Kratky v Parliament and Others (Order) French Text [2021] EUECJ T-13/21_CO (22 June 2021)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2021/T1321_CO.html
Cite as: ECLI:EU:T:2021:384, [2021] EUECJ T-13/21_CO, EU:T:2021:384

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (troisième chambre)

22 juin 2021 (*)

« Recours en indemnité – Protection des consommateurs – Prêt hypothécaire indexé sur une devise étrangère – Défaut d’arrêter des mesures législatives visant la protection des consommateurs – Recours manifestement dépourvu de tout fondement en droit »

Dans l’affaire T‑13/21,

Bálint Krátky, demeurant à Budapest (Hongrie), représenté par Me I. Kriston, avocat,

partie requérante,

contre

Parlement européen,

Conseil de l’Union européenne,

et

Commission européenne,

parties défenderesses,

ayant pour objet un recours fondé sur l’article 268 TFUE et tendant à obtenir réparation du préjudice que le requérant aurait prétendument subi du fait du défaut de la part du Parlement, du Conseil et de la Commission d’arrêter des mesures législatives visant la protection des consommateurs ayant souscrit un prêt hypothécaire indexé sur une devise étrangère,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. A. M. Collins (rapporteur), président, Z. Csehi et G. De Baere, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Procédure et conclusions du requérant

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 15 janvier 2021, le requérant, M. Bálint Krátky, a introduit le présent recours.

2        Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le même jour, le requérant a introduit une demande d’aide juridictionnelle.

3        Le requérant conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater la responsabilité non contractuelle du Parlement, du Conseil et de la Commission ;

–        condamner le Parlement, le Conseil et la Commission à payer, à titre de dommages et intérêts, un montant de 456 163,94 euros ;

–        condamner le Parlement, le Conseil et la Commission à payer, à titre d’indemnité de procédure, un montant de 2 328,98 euros.

 En droit

4        Aux termes de l’article 126 du règlement de procédure du Tribunal, lorsqu’un recours est manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sur proposition du juge rapporteur, à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

5        En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide de statuer sans poursuivre la procédure.

6        Le requérant se décrit comme étant un consommateur ayant conclu, en 2007, des contrats de prêt hypothécaire enregistrés en francs suisses (CHF), mais décaissés et remboursés en forints hongrois (HUF), avec deux établissements financiers établis à Budapest (Hongrie). Il fait valoir qu’il a subi un préjudice dans le cadre de ces contrats, constitué, notamment, de désavantages patrimoniaux et en termes de coûts. Selon lui, ce préjudice a été causé par un défaut du Parlement, du Conseil et de la Commission d’arrêter des mesures législatives visant à le protéger, de manière adéquate, en tant que consommateur ayant souscrit des prêts hypothécaires indexés sur une devise étrangère.

7        Le requérant fait observer que, entre 1987 et 2014, il n’existait aucune disposition de droit de l’Union réglementant les contrats en cause dès lors qu’ils étaient exclus du champ d’application de la directive 87/102/CEE du Conseil, du 22 décembre 1986, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de crédit à la consommation (JO 1987, L 42, p. 48), et de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102 (JO 2008, L 133, p. 66). À la suite de l’entrée en vigueur de la directive 2014/17/UE du Parlement européen et du Conseil, du 4 février 2014, sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage résidentiel et modifiant les directives 2008/48 et 2013/36/UE et le règlement (UE) no 1093/2010 (JO 2014, L 60, p. 34, rectificatifs JO 2015, L 246, p. 11 et JO 2017, L 166, p. 82), les contrats de crédit libellés en monnaie étrangère auraient été couverts par l’article 23 de cette directive. Toutefois, selon le requérant, l’adoption de cette directive est survenue trop tard, étant donné que la conclusion des contrats en cause a eu lieu en 2007.

8        À l’appui du recours, le requérant invoque, notamment, une violation de l’article 169, paragraphe 2, sous b), TFUE, des articles 21 et 38 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et de l’article 14 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950.

9        Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union, au sens de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, pour comportement illicite de ses organes est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué (voir arrêt du 9 septembre 2008, FIAMM e.a./Conseil et Commission, C‑120/06 P et C‑121/06 P, EU:C:2008:476, point 106 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 4 juillet 2000, Bergaderm et Goupil/Commission, C‑352/98 P, EU:C:2000:361, points 39 à 42).

10      Le caractère cumulatif des trois conditions d’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union implique que, lorsque l’une d’entre elles n’est pas remplie, le recours en indemnité doit être rejeté dans son ensemble, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres conditions (arrêt du 8 mai 2003, T. Port/Commission, C‑122/01 P, EU:C:2003:259, point 30).

11      S’agissant de la troisième condition, la jurisprudence exige l’établissement d’un lien direct de cause à effet entre la faute commise par l’institution concernée et le préjudice invoqué, lien dont il appartient à la partie requérante d’apporter la preuve. En d’autres termes, l’Union ne peut être tenue pour responsable que du préjudice qui découle de manière suffisamment directe du comportement irrégulier de l’institution concernée, c’est-à-dire que ce comportement doit être la cause déterminante du préjudice. En revanche, il n’incombe pas à l’Union de réparer toute conséquence préjudiciable, même éloignée, des comportements de ses organes (voir arrêt du 19 mars 2010, Gollnisch/Parlement, T‑42/06, EU:T:2010:102 point 110 et jurisprudence citée).

12      Dans des cas où le comportement prétendument à l’origine du dommage invoqué consiste en une abstention d’agir, comme en l’espèce, il est particulièrement nécessaire d’avoir la certitude que ledit dommage a effectivement été causé par les inactions reprochées et n’a pas pu être provoqué par des comportements distincts de ceux reprochés à l’institution défenderesse (arrêt du 13 décembre 2006, É.R. e.a./Conseil et Commission, T‑138/03, EU:T:2006:390, point 134).

13      En l’espèce, le requérant allègue l’existence d’un lien de causalité entre l’absence d’adoption, par le Parlement, le Conseil et la Commission, de mesures au titre de l’article 169 TFUE aux fins d’assurer un niveau élevé de protection des consommateurs souscrivant à des prêts hypothécaires et le préjudice qu’il aurait subi dans le cadre de la conclusion des contrats de prêts hypothécaires mentionnés au point 6 ci-dessus. Toutefois, il se borne à affirmer, à cet égard, que, d’une part, « si un niveau élevé de protection des consommateurs avait été assuré pour lui, [il] n’aurait pas subi [de préjudice] » et, d’autre part, « la chaîne de causalité n’a été rompue ni par l’action du requérant ni par celle de l’État membre », sans présenter d’éléments de preuve à l’appui de ces affirmations.

14      Partant, il convient de constater que le requérant n’a pas démontré, ainsi que l’exige la jurisprudence citée aux points 11 et 12 ci-dessus, que l’abstention d’agir du Parlement, du Conseil et de la Commission a été la cause déterminante de l’apparition du préjudice prétendument subi. Il ne peut être exclu que ledit préjudice ait été provoqué par des comportements distincts de ceux reprochés au Parlement, au Conseil et à la Commission.

15      Dès lors que la requête, même considérée dans son ensemble, ne permet pas d’identifier l’existence d’un lien de causalité suffisamment direct entre le comportement prétendument illicite du Parlement, du Conseil et de la Commission et le préjudice invoqué par le requérant, il convient de constater que la troisième condition nécessaire à l’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union n’est manifestement pas remplie. Or, ainsi qu’il résulte du point 10 ci-dessus, les trois conditions d’engagement de ladite responsabilité sont cumulatives, de sorte que l’absence de l’une d’entre elles suffit pour rejeter le recours en indemnité.

16      Il résulte des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de rejeter le présent recours comme étant manifestement dépourvu de tout fondement en droit, sans qu’il soit nécessaire de le signifier au Parlement, au Conseil et à la Commission.

 Sur les dépens

17      La présente ordonnance étant adoptée avant la signification de la requête au Parlement, au Conseil et à la Commission et avant que ceux-ci n’aient pu exposer des dépens, il suffit de décider que le requérant supportera ses propres dépens conformément à l’article 133 du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. Bálint Krátky supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 22 juin 2021.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

A. M. Collins


*      Langue de procédure : le hongrois.

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