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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) |
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You are here: BAILII >> Databases >> Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions) >> Calzaturificio Emmegiemme Shoes v EUIPO - Inticom (MAIMAI MADE IN ITALY) (EU Trade Mark - Judgment) French Text [2022] EUECJ T-589/20 (09 February 2022) URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2022/T58920.html Cite as: [2022] EUECJ T-589/20, EU:T:2022:59, ECLI:EU:T:2022:59 |
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DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)
9 février 2022 (*)
« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale MAIMAI MADE IN ITALY – Marque de l’Union européenne verbale antérieure YAMAMAY – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 – Usage sérieux de la marque antérieure – Recevabilité de nouveaux éléments de preuve – Altération du caractère distinctif »
Dans l’affaire T‑589/20,
Calzaturificio Emmegiemme Shoes Srl, établie à Surano (Italie), représentée par Me R. Fragalà, avocat,
partie requérante,
contre
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme M. Capostagno, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été
Inticom SpA, établie à Gallarate (Italie),
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 14 juillet 2020 (affaire R 1874/2018-2), relative à une procédure d’opposition entre Inticom et Calzaturificio Emmegiemme Shoes,
LE TRIBUNAL (troisième chambre),
composé de MM. M. van der Woude, président, G. De Baere (rapporteur) et V. Kreuschitz, juges,
greffier : Mme R. Ūkelytė, administratrice,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 24 septembre 2020,
vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 15 janvier 2021,
à la suite de l’audience du 21 octobre 2021,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 15 octobre 2012, la requérante, Calzaturificio Emmegiemme Shoes Srl, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].
2 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal MAIMAI MADE IN ITALY.
3 Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 18, 25 et 26 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :
– classe 18 : « Cuir et imitations du cuir ; produits en ces matières non compris dans d’autres classes ; peaux d’animaux » ;
– classe 25 : « Vêtements ; chaussures ; chapellerie » ;
– classe 26 : « Agrafes pour chaussures ».
4 La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2012/222, du 21 novembre 2012.
5 Le 19 février 2013, l’opposante, Inticom SpA, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits visés au point 3 ci-dessus.
6 L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne verbale YAMAMAY, déposée le 14 septembre 2006 et enregistrée le 30 août 2007 sous le numéro 5343769, désignant des produits relevant des classes 18, 25 et 26 au sens de l’arrangement de Nice et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :
– classe 18 : « Cuir et imitations du cuir ; produits en ces matières non compris dans d’autres classes ; peaux d’animaux ; malles et valises ; parapluies, parasols et cannes ; fouets et sellerie » ;
– classe 25 : « Articles d’habillement ; chaussures et chapellerie » ;
– classe 26 : « Dentelles et broderies ; rubans et lacets ; boutons, crochets et illets ; épingles et aiguilles ; fleurs artificielles ».
7 Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].
8 Le 18 avril 2015, la requérante a demandé, conformément à l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 (devenu article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001), que l’opposante apporte la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure pour les produits pour lesquels elle était enregistrée et sur lesquels l’opposition était fondée.
9 Le 11 août 2015, l’opposante a produit divers documents aux fins de prouver l’usage sérieux de la marque antérieure.
10 Par une demande du 18 avril 2015, la requérante a limité sa demande de marque à certains produits relevant de la classe 25, dont notamment des vêtements et des chaussures.
11 Par décision du 21 octobre 2016, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité. Elle a estimé qu’il n’était pas nécessaire d’examiner les preuves de l’usage et de procéder à une comparaison des produits, étant donné que les signes n’étaient pas susceptibles d’être confondus.
12 Le 14 décembre 2016, l’opposante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 68 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.
13 Le 17 mars 2017, l’opposante a introduit une demande de modification de la liste des produits relevant de la classe 18, désignés dans l’enregistrement de la marque antérieure. De ce fait, les produits relevant de la marque antérieure et compris dans la classe 18 correspondaient à la description suivante : « Cuir et imitations du cuir ; produits en ces matières non compris dans d’autres classes ; peaux d’animaux ; malles et valises ; parapluies, parasols et cannes ; fouets et sellerie ; sacs de plage ; porte-cartes [portefeuilles] ; sacs à main ; havresacs ; portefeuilles ; bourses ; sacs pour faire les courses ; coffrets destinés à contenir des articles de toilette dits “vanity cases” ; mallettes pour documents ; sacs à dos ; bandoulières [courroies] en cuir ; porte-documents ; colliers pour animaux ; porte-musique ; cartables ; sacoches pour porter les enfants ».
14 Par décision du 14 décembre 2017 (affaire R 2336/2016-2), la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a fait droit au recours et a renvoyé l’affaire devant la division d’opposition pour la poursuite de la procédure.
15 Par décision du 3 août 2018, la division d’opposition a fait droit partiellement à l’opposition. Elle a considéré que les produits relevant de la marque demandée, compris dans les classes 18 et 26 étaient différents des produits couverts par la marque antérieure, tandis que les produits relevant de la marque demandée, compris dans la classe 25 étaient pour la plupart identiques et similaires, à l’exception des « plastrons de chemises ; bouts de chaussures ; tiges de bottes ; ferrures de chaussures ; empeignes ; talonnettes pour chaussures ; trépointes de chaussures ; semelles ; talons ; et visières de casquettes ».
16 Eu égard au public pertinent et au caractère distinctif intrinsèque moyen de la marque antérieure, la division d’opposition a conclu qu’il existait un risque de confusion pour les produits identiques et similaires couverts par les deux marques en cause.
17 Le 24 septembre 2018, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 68 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition du 3 août 2018 en demandant son annulation partielle.
18 Dans ses observations en réponse au mémoire exposant les motifs de recours, en date du 19 février 2019, l’opposante a demandé le rejet du recours et a fourni des documents supplémentaires concernant l’usage de la marque antérieure.
19 Le 11 juin 2019, la requérante a demandé que les observations de l’opposante soient écartées, dans la mesure où elles étaient tardives et contenaient des éléments de preuve nouveaux, à l’égard desquels le principe du contradictoire n’avait pas été respecté.
20 Le 10 juillet 2019, le greffe des chambres de recours a confirmé que, contrairement à ce que prétendait la requérante, les observations de l’opposante ainsi que le bordereau des annexes corrigé avaient été reçus dans les délais impartis.
21 Le 2 août 2019, conformément aux dispositions de l’article 70, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, la requérante a été invitée à présenter une réponse aux observations de l’opposante du 19 février 2019, dans la mesure où elles concernaient des éléments de preuve nouveaux concernant l’usage de la marque antérieure qui n’avaient pas été présentés devant la division d’opposition.
22 Le 13 septembre 2019, la requérante a déposé ses observations en réponse.
23 Par décision du 14 juillet 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours.
24 En premier lieu, la chambre de recours a considéré que le recours ne concernait que les produits relevant de la classe 25 pour lesquels l’opposition avait été accueillie et que la décision de la division d’opposition était dès lors devenue définitive en ce qu’elle rejetait l’opposition et déclarait que la marque demandée pouvait être enregistrée pour les produits restants relevant des classes 18 et 26.
25 En deuxième lieu, en ce qui concerne la preuve de l’usage et plus spécifiquement la documentation présentée devant la division d’opposition, la chambre de recours a estimé que, au vu de la quantité considérable de documents fournis, l’opposante avait valablement étayé que la marque antérieure avait été utilisée sur une partie du territoire de l’Union européenne pendant la période pertinente et que c’était à juste titre que la division d’opposition avait relevé que les éléments de preuve produits par l’opposante, examinés dans leur ensemble, démontraient de manière satisfaisante l’importance de l’usage qu’elle avait fait de la marque antérieure pour les vêtements et chaussures relevant de la classe 25.
26 La chambre de recours a estimé qu’il n’était dès lors pas nécessaire d’examiner la question de la recevabilité et du caractère probant de la documentation supplémentaire présentée dans le cadre du recours devant elle. Dans un souci de clarté et d’exhaustivité, la chambre de recours a néanmoins précisé, d’une part, que les observations de l’opposante du 19 février 2019, formulées en réponse au mémoire exposant les motifs de recours, n’avaient pas été déposées tardivement et, d’autre part, qu’elle disposait d’un pouvoir discrétionnaire afin d’accepter, sous certaines conditions, des preuves produites pour la première fois devant elle. Ainsi, la chambre de recours a considéré que les preuves présentées pour la première fois devant elle étaient pertinentes pour l’issue de l’affaire et qu’il s’agissait de preuves supplémentaires, dont le but était de renforcer le contenu des preuves présentées antérieurement. Elle a donc estimé que ces nouveaux éléments de preuve pouvaient être accueillis.
27 En troisième lieu, la chambre de recours a relevé que le public pertinent était constitué du grand public de l’Union, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé et disposant d’un niveau d’attention moyen.
28 En quatrième lieu, la chambre de recours a constaté que les produits relevant de la marque demandée étaient partiellement identiques et partiellement similaires aux produits de l’opposante pour lesquels l’usage sérieux avait été prouvé, à savoir les vêtements et les chaussures.
29 En cinquième lieu, elle a relevé que les signes en conflit présentaient une certaine similitude sur le plan visuel, bien que réduite, et une similitude de degré à tout le moins moyen sur le plan phonétique et que ces similitudes n’étaient pas contrebalancées par la moindre différence sur le plan conceptuel, en particulier pour le public espagnol, letton, hongrois, polonais et portugais.
30 Dès lors, la chambre de recours a conclu que, compte tenu de l’identité et de la similitude des produits désignés par les marques en conflit, de la similitude visuelle et phonétique constatée entre les signes et du degré moyen de caractère distinctif de la marque antérieure, il existait un risque que le public pertinent, en particulier le public espagnol, letton, hongrois, polonais et portugais, soit amené à considérer que les « vêtements ; chapeaux et chaussures » désignant la marque demandée provenaient de la même entreprise produisant des vêtements et chaussures sous la marque YAMAMAY, ou d’entreprises liées économiquement. Elle a dès lors conclu à l’existence d’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, pour les produits en cause appartenant à la classe 25.
Conclusions des parties
31 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– déclarer illégal l’article 18, paragraphe 1, de la décision 2018-9 du présidium des chambres de recours du 12 novembre 2018 sur l’organisation des chambres (ci-après la « décision 2018-9 ») ;
– réformer ou annuler la décision attaquée ;
– condamner l’EUIPO aux dépens.
32 L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
33 À l’appui de son recours, la requérante invoque, en substance, quatre moyens, tirés, le premier, d’une exception d’illégalité à l’encontre de l’article 18, paragraphe 1, de la décision 2018-9 en ce qu’il viole les articles 41 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), le deuxième, d’irrégularités de procédure et de forme de la décision attaquée, le troisième, d’erreurs dans l’analyse des preuves de l’usage et, le quatrième, d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.
34 Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 15 octobre 2012, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée).
35 Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 15 juin 2021, Facebook Ireland e.a., C‑645/19, EU:C:2021:483, point 100 et jurisprudence citée), le litige est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001.
36 Il y a lieu de relever toutefois que, en ce qui concerne la preuve de l’usage sérieux de la marque demandée, en application notamment de l’article 82, paragraphe 2, sous d), du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), le litige est régi par les dispositions du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO 1995, L 303, p. 1).
37 Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références, faites par la chambre de recours dans la décision attaquée, par la requérante dans l’argumentation soulevée et par l’EUIPO dans son mémoire en défense, à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 comme visant l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.
Sur le premier moyen, tiré de l’illégalité de l’article 18, paragraphe 1, de la décision 2018-9,en ce qu’ilviole les articles 41 et 47 de la Charte
38 Dans le cadre de son premier moyen, la requérante soulève, en substance, une exception d’illégalité à l’encontre de l’article 18, paragraphe 1, de la décision 2018-9, qui était applicable en l’espèce, en ce que cette disposition prévoit que, lorsque plusieurs recours sont formés contre une même décision, ou contre une autre décision rendue par la première instance dans la même procédure relative à la même marque de l’Union européenne ou demande de marque de l’Union européenne, ces recours sont attribués à la même chambre de recours.
39 La requérante fait valoir non seulement que l’article 18, paragraphe 1, de la décision 2018-9 constitue une déformation de l’article 35, paragraphe 1, du règlement délégué 2018/625 et de l’article 166, paragraphe 4, sous c), du règlement 2017/1001, sur lesquels cette disposition est fondée, mais également que celle-ci se heurte au principe de bonne administration ainsi qu’au droit à un recours effectif et à l’accès à un tribunal impartial, consacrés par les articles 41 et 47 de la Charte.
40 Ainsi, la requérante considère, d’abord, que l’exigence d’économie de la procédure, sur laquelle repose l’article 18, paragraphe 1, de la décision 2018-9, ne saurait porter atteinte aux droits individuels consacrés aux articles 41 et 47 de la Charte. Elle estime qu’il est possible de réattribuer un recours pour la seconde fois à la même chambre de recours au motif que la décision de la division d’opposition était incomplète. En revanche, il n’en serait pas de même lorsque la chambre de recours a considéré que la décision de la division d’opposition était non seulement incomplète, mais aussi erronée. En effet, dans sa seconde décision, la division d’opposition ne pourrait pas s’écarter des indications de la chambre de recours et cette dernière ne pourrait donc pas prendre de décision contraire à sa décision initiale, à moins d’être composée autrement.
41 La requérante considère, ensuite, que l’article 35, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625 devrait également être appliqué en première instance.
42 L’EUIPO fait valoir que les griefs de la requérante sont dénués de fondement.
43 À titre liminaire, il convient de relever que l’article 256, paragraphe 3, et l’article 267, premier alinéa, sous b), TFUE, cités par la requérante, concernent les questions préjudicielles et ne sont, par conséquent, pas pertinents.
44 Ensuite, en premier lieu, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel l’article 35, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625, devrait être appliqué aux situations de première instance. En effet, si le législateur avait voulu imposer une condition de nouvelle composition de la chambre aux recours contre des décisions adoptées à la suite d’un premier renvoi devant la division d’opposition, il l’aurait expressément prévu. Or, ce n’est pas le cas, comme en attestent l’article 35, paragraphe 1, du règlement délégué 2018/625 et l’article 166, paragraphe 4, sous c), du règlement 2017/1001, qui prévoient que le président des chambres de recours attribue l’affaire à une chambre de recours sur la base de critères objectifs fixés par le présidium des chambres de recours. Dès lors, il n’y a pas de raison d’appliquer les contraintes relatives à la composition des chambres en dehors des cas où il y a un arrêt définitif du Tribunal ou de la Cour.
45 En deuxième lieu, quand bien même l’article 47 de la Charte serait applicable aux chambres de recours de l’EUIPO, au point 52 de l’arrêt du 1er juillet 2008, Chronopost et La Poste/UFEX e.a. (C‑341/06 P et C‑342/06 P, EU:C:2008:375), la Cour a estimé que le seul fait que le juge rapporteur, dans la formation de jugement qui avait rendu l’arrêt du 7 juin 2006, UFEX e.a./Commission (T‑613/97, EU:T:2006:150), du Tribunal était également le président et le juge rapporteur dans la formation de jugement qui avait rendu l’arrêt du 14 décembre 2000, UFEX e.a./Commission (T‑613/97, EU:T:2000:304), en première instance ne permettait pas de conclure que le Tribunal n’aurait pas respecté l’exigence d’impartialité à laquelle sont tenus ses membres et aurait ainsi méconnu le droit fondamental à un procès équitable.
46 En troisième lieu, s’agissant de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte, le Tribunal a déjà jugé qu’on ne saurait poser en principe général découlant du devoir d’impartialité qu’une instance administrative ou judiciaire a l’obligation de renvoyer l’affaire à une autre autorité ou à un organe autrement constitué de cette autorité [voir arrêt du 16 février 2017, Antrax It/EUIPO – Vasco Group (Thermosiphons pour radiateurs), T‑828/14 et T‑829/14, EU:T:2017:87, point 39 et jurisprudence citée].
47 Il ressort de l’analyse des trois arguments précédents que l’attribution d’une affaire, conformément à l’article 18, paragraphe 1, de la décision 2018-9, à la même chambre de recours que celle ayant statué précédemment, sans obligation de composer différemment cette chambre de recours, ne viole ni l’article 35, paragraphe 1, du règlement délégué 2018/625 ou l’article 166, paragraphe 4, sous c), du règlement 2017/1001, ni les articles 41 et 47 de la Charte. Cette conclusion n’est pas remise en cause par les autres arguments de la requérante.
48 S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel l’exigence d’économie de la procédure ne saurait en aucune façon porter atteinte aux droits individuels consacrés aux articles 41 et 47 de la Charte, il suffit de rappeler qu’il a été constaté au point 47 ci-dessus que l’article 18, paragraphe 1, de la décision 2018-9 ne violait pas les articles 41 et 47 de la Charte.
49 Par ailleurs, pour ce qui est de l’argument selon lequel la chambre de recours aurait dû renvoyer l’affaire devant la grande chambre, il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 12, paragraphe 1, de la décision 2018-9, « [u]ne chambre peut renvoyer une affaire dont elle est saisie à la grande chambre lorsqu’elle estime que la difficulté juridique, l’importance de l’affaire ou des circonstances particulières le justifient, par exemple lorsque des chambres de recours ont rendu des décisions divergentes sur une question de droit soulevée par cette affaire ».
50 En outre, l’article 165, paragraphe 3, du règlement 2017/1001 et l’article 37 du règlement délégué 2018/625 prévoient ces mêmes conditions.
51 En l’espèce, il y a lieu de relever que, d’une part, au regard des libellés combinés de ces articles, le renvoi à la grande chambre est une faculté laissée à la libre appréciation de la chambre de recours. D’autre part, la requérante n’avance aucun élément de nature à établir que, en l’espèce, les conditions prévues à l’article 12, paragraphe 1, de la décision 2018-9, à l’article 165, paragraphe 3, du règlement 2017/1001 et à l’article 37 du règlement délégué 2018/625, justifiant le renvoi d’une affaire à la grande chambre, étaient remplies. En effet, aucun des éléments invoqués dans la requête n’étaye qu’il existait une quelconque difficulté en droit, que l’affaire était particulièrement importante ou qu’il existait une circonstance particulière justifiant un renvoi en grande chambre. En l’espèce, tel qu’il sera démontré ci-après, tant les questions de procédure que les questions de fond soulevées par la requérante peuvent être solutionnées par une jurisprudence consolidée.
52 En tout état de cause, la requérante indique elle-même qu’elle ne dispose d’aucun élément permettant de remettre en cause les capacités d’évaluation des membres de la deuxième chambre de recours au sens de l’article 41 de la Charte.
53 Dès lors, il y a lieu de rejeter l’exception d’illégalité et de conclure que le renvoi par le présidium, conformément à l’article 18, paragraphe 1, de la décision 2018-9, d’une affaire à la même chambre de recours que celle ayant statué précédemment, sans obligation de composer différemment cette chambre de recours, ne constitue pas une déformation de l’article 35, paragraphe 1, du règlement délégué 2018/625 et de l’article 166, paragraphe 4, sous c), du règlement 2017/1001, et ne viole pas non plus l’obligation d’impartialité de l’administration au sens de l’article 41, paragraphe 1, et de l’article 47 de la Charte.
54 Partant, il y a lieu d’écarter le premier moyen dans son intégralité.
Sur le deuxième moyen, tiré d’irrégularités de procédure et de forme de la décision attaquée
55 À titre liminaire, il convient de relever que, aux points 21 à 26 de la requête, la requérante avance que les observations de l’opposante en réponse au mémoire exposant les motifs du recours ont été déposées tardivement et qu’elles auraient dû être déclarées irrecevables. Il convient cependant de relever que, lors de l’audience, la requérante a renoncé à ce grief.
56 Ensuite, le deuxième moyen se divise, en substance en trois branches. Premièrement, la requérante avance que les nouvelles preuves de l’usage déposées pour la première fois devant la chambre de recours auraient dû être déclarées irrecevables. Deuxièmement, elle soutient que les preuves de l’usage contenues dans les observations de l’opposante contiennent des irrégularités. Troisièmement, la requérante affirme que le caractère distinctif de la marque antérieure a été altéré.
57 L’EUIPO conteste cette argumentation.
Sur la première branche, tirée de l’irrecevabilité des nouvelles preuves de l’usage déposées au stade du second recours devant la deuxième chambre de recours
58 D’une part, la requérante soutient que les nouvelles preuves de l’usage apportées par l’opposante au stade du recours ont influencé le résultat de la décision attaquée en ce qui concerne la preuve de l’usage. La requérante soutient dès lors que la décision attaquée doit être annulée pour violation du droit à un procès équitable et du principe du contradictoire, consacrés à l’article 47 de la Charte.
59 D’autre part, la requérante affirme que les preuves de l’usage ont été déposées en violation des critères prévus à l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 et à l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625. Selon la requérante, même dans le cas où les preuves auraient pu, à première vue, paraître pertinentes pour l’issue de l’affaire, elles ne pourraient pas être considérées comme complémentaires dès lors qu’elles porteraient exclusivement sur les produits faisant partie des catégories de « sacs » et de « chaussures ». Or, ces catégories de produits ne seraient pas mentionnées dans les anciennes preuves de l’usage présentées dans le cadre de l’opposition. En outre, les autres conditions prévues à l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625 ne seraient pas non plus satisfaites.
60 Premièrement, en ce qui concerne la prétendue violation du droit à un procès équitable et du principe du contradictoire, consacrés à l’article 47 de la Charte, il suffit de rappeler les considérations exposées au point 45 ci-dessus et le fait que, le 2 août 2019, la requérante a été invitée à présenter une réponse aux observations de l’opposante du 19 février 2019, dans la mesure où elles concernaient des éléments de preuve nouveaux concernant l’usage de la marque antérieure qui n’avaient pas été présentés devant la division d’opposition. Or, le 13 septembre 2019, la requérante a déposé ses observations en réponse.
61 Deuxièmement, s’agissant, plus précisément, des preuves de l’usage annexées aux observations de l’opposante, il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 et à l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625, la chambre de recours a la possibilité d’exercer son pouvoir discrétionnaire afin d’accepter d’éventuelles preuves produites pour la première fois devant elle.
62 Selon l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, l’EUIPO « peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile ». Il découle du libellé de cet article que, en règle générale et sauf disposition contraire, la présentation de faits et de preuves par les parties demeure possible après l’expiration des délais auxquels se trouve subordonnée une telle présentation, en application des dispositions du même règlement, et qu’il n’est nullement interdit à l’EUIPO de tenir compte de faits et de preuves ainsi tardivement invoqués ou produits [arrêts du 13 mars 2007, OHMI/Kaul, C‑29/05 P, EU:C:2007:162, point 42 ; du 19 avril 2018, EUIPO/Group, C‑478/16 P, non publié, EU:C:2018:268, point 34, et du 21 mars 2019, Pan/EUIPO – Entertainment One UK (TOBBIA), T‑777/17, non publié, EU:T:2019:180, point 21].
63 Par ailleurs, l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625 encadre l’exercice du pouvoir d’appréciation prévu à l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, en ce qui concerne les faits invoqués et les preuves produites pour la première fois devant la chambre de recours. En effet, cette disposition prévoit ce qui suit :
« Conformément à l’article 95, paragraphe 2, du règlement [2017/1001], la chambre de recours peut accepter des faits invoqués ou des preuves produites pour la première fois devant elle uniquement si ces faits ou preuves répondent aux exigences suivantes :
a) ils semblent, à première vue, pertinents pour l’issue de l’affaire ; et
b) ils n’ont pas été présentés en temps utile pour des raisons valables, en particulier lorsqu’ils viennent uniquement compléter des faits et preuves pertinents qui avaient déjà été soumis en temps utile, ou sont déposés pour contester les conclusions tirées ou examinées d’office par la première instance dans la décision objet du recours. »
64 En l’espèce, la requérante soutient que la chambre de recours n’a pas vérifié si les deux exigences posées par l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625 étaient remplies avant d’admettre les éléments de preuve déposés pour la première fois devant elle. En effet, elle n’aurait pas tenu compte, d’une part, de leur pertinence, à première vue, pour le litige ni, d’autre part, des éventuelles raisons valables ayant conduit à leur production tardive.
65 Or, les allégations de la requérante procèdent d’une lecture erronée de la décision attaquée. En effet, il convient de constater que, aux points 66 et 67 de la décision attaquée, la chambre de recours a déclaré que, en l’espèce, les preuves produites pour la première fois devant elle étaient, à première vue, pertinentes et qu’elles représentaient des preuves complémentaires ayant pour but de renforcer le contenu des preuves présentées en première instance, notamment en ce qui concernait l’usage en Italie, en particulier pour les « chaussures » telles que les « ballerines, tongs, sandales, chaussures à talons hauts pour femmes, bottes et mocassins ». Elle a estimé que cet usage était en outre corroboré par le contrat de licence du 18 février 2011 pour l’usage exclusif de la marque YAMAMAY, dans sa version verbale et figurative, entre l’opposante et Miriade SpA, portant, entre autres, sur les « chaussures pour femmes à l’exclusion des chaussures de plage, chaussures de piscine, chaussons, tongs pour mer et piscine ». La réalité de ce contrat de licence était, à son tour, corroborée par les factures adressées par l’opposante à la licenciée concernant des redevances sur les ventes de chaussures portant la marque YAMAMAY pour les années 2011 et 2012.
66 En outre, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel les nouvelles preuves de l’usage ne pourraient pas être considérées comme complémentaires dès lors qu’elles porteraient sur des catégories de produits qui ne seraient pas mentionnées dans les anciennes preuves de l’usage présentées dans le cadre de l’opposition, il suffit de rappeler que tant la division d’opposition, dans sa décision du 3 août 2018, que la chambre de recours ont jugé que l’opposante avait prouvé l’usage sérieux de la marque antérieure dans l’Union au cours de la période pertinente pour les chaussures.
67 Dans ces conditions, il convient de conclure que la chambre de recours a constaté que les preuves étaient pertinentes et complémentaires par rapport aux preuves de l’usage déjà produites et qu’elle a donc vérifié que les conditions pour accepter de nouvelles preuves déposées pour la première fois devant elle au stade du recours étaient remplies. Dès lors, le grief tiré de la violation de l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 et de l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625 doit être rejeté.
68 Il convient dès lors de rejeter la première branche du deuxième moyen.
Sur la deuxième branche, tirée de ce que la présentation des anciennes et nouvelles preuves de l’usage est viciée par des irrégularités procédurales
69 La requérante affirme que, au-delà du fait qu’elles aient été produites tardivement, les preuves de l’usage déposées par l’opposante étaient entachées d’un vice de procédure en ce qu’elles ne répondaient pas aux exigences de l’article 55 du règlement délégué 2018/625. Ainsi, l’opposante aurait déposé des preuves confuses, difficilement identifiables, non traduites et sans aucune description spécifique au sein de ses observations déposées devant la chambre de recours. La requérante aurait par ailleurs soulevé ces mêmes griefs lors de la première phase de l’opposition. La requérante reproche à la chambre de recours de ne pas s’être prononcée sur ces exceptions de procédure.
70 À cet égard, en ce qui concerne les preuves de l’usage déposées devant la chambre de recours, il suffit de constater, ainsi que l’a fait la chambre de recours au point 63 de la décision attaquée, que le bordereau d’annexe corrigé, fourni par l’opposante le 2 avril 2019, est conforme aux exigences de l’article 55, paragraphe 2, du règlement délégué 2018/625. En effet, dans sa lettre du 5 mars 2019, l’EUIPO avait demandé que figurent dans le bordereau d’annexe corrigé, conformément à l’article 55, paragraphe 2, du règlement délégué 2018/625, le numéro d’annexe, une brève description du document ainsi qu’une indication du nombre de pages du document et le numéro de la page du mémoire où le document était cité. Or, force est de constater que tous ces éléments figurent dans le bordereau d’annexe corrigé.
71 En ce qui concerne les preuves de l’usage produites dans le cadre de la procédure d’opposition, il convient de relever que, dans sa décision du 3 août 2018, la division d’opposition avait déjà répondu aux griefs avancés par la requérante concernant le manque de traduction de certaines preuves de l’usage. La division d’opposition avait ainsi rappelé que, conformément à l’article 10, paragraphe 6, du règlement délégué 2018/625, l’opposante n’était pas tenue de traduire les preuves de l’usage, sauf si une demande spécifique à cet effet lui avait été adressée par l’EUIPO. Elle a ajouté que, compte tenu de la nature des documents non traduits, à savoir des factures et des revues de presse, et de leur caractère auto-explicatif, elle n’estimait pas nécessaire d’exiger leur traduction.
72 En tout état de cause, la requérante a été en mesure de prendre connaissance du contenu de ces éléments de preuve et de le comprendre, étant donné qu’elle a contesté le contenu de la documentation en question.
73 Il convient dès lors de rejeter la deuxième branche du deuxième moyen.
Sur la troisième branche, tirée de ce que le caractère distinctif de la marque antérieure a été altéré
74 La requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir conclu à l’usage sérieux de la marque antérieure au cours de la période de référence, en s’appuyant sur des preuves représentant la marque antérieure dans une forme figurative altérant son caractère distinctif. La chambre de recours aurait dès lors fait une application erronée de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001 ainsi que de l’article 47, paragraphe 2, du même règlement.
75 En outre, la requérante estime qu’il ressort de l’examen des preuves de l’usage que la marque antérieure invoquée au fondement de l’opposition n’a jamais été utilisée sous sa forme verbale à l’exception de certains cas isolés. Il s’ensuivrait que l’examen du risque de confusion entre les marques ne pourrait pas être effectué entre la marque antérieure et la marque demandée, mais qu’il devrait être effectué entre cette dernière et la marque figurative effectivement utilisée par l’opposante.
76 La requérante ajoute que l’usage de la marque figurative ne peut être considérée comme un usage sérieux de la marque antérieure, comme il a été conclu à tort dans la décision attaquée. Une telle forme stylisée présenterait des éléments graphiques marquants qui différencieraient le signe utilisé du signe enregistré. Plus particulièrement, elle estime que la marque figurative YAMAMAY a un caractère nettement plus distinctif que la marque antérieure de par son écriture dans une police de caractères spéciale, sa couleur spécifique, la dimension différente des lettres et le fait que certaines lettres sont en gras. Par conséquent, la requérante estime que les seules preuves de l’usage pertinentes à prendre en compte seraient celles de la marque antérieure.
77 L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.
78 À titre liminaire, il convient de relever que, contrairement à ce que prétend la requérante, il ressort des preuves de l’usage soumises par l’opposante que la marque antérieure a été utilisée sous sa forme verbale.
79 Ensuite, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001, est également considéré comme un usage au sens du premier alinéa dudit paragraphe l’usage de la marque de l’Union européenne sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée.
80 Or, selon la jurisprudence, lorsque le signe utilisé dans le commerce diffère de la forme sous laquelle celui-ci a été enregistré uniquement par des éléments négligeables, de sorte que les deux signes peuvent être considérés comme globalement équivalents, la disposition susmentionnée prévoit que l’obligation d’usage de la marque enregistrée peut être remplie par l’apport de la preuve de l’usage du signe qui en constitue la forme utilisée dans le commerce [arrêt du 23 février 2006, Il Ponte Finanziaria/OHMI – Marine Enterprise Projects (BAINBRIDGE), T‑194/03, EU:T:2006:65, point 50 ; voir, également, arrêt du 23 septembre 2020, CEDC International/EUIPO – Underberg (Forme d’un brin d’herbe dans une bouteille), T‑796/16, EU:T:2020:439, point 138 (non publié) et jurisprudence citée].
81 Le constat d’une altération du caractère distinctif de la marque telle qu’enregistrée requiert un examen du caractère distinctif et dominant des éléments ajoutés sur le fondement des qualités intrinsèques de chacun de ces éléments ainsi que de la position relative des différents éléments dans la configuration de la marque [voir arrêt du 23 septembre 2020, Forme d’un brin d’herbe dans une bouteille, T‑796/16, EU:T:2020:439, point 139 (non publié) et jurisprudence citée].
82 Il convient donc d’examiner si, en l’espèce, les différences entre le signe sous sa forme enregistrée et la marque figurative figurant dans certaines preuves de l’usage sont de nature à altérer le caractère distinctif de la marque antérieure dans la forme sous laquelle elle a été enregistrée.
83 À cet égard, il y a lieu de rappeler que la marque antérieure, telle qu’enregistrée, est la marque verbale YAMAMAY. Il ressort du point 52 de la décision attaquée et du dossier de la procédure devant l’EUIPO, transmis au Tribunal, qu’une partie des éléments de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure fournis par l’opposante concernent l’usage de cette marque sous la forme figurative suivante :
84 Ainsi, les éléments graphiques invoqués par la requérante n’empêchent pas que l’élément verbal « yamamay » soit clairement lisible dans cette forme d’utilisation de la marque antérieure. Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont en principe plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen ferait plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [arrêts du 14 juillet 2005, Wassen International/OHMI – Stroschein Gesundkost (SELENIUM-ACE), T‑312/03, EU:T:2005:289, point 37, et du 24 février 2021, Sonova/EUIPO – Digitmarket (B-Direct), T‑61/20, non publié, EU:T:2021:101, point 70]. De même, comme l’a constaté la chambre de recours au point 53 de la décision attaquée, les éléments figuratifs de la marque reproduite au point 83 ci-dessus ne jouent pas un rôle important dans l’impression d’ensemble du signe, voire ne constituent que des éléments décoratifs auxquels la jurisprudence n’attribue pas de caractère distinctif [arrêts du 23 janvier 2014, Coppenrath-Verlag/OHMI – Sembella (Rebella), T‑551/12, non publié, EU:T:2014:30, point 43, et du 20 janvier 2021, Enoport/EUIPO – Miguel Torres (CABEÇA DE TOIRO), T‑811/19, non publié, EU:T:2021:23, point 38]. En effet, lesdits éléments figuratifs se limitent à la présentation du mot « yamamay » dans des caractères typographiques blancs stylisés en minuscules, les première et dernière lettres étant mises en exergue par des majuscules et la lettre centrale « a » étant en gras sur un fond rectangulaire rouge.
85 Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, au point 54 de la décision attaquée, que les différences entre, d’une part, la marque utilisée dans la forme rappelée au point 83 ci-dessus et, d’autre part, la marque antérieure dans la forme sous laquelle elle a été enregistrée n’étaient pas de nature à altérer le caractère distinctif de cette dernière. Au titre de l’article 18, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement 2017/1001, l’usage de la marque sous cette forme figurative doit donc être considéré comme un usage de la marque antérieure.
86 Il s’ensuit que le troisième grief et, partant, le deuxième moyen dans son ensemble doivent être rejetés.
Sur le troisième moyen, tiré d’erreurs dans l’analyse des preuves de l’usage
87 La requérante affirme que ni la division d’opposition, ni la chambre de recours n’ont effectivement examiné les abondantes pièces présentées par l’opposante devant la division d’opposition. En effet, selon la requérante, si la division d’opposition et la chambre de recours avaient contrôlé de manière détaillée chaque page produite par l’opposante, elles auraient confirmé ses conclusions au sujet de la preuve de l’usage. Ainsi, il aurait été conclu à tort que la marque antérieure avait été utilisée pour les « vêtements et chaussures » car la preuve de l’usage n’aurait été apportée que pour les « sous-vêtements », « pyjamas » et « maillots de bain ». Les preuves de l’usage pour les « chaussures de plage », « sweat-shirts de sport » et les « pantoufles » ne suffiraient, quant à elles, pas à démontrer un usage sérieux au sens de l’article 18, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, dans la mesure où elles ne satisferaient pas aux critères de l’étendue quantitative et territoriale. En outre, les arguments de la requérante n’auraient pas été démentis par des renvois concrets, des citations ou des références détaillées aux pages dans lesquelles figurent les produits dont elle conteste la preuve de l’usage. Dès lors, la preuve de l’usage n’aurait fait l’objet que d’un examen partiel.
88 La requérante affirme ensuite que les nouvelles preuves de l’usage présentées pour la première fois devant la chambre de recours n’auraient pas dû être examinées par celle-ci car, sans préjudice de leur dépôt tardif et irrégulier, elles présenteraient également des lacunes quant à leur fond.
89 L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.
90 Il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, l’auteur d’une demande d’enregistrement d’une marque de l’Union européenne visée par une procédure d’opposition peut requérir la preuve que la marque antérieure invoquée à l’appui de cette procédure a fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, au cours des cinq années qui précèdent la publication de la demande.
91 La demande de marque de l’Union européenne présentée par la requérante ayant été publiée le 21 novembre 2012, la période de cinq années visée à l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 s’étend, ainsi que l’a, à juste titre, relevé la chambre de recours au point 30 de la décision attaquée, du 21 novembre 2007 au 20 novembre 2012.
92 À cet égard, il convient de relever que, ainsi qu’il ressort notamment des points 39 et 42 de la décision attaquée, les éléments de preuve fournis par l’opposante devant la division d’opposition concernant l’usage de la marque YAMAMAY pour la période pertinente étaient principalement constitués de très nombreuses pages de revues de presse et de factures émises au cours de la même période.
93 En ce qui concerne les pages de revues de presse, la chambre de recours a constaté que celles-ci étaient datées de 2007 à 2012 et qu’elles contenaient des articles dans des journaux de mode, d’information et de coutumes publiés en Grèce, en Italie et en Espagne. Elle a en outre constaté que ces documents faisaient référence à des vêtements de la marque YAMAMAY tels que des « débardeurs, leggings, combinaisons, salopettes, T-shirts, chemises à col roulé, chemises, shorts, T-shirts à manches longues, gilets, hauts [vêtements], pantalons, cache-maillots de plage, sweat-shirts » et à des chaussures de la même marque telles que des « sandales, pantoufles, tongs et chaussures de plage, ballerines ».
94 À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, l’apposition d’une marque sur un magazine, un périodique, une revue, un journal ou un catalogue est, en principe, susceptible de constituer un « usage valable du signe » en tant que marque, pour les produits et les services désignés par celle-ci, si la teneur de ces publications confirme l’usage du signe pour les produits et les services couverts par ladite marque [arrêts du 5 octobre 2010, Strategi Group/OHMI – RBI (STRATEGI), T‑92/09, non publié, EU:T:2010:424, point 32, et du 8 juillet 2020, Artur Florêncio & Filhos, Affsports/EUIPO – Anadeco Gestion (sflooring), T‑533/19, non publié, EU:T:2020:323, point 51].
95 La chambre de recours en a conclu, à juste titre, que les revues de presse produites constituaient une preuve valable que la marque antérieure avait été utilisée publiquement et vers l’extérieur, sur une partie du territoire de l’Union, pour désigner ces produits tels que décrits au point 93 ci-dessus.
96 En ce qui concerne, ensuite, les factures produites par l’opposante, datant de 2007 à 2012, la chambre de recours a constaté qu’elles étaient adressées à des clients en Espagne, en Grèce, en Allemagne, à Chypre et au Royaume-Uni et qu’elles concernaient des vêtements et chaussures de la marque YAMAMAY tels que des « survêtements, maillots, pantoufles, chaussons, chaussures de plage et de chambre, pantalons, chemises polos, t‑shirts, combinaisons, salopettes, jupes, tongs, cardigans, écharpes, ballerines ».
97 La chambre de recours a précisé que les factures avaient été adressées à plusieurs sociétés situées dans les pays susmentionnés, qu’elles indiquaient un usage continu de la marque tout au long de la période pertinente et qu’elles indiquaient des chiffres variés pour chaque année. La chambre de recours a ajouté que bien que les ventes de ces produits aient été relativement faibles par rapport au montant des ventes de certains produits de la requérante, elles ne sauraient être considérées comme insignifiantes.
98 En particulier, la chambre de recours a estimé que la combinaison des factures adressées à des clients en Espagne et en Grèce et des revues de presse dans ces pays constituait des preuves de l’activité économique réalisée au moyen de l’exploitation commerciale de la marque et que cela suffisait pour exclure tout usage purement fictif de celle-ci.
99 En ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel les preuves de l’usage pour les « chaussures de plage », « sweat-shirts de sport » et les « pantoufles » ne suffisent pas à démontrer un usage sérieux au sens de l’article 18, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, étant donné qu’elles ne satisfont pas aux critères de l’étendue quantitative et territoriale, il convient de rappeler, tout d’abord, que, selon une jurisprudence constante, la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux pour être opposable à une demande de marque de l’Union européenne consiste à limiter les conflits entre deux marques, pour autant qu’il n’existe pas de juste motif économique découlant d’une fonction effective de la marque sur le marché. En revanche, lesdites dispositions ne visent ni à évaluer la réussite commerciale, ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [arrêts du 26 septembre 2013, Centrotherm Systemtechnik/centrotherm Clean Solutions, C‑609/11 P, EU:C:2013:592, point 72, et du 28 mai 2020, Diesel/EUIPO – Sprinter megacentros del deporte (Représentation d’une ligne incurvée et coudée), T‑615/18, non publié, EU:T:2020:223, point 30]. En effet, il n’est pas exclu qu’il soit économiquement raisonnable pour le titulaire d’une marque de ne commercialiser que certains des produits ou une partie de ceux-ci dont le chiffre d’affaires annuel n’est pas important.
100 Ensuite, afin de qualifier de sérieux l’usage d’une marque de l’Union européenne, il n’est pas exigé que cette dernière soit utilisée sur une partie substantielle du territoire de l’Union [arrêt du 7 novembre 2019, Intas Pharmaceuticals/EUIPO – Laboratorios Indas (INTAS), T‑380/18, EU:T:2019:782, point 80]. En l’occurrence, la chambre de recours a constaté que les preuves de l’usage pour les produits mentionnés ci-dessus portaient sur des articles dans des magazines et journaux de mode, d’information et de coutumes publiés en Grèce et en Espagne.
101 Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que les éléments de preuve produits par l’opposante, examinés dans leur ensemble, démontraient de manière suffisante l’usage sérieux de la marque antérieure non seulement à l’égard des articles appartenant au secteur des « sous-vêtements, pyjamas et maillots de bain » comme le soutient la requérante, mais aussi à l’égard des « vêtements » et « chaussures ». Il importe peu, à cet égard, que la chambre de recours n’ait pas fait référence à chacune des pages du dossier et que les arguments de la requérante n’aient pas été démentis par des renvois concrets, des citations ou des références détaillées aux pages dans lesquelles figurent les produits dont elle conteste la preuve de l’usage.
102 Par ailleurs, il convient de préciser que les « sous-vêtements, pyjamas et maillots de bain » appartiennent à la catégorie plus large des vêtements et que les preuves de l’usage portant sur ces premiers produits constituent également une preuve de l’usage de la catégorie plus large des « vêtements ».
103 En ce qui concerne, enfin, les prétendues lacunes contenues dans les documents déposés par l’opposante devant la chambre de recours, il convient de préciser que, en tout état de cause, ainsi que la chambre de recours l’a elle-même indiqué au point 61 de la décision attaquée, elle n’a examiné ces preuves supplémentaires que dans un souci de clarté et d’exhaustivité de l’exposé.
104 Partant, il y a lieu de rejeter le troisième moyen.
Sur le quatrième moyen, tiré dela violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001
105 La requérante fait valoir, en substance, que les marques en conflit ne présentent pas de similitudes suffisantes sur le plan visuel, phonétique et conceptuel pour établir l’existence d’un risque de confusion. Elle reproche également à la chambre de recours d’avoir commis des erreurs lors de la comparaison des produits et de l’appréciation globale du risque de confusion.
106 L’EUIPO conteste cette argumentation.
107 Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.
108 Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée ; arrêt du 24 février 2021, B-Direct, T‑61/20, non publié, EU:T:2021:101, point 30].
109 À titre liminaire, il convient de relever que la requérante ne semble pas contester l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle les produits en cause s’adressent au grand public de l’Union, dont le consommateur moyen est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. En outre, il convient de rappeler que la chambre de recours a estimé qu’il convenait de concentrer l’examen du risque de confusion sur le public qui était le plus susceptible de confondre les signes, c’est-à-dire le public pour lequel les marques, visuellement et phonétiquement similaires, ne présentent aucune différence de nature conceptuelle, tel que le public espagnol, letton, hongrois, polonais et portugais.
110 En ce qui concerne l’appréciation des éléments distinctifs et dominants des signes, il est également constant entre les parties que l’expression anglaise « made in italy » de la marque demandée sera comprise par le public pertinent sur l’ensemble du territoire de l’Union, sera perçue comme une simple information relative au lieu de fabrication des produits et ne sera donc distinctive pour aucun des produits. En outre, il y a lieu de relever, à l’instar de la chambre de recours, que, les termes « yamamay » et « maimai » n’ayant aucune signification en espagnol, en letton, en hongrois, en polonais et en portugais, ils sont moyennement distinctifs.
Sur la comparaison des produits
111 En ce qui concerne la comparaison des produits en cause, la chambre de recours a repris les considérations exposées dans la décision de la division d’opposition attaquée devant elle. Ainsi, elle a constaté que les « vêtements » et les « chaussures », couverts par la marque demandée, compris dans la classe 25 et pour lesquels l’usage sérieux avait été prouvé, et les produits visés par la marque antérieure étaient pour la plupart identiques et similaires.
112 En outre, la chambre de recours a estimé que l’argument de la requérante selon lequel les produits relevant de la marque antérieure seraient commercialisés exclusivement dans des magasins mono-marques était dénué de pertinence. Elle a précisé que la comparaison des produits ne devait pas tenir compte des choix du titulaire de la marque en ce qui concerne les méthodes de distribution et de commercialisation, car ces choix étaient susceptibles d’être révisés et d’évoluer dans le temps.
113 La requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours concernant la comparaison des produits visés par les signes en conflit. Premièrement, la requérante estime que la comparaison des produits aurait dû être limitée aux « sous-vêtements, pyjamas, maillots de bain », couverts par la marque antérieure, étant donné que l’usage de la marque antérieure n’aurait été prouvé que pour ces produits. Deuxièmement, la chambre de recours n’aurait pas tenu compte de la limitation de la liste des produits relevant de la marque demandée. Troisièmement, dans la mesure où la requérante affirme que les produits comparés diffèrent par leur destination, leurs circuits de distribution et leur public pertinent et qu’ils n’ont pas de caractère concurrent, elle réfute qu’ils puissent être considérés comme identiques. Dès lors, si la chambre de recours avait tenu compte de tous les critères pertinents, elle serait parvenue à la conclusion que les produits en cause et les produits relevant de la marque antérieure n’étaient similaires qu’à un faible degré.
114 En l’espèce, il suffit de constater que c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que la comparaison des produits devait être fondée sur les catégories de « vêtements » et « chaussures » couvertes par la marque antérieure car l’usage de la marque antérieure avait été prouvé pour ces catégories de produits relevant de la classe 25. C’est donc à tort que la requérante affirme que la comparaison des produits aurait dû être effectuée par rapport aux seuls « sous-vêtements, pyjamas, maillots de bain », couverts par la marque antérieure.
115 En outre, tant la division d’opposition que la chambre de recours ont tenu compte de la limitation de la liste des produits relevant de la marque demandée en ce qu’elle excluait les « sous-vêtements, pyjamas, maillots de bain ». Elles n’ont cependant pas estimé que cette limitation était suffisante pour exclure la similitude des produits comparés, étant donné que la marque antérieure n’était pas enregistrée que pour des « sous-vêtements, pyjamas, maillots de bain », mais bien pour les catégories plus larges des « vêtements » et « chaussures ».
116 Enfin, il convient de relever que la requérante n’avance pas d’argument valable afin de réfuter les conclusions de la chambre de recours concernant la similitude et l’identité des produits en cause. Dès lors, vu ce qui précède, c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que les produits en cause étaient partiellement identiques et partiellement similaires.
Sur la comparaison des signes
117 À titre liminaire, il convient de préciser, concernant la comparaison des signes, que la chambre de recours reprend les considérations exposées dans la décision de la division d’opposition attaquée devant elle. En outre, aux points 82 et 83 de la décision attaquée, elle explique que les considérations reprises sont conformes à sa décision antérieure du 14 décembre 2017.
118 La requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours concernant la comparaison des signes en conflit sur le plan visuel, phonétique et conceptuel.
119 En vertu d’une jurisprudence constante, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée ; arrêt du 24 février 2021, B-Direct, T‑61/20, non publié, EU:T:2021:101, point 33).
120 En premier lieu, sur le plan visuel, la chambre de recours a relevé que l’élément distinctif de la marque demandée « maimai » ainsi que la marque antérieure avaient en commun la séquence de lettres « m », « a », « m », « a ». Elle a ensuite ajouté que, dans la marque demandée, cette séquence était séparée et suivie de la lettre « i » tandis que, dans la marque antérieure, la lettre « y » était placée au début et à la fin de l’élément verbal. La chambre de recours en a conclu que les différences entre les éléments verbaux distinctifs « maimai » et « yamamay » des signes, ainsi que la présence de l’expression non distinctive « made in italy » dans la marque demandée, n’étaient pas suffisantes pour compenser les coïncidences susvisées. Elle a dès lors estimé que les signes présentaient une certaine similitude visuelle, mais que celle-ci était réduite.
121 Selon la requérante, si la chambre de recours avait comparé le signe de la marque demandée avec la marque antérieure sous sa forme figurative, elle serait parvenue à la conclusion qu’il existait une similitude visuelle encore plus faible, voire inexistante, que celle constatée. Ainsi, la chambre de recours aurait dû tenir compte des éléments de la marque antérieure sous sa forme figurative tels que son fond de couleur rouge-bordeaux, sa police de caractères particulière, l’alternance de lettres minuscules et majuscules et la mise en exergue des deux lettres « y » et de la lettre « a » centrale. Elle en aurait dès lors conclu que les deux signes étaient différents sur le plan visuel.
122 À cet égard, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la comparaison doit s’effectuer entre les signes tels qu’ils ont été enregistrés ou tels qu’ils figurent dans la demande d’enregistrement [arrêts du 8 décembre 2005, Castellblanch/OHMI – Champagne Roederer (CRISTAL CASTELLBLANCH), T‑29/04, EU:T:2005:438, point 57, et du 27 janvier 2021, Turk Hava Yollari/EUIPO – Sky (skylife), T‑382/19, non publié, EU:T:2021:45, point 45]. Il convient donc de conclure que c’est à juste titre que la chambre de recours a comparé la marque demandée avec la marque antérieure.
123 Partant, il convient de considérer que les arguments de la requérante visant à contester l’appréciation de la chambre de recours concernant la similitude visuelle des signes en conflit, en ce qu’ils se fondent sur une comparaison entre la marque demandée et une autre marque que la marque antérieure, ne sont pas pertinents.
124 En deuxième lieu, sur le plan phonétique, la chambre de recours a constaté que la prononciation du seul élément distinctif « maimai » de la marque demandée était presque entièrement incluse, à l’exception de la troisième lettre « i » dans la prononciation de la marque antérieure YAMAMAY, puisque, dans les langues de référence, les lettres « i » et « y » se prononcent de manière identique ou très similaire. Elle a dès lors considéré que, même si les termes différaient légèrement par leur longueur et leur lettre initiale, leur prononciation était très semblable. Quant à l’expression « made in italy » de la marque demandée, la chambre de recours a estimé qu’une partie significative du public pertinent était susceptible d’omettre sa prononciation, aussi bien en raison de l’absence de caractère distinctif de l’expression que pour des raisons d’économie de langage. Par conséquent, la chambre de recours a conclu que les signes en conflit présentaient un degré de similitude à tout le moins moyen sur le plan phonétique.
125 Selon la requérante, la chambre de recours aurait dû conclure que la similitude phonétique entre les signes en cause était tout au plus d’un degré moyen, et ce seulement si elle avait estimé que l’élément « made in italy » était sans pertinence sur le plan phonétique. En outre, la requérante conteste l’observation de la chambre de recours selon laquelle les lettres « i » et « y » se prononceraient de manière identique ou très similaire dans la plupart des langues de référence étant donné que certains des alphabets mentionnés ne comporteraient même pas la lettre « y ».
126 À cet égard, il convient de relever que les signes en cause ont en commun la séquence de lettres « m », « a », « m », « a », qui seront prononcées de la même manière. En outre, contrairement à ce que prétend la requérante, la lettre « y » à la fin de la marque antérieure et la lettre « i » à la fin de la marque demandée seront prononcées de la même manière. Dès lors, le fait que les signes diffèrent phonétiquement en ce que la marque antérieure contient la lettre centrale « a » et commence par les deux lettres « y » et « a » et que la marque demandée contient la lettre centrale « i » ne remet pas en cause le fait qu’il existe une certaine similitude phonétique des marques en cause.
127 Pour ce qui est de l’argument de la requérante selon lequel certains des alphabets mentionnés ne comporteraient même pas la lettre « y », force est de constater que la requérante n’étaye pas cette affirmation, ni n’explique quelles conséquences il conviendrait d’en tirer en ce qui concerne la prétendue différence de prononciation des lettres « i » et « y ».
128 Par ailleurs, comme l’a relevé la chambre de recours, dans la mesure où le public percevra l’élément verbal « made in italy » comme une simple information relative au lieu de provenance géographique des produits, il y a lieu de considérer qu’il ne sera donc guère perçu par le public pertinent et donc pas prononcé.
129 Dès lors, il ne saurait être reproché à la chambre de recours d’avoir conclu que les signes en conflit présentaient un degré de similitude à tout le moins moyen sur le plan phonétique.
130 En troisième lieu, sur le plan conceptuel, la chambre de recours a constaté qu’aucun des éléments distinctifs des signes n’avait de signification et qu’ils seraient perçus comme des termes fantaisistes par le public pertinent. La chambre de recours en a conclu que, dans un tel cas, une comparaison conceptuelle des signes était sans intérêt aux fins de l’examen de leur similitude.
131 La requérante affirme que l’élément « yamamay » de la marque antérieure est un palindrome qui dispose d’un caractère conceptuel très marquant, ce qui n’est pas le cas de la marque demandée. Toutefois, elle admet au même paragraphe de la requête qu’elle ne conteste pas l’absence de toute signification des deux marques en conflit et, dès lors, le fait que la comparaison conceptuelle soit sans intérêt aux fins de l’examen de la similitude des signes.
132 À cet égard, il suffit de constater, comme l’a fait la chambre de recours, qu’aucun des signes en conflit n’a une signification claire et déterminée. En outre, la requérante ne remet pas en cause cette constatation de la chambre de recours. Dès lors que le public pertinent n’attribuera aucune signification particulière aux deux signes, il convient d’en conclure, à l’instar de la chambre de recours, qu’aucune comparaison conceptuelle n’est possible [voir, en ce sens, arrêts du 22 mai 2012, Retractable Technologies/OHMI – Abbott Laboratories (RT), T‑371/09, non publié, EU:T:2012:244, point 41, et du 28 avril 2021, Klaus Berthold/EUIPO – Thomann (HB Harley Benton), T‑284/20, non publié, EU:T:2021:218, point 114]. À cet égard, il importe peu que la marque antérieure soit ou non un palindrome.
133 Compte tenu des points qui précèdent, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré que les signes présentaient une similitude visuelle réduite et une similitude phonétique à tout le moins moyenne et qu’une comparaison conceptuelle n’était pas possible.
Sur l’appréciation globale du risque de confusion
134 La requérante soutient que les signes en cause sont différents ou à tout le plus faiblement similaires sur le plan visuel, qu’ils sont similaires à un degré à tout le plus moyen sur le plan phonétique et qu’ils ne sont pas comparables sur le plan conceptuel. Quant aux produits, ils seraient différents ou, tout au plus, similaires dans une faible mesure. Partant, les marques en conflit ne sauraient faire l’objet d’un risque de confusion étant donné que les similitudes limitées seraient largement compensées par les différences considérables entre elles.
135 L’EUIPO conteste ces arguments.
136 Selon une jurisprudence constante, l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [voir arrêt du 4 mars 2020, EUIPO/Equivalenza Manufactory, C‑328/18 P, EU:C:2020:156, point 59 et jurisprudence citée ; arrêt du 23 septembre 2020, Brillux/EUIPO – Synthesa Chemie (Freude an Farbe), T‑401/19, non publié, EU:T:2020:427, point 68].
137 Il y a lieu de rappeler que la chambre de recours a effectué une appréciation globale des facteurs pertinents. En effet, elle a conclu que, sur la base du principe de l’interdépendance des facteurs et compte tenu, premièrement, de l’identité et de la similitude des produits, deuxièmement, des similitudes entre les signes réduite sur le plan visuel et moyenne sur le plan phonétique, troisièmement, du fait que ces similitudes ne sont pas contrebalancées par une quelconque différence conceptuelle, quatrièmement, du caractère distinctif moyen de la marque antérieure et, cinquièmement, de l’image imparfaite des marques que le consommateur garde en mémoire, il existait un risque que le public pertinent soit amené à penser que les « vêtements, chapeaux et chaussures » relevant de la marque demandée provenaient de la même entreprise que les vêtements et chaussures relevant de la marque antérieure ou d’entreprises liées économiquement.
138 En ce qui concerne la décision R 1000/2006-2 de la chambre de recours [affaire JAMANIA/YamamaY (fig.)], du 13 juin 2007, qui serait, selon la requérante, applicable par analogie à la présente affaire, la chambre de recours a estimé, à juste titre, que tant les produits que les marques différaient de celles en cause en l’espèce : la marque antérieure YAMAMAY étant une marque figurative et la marque demandée JAMANIA n’ayant pas les assonances et les coïncidences existant dans les combinaisons de lettres que présentaient les marques en cause. Selon la chambre de recours, cette affaire n’était dès lors pas applicable par analogie à la présente affaire.
139 En outre, selon la jurisprudence, les décisions concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne, qui sont prises par les chambres de recours en vertu du règlement 2017/1001, relèvent d’une compétence liée et non pas d’un pouvoir discrétionnaire, de sorte que la légalité des décisions de ces mêmes chambres de recours doit être appréciée uniquement sur le fondement de ce règlement, tel qu’interprété par le juge de l’Union. Par conséquent, les chambres de recours ne sauraient être liées par des décisions antérieures de l’EUIPO [voir arrêt du 14 février 2019, Bayer Intellectual Property/EUIPO (Représentation d’un cœur), T‑123/18, EU:T:2019:95, point 36 et jurisprudence citée].
140 Dès lors que, d’une part, les arguments de la requérante s’appuient sur des considérations erronées concernant la similitude des produits et des signes qui ont déjà été rejetées aux points 116 et 133 ci-dessus et que, d’autre part, elle ne soulève pas d’autres arguments visant à contester l’appréciation de la chambre de recours concernant l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de rejeter le quatrième moyen et, par conséquent, le recours dans son ensemble sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité du chef de conclusions de la requérante visant à réformer la décision attaquée.
Sur les dépens
141 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (troisième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Calzaturificio Emmegiemme Shoes Srl est condamnée aux dépens.
Van der Woude | De Baere | Kreuschitz |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 février 2022.
Signatures
* Langue de procédure : l’italien.
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