texte à la connaissance de la Commission lors de la procédure formelle d’examen et qu’il ne ressort pas du dossier que la Commission aurait eu connaissance du texte en question lorsque la décision attaquée a été adoptée.
137 Dès lors, force est de constater que l’argument de la République française tiré de l’article 12 de la loi du 28 décembre 2010 doit être rejeté comme étant irrecevable.
138 Ce constat ne saurait être remis en cause par les arguments avancés par la République française.
139 Ainsi, premièrement, il convient de relever que la jurisprudence issue de l’arrêt du 21 janvier 2016, Galp Energía España e.a./Commission (C‑603/13 P, EU:C:2016:38), citée par la République française est dénuée de pertinence en l’espèce.
140 En effet, la Cour a certes jugé au point 72 de l’arrêt du 21 janvier 2016, Galp Energía España e.a./Commission (C‑603/13 P, EU:C:2016:38), que la portée du contrôle de légalité prévu à l’article 263 TFUE s’étend à l’ensemble des éléments des décisions de la Commission relatives aux procédures d’application des articles 101 et 102 TFUE dont le Tribunal assure un contrôle approfondi, en droit comme en fait, à la lumière des moyens soulevés par les parties requérantes et compte tenu de l’ensemble des éléments soumis par ces dernières, que ceux-ci soient antérieurs ou postérieurs à la décision entreprise, qu’ils aient été préalablement présentés dans le cadre de la procédure administrative ou, pour la première fois, dans le cadre du recours dont le Tribunal est saisi, dans la mesure où ces derniers éléments sont pertinents pour le contrôle de la légalité de la décision de la Commission (arrêt du 21 janvier 2016, Galp Energía España e.a./Commission, C‑603/13 P, EU:C:2016:38, point 72).
141 Toutefois, il ressort du libellé même du point 72 de l’arrêt du 21 janvier 2016, Galp Energía España e.a./Commission (C‑603/13 P, EU:C:2016:38), exposé ci-dessus, que cette jurisprudence se rapporte au contrôle de légalité des décisions adoptées sur le fondement des articles 101 et 102 TFUE et non au contrôle de légalité des décisions adoptées sur le fondement de l’article 107 TFUE.
142 Deuxièmement, la République française ne saurait soutenir qu’elle devrait être autorisée à se prévaloir du texte de l’article 12 de la loi du 28 janvier 2010 pour renverser la présomption d’avantage de l’IFPEN dans ses relations avec les institutions bancaires et financières devant le Tribunal au seul motif qu’elle n’a pas pu s’en prévaloir au stade de la procédure formelle d’examen, car celle-ci n’a donné lieu à aucune discussion concernant ladite présomption.
143 Il convient en effet de relever que, dans la décision d’ouverture de la procédure formelle d’examen, la Commission avait indiqué que, nonobstant les explications fournies par les autorités françaises, compte tenu des caractéristiques de la garantie de l’État dont bénéficiait l’IFPEN en raison de son statut d’EPIC, elle ne pouvait exclure le fait que l’IFPEN bénéficie d’un avantage économique lié à la possibilité que l’État agisse en dernier ressort. La Commission précisait également que cet avantage découlait d’une appréciation plus favorable par les créanciers du risque de remboursement des crédits, grâce à la présence de la garantie étatique illimitée et qu’il pourrait se traduire par de meilleures conditions de crédit. Il s’ensuit qu’il appartenait à la République française, qui a participé à la procédure formelle d’examen, d’apporter les éléments d’informations qu’elle estimait de nature à remettre en cause l’appréciation portée par la Commission dans la décision d’ouverture de ladite procédure, concernant l’existence d’un avantage économique dans les relations entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières, y compris, le cas échéant, le texte de l’article 12 de la loi du 28 décembre 2010.
144 En tout état de cause, à supposer que la République française puisse se prévaloir du texte de l’article 12 de la loi du 28 décembre 2010 dans le cadre de la présente procédure, force est de constater que celui-ci n’était pas, en lui-même, de nature à renverser la présomption d’avantage dans les relations entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières à la date à laquelle la Commission a adopté la décision attaquée.
145 En effet, l’article 12, paragraphe 1, de la loi du 28 décembre 2010 disposait que, «[n]onobstant toute disposition contraire des textes qui leur sont applicables, ne peuvent contracter auprès d’un établissement de crédit un emprunt dont le terme est supérieur à douze mois, ni émettre un titre de créance dont le terme excède cette durée les organismes français relevant de la catégorie des administrations publiques centrales, au sens du règlement (CE) n° 2223/96 du Conseil, du 25 juin 1996, relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux dans la Communauté, autres que l’État, la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la Caisse de la dette publique et la Société de prises de participation de l’État » et qu’« [u]n arrêté conjoint du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé du budget établi[ssai]t la liste des organismes auxquels s’appliqu[ait] cette interdiction ».
146 Ainsi, il convient de relever que, contrairement à ce que la République française a soutenu à l’audience, la seule référence à la catégorie des administrations publiques centrales au sens du règlement (CE) n° 2223/96 du Conseil, du 25 juin 1996, relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux dans la Communauté (JO 1996, L 310, p. 1), ne pouvait pas permettre de conclure que cette disposition était applicable à l’IFPEN, dans la mesure où ladite disposition prévoyait elle-même que la liste des organismes auxquels elle devait s’appliquer serait établie par un arrêté ministériel.
147 Il importe d’ailleurs de souligner que, en réponse à une question posée par le Tribunal, la République française a précisé que l’IFPEN était inscrit sur la liste des organismes français relevant de la catégorie des administrations publiques centrales visées par l’article 12 de la loi du 28 décembre 2010 annexée à l’arrêté du 28 septembre 2011 fixant la liste desdits organismes ayant interdiction de contracter auprès d’un établissement de crédit un emprunt dont le terme est supérieur à douze mois ou d’émettre un titre de créance dont le terme excède cette durée (JORF n° 232, du 6 octobre 2011, p. 16907).
148 S’agissant de l’argument de l’IFPEN selon lequel les éléments de contexte soumis par les autorités françaises à la Commission pendant la procédure administrative, rappelés au point 115 ci-dessus, auraient été suffisants pour renverser la présomption d’avantage dans les relations entre celui-ci et les institutions bancaires et financières pour le futur, il convient de relever, à l’instar de la Commission, que ces éléments, qui concernaient le passé, étaient insuffisants pour exclure l’existence de l’avantage dans le futur, dans la mesure où les statuts de l’IFPEN contenaient une disposition prévoyant la possibilité pour ce dernier de contracter des emprunts sans limitation de durée ou de montant.
149 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de constater que la République française et l’IFPEN ne sont pas parvenus à renverser la présomption d’avantage dans les relations entre l’IFPEN et les institutions bancaires et financières pour le futur.
150 Il y a donc lieu de conclure que c’est à bon droit que la Commission a considéré que la garantie de l’État dont bénéficie l’IFPEN en raison de son statut d’EPIC conférait à ce dernier un avantage économique.
151 Dès lors, nonobstant le constat, au point 105 ci-dessus, selon lequel la Commission n’a pas satisfait à la charge de la preuve concernant l’existence d’un avantage que l’IFPEN a pu retirer de la garantie implicite et illimitée de l’État dans ses relations avec ses fournisseurs et ses clients, il convient de rejeter comme non fondés les moyens tirés d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et relatifs à l’existence et au calcul de l’avantage en faveur de l’IFPEN.
Sur les moyens, tirés d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, et relatifs au transfert de l’avantage aux filiales de l’IFPEN, Axens et Prosernat
152 Les arguments relatifs au transfert de l’avantage dont aurait bénéficié l’IFPEN du fait de la garantie implicite et illimitée de l’État inhérente à son statut d’EPIC à ses filiales de droit privé, Axens et Prosernat, sont avancés dans la deuxième branche du deuxième moyen du recours dans l’affaire T‑157/12 et dans la deuxième branche du troisième moyen du recours dans l’affaire T‑479/11.
153 L’IFPEN et la République française soutiennent que la Commission n’a pas démontré à suffisance de droit le transfert de l’avantage économique dont a prétendument bénéficié l’IFPEN du fait de la garantie de l’État en cause vers ses filiales de droit privé Axens et Prosernat.
154 L’IFPEN relève, à cet égard, l’insuffisance de la motivation de la décision attaquée. Il soutient en outre que, dans la mesure où la Commission est obligée d’examiner, dans chacune de ses décisions, les faits spécifiques de l’espèce, sa démarche consistant à fonder le raisonnement développé dans la décision attaquée sur une analogie avec le raisonnement appliqué dans la décision C (2005) 5412 final de la Commission, du 21 décembre 2005, relative à l’aide d’État N 531/2005, France – Mesures liées à la création et au fonctionnement de la Banque postale (ci-après la « décision Banque postale »), est inadaptée et infondée. À cet égard, il relève que cette décision tenait compte de l’architecture particulière du fonctionnement du groupe La Poste, qui diffère de celle du groupe IFPEN, et que la nature scientifique des activités de l’IFPEN et de ses filiales n’est en rien comparable aux activités postales. En outre, l’IFPEN fait valoir qu’il ressort du considérant 246 de la décision attaquée que, la Commission n’ayant pas trouvé de trace d’un transfert de l’avantage dans sa comptabilité, elle aurait uniquement fondé la démonstration de ce transfert sur la présomption que l’avantage a été transféré par la non-tarification aux filiales des coûts liés à la couverture par la garantie de l’État des prestations réalisées pour leur compte par l’IFPEN.
155 La République française soutient, d’une part, que la Commission a commis une erreur d’interprétation de la décision Banque postale et, d’autre part, ignoré le fait que les prestations de service et les prestations de recherche fournies par l’IFPEN étaient facturées sur la base des coûts supportés par l’IFPEN majorés d’une marge et donc que les relations commerciales entre l’IFPEN et ses filiales étaient conclues dans des conditions normales de marché. La République française fait également valoir que la Commission a commis une erreur de droit et de fait en considérant que le raisonnement qu’elle avait suivi dans sa décision 2009/157/CE était transposable à l’intégralité des rapports entre l’IFPEN et ses filiales alors qu’elle aurait dû se limiter aux seules relations établies dans le cadre des accords exclusifs négociés entre l’IFPEN et ses filiales Axens et Prosernat.
156 Par ailleurs, la République française fait valoir que, contrairement à ce que soutient la Commission, il ressort du dispositif de la décision attaquée que la question du transfert de l’avantage aux filiales est inséparable du reste de ladite décision.
157 La Commission soutient que la question du transfert de l’avantage est subsidiaire aux fins de la démonstration de l’existence d’une aide d’État en faveur de l’IFPEN découlant du statut d’EPIC et ne peut viser qu’à une annulation partielle de la décision attaquée, à savoir la partie concernant le transfert de l’aide aux filiales. Selon la Commission, la question de l’éventuel transfert de l’avantage aux filiales de l’IFPEN est séparable de la question préalable de l’existence de l’avantage en faveur de l’IFPEN.
158 La Commission conteste, en outre, l’argumentation de la République française et de l’IFPEN et conclut au rejet des présents moyens.
159 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que l’article 1er, paragraphe 4, de la décision attaquée vise la couverture par la garantie de l’État des activités de transferts technologiques menées par l’IFPEN dans les domaines prévus par les conventions exclusives conclues avec Axens et Prosernat.
160 Il convient de relever que, ainsi qu’il ressort des considérants 249 et 250 de la décision attaquée, l’avantage économique dans les domaines d’activité exclusifs des filiales Axens et Prosernat, tiré de la couverture par la garantie de l’État octroyée à l’IFPEN, est un avantage sélectif en ce qu’il permet aux filiales de bénéficier d’un accès à la technologie et aux moyens humains et matériels de l’IFPEN dans des conditions plus favorables que leurs concurrents.
161 Il s’ensuit que la démonstration du transfert de l’avantage en faveur de l’IFPEN vers ses filiales Axens et Prosernat est nécessaire pour qualifier d’aide d’État au titre de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, la mesure visée par l’article 1er, paragraphe 4, de la décision attaquée.
162 Il convient également de rappeler que l’article 1er, paragraphe 5, de la décision attaquée vise la couverture par la garantie de l’État des prestations de recherche contractuelle et de service menées par l’IFPEN tant pour le compte des tiers que pour le compte des filiales.
163 Il y a lieu de relever que, par définition, la qualification de cette mesure d’aide d’État n’implique pas la démonstration d’un transfert de l’avantage en faveur de l’IFPEN vers ses filiales Axens et Prosernat en ce qui concerne les prestations de recherche contractuelle et de service menées par l’IFPEN pour le compte des tiers, ainsi que pour le compte de ses filiales en dehors des domaines prévus par les conventions exclusives.
164 En revanche, il importe de souligner que la démonstration du transfert de l’avantage de l’IFPEN vers ses filiales Axens et Prosernat est déterminante pour qualifier d’aide d’État la couverture par la garantie de l’État des prestations de recherche contractuelle et des prestations de service menées par l’IFPEN pour le compte desdites filiales dans les domaines prévus par les conventions exclusives conclues avec ces dernières. En effet, dans ce dernier cas, ce sont bien les filiales de l’IFPEN, Axens et Prosernat, qui sont les bénéficiaires de l’aide puisque, en raison des conventions d’exclusivité, lesdites prestations ne peuvent être menées par l’IFPEN que pour leur compte.
165 Il s’ensuit que, ainsi que le fait valoir en substance la Commission, le moyen tiré de l’absence de démonstration du transfert de l’avantage doit être rejeté comme inopérant en ce qu’il vise à contester la qualification d’aide d’État de la mesure visée à l’article 1er, paragraphe 5, de la décision attaquée, dès lors que celle-ci concerne la couverture par la garantie de l’État des prestations de recherche contractuelle et de service menées par l’IFPEN tant pour le compte des tiers que pour le compte des filiales en dehors du champ des conventions d’exclusivité.
166 C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les griefs soulevés par la République française et l’IFPEN.
167 Premièrement, s’agissant du grief de l’IFPEN selon lequel la Commission aurait, à tort, fondé sa démonstration du transfert de l’avantage en faveur de l’IFPEN vers ses filiales Axens et Prosernat sur une analogie inadaptée avec le raisonnement appliqué dans la décision Banque postale et, partant, manqué à son obligation de motivation, il convient de relever que celui-ci repose sur une prémisse erronée.
168 Ainsi, au considérant 240 de la décision attaquée, la Commission a précisé que, « compte tenu de l’absence, en droit français, de responsabilité générale de l’actionnaire du fait de ses filiales dans les groupes de sociétés, il n’y [avait] pas lieu de considérer que l’IFPEN, et, partant, l’État français, puissent être responsables du remboursement des créances détenues par des tiers sur des activités économiques d’Axens et Prosernat, notamment dans l’hypothèse où ces dernières seraient placées en liquidation judiciaire ».
169 La Commission a ainsi exclu qu’Axens et Prosernat puissent bénéficier d’un transfert direct de l’avantage dont l’IFPEN avait prétendument bénéficié dans ses relations avec ses créanciers.
170 La Commission a cependant considéré aux considérants 241 à 247 de la décision attaquée qu’Axens et Prosernat avaient bénéficié d’un transfert indirect de l’avantage en question, selon le raisonnement qui suit :
« (241) Il convient toutefois de noter que, dans la décision [Banque postale] précitée, bien qu’elle ait considéré […], qu’en tant que société anonyme, La Banque postale restait soumise au droit commun en matière de redressement de liquidation judiciaire et ne bénéficiait donc pas, pour son propre compte, d’une garantie illimitée de l’État, la Commission n’en a pas moins traité la question d’un éventuel transfert vers la filiale des effets de la garantie publique conférée à son actionnaire unique.
(242) Plus précisément, la Commission a estimé que l’architecture de fonctionnement du groupe induisait une perméabilité entre l’actionnaire (La Poste) et la filiale (La Banque postale), due à l’effet combiné de i) l’utilisation par la filiale des moyens humains et matériels mis à disposition par la société mère et ii) la rémunération de ces moyens sur la base des coûts supportés par la société mère, de sorte qu’en cas d’avantage économique de nature à faire baisser les coûts de La Poste, la rémunération versée par La Banque postale à sa société mère aurait été réduite à due concurrence, induisant un transfert (au moins partiel) de cet avantage économique vers la filiale.
(243) De façon équivalente, dans la décision C 51/05 précitée, la Commission a considéré qu’une certaine porosité existait, notamment dans les choix de tarification opérés par l’établissement public IFP pour les prestations fournies à Axens et Prosernat dans leur domaine exclusif, de sorte que les relations commerciales intragroupes n’obéiraient pas à une logique de marché, mais offriraient au contraire la possibilité d’une subvention croisée des activités économiques des filiales par les fonds publics mis à disposition de la société mère […].
(244) Dans l’affaire précitée relative à la Banque postale, la Commission a estimé nécessaire que les autorités françaises souscrivent des engagements permettant de mettre en place un mécanisme qui neutralise, au niveau de la filiale, les avantages éventuellement présents dans le chef de la société mère […].
(245) Dans le cas d’espèce, les autorités françaises se sont engagées, s’agissant des conditions d’emprunts des filiales de l’établissement public IFP (Axens, Beicip-Franlab, Prosernat), à mentionner par écrit dans le contrat de financement (pour tout instrument couvert par un contrat), lors de chaque opération, que ‟conformément au droit français (notamment la nécessité d’une autorisation législative expresse pour chaque garantie), la présente opération de financement ne bénéficiera d’aucune garantie d’une quelconque nature que ce soit, directe ou indirecte de la part de l’État.”
(246) En ce qui concerne l’utilisation par les filiales des moyens humains et matériels mis à disposition par leur société mère, comme la Commission l’a noté dans la décision C 51/05 précitée, ‟[s]’il y a subvention d’activités économiques, celle-ci résulte du niveau des rémunérations versées par les filiales concernées à la maison mère et se reflète dans les comptes de l’IFP” […]. Or, dans l’examen des comptes de l’établissement public IFP, les seuls éléments de coût qui n’ont pas déjà été pris en compte par la Commission, pour l’année 2006 dans sa décision C 51/05 précitée, et pour les années suivantes dans les rapports annuels transmis par les autorités françaises, sont ceux relatifs à la couverture, au titre de la garantie illimitée, des prestations délivrées par l’établissement public IFP à ses filiales. La prime correspondant à une garantie de bonne fin, ou à tout le moins, de meilleur effort, n’ayant pas été payée à l’État, elle n’a pas non plus pu être tarifée dans les services prestés aux filiales.
(247) En conséquence, il y a lieu de considérer que l’avantage économique né dans le chef de l’établissement public du fait de sa garantie statutaire a été à ce titre transféré à ses filiales de droit privé Axens et Prosernat. »
171 Par ailleurs, au considérant 269 de la décision attaquée, la Commission a précisé que « [l]a tarification des prestations de recherche contractuelle de l’[IFPEN] est établie sur la base de leur coût de revient complet, auquel une marge est appliquée, dont le taux varie en fonction du résultat de la négociation avec le client […] et que, « [c]ela étant, le seul élément de coût qui semble ne pas avoir été pris en compte par l’[IFPEN] correspond précisément à la prime de couverture de la garantie de bonne fin (ou de meilleur effort) de l’[IFPEN] ».
172 Il ressort des considérants précités que la démonstration du transfert de l’avantage en faveur de l’IFPEN vers ses filiales Axens et Prosernat repose sur le constat d’une sous-tarification des prestations de l’IFPEN auxdites filiales, qui découle, d’une part, de la décision 2009/157, dans laquelle la Commission aurait constaté l’existence d’une porosité, notamment dans les domaines exclusifs d’Axens et Prosernat permettant des subventions croisées, concernant l’année 2006 et, d’autre part, de la circonstance que les rapports annuels fournis par les autorités françaises pour les années 2007 à 2009, en vue de démontrer que la tarification des prestations réalisées par l’IFPEN pour le compte de ses filiales était conforme au prix du marché, ne tenaient pas compte du fait que l’IFPEN ne facturait pas à ses filiales, en tant que clients, la couverture desdites prestations par la garantie de l’État dont celui-ci bénéficie en raison de son statut d’EPIC.
173 Il s’ensuit que, contrairement à ce que fait valoir l’IFPEN, la Commission n’a pas appuyé sa démonstration du transfert de l’avantage en faveur de l’IFPEN vers ses filiales Axens et Prosernat sur une simple analogie avec le raisonnement appliqué dans la décision Banque postale, mais a tenu compte des circonstances spécifiques aux relations internes au groupe IFPEN.
174 À ce titre, il convient également de rejeter comme inopérant le grief de la République française selon lequel la Commission aurait mal interprété la décision Banque postale.
175 Deuxièmement, eu égard au constat figurant au point 172 ci-dessus quant au raisonnement sur lequel la Commission s’est appuyée pour démontrer le transfert de l’avantage en faveur de l’IFPEN vers ses filiales Axens et Prosernat, il convient également de rejeter comme non fondé l’argument de l’IFPEN selon lequel la Commission aurait uniquement fondé ladite démonstration sur la présomption d’un transfert de l’avantage par la non-tarification des coûts liés à la couverture par la garantie de l’État des prestations menées par l’IFPEN pour le compte de ses filiales.
176 Troisièmement, s’agissant de l’argument de la République française selon lequel, en substance, la Commission ne pouvait pas s’appuyer sur la décision 2009/157 pour démontrer le transfert de l’avantage en faveur de l’IFPEN vers ses filiales dans le cadre des prestations de recherche contractuelle et des prestations de service conduites par l’IFPEN pour le compte desdites filiales en dehors des domaines d’exclusivité de ces dernières, il y a lieu de considérer que, celui-ci ne concernant pas le transfert de l’avantage dans les domaines couverts par les conventions d’exclusivité, il doit être rejeté comme inopérant pour la raison exposée au point 165 ci-dessus.
177 Quatrièmement, la République française fait grief à la Commission de ne pas avoir tenu compte de la circonstance que les prestations de service et les prestations de recherche contractuelle sont facturées par l’IFPEN à ses filiales selon les conditions de marché.
178 À cet égard, d’une part, il convient de relever que la Commission a tenu compte de cette circonstance concernant la démonstration du transfert de l’avantage en faveur de l’IFPEN vers ses filiales Axens et Prosernat en dehors du champ des activités exclusives de ces dernières. Ainsi, comme le fait observer la Commission dans sa défense, il ressort du considérant 269 de la décision attaquée que, si la description du mode de fixation des prix de l’IFPEN fournie par les autorités françaises démontrait que la tarification des prestations de recherche contractuelle de l’IFPEN, en dehors du champ de ses relations exclusives avec ses filiales, était établie sur la base de leur coût de revient complet auquel une marge était appliquée, elle ne faisait toutefois pas mention d’une prime de risque versée à l’État en rémunération de sa garantie illimitée.
179 D’autre part, ainsi que le fait également valoir la Commission, il ressort du considérant 246 de la décision attaquée que la Commission s’est fondée, s’agissant de la démonstration du transfert de l’avantage en faveur de l’IFPEN vers ses filiales Axens et Prosernat, dans le domaine d’activité exclusif de ces dernières, sur la décision 2009/157, dont il ressort des considérants 146 et 147 que les rémunérations versées par Axens et Prosernat à l’IFPEN pour les prestations réalisées dans leurs domaines d’exclusivité étaient inférieures à leur coût de revient et entraînaient un transfert d’aide d’État. Or, il convient de relever que la République française n’a pas contesté la décision 2009/157 et qu’elle n’a pas davantage remis en cause les conclusions de cette dernière concernant les rémunérations versées par Axens et Prosernat à l’IFPEN pour les prestations réalisées dans leurs domaines d’exclusivité dans le cadre de la présente procédure.
180 Il convient dès lors de rejeter comme non fondé le grief de la République française tiré de l’absence de prise en compte par la Commission de la circonstance que les prestations de service et les prestations de recherche contractuelle sont facturées par l’IFPEN à ses filiales au prix du marché.
181 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de rejeter les moyens tirés d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, et relatifs au transfert de l’avantage en faveur de l’IFPEN vers ses filiales Axens et Prosernat comme non fondés.
Sur le moyen tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, et relatif à l’existence d’un transfert des ressources de l’État
182 Par un argument développé dans la troisième branche du deuxième moyen du recours dans l’affaire T‑157/12, l’IFPEN soutient, à titre surabondant, qu’il n’existe pas de lien de connexité suffisant entre l’avantage dont il bénéficierait et le transfert de ressources de l’État provenant de la garantie illimitée. Qu’il s’agisse de la relation avec ses fournisseurs ou ses clients, le lien entre une prétendue baisse de prix ou le prétendu recours à la garantie de bonne fin, d’une part, et le transfert de ressources de l’État, d’autre part, serait objectivement artificiel et entièrement bâti sur des constructions hypothétiques ne reposant sur aucune donnée objective.
183 À cet égard, il convient de relever que, bien que les arguments de l’IFPEN soient présentés dans la partie de son recours concernant l’existence de l’avantage, ils se réfèrent à une autre condition de l’existence d’une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, à savoir l’engagement des ressources de l’État.
184 Par ailleurs, il est à noter que ces arguments ne concernent que les relations entre l’IFPEN et ses fournisseurs et ses clients.
185 Il s’ensuit que, le Tribunal ayant constaté au point 105 ci-dessus que la Commission n’avait pas démontré que la garantie implicite et illimitée de l’État en faveur de l’IFPEN avait accordé, ou était susceptible d’accorder, un avantage au bénéfice exclusif de l’IFPEN dans ses relations avec ses fournisseurs et ses clients, il y a lieu de rejeter le présent moyen comme inopérant.
Sur le moyen, tiré d’une violation du principe de proportionnalité
186 Les arguments relatifs à la violation du principe de proportionnalité sont avancés par l’IFPEN dans le cinquième moyen de son recours dans l’affaire T‑157/12.
187 Ces arguments sont avancés en deux branches. Par la première branche, l’IFPEN fait valoir, en substance que, dans la mesure où la Commission n’a pas réussi à apporter une preuve objective de l’existence d’une garantie implicite et illimitée de l’État en faveur des EPIC et, partant, a fondé son raisonnement sur une série d’hypothèses non vérifiées, l’exigence de soumettre systématiquement la création d’un EPIC à une obligation de notification préalable et, par la suite, à une série de rapports administratifs au titre de la compatibilité, est disproportionnée. La violation du principe de proportionnalité serait d’autant plus évidente que, d’une part, les principes applicables aux EPIC sont antérieurs au traité de Rome et que le gouvernement français a fait valoir un argumentaire juridique solide pour démontrer le caractère erroné de la thèse de la Commission et, d’autre part, le gouvernement français aurait apporté un remède suffisant pour dissiper les doutes nourris par la Commission quant à l’existence d’une garantie en faveur des EPIC, en proposant de modifier le décret d’application de la loi du 16 juillet 1980.
188 Par la seconde branche, l’IFPEN fait valoir que la décision attaquée impose aux autorités françaises et, par voie de conséquence, à lui-même le respect d’un certain nombre d’obligations qui sont manifestement disproportionnées tant par rapport à l’objectif poursuivi qu’au périmètre très réduit, dans son cas, des effets du statut d’EPIC.
189 Ainsi, en premier lieu, l’IFPEN observe que la décision attaquée impose aux autorités françaises, et partant à lui-même, de produire chaque année, à compter du 1er janvier 2010 et jusqu’au terme des accords exclusifs, un rapport financier annuel incluant les éléments listés à l’article 5 de ladite décision. Or, d’une part, selon l’IFPEN, l’exercice demandé par la Commission d’inclure dans le rapport annuel une évaluation de l’effet majorant de la prétendue garantie illimitée correspondant à une appréciation plus favorable du risque de défaillance d’IFPEN par les fournisseurs et à l’absence de paiement d’une prime d’une prétendue garantie de bonne fin induit un gaspillage de ses ressources propres, alors même qu’un tel exercice est totalement artificiel et ne correspond à aucune réalité économique. Le fait qu’un tel « majorant » n’existe pas dans les comptes de l’IFPEN et que la Commission est incapable, après plusieurs années, de trouver des taux de comparaison acceptables confirmerait le caractère excessivement artificiel, sinon fantaisiste, de toute proposition de « majorant ». D’autre part, l’IFPEN relève que, entre la date d’adoption de la décision attaquée et la date d’introduction du présent recours, les autorités françaises ont notifié, conformément à l’article 3, paragraphe 2, de la décision 2009/157, le renouvellement des conventions de recherche industrielle entre lui et ses filiales Axens et Prosernat dans les domaines d’activité exclusifs de ces dernières. Selon l’IFPEN, la décision attaquée conditionnerait explicitement l’examen positif de compatibilité du renouvellement desdites conventions au respect de l’intégralité de la décision attaquée. Or, en pratique, la décision attaquée imposerait aux autorités françaises de produire un rapport annuel jusqu’au terme des accords exclusifs, soit pour une durée de dix ans, ce qui serait manifestement disproportionné au vu de l’objectif de contrôle d’une aide d’État dont on pourrait légitimement douter de l’existence.
190 En second lieu, l’IFPEN fait grief à la Commission d’avoir imposé aux autorités françaises d’insérer dans les contrats de l’IFPEN les clauses mentionnées à l’article 9 de la décision attaquée, ce qui constituerait une mesure extrêmement contraignante et d’autant moins justifiée que la Commission a conclu à l’existence d’une aide d’État sur la base d’une série d’hypothèses non confirmées et d’erreurs manifestes d’appréciation.
191 S’agissant de la première branche du présent moyen, il convient de relever que celle-ci repose sur la prémisse que la Commission n’aurait pas démontré que le statut d’EPIC conférait à l’IFPEN le bénéfice d’une garantie implicite et illimitée de l’État.
192 Toutefois, d’une part, il convient de rappeler que la Cour a jugé dans l’arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217), que, afin de prouver l’existence d’une telle garantie ne résultant expressément d’aucun texte législatif ou contractuel, il était loisible à la Commission de se fonder sur la méthode du faisceau d’indices sérieux, précis et concordants, pour vérifier s’il existait, en droit interne, une véritable obligation pour l’État d’engager ses propres ressources aux fins de couvrir les pertes d’un EPIC défaillant et donc, conformément à la jurisprudence constante, un risque économique suffisamment concret de charges grevant le budget étatique (arrêt du 3 avril 2014, France/Commission, C‑559/12 P, EU:C:2014:217, point 65).
193 D’autre part, il convient également de rappeler que, interrogée par le Tribunal sur les conséquences de l’arrêt du 3 avril 2014, France/Commission (C‑559/12 P, EU:C:2014:217), pour le présent litige, l’IFPEN a précisé, dans son courrier du 5 mai 2014, qu’il estimait que la considération exposée au point 192 ci-dessus était applicable en l’espèce et qu’il renonçait, en conséquence, à son premier moyen, tiré d’une erreur de droit, selon lequel la Commission aurait dépassé les limites qui lui sont reconnues pour interpréter le droit national dans le cadre de la législation sur les aides d’État.
194 Il s’ensuit que la première branche du présent moyen, dans la mesure où elle n’a pas été retirée par l’IFPEN, doit être rejetée comme non fondée.
195 S’agissant de la seconde branche du présent moyen, l’IFPEN soutient que les obligations imposées à la République française et, indirectement, à lui-même, par l’article 5 et l’article 9, paragraphes 1 à 3, de la décision attaquée sont disproportionnées.
196 Il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence, le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union, exige que les actes des institutions de l’Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante, et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (arrêt du 24 mai 2007, Maatschap Schonewille-Prins, C‑45/05, EU:C:2007:296, point 45).
197 En l’espèce, il y a lieu de relever qu’il ressort de l’article 4 de la décision attaquée que la mesure visée à l’article 1er, paragraphe 4, de cette même décision constitue, à compter du 1er janvier 2010 et jusqu’au terme des accords exclusifs entre l’IFPEN et ses filiales Axens et Prosernat, une aide d’État compatible avec le marché intérieur sous réserve des conditions prévues aux articles 5 et 6 de ladite décision.
198 Aux termes de l’article 5, paragraphe 1, de la décision attaquée, « [l]e rapport financier annuel mentionné à l’article 4, paragraphe 2, de la décision C 51/05 comporte, outre les éléments déjà mentionnés à l’article 5, paragraphe 1, de ladite décision, les éléments listés aux paragraphes 2, 3 et 4 du présent article ».
199 L’article 5, paragraphe 2, de la décision attaquée dispose que « [l]e rapport financier annuel comporte le montant, le taux d’intérêt et les conditions contractuelles des emprunts souscrits par l’[IFPEN] au cours de la période annuelle considérée, ainsi qu’une estimation de l’équivalent-subvention brut de l’éventuelle bonification d’intérêts liée à la garantie de l’État, sauf à apporter la preuve que ces contrats de prêt sont conformes aux conditions normales de marché, soit en comparant leurs conditions à celles obtenues par l’[IFPEN] avant son changement de statut, soit sur la base d’une méthodologie plus précise préalablement approuvée par la Commission ».
200 L’article 5, paragraphe 3, de la décision attaquée prévoit que « [l]e rapport financier annuel comporte le montant des biens et services acquis par l’[IFPEN] auprès de fournisseurs pour mener des prestations économiques mentionnées à l’article premier, paragraphes 4 et 5, de la présente décision, au cours de la période annuelle considérée, ainsi qu’une estimation maximale de l’équivalent-subvention brut de l’aide résultant d’une appréciation plus favorable par les fournisseurs du risque de défaillance de l’entreprise » et que « [c]ette estimation est réalisée soit en appliquant un taux forfaitaire de 2,5 % au montant des acquisitions réalisées, soit sur la base d’une méthodologie plus précise préalablement approuvée par la Commission ».
201 Aux termes de l’article 5, paragraphe 4, de la décision attaquée « [l]e rapport financier annuel comporte le montant des activités économiques, mentionnées à l’article premier, paragraphes 4 et 5, de la présente décision, réalisées par l’[IFPEN] au cours de la période annuelle considérée, ainsi qu’une estimation maximale de l’équivalent-subvention brut de l’aide résultant de l’absence de paiement d’une prime correspondant à une garantie de bonne fin, ou à tout le moins, de meilleur effort, offerte aux bénéficiaires desdites prestations économiques » et que « [c]ette estimation est réalisée soit en appliquant un taux forfaitaire de 5 % au montant des prestations réalisées, soit sur la base d’une méthodologie plus précise préalablement approuvée par la Commission ».
202 Il ressort de ces dispositions que l’article 5 de la décision attaquée impose à l’IFPEN, en substance, des obligations visant à vérifier la compatibilité avec le marché intérieur de l’aide qui lui est accordée par l’État. Il oblige cette entité à transmettre à la Commission, sur une base annuelle, des données relatives aux conditions des prêts qu’elle a souscrits, des montants des biens et services qu’elle a acquis auprès de fournisseurs pour mener ses activités économiques, avec une estimation maximale de l’équivalent-subvention de l’aide et, enfin, le montant des activités économiques qu’elle a réalisées avec une estimation maximale de l’équivalent-subvention de l’aide.
203 À cet égard, il convient de relever que, dans les cas où une mesure étatique peut être qualifiée d’aide d’État, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, elle est soumise à l’obligation de notification prévue à l’article 108, paragraphe 3, TFUE. L’obligation de notifier des informations nécessaires à la Commission pour apprécier la compatibilité d’une aide ne saurait donc être considérée comme contraire au principe de proportionnalité en tant que telle.
204 En outre, il convient de relever que, ainsi que la Commission le fait valoir, les obligations imposées à l’IFPEN s’inscrivent dans la continuité des obligations qui lui sont imposées par la décision 2009/157, qui n’a été contestée ni par l’IFPEN ni par la République française.
205 Par ailleurs, il convient de relever que, comme le fait également valoir la Commission, la transmission d’un rapport annuel dans le cadre d’un régime d’aide est une pratique courante et proportionnelle à l’objectif de contrôle des aides d’État.
206 Toutefois, en l’espèce, il convient de relever que, si l’obligation imposée par l’article 5, paragraphe 2, de la décision attaquée est en rapport avec la présomption d’avantage en faveur de l’IFPEN dans ses relations avec les institutions bancaires et financières dont le Tribunal a constaté qu’elle avait été utilisée à bon droit par la Commission pour qualifier d’aide d’État la mesure visée à l’article 1er, paragraphe 4, de cette même décision, il n’en va pas de même des obligations imposées par l’article 5, paragraphes 3 et 4, de la même décision.
207 En effet, force est de constater que les obligations imposées par ces dispositions se rapportent à l’avantage dont aurait bénéficié l’IFPEN dans ses relations avec les fournisseurs et les clients, dont le Tribunal a constaté, au point 105 ci-dessus, que la Commission n’avait pas démontré l’existence. Il s’ensuit que de telles obligations ne sauraient, par définition, être considérées comme appropriées et nécessaires au sens de la jurisprudence rappelée au point 196 ci-dessus.
208 Par ailleurs, il convient de relever que l’article 9, paragraphes 1 à 3, de la décision attaquée oblige les autorités françaises, en substance, à inclure dans les contrats conclus par l’IFPEN une clause de non-responsabilité de l’État et dans les contrats conclus par les filiales de l’IFPEN une clause écartant la responsabilité de ce dernier ainsi que celle de l’État.
209 Toutefois, l’IFPEN se borne à faire valoir, à cet égard, que l’obligation d’insérer les clauses de non-responsabilité serait particulièrement contraignante pour lui, sans expliquer en quoi les différentes clauses visées par l’article 9 de la décision attaquée ne seraient pas nécessaires ou appropriées en l’espèce.
210 Il convient donc de rejeter un tel grief comme irrecevable eu égard à la jurisprudence selon laquelle, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, la requête introductive d’instance doit contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Cet exposé doit être suffisamment clair et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autre information à l’appui. La requête doit, de ce fait, expliciter en quoi consiste le moyen sur lequel le recours est fondé, de sorte que sa seule énonciation abstraite ne répond pas aux exigences du règlement de procédure. Des exigences analogues sont requises lorsqu’un grief est invoqué au soutien d’un moyen (voir arrêt du 7 juin 2018, Winkler/Commission, T‑369/17, non publié, EU:T:2018:334, point 53 et jurisprudence citée).
211 Partant, il convient d’accueillir la seconde branche du présent moyen tiré de la violation du principe de proportionnalité en ce qu’elle vise l’article 5, paragraphes 3 et 4, de la décision attaquée, et de la rejeter comme irrecevable pour le surplus.
212 Il s’ensuit qu’il y a lieu d’accueillir partiellement le recours de l’IFPEN dans l’affaire T‑157/12.
213 L’ensemble des moyens soulevés par la République française ayant été rejetés, il convient, en revanche, de rejeter le recours dans l’affaire T‑479/11.
Sur l’étendue de l’annulation
214 L’IFPEN conclut, à titre principal, à l’annulation de la totalité de la décision attaquée et, à titre subsidiaire, à l’annulation des parties viciées du dispositif de ladite décision.
215 À cet égard, il convient de relever que le moyen accueilli, tiré de la violation du principe de proportionnalité, vise uniquement les conditions de compatibilité des mesures qualifiées d’aide d’État à l’article 1er, paragraphe 4, de la décision attaquée.
216 Compte tenu de tout ce qui précède, il y a lieu d’annuler l’article 5, paragraphes 3 et 4, de la décision attaquée, ainsi que l’article 6, paragraphe 1, de la décision attaquée en ce qu’il vise l’impact maximal de la garantie de l’État tel qu’il est estimé à l’article 5, paragraphes 3 et 4, de ladite décision, et de rejeter les recours pour le surplus.
Sur les dépens
217 En application de l’article 219 du règlement de procédure, le Tribunal statue, dans les décisions rendues après annulation et renvoi, sur les dépens relatifs, d’une part, aux procédures engagées devant le Tribunal et, d’autre part, à la procédure de pourvoi devant la Cour.
218 Dans la mesure où dans l’arrêt sur pourvoi, la Cour a annulé l’arrêt initial et réservé les dépens, il appartient au Tribunal de statuer, dans le présent arrêt, sur l’ensemble des dépens afférents aux procédures engagées devant lui, y compris la procédure de première instance, ainsi que sur les dépens afférents à la procédure de pourvoi dans l’affaire C‑438/16 P.
219 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Aux termes du paragraphe 3 du même article, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens. Toutefois, si cela apparaît justifié au vu des circonstances de l’espèce, le Tribunal peut décider que, outre ses propres dépens, une partie supporte une fraction des dépens de l’autre partie.
220 La République française, l’IFPEN et la Commission ayant, en partie, succombé dans la procédure de première instance, chaque partie supportera ses propres dépens dans le cadre de cette procédure.
221 La République française, l’IFPEN et la Commission supporteront chacun leurs propres dépens exposés dans le cadre de la procédure de pourvoi.
222 La République française ayant succombé dans l’affaire T‑479/11 RENV, elle supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission dans le cadre de cette procédure, conformément aux conclusions de celle-ci.
223 L’IFPEN et la Commission ayant chacun succombé dans l’affaire T‑157/12 RENV, le Tribunal annulant partiellement la décision attaquée et rejetant le recours pour le surplus, l’IFPEN et la Commission supporteront leurs propres dépens dans le cadre de cette procédure.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (huitième chambre)
déclare et arrête :
1) L’article 5, paragraphes 3 et 4, ainsi que l’article 6, paragraphe 1, en ce qu’il vise l’impact maximal de la garantie de l’État tel qu’il est estimé à l’article 5, paragraphes 3 et 4, de la décision 2012/26/UE de la Commission, du 29 juin 2011, concernant l’aide d’État C 35/08 (ex NN 11/08) accordée par la France à l’établissement public « Institut français du pétrole », sont annulés.
2) Les recours sont rejetés pour le surplus.
3) La Commission européenne, la République française et IFP Énergies nouvelles supporteront chacun leurs propres dépens dans les affaires T‑479/11 et T‑157/12.
4) La République française, IFP Énergies nouvelles et la Commission supporteront chacun leurs propres dépens exposés dans l’affaire C‑438/16 P.
5) La République française supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission dans l’affaire T‑479/11 RENV.
6) IFP Énergies nouvelles et la Commission supporteront chacun leurs propres dépens dans l’affaire T‑157/12 RENV.
Collins | Kancheva | De Baere |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 octobre 2020.
Le greffier | Le président |
E. Coulon | S. Papasavvas |
Table des matières
Antécédents du litige
Procédures antérieures devant le Tribunal et la Cour
Procédure et conclusions des parties après renvoi
En droit
Sur les moyens tirés d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE et relatifs à l’existence et au calcul de l’avantage pour l’IFPEN
Sur l’avantage en ce qui concerne les relations entre l’IFPEN et ses fournisseurs et clients
– Sur le grief pris de l’absence de preuve de l’avantage dans les relations entre l’IFPEN et ses fournisseurs
– Sur le grief pris de l’absence de preuve de l’avantage dans les relations entre l’IFPEN et ses clients
Sur l’avantage en ce qui concerne les relations de l’IFPEN avec les institutions bancaires et financières
Sur les moyens, tirés d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, et relatifs au transfert de l’avantage aux filiales de l’IFPEN, Axens et Prosernat
Sur le moyen tiré d’une violation de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, et relatif à l’existence d’un transfert des ressources de l’État
Sur le moyen, tiré d’une violation du principe de proportionnalité
Sur l’étendue de l’annulation
Sur les dépens
* Langue de procédure : le français.
© European Union
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