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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Nachalnik na Rayonno upravlenie Silistra (Judgment) French Text [2022] EUECJ C-520/20 (16 June 2022) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2022/C52020.html Cite as: [2022] EUECJ C-520/20, EU:C:2022:466, ECLI:EU:C:2022:466 |
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ARRÊT DE LA COUR (première chambre)
16 juin 2022 (*)
« Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière pénale – Système d’information Schengen de deuxième génération (SIS II) – Décision 2007/533/JAI – Articles 38 et 39 – Signalement concernant un objet recherché – Objectifs du signalement – Saisie ou preuve dans une procédure pénale – Exécution – Mesures nécessaires et conduite à tenir demandée dans un signalement – Remise de l’objet saisi à l’État membre signalant – Réglementation nationale ne permettant pas le refus d’exécution du signalement »
Dans l’affaire C‑520/20,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Administrativen sad – Silistra (tribunal administratif de Silistra, Bulgarie), par décision du 14 octobre 2020, parvenue à la Cour le 16 octobre 2020, dans la procédure
DB,
LY
contre
Nachalnik na Rayonno upravlenie – Silistra pri Oblastna direktsia na Ministerstvo na vatreshnite raboti – Silistra,
LA COUR (première chambre),
composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, M. L. Bay Larsen (rapporteur), vice‑président de la Cour, et M. A. Kumin, juge,
avocat général : M. P. Pikamäe,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la procédure écrite,
considérant les observations présentées :
– pour LY et DB, par Me G. Ganeva, advokat,
– pour le gouvernement bulgare, par Mmes M. Georgieva et L. Zaharieva, en qualité d’agents,
– pour la Commission européenne, par MM. J. Tomkin et I. Zaloguin, en qualité d’agents,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 13 janvier 2022,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 38, paragraphe 1, et de l’article 39, paragraphe 3, de la décision 2007/533/JAI du Conseil, du 12 juin 2007, sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen de deuxième génération (SIS II) (JO 2007, L 205, p. 63, ci-après la « décision SIS II »).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant DB et LY au Nachalnik na Rayonno upravlenie – Silistra pri Oblastna direktsia na Ministerstvo na vatreshnite raboti – Silistra (chef du commissariat de Silistra auprès de la direction régionale du ministère de l’Intérieur de Silistra, Bulgarie), au sujet de la décision de celui-ci de remettre à l’État membre signalant un bien saisi à la suite d’un signalement introduit par ce dernier dans le système d’information Schengen de deuxième génération (ci-après le « SIS II »).
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
La décision SIS II
3 Le considérant 5 de la décision SIS II est ainsi rédigé :
« Le SIS II devrait constituer une mesure compensatoire qui contribue au maintien d’un niveau élevé de sécurité dans un espace de liberté, de sécurité et de justice de l’Union européenne par le soutien qu’il apporte à la coopération opérationnelle en matière pénale entre les services de police et les autorités judiciaires. »
4 L’article 1er de cette décision, intitulé « Établissement et objectif général du SIS II », dispose, à son paragraphe 2 :
« L’objet du SIS II, conformément aux dispositions de la présente décision, est d’assurer un niveau élevé de sécurité dans l’espace de liberté, de sécurité et de justice de l’Union européenne, y compris la préservation de la sécurité publique et de l’ordre public et la sauvegarde de la sécurité sur les territoires des États membres, ainsi que d’appliquer les dispositions du titre IV [de la troisième partie] du traité [CE] relatives à la libre circulation des personnes sur les territoires des États membres, à l’aide des informations transmises par ce système. »
5 L’article 2, paragraphe 1, de ladite décision prévoit :
« La présente décision établit les conditions et les procédures relatives à l’introduction et au traitement dans le SIS II des signalements concernant des personnes ou des objets, ainsi qu’à l’échange d’informations supplémentaires et de données complémentaires aux fins de la coopération policière et judiciaire en matière pénale. »
6 L’article 3 de la même décision, intitulé « Définitions », énonce, à son paragraphe 1 :
« Aux fins de la présente décision, on entend par :
a) “signalement”, un ensemble de données introduites dans le SIS II pour permettre aux autorités compétentes d’identifier une personne ou un objet en vue de tenir une conduite particulière à son égard ;
b) “informations supplémentaires”, les informations non stockées dans le SIS II, mais en rapport avec des signalements introduits dans le SIS II, qui doivent être échangées :
i) afin de permettre aux États membres de se consulter ou de s’informer mutuellement lors de l’introduction d’un signalement ;
ii) à la suite d’une réponse positive afin que la conduite à tenir appropriée puisse être exécutée ;
[...] »
7 L’article 20, paragraphes 1 et 2, de la décision SIS II dispose :
« 1. Sans préjudice des dispositions de l’article 8, paragraphe 1, ou des dispositions de la présente décision prévoyant le stockage de données complémentaires, le SIS II comporte exclusivement les catégories de données qui sont fournies par chacun des États membres et qui sont nécessaires aux fins prévues aux articles 26, 32, 34, 36, et 38.
2. Les catégories de données sont les suivantes :
[...]
b) les objets visés aux articles 36 et 38. »
8 L’article 21 de cette décision énonce :
« Avant d’introduire un signalement, l’État membre signalant vérifie si le cas est suffisamment approprié, pertinent et important pour justifier l’introduction du signalement dans le SIS II. »
9 L’article 24 de ladite décision, intitulé « Dispositions générales concernant l’apposition d’un indicateur de validité », prévoit, à son paragraphe 1 :
« Si un État membre estime que la mise en œuvre d’un signalement introduit conformément aux articles 26, 32 ou 36 n’est pas compatible avec son droit national, ses obligations internationales ou des intérêts nationaux essentiels, il peut exiger par la suite que soit apposé sur ledit signalement un indicateur de validité visant à ce que l’exécution de la conduite à tenir en raison de ce signalement n’ait pas lieu sur son territoire. L’indicateur de validité est apposé par le bureau Sirene de l’État membre qui a introduit le signalement. »
10 L’article 38 de la même décision dispose :
« 1. Les données relatives aux objets recherchés aux fins d’une saisie ou de la preuve dans une procédure pénale sont intégrées dans le SIS II.
2. Les catégories ci-après d’objets facilement identifiables sont introduites :
a) les véhicules à moteur d’une cylindrée supérieure à 50 cm3, les embarcations et les aéronefs ;
[...] »
11 L’article 39 de la décision SIS II, intitulé « Exécution de la conduite à tenir demandée dans un signalement », prévoit :
« 1. Si une interrogation fait apparaître l’existence d’un signalement pour un objet trouvé, l’autorité qui l’a constaté se met en rapport avec l’autorité signalante afin de convenir des mesures nécessaires. À cette fin, des données à caractère personnel peuvent également être transmises conformément à la présente décision.
2. Les informations visées au paragraphe 1 sont communiquées grâce à l’échange d’informations supplémentaires.
3. L’État membre qui a trouvé l’objet prend les mesures conformément à son droit national. »
12 L’article 49 de cette décision SIS II énonce :
« 1. Un État membre signalant est responsable de l’exactitude, de l’actualité, ainsi que de la licéité de l’introduction des données dans le SIS II.
2. Seul l’État membre signalant est autorisé à modifier, compléter, rectifier, mettre à jour ou effacer les données qu’il a introduites.
3. Si un État membre autre que l’État membre signalant dispose d’indices faisant présumer qu’une donnée est entachée d’erreur de fait ou a été stockée illégalement, il en informe l’État membre signalant, par voie d’échange d’informations supplémentaires, dans les meilleurs délais et au plus tard dix jours après avoir relevé ces éléments. L’État membre signalant vérifie ce qui lui est communiqué et, le cas échéant, corrige ou efface la donnée sans délai.
[...] »
Le manuel Sirene
13 L’annexe de la décision d’exécution 2013/115/UE de la Commission, du 26 février 2013, relative au manuel Sirene et à d’autres mesures d’application pour le système d’information Schengen de deuxième génération (SIS II) (JO 2013, L 71, p. 1), telle que modifiée par la décision d’exécution (UE) 2017/1528 de la Commission, du 31 août 2017 (JO 2017, L 231, p. 6) (ci-après le « manuel Sirene »), dispose, à son point 2.1 :
« Définitions
– “État membre signalant”: l’État membre qui introduit le signalement dans le SIS II.
– “État membre d’exécution” : l’État membre qui exécute la conduite à tenir en cas de réponse positive.
– “Bureau Sirene du signalement” : le bureau Sirene d’un État membre qui détient les empreintes digitales ou des photographies de la personne signalée par un autre État membre.
– “Réponse positive” : une réponse positive est réputée exister dans le SIS II lorsque :
[...]
d) des mesures doivent être prises à la suite de la réponse positive.
[...] »
14 Le point 8.3 du manuel Sirene, intitulé « Échange d’informations en cas de réponse positive », énonce :
« Les bureaux Sirene peuvent transmettre des informations complémentaires sur les signalements relevant de l’article 38 de la décision SIS II. Ce faisant, ils agissent pour le compte des autorités judiciaires lorsque ces informations sont du ressort de l’entraide judiciaire conformément au droit national.
[...] »
Le droit bulgare
Le zakon za Ministerstvoto na vatreshnite raboti
15 Le zakon za Ministerstvoto na vatreshnite raboti (loi relative au ministère de l’Intérieur), du 28 mai 2014 (DV n° 53, du 27 juin 2014, p. 2), dans sa version applicable au litige au principal, dispose, à son article 84 :
« (1) Les services de police peuvent saisir temporairement un bien signalé à des fins de recherche dans le SIS ou dans les bases de données de l’Organisation internationale de police criminelle (Interpol).
[...]
(6) [...] La remise ou la saisie est notifiée à l’État membre ayant introduit le signalement aux fins de recherche dans le SIS ou dans la base de données d’Interpol.
[...]
(8) [...] Si, dans un délai de 60 jours, l’État membre signalant demande la restitution du bien recherché, ce dernier est restitué à la personne indiquée dans la demande dans un délai de 7 jours, par décision du chef d’unité compétent, au sens du paragraphe 6.
[...]
(13) [...] En cas de remise ou de saisie de [...] certificats d’immatriculation et de plaques d’immatriculation volés, détournés, égarés ou invalidés, si ces documents ne relèvent pas des catégories visées au paragraphe 11, ils sont remis selon les modalités prévues à la représentation diplomatique ou consulaire de l’État membre émetteur du document, par décision du chef d’unité compétent, au sens du paragraphe 6.
[...] »
La naredba no 8121z-465
16 L’article 7 de la naredba no 8121z-465 za organizatsiyata i funktsioniraneto na Natsionalnata Shengenska informatsionna sistema na Republika Balgaria (arrêté no 8121z-465, relatif à l’organisation et au fonctionnement du système d’information Schengen national de la République de Bulgarie), du 26 août 2014 (DV no 74, du 5 septembre 2014, p. 33), dans sa version applicable au litige au principal, dispose :
« (1) Le [système d’information Schengen national (SISN)] traite des signalements relatifs aux catégories de biens suivantes :
1. les biens recherchés aux fins d’une saisie ou de la preuve dans une procédure pénale (article 38 de la décision [SIS II]) ;
a) les véhicules à moteur d’une cylindrée supérieure à 50 cm3, les navires et les aéronefs ;
[...] »
Le litige au principal et la question préjudicielle
17 EF, un ressortissant bulgare, a acquis un véhicule à moteur en contractant un prêt bancaire, le 23 décembre 2014, auprès de la Santander Consumer Bank AS, une banque établie en Norvège. Ce prêt bancaire était garanti par le véhicule financé.
18 Au mois de mai 2016, pour une raison non établie, EF a cessé de rembourser ledit prêt bancaire, tout en informant cette banque que ce véhicule se trouvait désormais en Bulgarie. Ladite banque a alors chargé Lindorff AS du recouvrement de ses créances relatives audit véhicule.
19 Il ressort de la demande de décision préjudicielle que le même véhicule a été acquis, par la suite, en Bulgarie par AB, lequel l’aurait, à son tour, revendu, au mois de mars 2017, à Varna (Bulgarie), à DB.
20 Le 24 mai 2017, le Royaume de Norvège a introduit dans le SISN un signalement à des fins de saisie d’un véhicule, en tant que bien « volé, acquis illégalement ou perdu ».
21 Le 26 mai 2017, les services de police bulgares ont identifié, sur un parc de stationnement de la commune de Silistra (Bulgarie), un véhicule dont le numéro de châssis correspondait parfaitement à celui signalé. Le même jour, ce véhicule et son certificat d’immatriculation ont été confisqués à DB, au nom duquel celui-ci avait été immatriculé.
22 Le bureau Sirene bulgare a alors procédé à un échange d’informations avec le bureau Sirene norvégien, ce dernier ayant indiqué que le véhicule concerné avait fait l’objet d’un signalement à la suite de la commission, le 23 décembre 2014 à Hordaland (Norvège), d’une escroquerie ou d’un abus de confiance.
23 Le 6 juin 2017, les autorités bulgares ont reçu des autorités norvégiennes une demande de remise de ce véhicule à son propriétaire désigné, à savoir à Santander Consumer Bank, par l’intermédiaire de Lindorff, dont Plam EOOD était le représentant en Bulgarie.
24 Le 4 juillet 2017, ledit véhicule a été remis à CD, le gérant de Plam.
25 Le 28 août 2019, le chef du commissariat de Silistra auprès de la direction régionale du ministère de l’Intérieur de Silistra a rejeté la demande des requérants au principal, formulée le 13 août 2019 et tendant à ce que le même véhicule leur soit restitué immédiatement.
26 Les requérants au principal ont alors contesté, devant l’Administrativen sad – Silistra (tribunal administratif de Silistra, Bulgarie), la légalité de la décision de remise du véhicule concerné aux autorités de l’État membre signalant, invoquant l’absence de preuve convaincante que des poursuites pénales avaient été effectivement engagées en Norvège en ce qui concerne ce véhicule et faisant valoir leur bonne foi lors de l’acquisition dudit véhicule.
27 Considérant qu’il existait des relations de droit privé entre Santander Consumer Bank et EF et que la commission d’infractions pénales n’avait pas été établie, la juridiction de renvoi a demandé au chef du commissariat de Silistra auprès de la direction régionale du ministère de l’Intérieur de Silistra d’interroger les services de police norvégiens sur l’existence de poursuites pénales engagées en Norvège concernant le même véhicule ainsi que de produire un extrait des dispositions pertinentes du code pénal norvégien, accompagné d’une traduction de celui-ci dans la langue bulgare, y compris les passages ayant fondé l’introduction du signalement relatif au véhicule concerné. Cette juridiction a en outre exigé une réponse officielle des autorités norvégiennes en ce qui concerne la nature exacte de l’infraction qui aurait fait l’objet de ces poursuites et le stade auquel les procédures correspondantes se trouveraient.
28 Par une lettre présentée lors d’une audience du 26 août 2020 devant la juridiction de renvoi, celle-ci a été informée du fait que, dès lors que le véhicule concerné avait été retrouvé et rapatrié en Norvège, le dossier de l’affaire avait été clos le 10 juillet 2017.
29 La juridiction de renvoi considère que, si une telle procédure pénale n’existait pas, le signalement relatif au véhicule concerné dans le SIS II ne relèverait pas du champ d’application de la décision SIS II défini à l’article 2 de cette dernière et, par conséquent, aurait été introduit dans ce système en méconnaissance des objectifs poursuivis par de tels signalements, lesquels sont introduits aux fins d’une saisie ou de la preuve dans une procédure pénale dans l’État membre signalant.
30 Cette juridiction s’interroge sur la conformité à la décision SIS II d’une réglementation nationale qui impose aux autorités compétentes de l’État membre ayant trouvé l’objet recherché, agissant ainsi dans le cadre d’une compétence liée, une obligation de saisie de tout bien signalé à des fins de recherche dans le SIS II, dans le cas où il existerait des indices portant à croire que le signalement concerné n’a pas été introduit dans le SIS II conformément aux objectifs énoncés à l’article 38, paragraphe 1, de cette décision.
31 Dans ces conditions, l’Administrativen sad – Silistra (tribunal administratif de Silistra) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :
« L’article 39, et en particulier l’article 39, paragraphe 3, de la décision [SIS II], doit-il être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à des dispositions et à des pratiques administratives nationales qui prévoient que, en présence d’éléments de nature à conclure que le signalement introduit dans le SIS ne relève pas des objectifs de l’enregistrement d’un tel signalement, notamment de ceux définis à l’article 38, paragraphe 1, l’autorité de l’État membre d’exécution compétente peut, voire doit, refuser l’exécution ? »
Sur la question préjudicielle
32 Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 39 de la décision SIS II doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale en vertu de laquelle les autorités compétentes de l’État membre d’exécution sont tenues d’exécuter un signalement introduit dans le SIS II concernant un objet, alors même que celles-ci éprouvent des doutes quant aux motifs d’introduction d’un tel signalement tels que ceux-ci sont énoncés à l’article 38, paragraphe 1, de cette décision.
33 À titre liminaire, il ressort de la décision de renvoi que le signalement concerné a pour objet un véhicule à moteur d’une cylindrée supérieure à 50 cm3.
34 À cet égard, l’article 38, paragraphe 1, et paragraphe 2, sous a), de la décision SIS II prévoit que les données relatives à de tels véhicules, recherchés aux fins d’une saisie ou de la preuve dans une procédure pénale, sont intégrées dans le SIS II.
35 L’exécution de la conduite à tenir demandée dans un tel signalement est régie par l’article 39 de la décision SIS II. Cet article fait référence à des actions et à des mesures standardisées de nature essentiellement conservatoire de la part des autorités ayant constaté l’existence du signalement concernant un objet et opère, à son paragraphe 3, un renvoi au droit national quant au choix des mesures à prendre.
36 L’article 39, paragraphe 1, de cette décision prévoit que, lorsqu’une interrogation fait apparaître l’existence d’un signalement pour un objet trouvé, l’autorité qui l’a constaté se met en rapport avec l’autorité signalante afin de convenir des mesures nécessaires.
37 Le point 2.2.2 de l’appendice 2 du manuel Sirene précise à cet égard que, dans le respect du droit national de l’État membre d’exécution, les actions entreprises sont la saisine de l’objet trouvé ou la prise de toutes les mesures conservatoires nécessaires, l’identification de la personne en possession de cet objet et la prise de contact avec le bureau Sirene de l’État membre signalant.
38 Par ailleurs, l’article 39, paragraphe 2, de la décision SIS II ajoute que les informations visées au paragraphe 1 de cet article sont communiquées grâce à l’« échange d’informations supplémentaires », ces dernières étant définies à l’article 3, paragraphe 1, sous b), de cette décision comme étant les informations non stockées dans le SIS II, mais en rapport avec des signalements introduits dans le SIS II, qui doivent être échangées notamment, d’une part, afin de permettre aux États membres de se consulter ou de s’informer mutuellement lors de l’introduction d’un signalement et, d’autre part, à la suite d’une réponse positive afin que la conduite à tenir appropriée puisse être exécutée.
39 Le point 8.3 du manuel Sirene précise que, dès lors qu’il s’agit d’une réponse positive relative à un signalement à des fins de saisie ou de preuve portant notamment sur un véhicule effectué au titre de l’article 38 de la décision SIS II, des informations supplémentaires sont transmises par les bureaux Sirene « le plus rapidement possible ».
40 Eu égard à cette nécessité d’une action rapide, dont dépend la coopération opérationnelle en matière pénale entre les services de police et les autorités judiciaires mise en œuvre au titre de la décision SIS II, les autorités de l’État membre d’exécution doivent, aux fins de l’exécution du signalement introduit, prendre des mesures conservatoires nécessaires, sans qu’une contestation de la validité de ce signalement, tenant à l’existence de doutes quant au respect, par les autorités de l’État membre ayant introduit celui-ci, des objectifs visés à l’article 38, paragraphe 1, de cette décision, en l’occurrence l’existence, dans l’État membre signalant, d’une procédure pénale relative à l’objet signalé, puisse leur être opposée.
41 Une telle conclusion s’impose d’autant plus que, conformément à l’article 1er, paragraphe 2, de la décision SIS II, l’objet du SIS II est notamment d’assurer un niveau élevé de sécurité dans l’espace de liberté, de sécurité et de justice de l’Union, y compris la préservation de la sécurité publique et de l’ordre public et la sauvegarde de la sécurité sur les territoires des États membres.
42 C’est dans ce contexte que, aux termes de l’article 2, paragraphe 1, de la décision SIS II, cette dernière établit les conditions et les procédures relatives à l’introduction et au traitement dans le SIS II des signalements concernant notamment des objets, ainsi qu’à l’échange d’informations supplémentaires et de données complémentaires aux fins de la coopération policière et judiciaire en matière pénale.
43 Ainsi qu’il ressort de l’article 20, paragraphes 1 et 2, de la décision SIS II, le SIS II comporte exclusivement les catégories de données qui sont nécessaires aux fins prévues notamment à l’article 38 de celle-ci.
44 Bien qu’il en ressorte que les signalements portant sur des objets doivent, en vertu de cet article 38, poursuivre les objectifs qui y sont établis, l’article 21 de cette décision précise que c’est à l’État membre signalant de vérifier, avant d’introduire un signalement, si le cas est suffisamment approprié, pertinent et important pour justifier l’introduction du signalement dans le SIS II.
45 En outre, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il résulte de l’article 49, paragraphe 1, de la décision SIS II, c’est l’État membre signalant qui est responsable de l’exactitude, de l’actualité ainsi que de la licéité de l’introduction des données dans le SIS II, l’article 49, paragraphe 2, de cette décision indiquant que seul cet État membre est autorisé à modifier, compléter, rectifier, mettre à jour ou effacer les données qu’il a introduites.
46 En effet, si un État membre autre que l’État membre signalant dispose d’indices faisant présumer qu’une donnée est entachée d’une erreur de fait ou a été stockée illégalement, l’article 49, paragraphe 3, de ladite décision précise que l’État membre disposant de tels indices en informe l’État membre signalant, par voie d’échange d’informations supplémentaires, dans les meilleurs délais et au plus tard dix jours après avoir relevé ces éléments. L’État membre signalant vérifie ce qui lui est communiqué et, le cas échéant, corrige ou efface la donnée concernée sans délai.
47 Si, certes, dans certains cas, la décision SIS II permet à l’État membre d’exécution d’exiger l’apposition sur un signalement d’un « indicateur de validité », visant à ce que l’exécution de celui-ci n’ait pas lieu sur son territoire, ainsi que l’article 24, paragraphe 1, de cette décision le prévoit, il y a lieu de relever néanmoins que l’applicabilité de cet article est limitée, eu égard à son libellé, aux signalements introduits conformément aux articles 26, 32 ou 36 de ladite décision, à savoir concernant soit des personnes, soit des objets aux fins de contrôle discret ou de contrôle spécifique. Or, il y a lieu de relever que tel n’est pas le cas en l’occurrence, puisqu’il s’agit d’un signalement concernant un objet introduit à des fins autres que celles relatives à un contrôle discret ou à un contrôle spécifique, à savoir aux fins d’une saisie ou d’une preuve dans une procédure pénale.
48 En outre, ainsi que la Commission européenne l’a relevé dans ses observations écrites, l’échange d’informations entre l’État membre signalant et l’État membre d’exécution ainsi que l’adoption de mesures nécessaires par l’État membre ayant trouvé l’objet signalé procèdent de l’application du principe de coopération loyale. En effet, ainsi que cela ressort du considérant 5 de la décision SIS II, le système mis en place dans cette décision devrait apporter un soutien à la coopération opérationnelle en matière pénale entre les services de police et les autorités judiciaires.
49 À cet égard, la Cour a d’ailleurs jugé que le principe de coopération loyale, qui est à la base de l’acquis de Schengen, implique que l’État qui consulte le SIS tienne dûment compte des indications fournies par l’État membre signalant. Aussi, le réseau de bureaux Sirene a précisément été mis en place afin de renseigner les autorités nationales confrontées à un problème dans l’exécution d’un signalement (arrêt du 31 janvier 2006, Commission/Espagne, C‑503/03, EU:C:2006:74, points 56 et 57).
50 Or, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 44 de ses conclusions, si, dans le cadre de l’exécution d’un signalement relatif à un objet, il était loisible aux autorités de l’État membre d’exécution de remettre en cause la validité d’un signalement concernant un objet, du seul fait de l’existence d’indices portant à conclure que les objectifs énoncés à l’article 38, paragraphe 1, de la décision SIS II n’ont pas été respectés, cela risquerait de compromettre l’efficacité de la coopération opérationnelle en matière pénale entre les services de police et les autorités judiciaires mise en œuvre au titre de cette décision.
51 Quant à une éventuelle remise de l’objet saisi aux autorités de l’État membre signalant, telle que celle prévue en l’occurrence à l’article 84, paragraphe 8, de la loi relative au ministère de l’Intérieur, dans sa version applicable au litige au principal, il y a lieu de relever que, si une telle mesure ne ressort pas explicitement du libellé de l’article 39 de la décision SIS II, le paragraphe 3 de cet article prévoit que l’État membre qui a trouvé l’objet prend les mesures « conformément à son droit national ».
52 Cette dernière disposition opère ainsi un renvoi au droit national et ne définit en aucune manière des mesures précises qui doivent être prises dans ce cadre par les autorités de l’État membre d’exécution. Il s’ensuit que ladite dernière disposition ne saurait être interprétée comme excluant que ces mesures puissent comprendre celles visant une remise de l’objet signalé à l’État membre signalant.
53 Partant, compte tenu de la marge d’appréciation dont l’État membre d’exécution dispose s’agissant du choix desdites mesures en vertu de l’article 39, paragraphe 3, de la décision SIS II, cette disposition ne s’oppose pas non plus à ce que cet État membre, ayant fait le choix de prévoir une telle obligation de remise, soit tenu de l’exécuter, quand bien même les autorités compétentes dudit État membre éprouveraient des doutes quant au fait que le signalement a été introduit pour les motifs énoncés à l’article 38, paragraphe 1, de cette décision.
54 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question posée que l’article 39 de la décision SIS II doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale en vertu de laquelle les autorités compétentes de l’État membre d’exécution sont tenues d’exécuter un signalement introduit dans le SIS II concernant un objet, alors même que celles-ci éprouvent des doutes quant aux motifs d’introduction d’un tel signalement tels que ceux-ci sont énoncés à l’article 38, paragraphe 1, de cette décision.
Sur les dépens
55 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :
L’article 39 de la décision 2007/533/JAI du Conseil, du 12 juin 2007, sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen de deuxième génération (SIS II), doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale en vertu de laquelle les autorités compétentes de l’État membre d’exécution sont tenues d’exécuter un signalement introduit dans le système d’information Schengen de deuxième génération concernant un objet, alors même que celles-ci éprouvent des doutes quant aux motifs d’introduction d’un tel signalement tels que ceux-ci sont énoncés à l’article 38, paragraphe 1, de cette décision.
Signatures
* Langue de procédure : le bulgare.
© European Union
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