KM (Judgment) French Text [2021] EUECJ T-374/20 (24 March 2021)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2021/T37420.html
Cite as: ECLI:EU:T:2021:162, EU:T:2021:162, [2021] EUECJ T-374/20

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Provisional text

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

24 mars 2021 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Conjoint survivant – Pension de survie – Articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut – Conditions d’éligibilité – Durée du mariage – Exception d’illégalité – Égalité de traitement – Principe de non-discrimination en fonction de l’âge – Proportionnalité »

Dans l’affaire T‑374/20,

KM, représentée par Me M. Müller-Trawinski, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. B. Mongin et T. Bohr, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Parlement européen, représenté par Mme M. Windisch et M. U. Rösslein, en qualité d’agents,

et par

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. M. Bauer et M. Alver, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant, d’une part, à l’annulation de la décision de la Commission du 7 octobre 2019 rejetant la demande d’octroi d’une pension de survie à la requérante et, d’autre part, à ce qu’il soit enjoint à la Commission d’adopter une nouvelle décision et de lui octroyer une pension de survie,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. R. da Silva Passos, président, Mme I. Reine (rapporteure) et M. L. Truchot, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        L’article 79, premier alinéa, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») prévoit :

« Dans les conditions prévues au chapitre 4 de l’annexe VIII [du statut], le conjoint survivant d’un fonctionnaire ou d’un ancien fonctionnaire a droit à une pension de survie égale à 60 % de la pension d’ancienneté ou de l’allocation d’invalidité dont son conjoint bénéficiait ou dont il aurait bénéficié s’il avait pu y prétendre, sans condition de service ni d’âge, au moment de son décès. »

2        L’article 18 de l’annexe VIII du statut indique ce qui suit :

« Le conjoint survivant d’un ancien fonctionnaire titulaire d’une pension d’ancienneté, pour autant que le mariage ait été contracté avant que l’intéressé ait cessé d’être au service d’une institution et qu’il ait été son conjoint pendant un an au moins, a droit, sous réserve des dispositions prévues à l’article 22 [de la présente annexe], à une pension de survie égale à 60 % de la pension d’ancienneté dont bénéficiait son conjoint au jour de son décès […]

La condition de durée du mariage prévue au premier alinéa ne joue pas si un ou plusieurs enfants sont issus d’un mariage du fonctionnaire contracté antérieurement à sa cessation d’activité, pour autant que le conjoint survivant pourvoie ou ait pourvu aux besoins de ces enfants. »

3        L’article 20 de l’annexe VIII du statut se lit comme suit :

« La condition d’antériorité prévue [à l’article 18 de l’annexe VIII du statut] ne joue pas si le mariage, même contracté postérieurement à la cessation d’activité du fonctionnaire, a duré au moins cinq ans. »

 Antécédents du litige

4        La requérante, KM, et son conjoint, fonctionnaire auprès de la Commission européenne, ont vécu en couple à partir de 1984. Le 25 mai 2004, ils ont conclu un contrat de partenariat notarié en Allemagne, qu’ils ont ensuite fait enregistrer le 27 octobre 2009 à Bruxelles (Belgique) en tant que déclaration de cohabitation légale.

5        Le 1er mars 2016, le conjoint de la requérante a été admis à la retraite.

6        La requérante et son conjoint se sont mariés le 6 octobre 2017. Ce dernier est décédé le 10 septembre 2019.

7        À la suite du décès de son époux, la requérante, en sa qualité de conjointe survivante d’un ancien fonctionnaire, a introduit une demande d’octroi d’une pension de survie au titre du chapitre 4 de l’annexe VIII du statut.

8        Par lettre du 7 octobre 2019, la cheffe de l’unité « Pensions » de l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO) de la Commission a rejeté la demande d’octroi d’une pension de survie de la requérante (ci-après la « décision attaquée »). Celle-ci a estimé, en substance, que la requérante ne remplissait pas les conditions de durée du mariage prévues à l’article 20 de l’annexe VIII du statut pour pouvoir bénéficier d’une pension de survie, compte tenu du fait que son mariage avec le fonctionnaire défunt, contracté postérieurement à la cessation de fonctions de celui-ci, avait duré moins de cinq années.

9        Le 22 novembre 2019, la requérante a introduit une réclamation contre la décision attaquée.

10      Par décision du 20 mars 2020, l’autorité investie du pouvoir de nomination de la Commission a rejeté la réclamation de la requérante (ci-après la « décision de rejet de la réclamation »).

 Procédure et conclusions des parties

11      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 15 juin 2020, la requérante a introduit le présent recours.

12      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 30 juin 2020, en application de l’article 66 du règlement de procédure du Tribunal, la requérante a demandé le bénéfice de l’anonymat, qui lui a été accordé par décision du Tribunal du 23 juillet 2020.

13      Par actes déposés au greffe du Tribunal, respectivement, le 16 septembre et le 24 septembre 2020, le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne ont demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.

14      Par décisions du président de la septième chambre du Tribunal du 15 octobre et du 26 octobre 2020, respectivement, le Parlement et le Conseil ont été admis à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.

15      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 22 décembre 2020, le Conseil a indiqué qu’il renonçait à déposer un mémoire en intervention.

16      Les parties principales n’ayant pas demandé la tenue d’une audience, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, a décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, de statuer sans phase orale de la procédure.

17      La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ainsi que la décision de rejet de la réclamation ;

–        enjoindre à la Commission de prendre une nouvelle décision et de lui octroyer une pension de survie ;

–        condamner la Commission aux dépens.

18      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

19      Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur l’objet du recours

20      Premièrement, il y a lieu de relever que, par son premier chef de conclusions, la requérante demande, en substance, l’annulation de la décision attaquée et de la décision de rejet de la réclamation.

21      Selon une jurisprudence constante, des conclusions en annulation formellement dirigées contre la décision de rejet d’une réclamation ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée lorsqu’elles sont, en tant que telles, dépourvues de contenu autonome (voir arrêt du 13 juillet 2018, Curto/Parlement, T‑275/17, EU:T:2018:479, point 63 et jurisprudence citée).

22      En l’espèce, étant donné que la décision de rejet de la réclamation ne fait que confirmer la décision attaquée, en précisant les motifs venant au soutien de celle-ci, il convient de constater que les conclusions en annulation de la décision de rejet de la réclamation sont dépourvues de contenu autonome et qu’il n’y a donc pas lieu de statuer spécifiquement sur celles-ci. Toutefois, dans l’examen de la légalité de la décision attaquée, il est nécessaire de prendre en considération la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation, cette motivation étant censée coïncider avec celle de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 30 avril 2019, Wattiau/Parlement, T‑737/17, EU:T:2019:273, point 43 et jurisprudence citée).

23      Deuxièmement, par son deuxième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal d’enjoindre à la Commission d’adopter une nouvelle décision et de lui octroyer la pension de survie à laquelle elle estime avoir droit.

24      À cet égard, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence constante, dans le cadre du contrôle de légalité fondé sur l’article 91 du statut et sur l’article 270 TFUE, le Tribunal n’est pas compétent pour adresser des injonctions à l’administration. En effet, en vertu de l’article 266, paragraphe 1, TFUE, il incombe à l’institution dont émane l’acte annulé de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt (arrêts du 5 octobre 2016, CJ/ECDC, T‑370/15 P, non publié, EU:T:2016:599, point 109, et du 5 décembre 2017, Spadafora/Commission, T‑250/16 P, non publié, EU:T:2017:866, point 48). Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter le deuxième chef de conclusions pour cause d’incompétence.

 Sur le fond

25      À l’appui de son recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de l’illégalité de l’article 20 de l’annexe VIII du statut. Ce moyen comporte, en substance, deux griefs, tirés, premièrement, de la violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination entre les couples hétérosexuels et homosexuels et, deuxièmement, de la violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination en raison de l’âge.

26      Dans le cadre du second grief du moyen unique, la requérante fait valoir que, en vertu de l’article 18 de l’annexe VIII du statut, une année de mariage est considérée comme suffisante pour admettre une relation stable et non frauduleuse entre le conjoint survivant et l’ancien fonctionnaire, lorsque le mariage a été conclu avant la cessation d’activité de ce dernier. En revanche, aux termes de l’article 20 de cette annexe, lorsque le mariage est postérieur au départ à la retraite de l’ancien fonctionnaire, une durée minimale de cinq années de mariage est requise afin d’ouvrir le droit à une pension de survie. Or, il n’y aurait pas lieu d’exclure complètement la prise en charge des conjoints survivants qui se sont mariés après le départ à la retraite de l’ancien fonctionnaire.

27      La requérante souligne que, dans l’arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:1119), la Cour a jugé qu’une condition de durée minimale d’une année de mariage permettait de s’assurer de l’existence de relations réelles et stables entre les personnes concernées et n’était dès lors ni discriminatoire ni manifestement inappropriée. Selon la requérante, il doit en valoir de même pour des fonctionnaires déjà retraités, donc plus âgés, au moment du mariage.

28      La requérante soutient, en substance, que, dès lors que les conjoints survivants de fonctionnaires à la retraite se voient imposer un délai d’attente cinq fois plus long en vertu de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, ils devraient au moins avoir la possibilité d’apporter la preuve contraire du caractère durable de leur relation. Un délai d’attente de cinq années ne serait pas nécessaire pour lutter contre la fraude, dès lors qu’il existerait d’autres moyens moins contraignants de détecter des mariages de complaisance.

29      La requérante reconnaît que, d’un point de vue statistique, la probabilité du décès d’un fonctionnaire à la retraite est plus élevée que celle du décès d’un fonctionnaire en activité. Elle estime, néanmoins, qu’un fonctionnaire en activité peut également contracter une maladie chronique et avoir une espérance de vie réduite. Pourtant, dans ce cas, une durée minimale d’une année de mariage sera considérée comme suffisante, alors même que ce fonctionnaire pourrait s’empresser de se marier afin de subvenir aux besoins de son conjoint.

30      La Commission répond que le législateur possède un large pouvoir d’appréciation lorsque son action comporte un choix politique, économique et social, y compris en matière de pension de survie.

31      Selon la Commission, la pension de survie ne serait pas destinée à compenser l’incapacité du conjoint survivant à subvenir à ses besoins, mais elle serait l’expression d’une grande solidarité en cas de décès du fonctionnaire. Cette pension présenterait la particularité de représenter un montant très élevé par rapport aux régimes de pensions publics et d’être versée au bénéficiaire sans aucune contrepartie. Il existerait un risque réel de conclure un mariage de complaisance ou dans le seul but de bénéficier de la pension de survie.

32      Il résulterait de l’arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:1119), que l’objectif de lutte contre la fraude poursuivi par l’article 20 de l’annexe VIII du statut est légitime. De plus, en raison d’une plus grande prévisibilité et d’une plus grande proximité du décès, le risque de fraude serait plus élevé dans le cas d’un mariage contracté après la cessation d’activité du fonctionnaire. Une durée minimale de cinq années de mariage constituerait une mesure appropriée pour lutter contre une telle fraude. En outre, cette durée serait suffisamment longue pour garantir qu’un mariage a été contracté pour des raisons autres que financières et aurait un effet dissuasif.

33      La Commission ajoute que, même si une réglementation telle que l’article 20 de l’annexe VIII du statut comporte certains inconvénients, ceux-ci ne peuvent être reprochés au législateur qui a choisi un critère non discriminatoire pour atteindre l’objectif poursuivi.

34      Par ailleurs, la Commission soutient que l’article 20 de l’annexe VIII du statut est lié à la cessation d’activité du fonctionnaire. Il n’existerait donc pas de différence de traitement fondée sur l’âge. La différence de traitement en cause serait due au fait que les fonctionnaires et les anciens fonctionnaires se trouvent dans des situations différentes. Ainsi, il existerait une différence selon que le fonctionnaire a contracté un mariage pendant qu’il était en fonction ou après la cessation de ses activités.

35      Le Parlement indique qu’il se rallie aux arguments de la Commission. Il ajoute que, dans l’arrêt du 24 novembre 2016, Parris (C‑443/15, EU:C:2016:897), la Cour a jugé qu’une disposition nationale qui subordonne le droit à une pension de survie à la condition que l’affilié se soit marié ou ait conclu un partenariat enregistré avant l’âge de 60 ans ne constitue pas une discrimination fondée sur l’âge.

 Observations liminaires

36      Il convient de rappeler que le principe d’égalité de traitement constitue un principe général du droit de l’Union européenne, consacré à l’article 20 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), dont le principe de non-discrimination énoncé à son article 21, paragraphe 1, est une expression particulière. Ce principe exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir arrêt du 5 juillet 2017, Fries, C‑190/16, EU:C:2017:513, points 29 et 30 et jurisprudence citée).

37      Selon la jurisprudence, pour qu’il puisse être reproché au législateur de l’Union d’avoir violé le principe d’égalité de traitement, il faut qu’il ait traité d’une façon différente des situations comparables entraînant un désavantage pour certaines personnes par rapport à d’autres (voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2018, FV/Conseil, T‑750/16, EU:T:2018:972, point 89 et jurisprudence citée).

38      En ce qui concerne l’exigence tenant au caractère comparable des situations, celle-ci s’apprécie au regard de l’ensemble des éléments qui les caractérisent. Ces éléments doivent, notamment, être déterminés et appréciés à la lumière de l’objet et du but de l’acte de l’Union qui institue la distinction en cause. Doivent, en outre, être pris en considération les principes et les objectifs du domaine dont relève l’acte en cause (voir arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 67 et jurisprudence citée).

39      De plus, en vue de déterminer si le traitement par le statut des situations à comparer porte atteinte au principe d’égalité de traitement, il convient de se fonder sur une analyse centrée sur l’ensemble des règles de droit régissant les positions de chacune des situations à comparer, en tenant compte notamment de l’objet de la disposition contestée (voir, par analogie, arrêt du 9 mars 2017, Milkova, C‑406/15, EU:C:2017:198, point 58).

40      Pour qu’une différence de traitement puisse être compatible avec les principes généraux d’égalité de traitement et de non-discrimination, cette différence doit être justifiée sur la base d’un critère objectif et raisonnable et proportionnée par rapport au but poursuivi par cette différenciation (voir, en ce sens, arrêt du 15 février 2005, Pyres/Commission, T‑256/01, EU:T:2005:45, point 61). À cet égard, aux termes de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, toute limitation de l’exercice des droits et des libertés reconnus par celle-ci doit être prévue par la loi et respecter le contenu essentiel de ces droits et de ces libertés. Dans le respect du principe de proportionnalité, des limitations ne peuvent être apportées que si elles sont nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union ou au besoin de protection des droits et des libertés d’autrui.

41      Il ressort de la jurisprudence que le principe de proportionnalité exige que les actes des institutions de l’Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (voir arrêt du 26 février 2016, Bodson e.a./BEI, T‑240/14 P, EU:T:2016:104, point 116 et jurisprudence citée).

42      Il convient néanmoins d’ajouter que, en vue de lutter contre les abus, voire la fraude, le législateur de l’Union dispose d’une marge d’appréciation dans l’établissement du droit à une pension de survie (arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 89). La reconnaissance d’un tel pouvoir d’appréciation du législateur implique la nécessité de vérifier s’il n’apparaît pas déraisonnable pour le législateur de l’Union d’estimer que la différence de traitement instituée puisse être appropriée et nécessaire aux fins de la réalisation de l’objectif poursuivi (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 14 décembre 2018, FV/Conseil, T‑750/16, EU:T:2018:972, point 114 et jurisprudence citée).

43      C’est à la lumière de l’ensemble de ces principes qu’il convient de vérifier si la condition d’une durée minimale du mariage prévue à l’article 20 de l’annexe VIII du statut va à l’encontre des principes généraux d’égalité de traitement et de non-discrimination fondée sur l’âge au vu des objectifs poursuivis par cette condition. Il convient donc d’examiner si cette condition est prévue par la loi et respecte le contenu essentiel du droit à l’égalité de traitement et de l’interdiction de toute discrimination, si les situations visées par les articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut sont comparables et, dans l’affirmative, si la condition de la durée minimale de cinq années de mariage prévue à l’article 20 de l’annexe VIII du statut poursuit un objectif d’intérêt général. À cet égard, il y a lieu de vérifier s’il n’apparaît pas déraisonnable pour le législateur de l’Union d’estimer que la différence de traitement instituée puisse être appropriée et nécessaire aux fins de la réalisation d’un tel objectif.

 Sur l’existence d’une différence de traitement

44      Il y a lieu de rappeler que, dans son arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 68), la Cour a jugé que l’objectif de la pension de survie était d’octroyer au conjoint survivant un revenu de remplacement destiné à compenser partiellement la perte des revenus du conjoint décédé. Selon la Cour, ce droit n’est pas soumis à des conditions de ressources ou de patrimoine devant caractériser une incapacité du conjoint survivant à faire face à ses besoins et démontrant ainsi sa dépendance financière passée par rapport au défunt (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 69).

45      L’octroi de la pension de survie dépend, en revanche, seulement de la nature juridique des liens qui unissaient la personne concernée au fonctionnaire décédé (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, point 70). À cette condition s’ajoute celle de la durée minimale du mariage, en l’occurrence une année selon l’article 18 de l’annexe VIII du statut et cinq années selon l’article 20 de l’annexe VIII du statut.

46      Cela étant précisé, il y a lieu de constater que les articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut traitent différemment les conjoints survivants d’anciens fonctionnaires selon que le mariage a été contracté avant ou après la cessation d’activité de ces derniers. La date du mariage constitue donc le critère retenu par le législateur pour distinguer les deux situations.

47      Or, la nature juridique des liens qui unissaient le conjoint survivant au fonctionnaire décédé est identique, que le mariage ait été conclu avant ou après la cessation d’activité de ce dernier. Cette nature juridique ne diffère pas selon que les fonctionnaires exerçaient une activité professionnelle ou non.

48      En outre, l’objectif de la pension de survie, dont le régime est établi par les articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut, est de compenser, au bénéfice du conjoint survivant, la perte de revenus découlant du décès de l’ancien fonctionnaire. Il s’agit donc d’octroyer un revenu de remplacement au conjoint survivant. Ainsi, la circonstance que le fonctionnaire défunt se soit marié avant ou après la cessation de ses fonctions n’est pas de nature à modifier de façon essentielle la situation du conjoint survivant, en ce qui concerne ses droits patrimoniaux. De plus, ainsi qu’il ressort du point 44 ci-dessus, la Cour a jugé que le niveau des besoins financiers du conjoint survivant et son éventuelle dépendance financière à l’égard du fonctionnaire ou de l’ancien fonctionnaire décédé ne constituent pas un critère à prendre en compte.

49      Ainsi, il y a lieu de constater que la situation des conjoints survivants d’un ancien fonctionnaire qui se sont mariés avant la cessation d’activité de celui-ci n’est pas différente de celle des conjoints survivants d’un ancien fonctionnaire qui ont contracté mariage après cette cessation aux fins de l’octroi d’une pension de survie en application de l’article 18 ou de l’article 20 de l’annexe VIII du statut.

50      Il résulte de tout ce qui précède qu’il existe une différence de traitement de situations comparables en fonction de la date de la conclusion du mariage, dès lors qu’il s’agit de l’unique élément qui détermine l’application des conditions de durées minimales différentes du mariage conformément aux articles 18 et 20 de l’annexe VIII du statut.

51      Cette différence de traitement entraîne un désavantage, au sens de la jurisprudence citée au point 37 ci-dessus, pour les conjoints survivants d’un ancien fonctionnaire qui se sont mariés après la cessation d’activité de celui-ci, auxquels le régime de l’article 20 de l’annexe VIII du statut s’applique, par rapport aux conjoints survivants d’un ancien fonctionnaire qui ont contracté mariage avant cette cessation et qui relèvent de l’article 18 de cette annexe.

52      À cet égard, il convient également de relever que la condition d’une durée minimale de cinq années de mariage prévue par l’article 20 de l’annexe VIII du statut entraîne un désavantage particulier pour les conjoints survivants ayant épousé un ancien fonctionnaire en raison du fait que, dans la grande majorité des cas, la cessation d’activité d’un fonctionnaire correspondant au départ à la retraite de celui-ci, dont l’âge est fixé par le statut, celui-ci est plus âgé qu’un fonctionnaire en activité. Ainsi, les anciens fonctionnaires visés par l’article 20 de l’annexe VIII du statut se sont généralement mariés à un âge plus avancé que les anciens fonctionnaires visés par l’article 18 de l’annexe VIII du statut, qui se sont mariés avant leur cessation d’activité. Par conséquent, les conjoints survivants ayant épousé un ancien fonctionnaire ont en règle générale plus de difficultés à satisfaire à la condition de la durée minimale du mariage prévue par ledit article 20, qui s’élève à cinq années, que les conjoints survivants qui ont épousé un fonctionnaire avant la cessation d’activité, et pour lesquels l’article 18 de l’annexe VIII du statut ne prévoit qu’une durée minimale de mariage d’un an.

53      Ainsi, en raison de la durée minimale de cinq années de mariage qu’il impose, le traitement prévu à l’article 20 de l’annexe VIII du statut pour les conjoints survivants ayant épousé un ancien fonctionnaire après la cessation d’activité de celui-ci est moins favorable que le traitement prévu à l’article 18 de ladite annexe pour les conjoints survivants qui se sont mariés lorsque le fonctionnaire était encore en activité et était généralement plus jeune qu’un ancien fonctionnaire.

54      Il existe donc également une différence de traitement de situations comparables, fondée indirectement sur l’âge de l’ancien fonctionnaire à la date à laquelle il a contracté mariage.

55      L’arrêt du 24 novembre 2016, Parris (C‑443/15, EU:C:2016:897), invoqué par le Parlement, ne saurait remettre cette conclusion en cause. Au contraire, dans cet arrêt, la Cour a jugé que la réglementation nationale en cause qui, dans le cadre d’un régime de prévoyance professionnel, subordonnait le droit des partenaires enregistrés survivants des affiliés à bénéficier d’une prestation de survie à la condition que le partenariat enregistré ait été conclu avant que l’affilié n’ait atteint l’âge de 60 ans, instituait une différence de traitement directement fondée sur le critère de l’âge (arrêt du 24 novembre 2016, Parris, C‑443/15, EU:C:2016:897, point 68). Cet arrêt tend donc à appuyer l’existence d’une différence de traitement fondée sur l’âge.

 Sur le respect des critères énoncés à l’article 52, paragraphe 1, de la Charte et la justification de la différence de traitement

56      À titre liminaire, il y a lieu de constater que la différence de traitement instituée par l’article 20 de l’annexe VIII du statut est prévue par la « loi » au sens de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, dans la mesure où cette disposition trouve son origine dans le statut.

57      Par ailleurs, aux fins de justifier la différence de traitement en cause, la Commission fait valoir que la condition d’une durée minimale de cinq années de mariage vise à prévenir les fraudes, dont le risque croîtrait à mesure que le décès deviendrait plus prévisible. Il s’agirait, en substance, de protéger le fonctionnaire victime d’une personne indélicate qui chercherait à conclure un mariage de pure complaisance à seule fin de toucher la pension de survie.

58      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, selon la Cour, le principe d’interdiction de la fraude et de l’abus de droit constitue un principe général du droit de l’Union dont le respect s’impose aux justiciables (arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission, C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, points 88 et 89). La lutte contre la fraude constitue donc un objectif d’intérêt général.

59      À cet égard, il ressort, en substance, de l’arrêt du 19 décembre 2019, HK/Commission (C‑460/18 P, EU:C:2019:1119, points 89 et 90), qu’une condition de durée minimale du mariage d’un an, telle que celle prévue à l’article 17 de l’annexe VIII du statut, vise à s’assurer de la réalité et de la stabilité des relations entre les personnes concernées et n’apparaît pas, à ce titre, manifestement inadéquate eu égard à l’objectif de lutte contre la fraude.

60      Ainsi, il n’apparaît pas déraisonnable de subordonner le droit du conjoint survivant d’un fonctionnaire ou d’un ancien fonctionnaire à percevoir une pension de survie à la condition que le mariage ait satisfait à une condition de durée minimale. Une telle condition permet, en effet, de s’assurer que ce mariage ne repose pas exclusivement sur des considérations étrangères à un projet de vie commun, telles que des considérations purement financières ou liées à l’obtention d’un droit de séjour.

61      Toutefois, il convient de souligner que l’article 20 de l’annexe VIII du statut, qui s’applique lorsque le mariage a été conclu après la cessation d’activité du fonctionnaire, impose une condition de durée minimale du mariage cinq fois supérieure à celle prévue par l’article 18 de l’annexe VIII du statut, qui trouve à s’appliquer lorsque le mariage a été conclu avant cette cessation d’activité du fonctionnaire.

62      À cet égard, il n’est nullement contesté que le législateur de l’Union dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans l’établissement d’un seuil tel que celui d’une durée minimale de cinq années de mariage dans le cadre de l’article 20 de l’annexe VIII du statut. Toutefois, ainsi que le fait valoir, en substance, la requérante, et comme il ressort de la jurisprudence citée aux points 40 à 42 ci-dessus, ce pouvoir n’est pas illimité et doit s’exercer dans le respect des principes généraux du droit de l’Union, tels que les principes d’égalité de traitement et de proportionnalité.

63      Ainsi, il convient encore de vérifier si la condition de la durée minimale du mariage requise par l’article 20 de l’annexe VIII du statut, qui s’applique sans aucune exception possible, ne va pas manifestement au-delà de ce qui est nécessaire pour garantir l’absence de fraude.

64      À cet égard, tout d’abord, il y a lieu de constater que le dossier ne contient aucune explication convaincante ni aucun élément de preuve permettant d’étayer la prémisse, avancée par la Commission, selon laquelle la probabilité de conclure un mariage frauduleux augmente après la cessation d’activité des fonctionnaires, de sorte, par exemple, qu’un fonctionnaire qui se marierait la veille de la cessation d’activité serait moins susceptible de conclure un mariage frauduleux qu’un fonctionnaire qui se marierait le lendemain d’une telle cessation. La Commission n’a pas davantage expliqué pour quel motif un fonctionnaire qui a cessé son activité serait moins apte à se prémunir contre les intentions frauduleuses d’une personne souhaitant l’épouser qu’un fonctionnaire qui serait encore en activité, de sorte qu’il serait nécessaire d’imposer une durée minimale de mariage cinq fois plus élevée lorsque le mariage est contracté après la cessation d’activité du fonctionnaire.

65      En outre, il y a lieu de constater que, comme le soutient en substance la requérante, l’article 20 de l’annexe VIII du statut instaure, dans les faits, une présomption générale de fraude à l’égard des mariages dont la durée est inférieure à cinq années. Cette présomption ne peut pas être renversée, de sorte qu’elle revêt un caractère irréfragable.

66      Il en résulte que, aux fins de l’application de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, des mariages, même conclus de bonne foi, sont présumés frauduleux lorsqu’ils ont duré moins de cinq années.

67      Or, selon une jurisprudence bien établie, une présomption générale de fraude ne saurait suffire à justifier une mesure qui porte atteinte aux objectifs du traité FUE (voir arrêt du 19 décembre 2012, Commission/Belgique, C‑577/10, EU:C:2012:814, point 53 et jurisprudence citée).

68      En outre, il y a lieu de relever que la durée du mariage n’est pas nécessairement le seul élément représentatif de la sincérité de celui-ci (voir, par analogie, arrêts du 20 juin 2013, Giersch e.a., C‑20/12, EU:C:2013:411, points 72 et 73 et jurisprudence citée, et du 18 juillet 2013, Prinz et Seeberger, C‑523/11 et C‑585/11, EU:C:2013:524, points 36 et 37 et jurisprudence citée).

69      Or, l’article 20 de l’annexe VIII du statut utilise exclusivement la condition d’une durée minimale de cinq années de mariage, sans prévoir aucune exception, de sorte qu’il est impossible pour le conjoint survivant ayant contracté un mariage après la cessation d’activité de l’ancien fonctionnaire de faire valoir que le mariage a été conclu de bonne foi, et ce quels que soient les éléments de preuve objectifs qu’il pourrait présenter à cet égard. Ce faisant, cette disposition institue une présomption générale et irréfragable de fraude envers les mariages ayant duré moins de cinq années.

70      En revanche, l’article 18, deuxième alinéa, de l’annexe VIII du statut prévoit des circonstances objectives dans lesquelles aucune durée minimale du mariage n’est requise, à savoir la naissance d’un enfant issu du mariage du fonctionnaire avant la cessation de ses activités, pour autant que le conjoint survivant pourvoie ou ait pourvu aux besoins de celui-ci. Le législateur a donc considéré, dans le cas d’un mariage conclu avant la cessation d’activité de l’ancien fonctionnaire, qu’il existait des circonstances objectives qui permettaient de renverser la présomption de fraude.

71      Les circonstances objectives rappelées au point 70 ci-dessus constituent des critères clairs permettant de gérer efficacement les pensions de survie, dans le respect du principe de sécurité juridique.

72      En l’espèce, même si le mariage de la requérante avec l’ancien fonctionnaire a été conclu après la cessation d’activité de son conjoint, il existe des éléments objectifs susceptibles de démontrer qu’il ne s’agit pas d’un mariage frauduleux. En effet, la requérante a mené une vie commune de près de 20 années avec l’ancien fonctionnaire avant de conclure un partenariat notarié avec celui-ci en Allemagne en 2004. Ce partenariat, qui a ensuite été enregistré en Belgique en 2009, a été suivi d’un mariage en 2017. Il y avait donc bien un projet de vie commun qui a duré plus de 35 années. Au demeurant, ni la Commission ni le Parlement n’ont soutenu que le cas d’espèce était entaché de fraude.

73      Par ailleurs, au vu de l’âge généralement plus élevé des anciens fonctionnaires visés par l’article 20 de l’annexe VIII du statut, l’exigence d’une durée minimale de cinq années de mariage est particulièrement difficile à remplir pour les conjoints survivants ayant épousé un tel ancien fonctionnaire. Elle est ainsi susceptible d’exclure du bénéfice de la pension de survie un nombre significatif de ces conjoints qui, pourtant, auraient pu établir l’absence de fraude.

74      À cet égard, il est vrai que, dans l’arrêt du 24 novembre 2016, Parris (C‑443/15, EU:C:2016:897), la Cour a jugé qu’une réglementation nationale qui, dans le cadre d’un régime de prévoyance professionnel, subordonnait le droit des partenaires enregistrés survivants des affiliés à bénéficier d’une prestation de survie à la condition que le partenariat enregistré ait été conclu avant que l’affilié n’ait atteint l’âge de 60 ans, alors que le droit national ne permettait pas à l’affilié concerné de conclure un partenariat enregistré avant d’atteindre cette limite d’âge, ne constituait pas une discrimination fondée sur l’âge (arrêt du 24 novembre 2016, Parris, C‑443/15, EU:C:2016:897, point 78).

75      Toutefois, il y a lieu de rappeler que, comme cela est indiqué au point 55 ci-dessus, dans un premier temps, la Cour avait constaté l’existence d’une différence de traitement fondée sur l’âge dans cette affaire. Dans un second temps, la Cour a examiné si une telle différence de traitement pouvait être justifiée au regard de l’article 2 et de l’article, 6, paragraphe 2, de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail (JO 2000, L 303, p.16).

76      Ainsi, la Cour a rappelé que l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2000/78 permet aux États membres de prévoir que ne constitue pas une discrimination fondée sur l’âge la fixation, pour les régimes professionnels de sécurité sociale, d’âges d’adhésion ou d’admissibilité aux prestations de retraite ou d’invalidité. Sur le fondement de cette disposition particulière, la Cour a conclu que la différence de traitement en raison de l’âge instituée par la réglementation nationale en cause ne constituait pas une telle discrimination. Or, le Parlement n’a nullement expliqué dans quelle mesure cette disposition pouvait trouver à s’appliquer dans un cas tel que celui de l’espèce, qui concerne la mise en œuvre d’une disposition du statut.

77      Enfin, il y a lieu de rappeler que le législateur n’a pas toujours exclu toute appréciation individuelle dans le statut. Ainsi, l’article 1er, paragraphe 2, sous d), de l’annexe VII du statut prévoit qu’un fonctionnaire ne remplissant pas les conditions prévues pour l’octroi de l’allocation de foyer peut, sur « décision spéciale et motivée de l’autorité investie du pouvoir de nomination, prise sur la base de documents probants », en bénéficier lorsqu’il assume cependant effectivement des charges de famille.

78      Il résulte de tout ce qui précède qu’il est déraisonnable de considérer que la condition d’une durée minimale de cinq années de mariage prévue par l’article 20 de l’annexe VIII du statut, qui est cinq fois plus élevée que celle prévue par l’article 18 de l’annexe VIII du statut et qui ne souffre aucune exception permettant d’établir l’absence de fraude, quels que soient les éléments de preuve objectifs apportés, puisse être nécessaire aux fins de la réalisation de l’objectif de lutte contre la fraude.

79      Par conséquent, l’article 20 de l’annexe VIII du statut instaure une différence de traitement entre conjoints survivants d’anciens fonctionnaires qui n’est pas justifiée par l’objectif de lutte contre la fraude, dès lors qu’elle n’est pas nécessaire pour réaliser cet objectif.

80      En outre, en ce qu’il instaure une présomption générale et irréfragable de fraude envers les couples dont le mariage a duré moins de cinq années, alors même qu’une présomption générale de fraude ne saurait suffire à justifier une mesure qui porte atteinte aux objectifs du traité FUE, l’article 20 de l’annexe VIII du statut ne respecte pas le contenu essentiel du droit à l’égalité de traitement et de l’interdiction de toute discrimination.

81      Partant, l’article 20 de l’annexe VIII du statut viole le principe général d’égalité de traitement ainsi que le principe de non-discrimination en fonction de l’âge. Il y a donc lieu de faire droit à l’exception d’illégalité soulevée par la requérante.

82      Par voie de conséquence, la décision attaquée, adoptée sur le fondement de l’article 20 de l’annexe VIII du statut, se trouve privée de base légale, de sorte qu’il convient de l’annuler, sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre grief de la requête.

 Sur les dépens

83      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé pour l’essentiel, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.

84      Par ailleurs, selon l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs propres dépens. Il convient donc de décider que le Parlement et le Conseil supporteront chacun leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la Commission européenne du 7 octobre 2019 rejetant la demande d’octroi d’une pension de survie à KM est annulée.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La Commission supportera, outre ses propres dépens, les dépens de KM.

4)      Le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne supporteront chacun leurs propres dépens.

da Silva Passos

Reine

Truchot

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 mars 2021.

Signatures

*      Langue de procédure : l’allemand.

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