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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Universitat Koblenz-Landau v EACEA (Judgment) French Text [2021] EUECJ T-606/18 (24 February 2021) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2021/T60618.html Cite as: EU:T:2021:105, [2021] EUECJ T-606/18, ECLI:EU:T:2021:105 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (dixième chambre élargie)
24 février 2021 (*)
« Clause compromissoire – Programmes Tempus – Convention de subvention – Coûts éligibles – Suspension des paiements – Remboursement des sommes versées – Obligation de motivation »
Dans l’affaire T‑606/18,
Universität Koblenz-Landau, établie à Mayence (Allemagne), représentée par Mes C. von der Lühe et I. Felder, avocats,
partie requérante,
contre
Agence exécutive « Éducation, audiovisuel et culture » (EACEA), représentée par M. H. Monet, en qualité d’agent, assisté de Mes R. van der Hout et C. Wagner, avocats,
partie défenderesse,
ayant pour objet une demande fondée sur l’article 272 TFUE et tendant à ce que le Tribunal, d’une part, constate l’inexistence de la créance de 22 454,22 euros dont l’EACEA s’estime détentrice au titre de l’exécution de la convention de subvention no 2012‑3075 concernant la réalisation du projet « Qualification Frameworks in Central Asia : Bologna-Based Principles and Regional Coordination » et, d’autre part, condamne celle-ci à verser à la requérante un montant de 41 408,15 euros au titre de la même convention, assorti d’intérêts de retard,
LE TRIBUNAL (dixième chambre élargie),
composé de MM. S. Papasavvas, président, A. Kornezov (rapporteur), E. Buttigieg, Mme K. Kowalik‑Bańczyk et M. G. Hesse, juges,
greffier : M. E. Coulon,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 La requérante, Universität Koblenz-Landau, est un établissement d’enseignement supérieur allemand de droit public.
2 Le 10 octobre 2012, dans le cadre des programmes de l’Union européenne de coopération avec des pays tiers visant à la modernisation des systèmes d’enseignement supérieur de ces pays, dénommés « Tempus », la requérante a signé avec l’Agence exécutive « Éducation, audiovisuel et culture » (EACEA), en qualité de coordinatrice, la convention de subvention no 2012‑3075 concernant la réalisation du projet « Qualification Frameworks in Central Asia : Bologna-Based Principles and Regional Coordination » (cadres de certification en Asie centrale : principes fondés sur le processus de Bologne et coordination régionale) (ci-après la « convention Quadriga » ou la « convention litigieuse »).
3 Conformément à l’article I.9 de la convention Quadriga, celle-ci est régie par les stipulations contractuelles et les règles de droit de l’Union applicables.
4 L’article I.9 de cette convention stipule, en outre, que les décisions de l’EACEA concernant l’application des clauses de la convention de subvention concernée ainsi que les modalités de sa mise en œuvre peuvent faire l’objet d’un recours formé par les bénéficiaires devant le juge de l’Union.
5 L’article I.4.2 de la convention Quadriga prévoit que les coûts éligibles maximaux au titre de celle-ci s’élèvent à 679 861,95 euros. L’article I.4.3 de la même convention précise que le montant maximal de la subvention s’élève à 611 171,95 euros, ce qui correspond à un taux de financement d’environ 89,9 % des coûts éligibles.
6 En application des articles I.5.1 et I.5.2 de la convention Quadriga, l’EACEA a versé à la requérante, en tant que préfinancement, la somme de 550 054,76 euros.
7 Le 14 janvier 2016, dans son rapport final, la requérante a déclaré auprès de l’EACEA avoir encouru des coûts pour la réalisation de la convention litigieuse à hauteur de 679 861,95 euros, ce qui correspondait au montant maximal des coûts éligibles (voir point 5 ci‑dessus).
8 Par lettre du 20 juin 2016, l’EACEA a informé la requérante qu’elle avait décidé de suspendre le paiement du solde restant sur le fondement de l’article II.16.2, paragraphe 3, de la convention Quadriga, au motif qu’il était nécessaire de clarifier et d’examiner davantage l’éligibilité de certains coûts.
9 Le 5 février 2018, l’EACEA a informé la requérante qu’elle avait effectué un examen financier sur la base des documents présentés par cette dernière. Selon les résultats de cet examen, un montant de 533 870,49 euros avait été considéré comme éligible au titre de la convention Quadriga et, par conséquent, la requérante avait droit à une subvention s’élevant à 89,90 % de ce montant, à savoir 479 930,77 euros. Ainsi, la requérante ayant déjà reçu 550 054,76 euros, l’EACEA lui a demandé de lui restituer la somme de 70 123,99 euros. L’EACEA a également invité la requérante à présenter ses observations et à produire d’autres éléments de preuve pour justifier l’éligibilité des dépenses considérées comme non éligibles.
10 Par lettre du 29 mars 2018, la requérante a présenté ses observations ainsi que des éléments supplémentaires visant à prouver l’éligibilité des dépenses considérées non éligibles par l’EACEA. Elle a pourtant concédé que certains coûts à hauteur de 21 949,93 euros n’étaient effectivement pas éligibles.
11 Par lettre du 8 août 2018, l’EACEA a informé la requérante qu’elle acceptait une partie des justificatifs présentés et que, par conséquent, compte tenu du taux de financement prévu par la convention Quadriga, le montant final auquel elle avait droit était fixé à 527 600,54 euros. Ainsi, l’EACEA a estimé être détentrice d’une créance d’un montant de 22 454,22 euros. L’EACEA a également indiqué qu’une note de débit précisant les conditions et le délai de paiement allait suivre.
Procédure
12 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 octobre 2018, la requérante a introduit le présent recours, fondé sur l’article 272 TFUE.
13 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 19 décembre 2018, l’EACEA a déposé le mémoire en défense.
14 Sur demande de la requérante, la procédure a été suspendue à deux reprises, par décisions des 28 février et 22 mai 2019, au motif que la requérante et l’EACEA avaient entamé des discussions visant à parvenir à un accord amiable éventuel.
15 Par décision du 5 septembre 2019, une troisième demande de suspension de la procédure a été rejetée.
16 La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, par décision du président du Tribunal du 21 octobre 2019, en application de l’article 27, paragraphe 5, du règlement de procédure du Tribunal, la présente affaire a été réattribuée à la dixième chambre.
17 Par décision du 11 mars 2020, le Tribunal a décidé, en application de l’article 28 du règlement de procédure, de renvoyer l’affaire à la dixième chambre siégeant en formation élargie à cinq juges.
18 En l’absence de demande en ce sens formulée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, a, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, décidé de statuer sans phase orale de la procédure.
Conclusions
19 La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :
– constater que la créance dont se prévaut l’EACEA dans la demande de remboursement qu’elle lui a adressée par lettre du 8 août 2018, pour un montant de 22 454,22 euros, n’existe pas ;
– condamner l’EACEA à lui payer un montant de 41 408,15 euros assorti d’intérêts de retard calculés selon le taux d’intérêt de base de la Banque centrale européenne (BCE) majoré de neuf points ;
– condamner l’EACEA aux dépens.
20 L’EACEA conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours comme manifestement irrecevable et, à titre subsidiaire, comme non fondé ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
21 La requérante soulève deux moyens, tirés, le premier, du caractère éligible des coûts considérés comme non éligibles par l’EACEA et, le second, d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation.
22 À titre liminaire, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 272 TFUE, lu en combinaison avec l’article 256 TFUE, le Tribunal est compétent pour statuer en vertu d’une clause compromissoire contenue dans un contrat de droit public ou de droit privé passé par l’Union ou pour son compte. L’article 272 TFUE constitue ainsi une disposition spécifique permettant de saisir le juge de l’Union en vertu d’une clause compromissoire, et ce sans limitation tenant à la nature de l’action introduite devant le juge de l’Union (arrêt du 26 février 2015, Planet/Commission, C‑564/13 P, EU:C:2015:124, points 22 et 23).
23 En l’espèce, le Tribunal a compétence pour statuer sur le présent recours conformément à l’article 272 TFUE en vertu de la clause compromissoire contenue dans l’article I.9 de la convention Quadriga.
24 Cela étant précisé, il convient d’examiner, en premier lieu, le second moyen du recours, tiré d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation.
Sur le second moyen, tiré d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation
Sur l’invocabilité de l’obligation de motivation dans le cadre d’un litige de nature contractuelle
25 L’EACEA excipe de l’impossibilité d’invoquer utilement un moyen tiré de l’obligation de motivation dans le cadre d’un recours fondé sur l’article 272 TFUE, dans le cadre d’un tel recours ne pouvant être invoqués que des moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du contrat en cause ou du droit applicable au contrat. Or, en l’espèce, la requérante ne démontrerait pas en quoi l’obligation de motivation incomberait à l’EACEA en vertu de la convention de subvention. En outre, l’obligation de motivation serait un principe qui concerne au premier chef les actes législatifs et administratifs de l’Union.
26 Cette objection doit être rejetée.
27 À cet égard, il convient de souligner que l’obligation de motivation, invoquée par la requérante, a été inscrite dans l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), au terme duquel les institutions, organes et organismes de l’Union sont obligés de motiver leurs décisions.
28 Ainsi, le Tribunal a déjà eu l’occasion de juger que la Charte, qui fait partie du droit primaire, prévoit, à son article 51, paragraphe 1, sans exception, que ses dispositions « s’adressent aux institutions, organes et organismes de l’Union dans le respect du principe de subsidiarité » et que, dès lors, les droits fondamentaux ont vocation à régir l’exercice des compétences qui sont attribuées aux institutions de l’Union, y compris dans un cadre contractuel (arrêts du 3 mai 2018, Sigma Orionis/Commission, T‑48/16, EU:T:2018:245, points 101 et 102, et du 3 mai 2018, Sigma Orionis/REA, T‑47/16, non publié, EU:T:2018:247, points 79 et 80 ; voir également, par analogie, arrêt du 13 mai 2020, Talanton/Commission, T‑195/18, non publié, sous pourvoi, EU:T:2020:194, point 73).
29 De même, selon la Cour, lorsque les institutions, organes ou organismes de l’Union exécutent un contrat, ils restent soumis aux obligations qui leur incombent en vertu de la Charte et des principes généraux du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2020, ADR Center/Commission, C‑584/17 P, EU:C:2020:576, point 86).
30 La Cour a également souligné que, si les parties décident, dans leur contrat, au moyen d’une clause compromissoire, d’attribuer au juge de l’Union la compétence pour connaître des litiges afférents à ce contrat, ce juge sera compétent, indépendamment du droit applicable stipulé audit contrat, pour examiner d’éventuelles violations de la Charte et des principes généraux du droit de l’Union (arrêt du 16 juillet 2020, Inclusion Alliance for Europe/Commission, C‑378/16 P, EU:C:2020:575, point 81).
31 Par ailleurs, il convient de souligner que les institutions, organes et organismes de l’Union ne sont pas tout à fait comparables à des parties contractantes privées, lorsqu’ils agissent dans un cadre contractuel. Ainsi, d’une part, les subventions octroyées par ceux-ci puisent dans les deniers publics de l’Union, de sorte que, lorsqu’ils octroient de telles subventions, les institutions, organes et organismes de l’Union restent encadrés notamment par les exigences budgétaires découlant de l’article 317 TFUE et les règles financières prévues à cet égard par le règlement financier applicable. D’autre part, en présence d’un contrat contenant, comme en l’espèce, une clause compromissoire attribuant compétence au juge de l’Union, notamment la Commission dispose de prérogatives exorbitantes du droit commun lui permettant de formaliser la constatation d’une créance contractuelle en adoptant unilatéralement, sur le fondement de l’article 72, paragraphe 2, du règlement (CE, Euratom) no 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO 2002, L 248, p. 1), ou de l’article 79, paragraphe 2, du règlement (UE, Euratom) no 966/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union et abrogeant le règlement no 1605/2002 (JO 2012, L 298, p.1), une décision formant titre exécutoire en vertu de l’article 299 TFUE, dont les effets et la force obligatoire émanent desdites dispositions (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2020, ADR Center/Commission, C‑584/17 P, EU:C:2020:576, points 68 à 70 et 73). De surcroît, force est de constater que, conformément à l’article 108, paragraphe 1, second alinéa, du règlement no 1605/2002 et à l’article 121, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 966/2012, une subvention peut être octroyée soit par le biais d’une convention écrite, soit par le biais d’une décision de la Commission notifiée au bénéficiaire. Ainsi, le législateur de l’Union a prévu qu’une subvention pouvait être octroyée tant par la voie contractuelle que par la voie administrative. Or, les institutions, organes et organismes de l’Union ne sauraient, à leur gré, se soustraire à leurs obligations découlant du droit primaire, y compris de la Charte, en fonction de leur choix d’octroyer des subventions par voie de convention plutôt que par décision.
32 Partant, il y a lieu d’écarter l’objection de l’EACEA concernant l’invocabilité de l’obligation de motivation dans un litige de nature contractuelle.
Sur le fond
33 La requérante fait valoir, en substance, que l’EACEA n’a pas expliqué à suffisance de droit les raisons pour lesquelles certains coûts avaient été considérés comme non éligibles. Il s’agit, en particulier, de certains coûts de personnel, de déplacement, d’équipement, d’impression et de publication et d’« autres coûts ».
34 L’EACEA conteste les arguments de la requérante.
35 L’étendue de l’obligation de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances concrètes, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que le destinataire peut avoir à recevoir des explications, et il importe, pour apprécier le caractère suffisant de la motivation, de la replacer dans le contexte factuel et juridique dans lequel s’inscrit l’adoption de l’acte en cause. Ainsi, un acte est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu du destinataire concerné qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir, par analogie, arrêts du 15 novembre 2012, Conseil/Bamba, C‑417/11 P, EU:C:2012:718, points 53 et 54 et jurisprudence citée ; du 24 octobre 2011, P/Parlement, T‑213/10 P, EU:T:2011:617, point 30, et du 27 septembre 2012, Applied Microengineering/Commission, T‑387/09, EU:T:2012:501, points 64 à 67).
36 Il convient d’examiner ci-après consécutivement les arguments de la requérante concernant chacune des catégories de coûts mentionnées au point 33 ci-dessus et considérées par l’EACEA, dans sa lettre du 8 août 2018, comme non éligibles.
– Sur les coûts de personnel
37 La requérante fait valoir que le refus de l’EACEA de considérer comme éligibles, dans sa lettre du 8 août 2018, les coûts de personnel d’un montant de 16 868,92 euros ne contiendrait aucune justification, de sorte qu’elle ne serait pas en mesure de comprendre le calcul effectué. L’EACEA n’aurait pas non plus répondu aux arguments de la requérante exposés dans sa lettre du 29 mars 2018 et dans les annexes jointes à celle-ci.
38 À cet égard, premièrement, force est de constater que, dans sa lettre du 8 août 2018, l’EACEA a exposé, succinctement, mais de manière suffisamment claire et précise, les raisons pour lesquelles elle a considéré que certains coûts de personnel étaient inéligibles. Ainsi, elle y a précisé la formule utilisée pour calculer les réductions relatives aux coûts concernant l’emploi de six personnes et dont les montants déclarés ont été considérés comme surévalués. Il en ressort que l’EACEA a divisé le salaire brut de ces personnes, tel qu’il ressort de leurs fiches mensuelles de salaires présentées par la requérante elle‑même (annexe A. 8, par exemple page 74), par 20, ce qui correspond au nombre de jours ouvrables par mois, pour parvenir à un taux journalier pour chacune de ces personnes. Elle a ensuite multiplié les taux journaliers par le nombre de jours que chacune de ces personnes avait déclaré avoir travaillé pour le projet en cause selon les informations présentées par la requérante elle‑même dans son rapport final du 14 janvier 2016.
39 Deuxièmement, contrairement à ce que soutient la requérante, il ressort de sa lettre du 8 août 2018 que l’EACEA a répondu aux arguments de la requérante exposés dans sa lettre du 29 mars 2018 et dans les annexes jointes à celle-ci. En effet, dans sa lettre du 5 février 2018, l’EACEA avait demandé le remboursement d’un montant de 58 996,94 euros au titre des coûts de personnel à cause de l’absence de justificatifs fiables à cet égard. Toutefois, après la présentation de certains documents additionnels par la requérante, mentionnés au point I de sa lettre du 29 mars 2018, l’EACEA a, dans sa lettre du 8 août 2018, accepté en partie les justifications présentées et a réduit en conséquence le montant à rembourser à 16 868,92 euros au titre des coûts de personnel, tout en expliquant les raisons sous-tendant le recouvrement envisagé du montant restant.
40 Il s’ensuit que l’EACEA a respecté à suffisance de droit son obligation de motivation en ce qui concerne son refus de considérer comme éligibles, au point I de sa lettre du 8 août 2018, les coûts de personnel d’un montant de 16 868,92 euros.
– Sur les coûts de déplacement
41 Le refus de l’EACEA de considérer comme éligibles, au point II de sa lettre du 8 août 2018, des coûts de déplacement d’un montant de 1 049,45 euros serait, selon la requérante, incompréhensible et contredirait les déclarations faites par la requérante dans sa lettre du 29 mars 2018.
42 À cet égard, force est de constater que, dans sa lettre du 8 août 2018, l’EACEA a, tout d’abord, rappelé les stipulations contractuelles déterminant le taux de change applicable en vue de la conversion de sommes en euros et les lignes directrices sur l’utilisation de la subvention faisant l’objet de la convention litigieuse et concernant le calcul des frais de déplacement éligibles. Elle a présenté, ensuite, un tableau des plafonds applicables selon la durée de déplacement, tout en expliquant par la suite la manière de calculer les coûts de déplacement. Enfin, l’EACEA a précisé, succinctement, mais de manière suffisamment claire, les raisons particulières concernant chacun des postes pour lesquels elle a considéré qu’une correction était nécessaire.
43 Dans ces circonstances, le Tribunal constate que l’EACEA a expliqué à suffisance de droit les raisons pour lesquelles elle a considéré, au point II de sa lettre du 8 août 2018, les coûts de déplacement d’un montant de 1 049,45 euros comme non éligibles.
– Sur les coûts de matériel
44 La requérante estime que les explications sous-tendant le refus de l’EACEA de considérer comme éligibles, au point III de sa lettre du 8 août 2018, des dépenses pour l’achat de matériel d’un montant de 42 385 euros ne seraient pas de nature à justifier le bien‑fondé de cette déduction et seraient incompréhensibles, dans la mesure où elles se borneraient à exciper des « incohérences » des éléments de preuve présentés par la requérante ou de leur caractère « peu clair ».
45 À cet égard, il y a lieu de relever que, dans la lettre du 8 août 2018, l’EACEA a indiqué les raisons pour lesquelles elle avait considéré qu’une partie des coûts relatifs à plusieurs postes se rapportant à l’achat de matériel n’étaient pas éligibles.
46 En effet, premièrement, concernant le poste no 3, l’EACEA a pris note de la nouvelle facture qui lui avait été soumise par la requérante concernant l’achat de matériel pour un montant de 5 104,50 euros. Elle a indiqué avoir cependant constaté une incohérence concernant le numéro et la date de la facture. Les échanges précontentieux entre les parties concernant ladite somme clarifient davantage la nature de l’incohérence en cause. Ainsi que le fait valoir à juste titre l’EACEA, dans son rapport final du 14 janvier 2016, la requérante a produit une facture qui portait un numéro et une date différente de celle qu’elle a produite après. En effet, force est de relever que, dans ledit rapport, la date de l’achat en question est le 30 mai 2014 (annexe B.1, page 54 du dossier), et la requérante a produit une facture qui portait le numéro 116 (annexe B.3, page 84 du dossier), alors que la facture présentée par la suite était datée du 3 mars 2015 et portait le numéro 66 (annexes A.10, page 187, et B.3, page 85 du dossier). Il suffit donc de replacer le motif en cause évoqué par l’EACEA dans son contexte factuel, en conformité avec la jurisprudence citée au point 35 ci-dessus, pour comprendre clairement la raison pour laquelle l’EACEA a considéré la dépense en question comme non éligible.
47 Deuxièmement, s’agissant des postes de coûts nos 4 et 5, l’EACEA a indiqué qu’aucune facture n’avait été produite par la requérante, de sorte que ces coûts ne pouvaient être considérés comme éligibles.
48 Troisièmement, l’EACEA a indiqué, concernant le poste de coûts no 7, que la requérante avait appliqué un taux de change erroné pour la conversion en euros. Or, cette précision est suffisamment claire et ne nécessite pas d’explications additionnelles.
49 Enfin, s’agissant des postes de coûts nos 8 à 10, l’EACEA a expliqué, dans sa lettre du 8 août 2018, que les documents produits par la requérante manquaient de clarté et qu’une traduction faisait défaut. Si l’explication de l’EACEA est, certes, succincte, la requérante pouvait, toutefois, en comprendre la teneur à la lumière des explications plus détaillées données à l’égard de chacun de ses postes dans la lettre que l’EACEA lui avait adressée le 5 février 2018. En effet, dans ladite lettre, l’EACEA avait indiqué que, s’agissant des postes nos 8 et 10, la raison de la non-éligibilité des coûts qui s’y rapportent consistait dans l’absence de clarté et de traçabilité des paiements et de la manière dont le matériel supposément acheté avait été réparti entre universités. Quant au poste no 9, l’EACEA a fait valoir que des justificatifs bancaires faisaient défaut, que des documents de comptabilité internes n’étaient pas des preuves suffisantes et que la requérante aurait dû en présenter des traductions. Ces documents ne permettaient donc pas d’identifier et de vérifier les coûts déclarés, conformément à l’article II.14.1 de la convention Quadriga.
50 Par ailleurs, la teneur du motif évoqué par l’EACEA peut également être appréhendée à la lecture des documents présentés par la requérante à cet égard et versés en annexe A. 10 à la requête, dont il ressort, en effet, que certains documents sont rédigés en caractères cyrilliques et ne sont pas traduits, que d’autres ne sont ni signés ni certifiés d’une autre manière et que d’autres encore ne sont pas clairs, dans la mesure où ils n’assurent pas une traçabilité suffisante permettant d’établir un rapport entre le matériel acheté et les destinataires finaux desdits achats, de sorte qu’il est impossible de vérifier la conformité de ces coûts avec l’article II.14.1 de la convention en cause.
51 Partant, il convient de conclure que, compte tenu du contexte factuel et des échanges entre la requérante et l’EACEA, cette dernière a motivé à suffisance de droit son refus d’accepter comme éligibles les coûts de matériel répertoriés au point III de sa lettre du 8 août 2018.
– Sur les coûts d’impression et de publication et les autres coûts
52 La requérante fait valoir que l’EACEA n’explique pas de manière précise sur quoi elle fonde son refus de considérer comme éligibles, au point IV de sa lettre du 8 août 2018, des coûts engagés au titre de l’« impression et [de la] publication », pour un montant total de 8 369,51 euros, « en particulier en ce qui concerne les postes nos 1 à 20 » de ce point ainsi que, au point V de ladite lettre, des coûts engagés figurant dans la rubrique « autres coûts », pour un montant total de 18 306,31 euros.
53 À cet égard, force est de constater, premièrement, concernant les postes de coûts d’« impression et publication », que, dans sa lettre du 5 février 2018, l’EACEA avait considéré que certains coûts se rapportant aux postes nos 1 à 20 du point IV n’étaient pas éligibles, au motif que les factures les concernant n’étaient pas claires et cohérentes. S’agissant des coûts relatifs au poste no 31, elle a indiqué que le taux de change appliqué par la requérante était erroné. Dans sa lettre du 29 mars 2018, la requérante a présenté des documents visant à prouver la réalité des coûts se rapportant uniquement aux postes nos 5, 10, 13, 17 et 31 du point IV de la lettre de l’EACEA du 5 février 2018. Dans sa lettre du 8 août 2018, l’EACEA a clairement indiqué, concernant les postes nos 1 à 20, que les listes de coûts présentées par la requérante avaient l’apparence de documents internes. Or, selon l’article II.14.1 de la convention Quadriga, les coûts éligibles de l’action faisant l’objet du contrat sont les coûts réellement exposés par un bénéficiaire, qui répondent notamment au critère d’être identifiables et vérifiables. Ainsi, au vu du contexte factuel et juridique en cause, la requérante était à même de comprendre la teneur de l’objection de l’EACEA à cet égard.
54 S’agissant du poste de coûts no 31, l’EACEA a clairement indiqué que le taux de change appliqué par la requérante était erroné, ce qui ne nécessite pas non plus d’explications additionnelles.
55 Deuxièmement, s’agissant des « autres coûts », il y a lieu de relever que, dans sa lettre du 29 mars 2018, la requérante a présenté des documents visant, selon cette lettre, à prouver l’éligibilité seulement des coûts relatifs aux postes nos 4 et 13. Or, l’EACEA a, dans sa lettre du 8 août 2018, déclaré le montant relatif au poste no 4 éligible, alors que, pour le poste no 13, elle a indiqué qu’aucun justificatif n’avait été reçu. En ce qui concerne les autres postes figurant au point V de ladite lettre, la requérante ne précise pas quels postes concrètement seraient insuffisamment motivés.
56 Partant, il convient de conclure que l’EACEA a motivé à suffisance de droit son refus d’accepter comme éligibles les coûts répertoriés aux points IV et V de sa lettre du 8 août 2018.
57 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le second moyen comme non fondé.
Sur le premier moyen, tiré du caractère éligible de certains coûts
58 Par son premier moyen, la requérante conteste le refus de l’EACEA de reconnaître comme éligibles certains coûts, malgré la production de pièces justificatives. Elle fait valoir que la demande de remboursement de l’EACEA d’un montant total de 22 454,22 euros n’est pas fondée en droit, étant donné que les conditions pour un tel recouvrement prévues à l’article II.17 et à l’article II.18 de la convention Quadriga ne sont pas réunies. À cet égard, la requérante renvoie, aux points 27, 28, 30, 37, 38 et 39 de la requête, aux observations figurant dans sa lettre du 29 mars 2018 et aux preuves soumises en annexe jointe à cette lettre et présentées devant le Tribunal en tant qu’annexes A. 8 à A. 12.
59 L’EACEA excipe de l’irrecevabilité du premier moyen au motif que celui-ci ne contiendrait pas les éléments de fait et de droit sur lesquels il est fondé.
60 À cet égard, il convient de constater que la requérante se borne à contester, de manière globale, la non-éligibilité des coûts faisant l’objet du recouvrement envisagé en cause, sans pour autant préciser quels coûts concrets auraient été erronément considérés comme non éligibles et sans identifier concrètement les erreurs que l’EACEA aurait commises à cet égard. En effet, la requérante se contente de renvoyer, de manière générale, pour chacune des catégories de coûts mentionnées au point 33 ci-dessus, à sa lettre du 29 mars 2018 et à certaines annexes de la requête.
61 Or, il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier, dans les annexes, les moyens et les arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale (voir arrêt du 14 mars 2013, Fresh Del Monte Produce/Commission, T‑587/08, EU:T:2013:129, point 270 et jurisprudence citée). Partant, les éléments essentiels de fait ne ressortant pas de façon compréhensible de la requête, il convient de rejeter comme irrecevables les arguments de la requérante tendant à contester, de façon globale, le caractère non éligible des coûts faisant l’objet du recouvrement envisagé (voir, en ce sens, ordonnance du 11 janvier 2013, Charron Inox et Almet/Commission et Conseil, T‑445/11 et T‑88/12, non publiée, EU:T:2013:4, point 57 et jurisprudence citée).
62 De même, si la requérante allègue une violation des articles II.17 et II.18 de la convention Quadriga, elle ne présente aucun argument concret susceptible d’étayer cette allégation.
63 Les seuls arguments concrets identifiables dans la requête et susceptibles d’être rattachés au premier moyen du recours ne peuvent, quant à eux, qu’être rejetés comme non fondés.
64 Ainsi, la requérante mentionne, au point 33 de la requête, que les éléments de preuve présentés par elle dans sa lettre du 29 mars 2018 montreraient que l’achat du matériel a eu lieu et que l’EACEA ne prétendrait pas que les factures produites étaient fausses. Toutefois, cet argument est inopérant. En effet, il suffit d’observer, d’une part, que l’EACEA n’a pas conclu que certains coûts liés à l’achat de matériel n’étaient pas éligibles au motif que ces achats n’auraient pas eu lieu, mais aux motifs exposés aux points 46 à 49 ci-dessus. D’autre part, et de même, la falsification éventuelle des documents en cause ne figure pas non plus parmi les motifs cités par l’EACEA en ce qui concerne les coûts de matériel. En tout état de cause, le seul fait qu’un achat aurait supposément eu lieu ou que les factures s’y rapportant ne soient pas fausses ne suffit pas pour déclarer un coût éligible. Encore faut-il que ces coûts remplissent les conditions contenues à l’article II.14.1 de la convention litigieuse, relatives notamment à l’exigence que les coûts déclarés au titre de cette convention soient identifiables et vérifiables.
65 De même, contrairement à ce que fait valoir la requérante, les objections émises par l’EACEA quant à l’éligibilité des coûts faisant l’objet du recouvrement envisagé en cause ne sauraient être qualifiées de formelles. En effet, l’exigence que les coûts déclarés au titre de cette convention soient identifiables et vérifiables constitue une obligation contractuelle essentielle, qui découle de l’article II.14.1 de la convention, et qui vise à permettre à l’EACEA d’identifier et de vérifier l’éligibilité des coûts déclarés et, ainsi, de mener à bien sa tâche consistant à garantir une gestion saine et effective des ressources de l’Union.
66 Enfin, la requérante critique, au point 38 de la requête, le fait que l’EACEA a indiqué, dans sa lettre du 8 août 2018, que certains coûts déclarés en tant que « impression et publication » devaient être rangés dans la catégorie intitulée « Autres coûts ». Il suffit de relever à cet égard que, ainsi qu’il ressort de ladite lettre, le rangement des coûts en cause d’une catégorie de coûts à une autre n’a eu aucune incidence sur l’éligibilité de tels coûts. Il y a lieu de conclure, par conséquent, que cet argument de la requérante est inopérant.
67 Partant, il y a lieu de rejeter le premier moyen du recours comme, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé. Par voie de conséquence, le premier chef de conclusions doit être rejeté.
68 Le rejet du premier chef de conclusions emporte, par voie de conséquence, également le rejet du second chef de conclusions, tendant à la condamnation de l’EACEA à payer un montant de 41 408,15 euros, assorti d’intérêts de retard calculés selon le taux d’intérêt de base de la BCE majoré de neuf points. En effet, le montant faisant l’objet du second chef de conclusions correspond à la différence entre, d’une part, le montant des coûts éligibles selon la requérante, remboursés à hauteur de 89,9 %, soit la somme de 591 462,91 euros, et, d’autre part, le montant qui lui a déjà été versé par l’EACEA, soit la somme de 550 054,76 euros. Or, compte tenu de ce que le premier chef de conclusions, portant, en substance, sur l’éligibilité des coûts déclarés par la requérante, doit être rejeté, la demande de la requérante visant à constater que l’EACEA n’avait pas droit au recouvrement de 22 454,22 euros, figurant dans la lettre du 8 août 2018, ayant été considérée comme non fondée, aucun paiement résiduel au titre de la convention Quadriga n’est dû à la requérante.
69 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble.
Sur les dépens
70 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EACEA.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (dixième chambre élargie)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Universität Koblenz-Landau est condamnée aux dépens.
Papasavvas | Kornezov | Buttigieg |
Kowalik-Bańczyk | Hesse |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 février 2021.
Signatures
* Langue de procédure : l’allemand.
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