Soapland v EUIPO - Norma (Manòu) (EU trade mark - Judgment) French Text [2021] EUECJ T-504/20 (17 November 2021)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2021/T50420.html
Cite as: EU:T:2021:789, ECLI:EU:T:2021:789, [2021] EUECJ T-504/20

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

17 novembre 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale Manòu – Marques nationale et internationale verbales antérieures MANOU – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] – Preuve de l’usage sérieux des marques antérieures »

Dans l’affaire T‑504/20,

Soapland GmbH & Co. OHG, établie à Andernach (Allemagne), représentée par Me M. Gail, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. M. Fischer et Mme A. Graul, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Norma Lebensmittelfilialbetrieb Stiftung & Co. KG, établie à Nürnberg (Allemagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 8 juin 2020 (affaire R 1504/2019‑1), relative à une procédure d’opposition entre Norma Lebensmittelfilialbetrieb Stiftung & Co. et SoaplandGmbH & Co.,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme V. Tomljenović, présidente, MM. F. Schalin (rapporteur) et I. Nõmm, juges,

greffier : Mme R. Ūkelytė, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 11 août 2020,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 21 octobre 2020,

à la suite de l’audience du 12 juillet 2021,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 21 octobre 2015, la requérante, Soapland GmbH & Co. OHG, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal Manòu.

3        Les produits visés par cette demande relèvent des classes 18, 24 et 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante :

–        classe 18 : « Produits en cuir et en imitations du cuir (compris dans la classe 18), à savoir sacs de plage, portefeuilles, sacs à provisions, sacs à main, gibecières, sacs de voyage, sacs à dos, sacs d’alpinistes, serviettes d’écoliers, sacs, sacs [enveloppes, pochettes] en cuir pour l’emballage, nécessaires de toilette et trousses de toilette, peaux et fourrures, malles et valises, fouets, harnais, articles de sellerie » ;

–        classe 24 : « Tissus et produits textiles non compris dans d’autres classes ; couverture de lit ou de table ; linge de lit » ;

–        classe 25 : « Vêtements, notamment robes, jupes, tuniques, chemisiers, pantalons, chemises, tee-shirts, pull-overs, vestes, manteaux, peignoirs de bain, cache-col, gilets, foulards, foulards de hanches, ceintures, gaines ; chaussures, chapeaux ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2015/235, du 10 décembre 2015.

5        Le 10 mars 2016, l’autre partie à la procédure devant l’EUIPO, Norma Lebensmittelfilialbetrieb Stiftung & Co. KG, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque allemande verbale MANOU, déposée le 23 mai 1980, enregistrée le 11 mars 1981 et renouvelée le 1er juin 2010, sous le numéro 1015278, pour les produits relevant de la classe 25 et correspondant à la description suivante : « Vêtements ; notamment bas pour dames, collants pour dames ; chapeaux, bonnets et casquettes ; chaussures » ;

–        l’enregistrement international de la marque verbale MANOU, avec une extension de la protection à la République tchèque, à la France et à l’Autriche, enregistré le 25 janvier 2005 et prolongé le 12 février 2015, sous le numéro 844568, portant sur les mêmes produits compris dans la classe 25 que ceux visés par la marque verbale allemande no 1015278.

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

8        La requérante ayant demandé le 30 novembre 2016 que l’autre partie fournisse la preuve de l’usage sérieux des marques antérieures, cette dernière a présenté de nombreux documents par mémoire du 4 avril 2017.

9        Par décision du 17 mai 2019, la division d’opposition a partiellement accueilli l’opposition et, par conséquent, a rejeté la demande d’enregistrement pour les produits cités ci-après. Elle a constaté un usage sérieux de la marque allemande antérieure pour les « vêtements » en Allemagne et a estimé la similitude des signes suffisante pour motiver un risque de confusion pour tous les produits identiques ou similaires :

–        classe 18 : « Produits en cuir et en imitations du cuir (compris dans la classe 18), à savoir sacs de plage, portefeuilles, sacs à provisions, sacs à main, gibecières, sacs à dos, sacs d’alpinistes, serviettes d’écoliers, sacs » ;

–        classe 25 : « Vêtements, notamment robes, jupes, tuniques, chemisiers, pantalons, chemises, tee-shirts, pull-overs, vestes, manteaux, peignoirs de bain, cache-col, gilets, foulards, foulards de hanches, ceintures, gaines ; chaussures, chapeaux ».

10      Le 15 juillet 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 77 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 8 juin 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours contre la décision de la division d’opposition. Plus particulièrement, elle a considéré que, compte tenu de l’identité ou de la similitude entre les produits en cause, du fait que le signe antérieur était pratiquement identique au signe demandé, il existait un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

12      En premier lieu, la chambre de recours a rejeté l’argument de la requérante selon lequel l’examen de la preuve de l’usage n’aurait pas dû être effectué sur le fondement de la marque allemande antérieure, étant donné que l’opposition était irrecevable sur le fondement de cette marque. À cet égard, la chambre de recours a considéré que la division d’opposition avait implicitement jugé que l’opposition était également recevable en ce qui concerne la marque allemande antérieure, sinon, le contraire aurait été établi dans la décision de première instance.

13      En deuxième lieu, la chambre de recours a confirmé la décision de la division d’opposition selon laquelle, en ce qui concerne la marque allemande antérieure, la preuve de l’usage pour des « vêtements » a été établie à suffisance de droit, et que tel n’était pas le cas en ce qui concerne l’enregistrement international antérieur.

14      En troisième lieu, s’agissant du public pertinent, la chambre de recours a estimé que les produits en cause, en tant que produits de consommation courante, s’adressaient au grand public allemand, dont le niveau d’attention était moyen.

15      En quatrième lieu, la chambre de recours a considéré que les produits en cause étaient soit identiques, soit similaires.

16      En cinquième lieu, elle a reconnu que les signes en conflit étaient quasi identiques.

17      En sixième lieu, s’agissant du risque de confusion, la chambre de recours a estimé, étant donné que le mot « manou » n’évoquait pas les produits concernés, pas plus qu’il n’était descriptif de ces derniers, qu’il convenait de partir du principe d’un caractère distinctif intrinsèque moyen de la marque antérieure.

18      En septième lieu, la chambre de recours a considéré que, compte tenu de l’identité ou de la similitude entre les produits en cause et du fait que le signe antérieur était pratiquement identique au signe demandé, il existait un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

 Conclusions des parties

19      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

20      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

21      À titre liminaire, il convient de relever que, compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 21 octobre 2015, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée).

22      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée et par les parties dans leurs écritures à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, comme visant l’article 8, paragraphe 1, sous b), d’une teneur identique à celle du règlement no 207/2009. De même, les références à l’article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001 doivent être comprises comme visant l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009.

23      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

24      Dans le cadre de ce moyen unique, la requérante avance, en substance, que les appréciations de la chambre de recours relatives à la comparaison des produits, à la comparaison des signes et à l’existence du risque de confusion sont erronées.

25      Plus particulièrement, la requérante fait valoir que :

–        en ce qui concerne le public pertinent, étant donné qu’il s’agit de marques de l’Union européenne enregistrées, dont les titulaires sont des titulaires de marques allemandes, le risque de confusion doit être examiné non seulement pour l’Allemagne, mais aussi pour l’ensemble de l’Union ;

–        en ce qui concerne la similitude des produits, il n’y a pas de similitude entre les « vêtements » de la marque antérieure et les produits de la marque contestée compris dans la classe 18, d’une part, et les « chaussures » et « chapeaux » compris dans la classe 25, d’autre part. Les « sacs » et les « chaussures » ne présenteraient aucune similitude avec les « vêtements ». De même, les « portefeuilles », les « sacs fourre-tout », les « valises » ne présenteraient pas non plus de similitude avec les « vêtements ». Il en irait de même pour les « chaussures », qui ne seraient pas non plus similaires aux « sacs », et les « produits de textiles », les « articles de literie » qui ne seraient pas similaires aux « vêtements » ;

–        en ce qui concerne le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure MANOU, la chambre de recours a tort en ce qu’elle l’a qualifié de moyen et non pas, en tant que prénom, de faible ou d’inférieur à la moyenne ;

–        de plus, les signes en conflit diffèrent par l’orthographie des lettres « o » et « ò » ;

–        en ce qui concerne le risque de confusion, étant donné que l’opposante commercialise ses produits exclusivement dans ses propres magasins, il est de fait impossible de confondre les produits à comparer, étant donné qu’ils ne se retrouvent jamais ensemble sur le marché ;

–        enfin, la décision attaquée doit également être annulée, car la marque allemande antérieure y a été prise à tort comme base de l’examen de la preuve de l’usage.

26      L’EUIPO fait remarquer que le recours repose sur une violation de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, alors qu’en l’espèce il s’agit d’une procédure d’opposition et non pas d’une procédure de nullité. Partant, le recours serait uniquement recevable si l’on considère que c’est par erreur que le recours a été fondé sur une violation dudit article.

27      Sur le fond, l’EUIPO conteste les arguments de la requérante et défend la décision attaquée.

 Sur la recevabilité du recours

28      Comme l’a fait valoir l’EUIPO, à juste titre, le recours repose sur une violation de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

29      Selon l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 une marque de l’Union européenne est déclarée nulle sur demande présentée auprès de l’Office lorsqu’il existe une marque antérieure visée à l’article 8, paragraphe 2, et que les conditions énoncées au paragraphe 1 ou au paragraphe 5 du même article sont remplies.

30      En l’espèce, il s’agit d’une procédure d’opposition et non pas d’une procédure de nullité. Vu le contenu de la requête, il est clair que la requérante s’est trompée de base juridique. Partant, la base juridique erronée invoquée par la requérante n’aboutit pas à l’irrecevabilité du recours. Elle doit être comprise comme visant une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

31      À cet égard, il importe de rappeler que, si les parties déterminent l’objet du litige qui ne peut être modifié par le juge, il appartient à ce dernier d’interpréter les moyens par leur substance plutôt que par leur qualification et de procéder, par conséquent, à la qualification des moyens et arguments de la requête (voir arrêt du 5 septembre 2014, Éditions Odile Jacob/Commission, T‑471/11, EU:T:2014:739, point 51 et jurisprudence citée).

 Sur la recevabilité de l’opposition

32      La requérante fait valoir que la division d’opposition et la chambre de recours n’auraient pas dû prendre en considération la marque allemande verbale antérieure MANOU dans le cadre de l’examen de la preuve de l’usage, dans la mesure où ladite marque n’aurait pas été soumise à un examen de recevabilité.

33      Cet argument doit être écarté.

34      À cet égard, il convient de rappeler qu’une opposition, comme en l’espèce, peut être fondée sur plusieurs droits antérieurs. De plus, pour des raisons d’économie de la procédure, la division d’opposition et, en deuxième instance, la chambre de recours sont libres de choisir sur laquelle des différentes marques antérieures invoquées elles fondent leur décision [voir, en ce sens, arrêt du 27 octobre 2010, Michalakopoulou Ktimatiki Touristiki/OHMI – Free (FREE), T‑365/09, non publié, EU:T:2010:455, point 25]. Le fait que la division d’opposition ait constaté que l’opposition était recevable, dans la mesure où elle était fondée sur l’enregistrement international antérieur de la marque verbale MANOU, et qu’elle ait commencé son examen sur la base de cet enregistrement n’implique pas qu’elle ait considéré que l’opposition fondée sur la marque allemande verbale antérieure MANOU était irrecevable. Par ailleurs, une telle conclusion peut être également tirée du message du 21 mars 2016 qui a été envoyé à la requérante lors de la procédure administrative et dans lequel il était également fait référence à la communication no 5/07 du président de l’EUIPO, du 12 septembre 2007, relative à des changements de pratique dans le cadre de la procédure d’opposition. De plus, le fait que la division d’opposition ait constaté, par la suite, que la preuve de l’usage sérieux faisait défaut en ce qui concernait l’enregistrement international antérieur de la marque verbale MANOU, mais que la preuve était suffisante en ce qui concernait la marque allemande verbale antérieure MANOU, implique que la division d’opposition a considéré, préalablement, ladite marque comme recevable. Partant, la chambre de recours a correctement considéré, aux points 16 à 18 de la décision attaquée, que la division d’opposition avait implicitement mais nécessairement considéré que l’opposition était recevable en ce qu’elle était fondée sur la marque allemande verbale antérieure MANOU.

35      Pour autant que le grief de la requérante mentionné au point 32 ci-dessus devrait également être interprété comme un grief contestant la preuve suffisante de l’usage sérieux de cette marque, celui-ci doit être rejeté comme irrecevable. À cet égard, il convient de constater, à l’instar de l’EUIPO, que la requérante se limite à une contestation très vague. En effet, elle a uniquement indiqué, au point 43 de la requête, que « la marque allemande ne de[vr]ait [...] pas être prise en compte, de sorte que l’usage pour l’Allemagne (que nous contestons également, indépendamment de cela) est obsolète », sans mentionner ni motifs concrets ni indices démontrant la prétendue irrégularité de l’examen effectué par la chambre de recours en ce qui concerne la preuve de l’usage sérieux de ladite marque. Or, une telle contestation vague et non étayée ne répond pas aux exigences de l’article 177, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, tel qu’interprété par la jurisprudence [voir, en ce sens, arrêt du 13 mai 2020, Peek & Cloppenburg/EUIPO – Peek & Cloppenburg (Peek & Cloppenburg), T‑446/18, non publié, EU:T:2020:187, point 29 et jurisprudence citée].

 Sur le fond

36      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

37      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

38      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

39      Il convient également de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

40      La chambre de recours a considéré que le territoire pertinent pour les besoins de l’appréciation du risque de confusion était l’Allemagne et que les produits en cause étaient essentiellement destinés au grand public. En conséquence, la chambre de recours a considéré que le niveau d’attention du public pertinent pouvait varier en fonction des produits concernés (voir points 38 et 39 de la décision attaquée).

41      Il y a lieu de constater que la chambre de recours a estimé, à juste titre, en ce qui concerne les produits en cause, à savoir ceux compris dans les classes 18 et 25, que le public général fait preuve d’un niveau d’attention moyen.

42      De même, étant donné que le droit antérieur sur lequel a été fondée la décision attaquée est une marque allemande nationale, c’est à juste titre, comme l’a estimé la chambre de recours et ainsi qu’il résulte de la jurisprudence citée au point 39 ci-dessus, qu’il convient de se fonder territorialement sur l’Allemagne, et non sur l’ensemble de l’Union.

43      Il s’ensuit que l’argument de la requérante selon lequel il faut examiner le risque de confusion non seulement pour l’Allemagne, mais également pour toute l’Union ne peut qu’être écarté.

 Sur la comparaison des produits

44      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

45      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, en ce qui concerne les produits litigieux relevant de la classe 18 et ceux relevant de la classe 25, couverts par la marque antérieure, que ceux-ci présentaient un degré de similitude qui ne pouvait être qualifié de faible. En ce qui concerne les produits litigieux relevant de la classe 25, elle a considéré que les « vêtements » étaient identiques et les « chaussures, chapeaux » étaient similaires aux « vêtements » couverts par la marque antérieure.

46      La requérante fait valoir, en substance, que les marques en conflit désignent des produits différents et ont des canaux de distribution différents. À cet égard, elle fait référence aux nombreuses paires de produits, telles que « Vêtements » (relevant de la classe 25) et « Produits textiles » (relevant de la classe 24) ; « Vêtements » (relevant de la classe 25) et « Linge de lit » (relevant de la classe 24) ; « Chapeaux » (relevant de la classe 25) et « Articles de sports » (relevant de la classe 28). Toutefois, aucune des paires de produits mentionnées par la requérante dans la requête n’est en cause en l’espèce.

47      En tout état de cause, en ce qui concerne les autres paires de produits évoquées par la requérante et relevant des classes 18 et 25, il ressort, en substance, de la requête que la requérante, en réalité, est d’avis que les produits en conflit ne sont pas identiques à ceux de la marque antérieure, ni même similaires, sans pour autant qu’elle fournisse une explication claire à cet égard.

48      S’agissant de la comparaison des produits relevant des classes 18 et 25, comme l’a fait valoir la chambre de recours, à juste titre, les « vêtements » relevant de la classe 25 de la marque antérieure et les produits litigieux relevant de la classe 18 de la marque contestée sont souvent commercialisés ensemble avec des vêtements dans des points de vente qui ne sont pas seulement constitués par des établissements relevant de la grande distribution, mais également par des magasins plus spécialisés.

49      De même, les consommateurs combinent souvent des vêtements compris dans la classe 25 avec différents accessoires de mode complémentaires compris dans la classe 18, tels que les « sacs », les « sacs à main », les « sacs à dos » ou les « portefeuilles ». De telles combinaisons contribuent en effet à l’image extérieure du consommateur, ce qui peut impliquer une coordination entre ses différentes composantes à l’occasion de leur création ou de leur acquisition. De plus, le fait que les produits soient souvent vendus dans les mêmes points de vente spécialisés favorisent la perception par le consommateur concerné des liens étroits existant entre les produits et renforcent l’impression que la responsabilité de la fabrication de ces produits incombe à la même entreprise [voir, en ce sens, arrêts du 11 juillet 2007, PiraÑAM diseño original Juan Bolaños, T‑443/05, EU:T:2007:219, point 50, et du 16 septembre 2013, Gitana/OHMI – Teddy (GITANA), T‑569/11, non publié, EU:T:2013:462, points 45 et 46].

50      Partant, la chambre de recours a pu constater, sans commettre d’erreur, que certains consommateurs percevaient l’existence d’un lien étroit entre les « vêtements » relevant de la classe 25 et les produits litigieux et qu’ils pouvaient donc être amenés à penser que la responsabilité de leur fabrication incombait à la même entreprise, et de ce fait, que ces produits présentaient une similitude.

51      Cette conclusion n’est pas remise en cause par la décision de la chambre de recours dans l’affaire R 355/17‑1, invoquée par la requérante, dans laquelle la chambre de recours a constaté qu’il n’existait pas de similitude entre les « vêtements » et les « sacs de voyage ». En premier lieu, les « sacs de voyages » ne figurent pas dans la liste des produits litigieux. En second lieu, à l’instar de ce qu’a fait remarquer l’EUIPO, les « sacs de voyages » ne sont pas non plus directement comparables aux accessoires de mode en cause, tels que les « sacs à main » ou les « sacs à dos », par leur nature, leur destination ou leur fonction esthétique. En outre, ils sont généralement vendus dans les points de vente spécialisés qui, en général, ne proposent pas de vêtements. Le même raisonnement s’applique en ce qui concerne les « sacs fourre-tout » et les « valises », ces produits ne figurant d’ailleurs pas non plus dans la liste de produits litigieux, et qui font l’objet d’autres décisions de la chambre de recours qui ont été invoquées par la requérante dans la requête.

52      Enfin, force est de constater que la requérante dans ses écritures n’a pas contesté la similitude des autres produits litigieux relevant de la classe 18 avec les « vêtements » relevant de la classe 25.

53      S’agissant de la comparaison des produits relevant de la classe 25, il suffit de remarquer que la chambre de recours a constaté, à juste titre, que les « vêtements » désignés par la marque contestée étaient identiques aux « vêtements » visés par la marque antérieure.

54      En outre, il résulte de la jurisprudence que les « vêtements » sont similaires aux « chaussures » et aux « chapeaux » [voir arrêt du 8 mars 2005, Leder & Schuh/OHMI – Schuhpark Fascies (JELLO SCHUHPARK), T‑32/03, non publié, EU:T:2005:82, point 50 et jurisprudence citée]. En effet, les produits à comparer poursuivent le même objet, car ils sont utilisés pour couvrir différentes parties du corps humain et protéger des intempéries. De plus, ce sont des articles de mode se trouvant souvent dans les mêmes magasins de vente au détail.

 Sur la comparaison des signes

55      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

56      La chambre de recours a considéré, au point 47 de la décision attaquée, que le signe demandé Manòu était, abstraction faite de l’accent placé sur la lettre « o » qui est phonétiquement dénué de pertinence en allemand et visuellement insignifiant, phonétiquement et visuellement identique à la marque antérieure. En outre, la chambre de recours a considéré qu’une comparaison conceptuelle était exclue, étant donné que le signe MANOU n’était ni un mot allemand ni connu du public germanophone. De ce fait, elle a conclu que les signes devaient être considérés comme quasi identiques.

57      Ces considérations doivent être approuvées.

58      À cet égard, il est constant entre les parties que l’unique différence entre les signes à comparer réside dans un accent sur la lettre « o ». Contrairement à ce que prétend la requérante, cette différence n’a pas pour conséquence une différence importante sur le plan phonétique. En effet, mis à part que la requérante ne donne aucune explication concrète pour expliquer en quoi cette différence consiste, elle invoque, à ce sujet, uniquement l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 22 septembre 2011, ara/OHMI – Allrounder (A avec deux motifs triangulaires) (T‑174/10, non publié, EU:T:2011:519). Toutefois, comme l’a fait valoir l’EUIPO, cette affaire n’est pas pertinente en l’espèce. Dans ladite affaire, la possibilité d’effectuer une comparaison phonétique entre la marque antérieure et la marque demandée a été écartée, parce que, en raison du graphisme particulier de la marque demandée, le consommateur aurait tendance à la décrire et non à la prononcer. Cette constatation n’est pas en cause en l’espèce. Un accent sur la lettre « o » n’équivaut pas à un graphisme particulier et n’implique pas que le consommateur prononce les deux marques en conflit d’une façon différente.

59      Partant, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu que les signes en cause étaient quasi identiques.

 Sur l’existence d’un risque de confusion

60      Il ressort de la lecture combinée des points 49 à 52 de la décision attaquée que la chambre de recours a considéré que les signes en conflit étaient identiques et que les produits litigieux étaient partiellement identiques et partiellement similaires aux produits couverts par la marque antérieure et que, par conséquent, compte tenu du principe d’interdépendance, un risque de confusion était fortement probable dans l’esprit du public pertinent.

61      La requérante estime qu’il n’y a pas de risque de confusion en raison de la dissemblance des produits. De plus, elle exclut un tel risque également du fait que l’opposante ne vend ses produits que dans ses propres filiales et sa propre boutique en ligne, de telle sorte que les produits à comparer ne se rencontrent jamais sur le marché.

62      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, la similitude des marques et celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, VENADO avec cadre e.a., T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74).

63      En l’espèce, ainsi qu’il ressort des considérations ci-dessus, les signes sont quasi identiques et les produits sont identiques ou similaires. Partant, au regard du principe d’interdépendance rappelé au point 62 ci-dessus, c’est à bon droit que la chambre de recours a pu constater en l’espèce l’existence d’un risque de confusion.

64      En outre, s’agissant du caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que celui-ci était moyen dès lors que la marque antérieure était dépourvue de signification pour les produits en cause (voir point 49 de la décision attaquée). Le fait, invoqué par la requérante, que « manou » soit un prénom et n’ait donc prétendument qu’un caractère distinctif inferieur à la moyenne ne remet pas en cause l’appréciation de la chambre de recours. À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il convient d’apprécier le caractère distinctif d’une marque en ce qui concerne les produits ou les services à revendiquer concrètement. Même si Manou était un prénom, il n’apparaît pas dans quelle mesure cette dénomination devrait être descriptive ou faiblement distinctive de quelque autre manière que ce soit en rapport avec les produits concrètement revendiqués, en l’occurrence les « vêtements ».

65      S’agissant de l’affirmation selon laquelle l’opposante commercialise ses produits par le biais de ses propres canaux de distribution, il y a lieu de remarquer, à l’instar de la chambre de recours, que cela n’a pas été prouvé et que, de toute façon, rien n’empêche l’opposante de vendre ses vêtements dans les grands magasins ou boutiques dans lesquels les produits de la requérante sont également proposés.

66      Il résulte de ce qui précède que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant qu’il existait en l’espèce un risque de confusion aux yeux du public pertinent.

67      Il s’ensuit que le moyen unique doit être rejeté et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

68      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Soapland GmbH & Co. OHG est condamnée aux dépens.

Tomljenović

Schalin

Nõmm

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 novembre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.

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