Hungary v Commission (EAGF and EAFRD - Expenditure excluded from financing - Judgment) French Text [2023] EUECJ T-491/21 (12 July 2023)


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Court of Justice of the European Communities (including Court of First Instance Decisions)


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URL: http://www.bailii.org/eu/cases/EUECJ/2023/T49121.html
Cite as: EU:T:2023:389, [2023] EUECJ T-491/21, ECLI:EU:T:2023:389

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DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

12 juillet 2023 (*)

« FEAGA et Feader – Dépenses exclues du financement – Dépenses effectuées par la Hongrie – Exclusion du double financement – Article 30 du règlement (UE) no 1306/2013 – Article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution (UE) no 809/2014 – Aide au boisement – Article 22 du règlement (UE) no 1305/2013 – Aide à l’écologisation – Article 43 du règlement (UE) no 1307/2013 – Cumul des aides »

Dans l’affaire T‑491/21,

Hongrie, représentée par MM. M. Fehér et G. Koós, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mme J. Aquilina, M. A. Sauka et Mme Z. Teleki, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. D. Spielmann, président, V. Valančius (rapporteur) et I. Gâlea, juges,

greffier : Mme A. Juhász-Tóth, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 23 janvier 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la Hongrie demande l’annulation de la décision d’exécution (UE) 2021/988 de la Commission, du 16 juin 2021, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2021, L 218, p. 9), en ce qu’elle lui a imposé une correction financière ponctuelle de 1 887 692,57 euros au titre des exercices financiers 2016 à 2019 (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Par lettre du 23 octobre 2017, la Commission européenne a informé les autorités hongroises de l’ouverture d’une enquête sur un éventuel cas de double financement pour certaines surfaces boisées, en application de l’article 52 du règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant les règlements (CEE) no 352/78, (CE) no 165/94, (CE) no 2799/98, (CE) no 814/2000, (CE) no 1200/2005 et no 485/2008 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 549), et de l’article 34 du règlement d’exécution (UE) no 908/2014 de la Commission, du 6 août 2014, portant modalités d’application du règlement no 1306/2013 en ce qui concerne les organismes payeurs et autres entités, la gestion financière, l’apurement des comptes, les règles relatives aux contrôles, les garanties et la transparence (JO 2014, L 255, p. 59).

3        Dans cette lettre, la Commission a rappelé que les autorités hongroises avaient décidé que les surfaces boisées pouvaient constituer des surfaces d’intérêt écologique, afin qu’elles ouvrent droit, pour les agriculteurs qui disposaient de telles surfaces, à un paiement annuel au titre des pratiques agricoles bénéfiques pour le climat et l’environnement (ci-après l’« aide à l’écologisation »), en application de l’article 43 du règlement (UE) no 1307/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, établissant les règles relatives aux paiements directs en faveur des agriculteurs au titre des régimes de soutien relevant de la politique agricole commune et abrogeant le règlement (CE) no 637/2008 du Conseil et le règlement (CE) no 73/2009 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 608).

4        Or, la Commission a relevé que, en application des articles 21 et 22 du règlement (UE) no 1305/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, relatif au soutien au développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) et abrogeant le règlement (CE) no 1698/2005 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 487), les surfaces boisées étaient susceptibles d’ouvrir droit, pour des gestionnaires terriens privés et publics et pour leurs associations, au versement d’une aide au boisement et à la création de surfaces boisées (ci-après l’« aide au boisement »).

5        En vertu de l’article 22, paragraphe 1, du règlement no 1305/2013, l’aide au boisement, qui est accordée aux gestionnaires terriens privés et publics et à leurs associations, concerne les coûts d’installation et une prime annuelle par hectare destinée à couvrir les pertes de revenus agricoles et les coûts d’entretien, y compris les éventuels nettoyages anticipés et tardifs, pour une période maximale de douze ans.

6        Ainsi, la Commission a estimé que, afin d’éviter un double financement, l’aide à l’écologisation devait être déduite de l’aide au boisement dans la mesure où cette dernière aide comprenait une composante destinée à couvrir les pertes de revenus agricoles. Elle a demandé aux autorités hongroises de lui indiquer les modalités de contrôle éventuellement mises en œuvre afin d’éviter ce double financement et, en l’absence d’un système de contrôle, de lui fournir la liste des bénéficiaires qui auraient perçu simultanément l’aide à l’écologisation et l’aide au boisement à partir de l’année 2015.

7        Le 30 novembre 2017, les autorités hongroises ont fait part à la Commission de leur désaccord.

8        En particulier, les autorités hongroises ont indiqué, en substance, que l’exclusion du double financement énoncée à l’article 30 du règlement no 1306/2013 ne trouvait pas à s’appliquer aux surfaces boisées ouvrant droit à la fois à l’aide à l’écologisation et à l’aide au boisement, dans la mesure où ces deux aides ne poursuivaient pas le même objectif, n’étaient pas affectées au même coût éligible et n’étaient pas octroyées sur la base des mêmes critères d’éligibilité.

9        Le 23 février 2018, la Commission a communiqué aux autorités hongroises ses conclusions, aux termes desquelles elle envisageait l’application d’une correction forfaitaire de 10 % sur les fonds agricoles versés à partir de l’année 2015 (année de demande), en l’absence de mise en œuvre par les autorités hongroises d’un contrôle clé permettant d’exclure le double financement pour les surfaces boisées qui ouvraient simultanément droit à l’aide à l’écologisation et à une compensation annuelle de revenus au titre de l’aide au boisement.

10      En particulier, dans ses conclusions, la Commission s’est référée, non seulement à l’article 30 du règlement no 1306/2013, mais également à l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution (UE) no 809/2014 de la Commission, du 17 juillet 2014, établissant les modalités d’application du règlement no 1306/2013 en ce qui concerne le système intégré de gestion et de contrôle, les mesures en faveur du développement rural et la conditionnalité (JO 2014, L 227, p. 69), en application duquel les contrôles administratifs qui incombent aux États membres doivent garantir qu’il n’y a aucun double financement par d’autres régimes de l’Union européenne.

11      La Commission a également appelé l’attention des autorités hongroises sur le point 3.4.2 du document explicatif de la Commission relatif aux méthodes de calcul du montant de l’aide au développement rural en vue d’éliminer le double financement (ci-après le « document explicatif »), dans sa version de février 2017, dont il ressortait que, si les composantes de l’aide au boisement visant à compenser les frais d’implantation ou d’entretien des superficies boisées ne pouvaient relever d’une hypothèse de double financement, il n’en allait pas de même de la composante visant à compenser la perte de revenus résultant, pour l’exploitant agricole, de la mise en culture d’espèces forestières en lieu et place de cultures agricoles plus rentables, dans la mesure où cette composante du soutien au développement rural était de même nature que l’aide à l’écologisation.

12      Ainsi, selon la Commission, il ressortait de ce document que le constat d’un double financement entre les aides au boisement et à l’écologisation était subordonné à la réunion de trois conditions, à savoir, premièrement, la surface boisée ouvrant droit à l’aide au boisement devait être située sur une surface agricole, deuxièmement, cette surface boisée devait ouvrir droit au paiement direct dans le cadre du règlement no 1307/2013 et, troisièmement, cette surface boisée devait donner droit à l’aide à l’écologisation également prévue par ce règlement.

13      Par lettre du 23 avril 2018, les autorités hongroises ont réitéré leur désaccord avec l’interprétation de la Commission.

14      Le 20 septembre 2018, la Commission et les autorités hongroises ont participé à la réunion bilatérale prévue par l’article 34, paragraphes 2 et 3, du règlement d’exécution no 908/2014.

15      Le 5 décembre 2019, la Commission a indiqué aux autorités hongroises qu’elle maintenait sa position telle que résumée aux points 9 et 10 ci-dessus et que, par conséquent, elle proposait d’écarter des financements de l’Union la somme de 1 887 692,57 euros, au titre des exercices financiers 2016 à 2019.

16      Le 20 janvier 2020, les autorités hongroises ont présenté une demande de conciliation, conformément à l’article 40 du règlement d’exécution no 908/2014.

17      Le 28 septembre 2020, l’organe de conciliation a rendu son rapport.

18      Dans son rapport, l’organe de conciliation a constaté l’échec de la procédure de conciliation. Il a considéré que, si les conséquences financières des aides au boisement et à l’écologisation pouvaient être les mêmes, les objectifs et le contexte de ces deux aides étaient complètement différents. Selon l’organe de conciliation, la divergence entre les objectifs des deux types d’aides et l’existence de situations contractuelles dans le cadre de l’aide au boisement pouvaient expliquer l’absence de mise en place de contrôles spécifiques sur d’éventuels doubles financements en raison du cumul des aides au boisement et à l’écologisation. Constatant que le point 3.4.2 du document explicatif n’avait été introduit qu’en 2017, l’organe de conciliation a suggéré que la Commission limite le champ d’application temporelle de la correction envisagée fixant le début de la période de correction au mois d’avril 2017.

19      Aux termes de ses conclusions en date du 22 février 2021, la Commission a maintenu sa position selon laquelle il convenait d’appliquer une correction financière ponctuelle de 10 % sur les dépenses du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) relatives aux mesures forestières qui avaient été versées au titre des exercices financiers 2016 à 2019.

20      En particulier, la Commission n’a pas suivi la suggestion de l’organe de conciliation de limiter la correction financière aux années de demande 2017 et 2018 au motif que l’interdiction générale des doubles financements était clairement énoncée à l’article 30 du règlement no 1306/2013 et était donc applicable par les États membres dès le début de la période de programmation 2014-2020, nonobstant la circonstance selon laquelle la Commission a adopté des orientations spécifiques en 2017 s’agissant de l’aide au boisement.

21      Aux termes du rapport de synthèse, la Commission a maintenu sa position tendant à l’application d’une correction financière ponctuelle d’un montant de 1 887 692,57 euros.

22      Le 16 juin 2021, la Commission a adopté la décision attaquée.

 Conclusions des parties

23      La Hongrie conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

24      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la Hongrie aux dépens.

 En droit

25      Au soutien du recours, la Hongrie invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 30 du règlement no 1306/2013 et de l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution no 809/2014. Ce moyen est, en substance, articulé en trois branches, relatives, respectivement, aux différences d’objectifs entre l’aide au boisement et l’aide à l’écologisation, aux différences de contexte entre ces deux aides et à l’interprétation prétendument erronée de la Commission quant à la portée de l’article 30 du règlement no 1306/2013 et de l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution no 809/2014.

26      Il convient de commencer l’examen du moyen unique par la troisième branche.

 Sur la troisième branche du moyen unique, relative à la portée de l’article 30 du règlement no 1306/2013 et de l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution no 809/2014

27      La Hongrie fait valoir, en substance, que la Commission attribue une portée incorrecte à la clause générale d’interdiction des doubles financements qui figure à l’article 30 du règlement no 1306/2013 et à l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution no 809/2014.

28      Au soutien de la troisième branche de l’unique moyen, la Hongrie fait valoir, en substance, deux griefs :

–        un premier grief est tiré d’une interprétation erronée de l’article 30 du règlement no 1306/2013 et de l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution no 809/2014 par la Commission ;

–        un second grief, qui revêt un caractère subsidiaire par rapport au premier, est tiré de ce que, à supposer même que l’article 30 du règlement no 1306/2013 et l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution no 809/2014 soient correctement interprétés par la Commission, ces dispositions ne seraient pas applicables en l’espèce en l’absence d’une disposition d’exécution, normative et contraignante, prise par la Commission pour les mettre en œuvre.

29      Dans le cadre du premier grief de la troisième branche, la Hongrie soutient que la Commission attribue une portée incorrecte à la clause générale d’interdiction des doubles financements qui figure à l’article 30 du règlement no 1306/2013 et à l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution no 809/2014.

30      Premièrement, la Hongrie fait valoir, en substance, qu’une interprétation conférant un caractère général et absolu à l’interdiction des doubles financements, énoncée à l’article 30 du règlement no 1306/2013, serait en contradiction avec l’article 43 du règlement no 1307/2013, qui autorise la perception d’un paiement supplémentaire pour les pratiques agricoles bénéfiques pour le climat et l’environnement au bénéfice des agriculteurs qui ont droit à un paiement au titre du régime de paiement de base ou du régime de paiement unique à la surface.

31      Deuxièmement, la Hongrie se prévaut de l’article 43, paragraphe 4, du règlement no 1307/2013, par lequel le législateur de l’Union a prévu l’interdiction du double financement, non des pratiques agricoles bénéfiques pour le climat et l’environnement – lesquelles incluent le fait pour l’agriculteur de disposer d’une surface d’intérêt écologique sur la surface agricole –, mais des seules pratiques équivalentes visées au paragraphe 3 du même article.

32      Troisièmement, la Hongrie estime que cette interprétation est confortée par l’article 1er, points 10, 11 et 12, du règlement (UE) 2017/2393 du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2017, modifiant les règlements no 1305/2013, no 1306/2013, no 1307/2013, (UE) no 1308/2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles et (UE) no 652/2014 fixant des dispositions pour la gestion des dépenses relatives, d’une part, à la chaîne de production des denrées alimentaires, à la santé et au bien-être des animaux et, d’autre part, à la santé et au matériel de reproduction des végétaux (JO 2017, L 350, p. 15).

33      La Hongrie précise, en effet, que, par ces dispositions, le législateur de l’Union a adopté des dispositions spécifiques pour interdire le cumul du paiement pour les pratiques agricoles bénéfiques pour le climat et l’environnement visées à l’article 43 du règlement no 1307/2013 avec les paiements agroenvironnementaux et climatiques, l’aide au titre de l’agriculture biologique ou encore les paiements au titre de Natura 2000, qui sont régis, respectivement, par l’article 28, l’article 29 et l’article 30 du règlement no 1305/2013.

34      La Hongrie soutient ainsi que ni la Commission ni le législateur de l’Union n’ont considéré, lors du processus d’adoption du règlement no 2017/2393, que les aides au boisement et à l’écologisation pouvaient relever de l’interdiction des doubles financements prescrite par l’article 30 du règlement no 1306/2013.

35      Au soutien du second grief développé dans le cadre de la troisième branche du moyen unique, la Hongrie considère que l’article 30 du règlement no 1306/2013 et l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution no 809/2014 ne précisent pas les modalités selon lesquelles il convient de traiter la situation qui tombe dans le champ d’application de l’interdiction du double financement des dépenses financées au titre du Feader, et, en particulier, les modalités de déduction des aides susceptibles d’être cumulées.

36      La Hongrie soutient ainsi que ladite interdiction ne peut être valablement appliquée sans une disposition normative et contraignante du droit de l’Union. Ainsi, la Commission ne pouvait fonder la décision attaquée sur le document explicatif, dans sa version modifiée en 2017, dès lors que ce document revêtait uniquement un caractère interprétatif et non-contraignant et ne pouvait pallier l’absence d’intervention du législateur de l’Union.

37      La Commission conteste les arguments de la Hongrie.

 Sur le premier grief de la troisième branche du moyen unique

38      À titre liminaire, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, lors de l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie. La genèse d’une disposition du droit de l’Union peut également révéler des éléments pertinents pour son interprétation (voir arrêt du 9 juin 2022, IMPERIAL TOBACCO BULGARIA, C‑55/21, EU:C:2022:459, point 44 et jurisprudence citée).

39      En premier lieu, aux termes de l’article 30 du règlement no 1306/2013, « [l]es dépenses financées au titre du Feader ne font l’objet d’aucun autre financement à partir du budget de l’Union ».

40      La clause d’exclusion du double financement interdit le double financement des « dépenses » financées au titre du Feader par un autre financement à partir du budget de l’Union.

41      Ainsi, il ressort du libellé de cette disposition que, afin de vérifier si cette règle trouve à s’appliquer, il convient de déterminer à la fois qui est le bénéficiaire et quel est l’objet des dépenses qui sont déjà financées au titre du Feader, afin d’examiner si un autre financement à partir du budget de l’Union finance les mêmes dépenses.

42      Par conséquent, une situation dans laquelle les dépenses financées par le Feader et un autre financement de l’Union sont identiques, au sens où elles ont à la fois le même objet et le même bénéficiaire, relève de la clause d’exclusion du double financement fixée par l’article 30 du règlement no 1306/2013.

43      En deuxième lieu, l’interprétation contextuelle corrobore cette interprétation littérale.

44      Tout d’abord, selon son article 1er, le règlement no 1306/2013 établit les règles régissant, notamment, le financement des « dépenses » au titre de la politique agricole commune (PAC), y compris les « dépenses » de développement rural.

45      L’article 2 du règlement no 1306/2013, relatif aux « [t]ermes utilisés » dans ce règlement, ne définit pas la notion de « dépenses financées au titre du Feader ». En revanche, il mentionne, dans son paragraphe 1, sous e), les « paiements directs » au sens de l’article 1er du règlement no 1307/2013.

46      L’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1306/2013 dispose que le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) « finance les dépenses » relatives aux « paiements directs aux agriculteurs prévus dans le cadre de la PAC ».

47      L’article 5 du règlement no 1306/2013, relatif aux « [d]épenses du Feader », dispose que le Feader est mis en œuvre en gestion partagée entre les États membres et l’Union et qu’il finance la « contribution financière de l’Union aux programmes de développement rural mis en œuvre conformément au droit de l’Union concernant le soutien au développement rural ».

48      De même, la section 1 du chapitre I du titre IV de ce règlement est relative au « [f]inancement des dépenses » du FEAGA.

49      Ainsi, le législateur de l’Union a utilisé le terme « dépenses » pour désigner, de manière générique, les dépenses du FEAGA (y compris les paiements directs) et la contribution financière du Feader, sans distinguer si les dépenses financées par ces fonds revêtent un caractère compensatoire de coûts exposés ou un caractère purement incitatif.

50      Ensuite, il convient de relever que le règlement no 1305/2013 comporte trois séries de dispositions sur l’exclusion du double financement.

51      Premièrement, le considérant 22 de ce règlement énonce :

« Il convient que les paiements au titre de mesures agroenvironnementales et climatiques continuent à jouer un rôle de premier plan pour contribuer au développement durable des zones rurales et satisfaire à la demande croissante de la société en matière de services environnementaux […]  Les paiements devraient contribuer à couvrir les coûts supplémentaires et les pertes de revenus résultant des engagements contractés et ne devraient porter que sur les engagements qui vont au-delà des exigences et normes obligatoires correspondantes, conformément au principe du “pollueur-payeur”. Les États membres devraient également veiller à ce que les paiements accordés aux agriculteurs ne donnent pas lieu à un double financement à la fois au titre du présent règlement et du règlement (UE) no 1307/2013 […] »

52      Par conséquent, l’article 28, paragraphe 6, deuxième alinéa, du règlement no 1305/2013 dispose que, lors du calcul des paiements agroenvironnementaux et climatiques, les États membres déduisent le montant nécessaire afin d’exclure le double financement « des pratiques visées à l’article 43 du règlement (UE) no 1307/2013 ».

53      De même, les considérants 23 et 24 du règlement no 1305/2013 reproduisent la même phrase que celle soulignée au point 51 ci-dessus à propos, respectivement, des paiements en faveur des agriculteurs qui sont liés au passage à l’agriculture biologique ou au maintien de celle-ci, et au soutien accordé aux agriculteurs et aux gestionnaires de forêts afin de faire face à des désavantages spécifiques dus à la mise en œuvre de certaines législations de l’Union (sites Natura 2000, directive 2000/60 (ci-après la « directive-cadre sur l’eau »).

54      Ainsi, l’article 29, paragraphe 4, du règlement no 1305/2013, relatif à l’agriculture biologique, et l’article 30 du même règlement, relatif aux paiements de Natura 2000 et de la directive-cadre sur l’eau, reproduisent la même disposition que celle visée au point 52 ci-dessus.

55      Deuxièmement, le considérant 62 du règlement no 1305/2013 indique également que la délégation octroyée à la Commission en vue d’adopter des actes délégués devrait « aussi couvrir la méthode de calcul à utiliser pour éviter le double financement des pratiques visées à l’article 43 du règlement (UE) no 1307/2013 dans le cadre des mesures agroenvironnementales et climatiques, en faveur de l’agriculture biologique, les mesures au titre de Natura 2000 et les mesures au titre de la directive-cadre sur l’eau ».

56      Par voie de conséquence, l’article 28, paragraphe 11, du règlement no 1305/2013, relatif aux paiements agroenvironnementaux et climatiques, dispose que, « [a]fin de veiller à exclure le double financement visé au paragraphe 6, deuxième alinéa, la Commission est habilitée à adopter des actes délégués en conformité avec l’article 83 [du règlement no 1305/2013], afin de définir la méthode de calcul à utiliser, y compris dans le cas des mesures équivalentes prévues à l’article 43 du règlement (UE) no 1306/2013 ».

57      De la même manière, l’article 29, paragraphe 6, du règlement no 1305/2013, relatif à l’agriculture biologique, et l’article 30, paragraphe 8, du même règlement, relatif aux paiements au titre de Natura 2000 et de la directive-cadre sur l’eau, habilitent la Commission, en vue de veiller à exclure le double financement, à adopter des actes délégués afin de définir la méthode de calcul à utiliser.

58      Troisièmement, l’article 48 du règlement no 1305/2013 dispose qu’« [u]ne clause de révision est prévue pour les opérations exécutées en vertu des articles 28, 29, 33 et 34, afin de garantir leur adaptation dans le cas de modifications des normes obligatoires correspondantes et des exigences ou des obligations visées dans ces articles au-delà desquelles les engagements doivent aller » et que « [l]a clause de révision porte aussi sur les adaptations nécessaires pour éviter le double financement des pratiques visées à l’article 43 du règlement (UE) no 1307/2013 en cas de modifications desdites pratiques ».

59      Dans la mesure où les articles 28 et 29 du règlement no 1305/2013 comportent déjà des clauses visant à prévenir le double financement des pratiques visées à l’article 43 du règlement no 1307/2013, la dernière phrase de l’article 48, premier alinéa, du règlement no 1305/2013 signifie que, par l’adoption de cette clause de révision, le législateur de l’Union a entendu rendre possible l’adaptation des clauses anti-cumul existantes s’agissant des paiements agroenvironnementaux et climatiques et de l’aide à l’agriculture biologique, dans l’hypothèse d’une évolution de l’article 43 du règlement no 1307/2013 et, le cas échéant, a entendu adopter des clauses anti-cumul pour les paiements en faveur du bien-être des animaux, visés à l’article 33 du règlement no 1305/2013, et l’aide au titre des services forestiers, environnementaux et climatiques et de la conservation des forêts visée à l’article 34 du même règlement, dans l’hypothèse d’une évolution de l’article 43 du règlement no 1307/2013. En effet, lors de l’adoption du règlement no 1305/2013, le législateur de l’Union n’a pas prévu de clauses anti-cumul spécifiques pour les paiements en faveur du bien-être des animaux et l’aide au titre des services forestiers, environnementaux et climatiques et de la conservation des forêts, contrairement à ce qu’il a fait pour les paiements agroenvironnementaux et climatiques et l’aide à l’agriculture biologique.

60      Or, l’aide au titre des services forestiers présente des similitudes avec l’aide au boisement régie par l’article 22 du règlement no 1305/2013, puisqu’elle est accordée, par hectare de forêt, aux gestionnaires forestiers publics et privés et aux autres organismes de droit privé et public, ainsi qu’à leurs associations, qui s’engagent, sur la base du volontariat, à exécuter des opérations consistant en un ou plusieurs engagements forestiers, environnementaux et climatiques, et les paiements indemnisent les bénéficiaires pour une partie ou la totalité des coûts supplémentaires et des pertes de revenus résultant des engagements pris.

61      À cet égard, il convient de constater que l’introduction de dispositions spécifiques anti-cumul par le législateur dans les règlements sectoriels de la PAC n’a pas d’autre but que de justifier et soutenir les dispositions habilitant la Commission à adopter des actes délégués pour établir les modalités de calcul des montants à déduire en raison de la situation de double financement.

62      En effet, il convient de rappeler que l’article 290, paragraphe 1, TFUE, permet au législateur de l’Union de déléguer à la Commission le pouvoir d’adopter des actes non législatifs de portée générale qui complètent ou modifient certains éléments non essentiels de l’acte législatif.

63      Or, l’article 290, paragraphe 1, second alinéa, TFUE, impose au législateur de l’Union, lorsqu’il confie à la Commission le pouvoir d’adopter des actes délégués, de « délimiter explicitement les objectifs, le contenu, la portée et la durée de la délégation de pouvoir ».

64      Ainsi, la jurisprudence exige notamment que la délimitation du pouvoir conféré soit suffisamment précise, en ce sens qu’elle doit indiquer clairement les limites de ce pouvoir et être de nature à soumettre l’usage qui en sera fait par la Commission à un contrôle au regard de critères objectifs fixés par le législateur de l’Union (voir arrêt du 26 juillet 2017, République tchèque/Commission, C‑696/15 P, EU:C:2017:595, point 49 et jurisprudence citée).

65      Ainsi, l’introduction, dans le règlement no 1305/2013, des clauses spécifiques anti-cumul, qui réitèrent la clause d’interdiction du double financement prévue par l’article 30 du règlement no 1306/2013, a pour finalité de délimiter explicitement les objectifs, le contenu et la portée du pouvoir confié à la Commission d’adopter des actes délégués en vue d’établir les modalités de calcul des montants à déduire en raison de la situation de double financement susceptible de résulter du paiement vert lié à certaines pratiques équivalentes aux pratiques agricoles bénéfiques pour le climat et l’environnement  et des paiements agroenvironnementaux et climatiques, de l’aide au titre de l’agriculture biologique et des paiements au titre de Natura 2000 et de la directive-cadre sur l’eau.

66      Cette interprétation est corroborée par le règlement no 2017/2393, cité par la Hongrie, et qui a modifié, notamment, le règlement no 1305/2013.

67      En effet, contrairement à ce que soutient la Hongrie, le règlement no 2017/2393 a simplement complété les articles 28, 29 et 30 du règlement no 1305/2013 afin que les États membres puissent calculer la déduction imputable, respectivement, aux paiements agroenvironnementaux et climatiques, à l’aide à l’agriculture biologique, et aux paiements au titre de Natura 2000 et de la directive-cadre sur l’eau, en vue d’éviter le double financement en lien avec le paiement vert lié à certaines pratiques équivalentes aux pratiques agricoles bénéfiques pour le climat et l’environnement, sous la forme d’un montant moyen forfaitaire appliqué à tous les bénéficiaires concernés.

68      À cet égard, le considérant 5 de ce règlement énonce que, « [a]fin de réduire la charge administrative liée à la mise en œuvre du principe de l’absence de double financement en ce qui concerne le verdissement, il convient de donner la possibilité aux États membres d’appliquer une déduction moyenne forfaitaire à tous les bénéficiaires concernés exécutant le type d’opération ou de sous-mesure concerné ».

69      Ainsi, cette modification, qui complète et précise l’habilitation initialement conférée à la Commission, atteste que les clauses spécifiques anti-cumul introduites dans le règlement no 1305/2013 ont en réalité pour seule finalité de respecter les exigences fixées par l’article 290 TFUE quant à la délimitation des objectifs, du contenu, de la portée et de la durée de la délégation de pouvoir octroyée à la Commission, afin que cette dernière définisse les règles de calcul des déductions imputables sur certaines aides du Feader expressément énumérées dans ce règlement.

70      Par ailleurs, ainsi que la Hongrie le fait valoir, le législateur de l’Union a adopté des dispositions spécifiques anti-cumul dans le règlement no 1307/2013.

71      Premièrement, le considérant 50 de ce règlement énonce que, « [a]fin de garantir une utilisation efficace et ciblée des fonds de l’Union et afin d’éviter un double financement au titre d’autres instruments de soutien similaires, il convient de déléguer à la Commission le pouvoir d’adopter certains actes en vue de définir les conditions d’octroi du soutien couplé facultatif ainsi que les règles relatives à sa cohérence avec d’autres mesures de l’Union et au cumul d’aides ».

72      Ainsi, ce considérant marque l’intention du législateur de l’Union de prévenir un double financement résultant de la possibilité pour les États membres d’accorder un paiement complémentaire, le soutien couplé facultatif, aux exploitants agricoles de certains secteurs limitativement énumérés, dans des régions où ces secteurs agricoles sont particulièrement importants pour des raisons économiques, sociales ou environnementales et où ils rencontrent des difficultés.

73      Deuxièmement, l’article 43, paragraphe 4, du règlement no 1307/2013 dispose que « [l]es pratiques équivalentes visées au paragraphe 3 ne bénéficient pas d’un double financement ».

74      Conformément au paragraphe 3 du même article, les pratiques équivalentes sont celles qui incluent des pratiques similaires ayant des effets bénéfiques pour le climat et l’environnement équivalents ou supérieurs aux effets de l’une ou plusieurs des pratiques agricoles bénéfiques pour le climat et l’environnement, qui sont, quant à elles, visées au paragraphe 2 du même article.

75      Troisièmement, en application de l’article 43, paragraphe 12, sous c), du règlement no 1307/2013, la Commission est habilitée à adopter un acte délégué en vue d’établir les modalités de calcul du montant des paiements agroenvironnementaux et climatiques, visés à l’article 28, paragraphe 6, du règlement no 1305/2013, en ce qui concerne certaines pratiques équivalentes aux pratiques agricoles bénéfiques pour le climat et l’environnement, et toute autre pratique équivalente ajoutée à cette annexe conformément à l’article 43, paragraphe 12, sous a), du même règlement, « lorsqu’un calcul spécifique est nécessaire pour éviter un double financement ».

76      Par conséquent, la circonstance selon laquelle le législateur de l’Union a adopté des dispositions spécifiques pour empêcher le cumul des paiements agroenvironnementaux et climatiques et du paiement vert lié à certaines pratiques équivalentes aux pratiques agricoles bénéfiques pour le climat et l’environnement ne signifie pas, contrairement à ce que soutient la Hongrie, que le cumul des aides à l’écologisation et au boisement est autorisé, par une forme de dérogation implicite à l’article 30 du règlement no 1306/2013.

77      En effet, il convient de considérer que le législateur de l’Union a simplement réaffirmé, s’agissant des paiements agroenvironnementaux et climatiques et de certaines pratiques équivalentes, la règle d’interdiction du double financement déjà fixée par l’article 30 du règlement no 1306/2013, aux fins d’étayer et de délimiter explicitement les objectifs, le contenu et la portée de la disposition subséquente habilitant la Commission à adopter des actes délégués pour établir les modalités de calcul de la déduction devant être imputée sur les paiements agroenvironnementaux et climatiques, en raison du paiement vert lié à certaines pratiques équivalentes aux pratiques agricoles bénéfiques pour le climat et l’environnement.

78      Enfin, cette interprétation est corroborée par la lecture du règlement (UE) no 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) no 922/72, (CEE) no 234/79, (CE) no 1037/2001 et (CE) no 1234/2007 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 671).

79      Ce règlement, qui constitue l’un des règlements de base de la PAC, établit une organisation commune des marchés pour les produits agricoles, à l’exclusion des produits de la pêche et de l’aquaculture, et, conformément à son article 2, le règlement no 1306/2013 est applicable aux mesures prévues par le règlement no 1308/2013.

80      Or, ce règlement comporte également des clauses spécifiques qui habilitent la Commission à adopter des actes délégués afin de prévenir des situations de double financement dans le secteur des fruits et légumes, le secteur vitivinicole et le secteur de l’apiculture, en lien avec des mesures susceptibles de figurer dans les plans de développement rural et, partant, d’être financées par le Feader.

81      En outre, ce n’est que pour le secteur des fruits et légumes, à l’article 33, paragraphe 2, sous c), du règlement no 1308/2013, que le législateur a, en quelque sorte, réaffirmé la clause d’exclusion du double financement prévue par l’article 30 du règlement no 1306/2013, en imposant aux États membres de s’assurer de l’absence de double financement lors de l’examen des programmes opérationnels d’associations d’organisations de producteurs de ce secteur.

82      Or, le législateur n’a pas jugé utile de réaffirmer cette règle pour les secteurs vitivinicole et de l’apiculture.

83      Ainsi, la rédaction du règlement no 1308/2013 atteste d’une pratique variable de la part du législateur de l’Union, ce dernier n’ayant pas toujours jugé nécessaire de réitérer l’interdiction générale des doubles financements au soutien des dispositions habilitant la Commission à adopter des actes délégués en vue de calculer les déductions imputables sur les montants de certaines aides.

84      Par conséquent, l’argument contextuel de la Hongrie, selon lequel la clause d’interdiction des doubles financements prévue par l’article 30 du règlement no 1306/2013 ne revêtirait pas une portée générale en raison de l’existence de clause anti-cumuls spécifiques dans les règlements sectoriels de la PAC doit être rejeté.

85      En troisième lieu, l’interprétation finaliste de l’article 30 du règlement no 1306/2013 tend à renforcer l’approche selon laquelle une clause d’exclusion du double financement a une portée large.

86      En effet, il ressort du considérant 3 du règlement no 1306/2013 que ce règlement a, notamment, pour but de traiter dans un même ensemble de règles les dispositions relatives au financement de la PAC, tout en maintenant le FEAGA et le Feader et en autorisant des traitements différents selon la nature des mesures susceptibles d’être financées.

87      Dans ce cadre, le considérant 4 du règlement no 1306/2013 se réfère, notamment, au principe de bonne gestion financière.

88      Le considérant 24 du règlement no 1306/2013 évoque les objectifs de clarté juridique et de cohérence entre les fonds couverts par le règlement no 1306/2013, y compris le Feader.

89      En outre, le considérant 48 du règlement no 1306/2013 évoque l’obligation pour les États membres d’assurer une protection efficace des intérêts financiers du budget de l’Union.

90      Par conséquent, il y a lieu de déduire de ces dispositions que l’article 30 du règlement no 1306/2013 a pour finalité d’assurer la cohérence entre le Feader et les autres programmes budgétaires de l’Union dans le respect du principe de bonne gestion financière et de la protection des intérêts financiers de l’Union.

91      Cet objectif est conforté, par ailleurs, par la jurisprudence selon laquelle, dans le cadre du financement de la PAC, une interprétation stricte des conditions de prise en charge des dépenses de l’Union s’impose, car la gestion de cette politique, dans des conditions d’égalité entre les opérateurs économiques des États membres, s’oppose à ce que les autorités d’un État membre favorisent les opérateurs de cet État membre par le biais d’une interprétation large d’une disposition du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 12 février 2020, Hongrie/Commission, T‑505/18, non publié, EU:T:2020:56, point 41 et jurisprudence citée).

92      En quatrième lieu, l’interprétation historique ne fait que confirmer la portée générale de la clause d’exclusion du double financement.

93      En effet, l’article 29 de la proposition initiale de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune [COM/2011/0628 final – 2011/0288 (COD)], du 12 octobre 2011, comportait une clause d’exclusion du double financement rédigée comme suit :

« Sans préjudice de l’admissibilité à l’aide en application de l’article 30, paragraphe 2, du règlement [relatif au soutien au développement rural par le Feader], les dépenses financées au titre du Feader ne font l’objet d’aucun autre financement à partir du budget de l’UE. »

94      L’article 30, paragraphe 2, de la proposition initiale de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au soutien au développement rural par le Feader [COM/2011/0627 final – 2011/0282 (COD)], qui a été adoptée le même jour par la Commission, portait sur une mesure spécifique du Feader, l’aide à l’agriculture biologique.

95      Ainsi, cette disposition prévoyait que « l’aide à l’agriculture biologique n’est accordée que pour les engagements qui vont au-delà des normes obligatoires établies en application du titre VI, chapitre 1, du règlement [relatif au financement, à la gestion et au suivi de la PAC], des exigences minimales applicables à l’utilisation des engrais et des produits phytosanitaires, ainsi que des autres exigences obligatoires correspondantes, établies par la législation nationale » et que « [t]outes ces exigences sont recensées dans le programme ».

96      Par conséquent, dans sa rédaction initiale, la clause d’exclusion du double financement des dépenses financées au titre du Feader était applicable à toutes ces dépenses, à l’exception de l’aide à l’agriculture biologique, à laquelle cette clause ne pouvait préjudicier.

97      Toutefois, dans son projet de résolution législative sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au financement, à la gestion et au suivi de la PAC [(COM(2011)0628 – C7 0341/2011 – COM(2012)0551 – C7-0312/2012 – 2011/0288(COD)], le Parlement a proposé de supprimer cette référence à l’article 30, paragraphe 2, du règlement relatif au soutien au développement rural par le Feader, aboutissant ainsi à la rédaction qui a été retenue par le législateur de l’Union.

98      Par conséquent, cet historique conforte la position selon laquelle la clause d’exclusion du double financement revêt une portée générale en ce qu’elle s’applique à l’ensemble des mesures prévues par le règlement no 1305/2013.

99      Ainsi, il résulte des divers éléments d’interprétation que l’article 30 du règlement no 1306/2013 a une portée générale et doit s’appliquer à chaque fois que le même bénéficiaire est susceptible de recevoir, au titre de la même parcelle, un autre financement émanant du budget de l’Union et poursuivant le même objet, indépendamment du caractère compensatoire ou incitatif des financements en cause.

100    Concernant l’interprétation de l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution no 809/2014, il y a lieu de relever que ce règlement a pour seul objet d’établir les modalités d’application du règlement no 1306/2013.

101    Par conséquent, et ainsi que l’ont reconnu les parties pendant l’audience, l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution no 809/2014, aux termes duquel les États membres doivent garantir, par leurs contrôles administratifs, l’absence de double financement par d’autres régimes de l’Union, ne saurait recevoir une interprétation distincte de celle de l’article 30 du règlement no 1306/2013.

102    Dès lors, le premier grief de la troisième branche, par lequel la Hongrie critique l’interprétation de la Commission quant à la portée générale de l’article 30 du règlement no 1306/2013 et de l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution no 809/2014, doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le second grief de la troisième branche du moyen unique

103    Dans le cadre du second grief de la troisième branche du moyen unique, la Hongrie fait valoir que la règlementation de l’Union ne permettrait pas de déterminer les modalités de calcul de la déduction devant être imputée sur l’aide au boisement lorsqu’un exploitant agricole perçoit simultanément l’aide à l’écologisation.

104    Par suite, tant l’article 30 du règlement no 1306/2013 que l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution no 809/2014 seraient inapplicables dans l’hypothèse du cumul des aides au boisement et à l’écologisation.

105    Ainsi qu’il ressort de l’analyse du premier grief de la troisième branche du moyen unique, dans le cas du cumul des aides au boisement et à l’écologisation, le législateur de l’Union n’a pas confié de pouvoir délégué à la Commission afin qu’elle précise les modalités de calcul de la déduction. De même, le législateur de l’Union n’a pas octroyé à la Commission de compétence d’exécution en ce sens.

106    Par conséquent, c’est bien aux États membres qu’il incombe d’élaborer une méthodologie pour calculer cette déduction lorsque la situation de cumul des aides se vérifie.

107    Dans ce contexte, le grief tiré de ce que le législateur de l’Union n’aurait pas confié à la Commission le pouvoir de prendre des actes délégués ou des actes d’exécution afin de déterminer précisément les modalités de calcul de la déduction imputable sur l’aide au boisement lorsque le bénéficiaire perçoit également, au titre de la même parcelle boisée, l’aide à l’écologisation, manque en droit.

108    En effet, conformément à l’article 291, paragraphe 1, TFUE, il revient en principe aux États membres de prendre toutes les mesures de droit interne pour la mise en œuvre des actes juridiquement contraignants de l’Union. Aux termes du paragraphe 2 de cet article, sauf dans des cas spécifiques, ce n’est que lorsque des conditions uniformes d’exécution des actes juridiquement contraignants de l’Union sont nécessaires et que ces actes confèrent des compétences d’exécution à la Commission que cette institution peut adopter des actes d’exécution.

109    Ainsi, selon le système institutionnel de l’Union et les règles régissant les relations entre l’Union et ses États membres, il appartient à ces derniers, en l’absence d’une disposition contraire du droit de l’Union, d’assurer, sur leur territoire, l’exécution du droit de l’Union, notamment dans le cadre de la PAC (voir, par analogie, arrêt du 23 novembre 1995, Nutral/Commission, C‑476/93 P, EU:C:1995:401, point 14).

110    Pour ce qui est plus particulièrement des actions de financement décidées dans le cadre de cette politique, il incombe aux États membres, selon l’article 58 du règlement n1306/2013, de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer une protection efficace des intérêts financiers de l’Union, en particulier pour récupérer les sommes perdues à la suite d’irrégularités ou de négligences (voir, par analogie, arrêt du 30 janvier 2019, Belgique/Commission, C‑587/17 P, EU:C:2019:75, point 66).

111    Ainsi, l’article 58, paragraphe 1, du règlement n1306/2013, en imposant aux États membres de veiller à protéger les intérêts financiers de l’Union et de récupérer les sommes indûment versées, est l’expression, en ce qui concerne le financement de la PAC, de l’obligation de diligence générale prévue à l’article 4, paragraphe 3, TUE. Cette obligation, qui s’applique tout au long de la procédure de recouvrement de ces sommes, implique que les autorités nationales procèdent au recouvrement avec promptitude et en temps utile, et recourent aux moyens de vérification et de récupération à leur disposition afin de garantir la protection de ces intérêts (voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 2019, Belgique/Commission, C‑587/17 P, EU:C:2019:75, point 67).

112    Dès lors, la seule circonstance que les dispositions du droit de l’Union ne précisent pas les mesures spécifiques devant être adoptées en vue de la protection des intérêts financiers de l’Union et, notamment, de la récupération des sommes indûment versées en cas de cumul des aides à l’écologisation et au boisement ne saurait être considérée comme entachant d’illégalité la décision attaquée.

113    À cet égard, il convient de rappeler que, la gestion du financement du FEAGA reposant principalement sur les administrations nationales, qui sont chargées de veiller à la stricte observation des règles de l’Union et qui jouissent de la proximité géographique nécessaire à cette fin, les États membres sont les mieux placés pour récupérer les sommes indûment versées ou perdues à la suite d’irrégularités ou de négligences et pour déterminer les mesures les plus appropriées à prendre à cet égard (arrêt du 30 janvier 2019, Belgique/Commission, C‑587/17 P, EU:C:2019:75, point 69).

114    Ainsi, il appartient aux autorités nationales, sous réserve de respecter l’obligation de diligence, de choisir les modalités les plus appropriées en vue de la récupération des sommes en cause, en fonction des circonstances particulières de l’espèce (voir, par analogie, arrêt du 30 janvier 2019, Belgique/Commission, C‑587/17 P, EU:C:2019:75, points 68 et 70 et jurisprudence citée).

115    Enfin, il résulte de la jurisprudence qu’un État membre ne saurait invoquer des difficultés liées à l’interprétation d’un texte de l’Union pour en différer unilatéralement la mise en œuvre et qu’il incombe, au contraire, à l’État concerné de soumettre ces difficultés à l’appréciation de la Commission, en vertu de la règle imposant aux États membres et aux institutions des devoirs réciproques de coopération loyale, qui inspire, notamment, l’article 4, paragraphe 3, TUE (voir arrêt du 12 juillet 2017, Estonie/Commission, T‑157/15, non publié, EU:T:2017:483, point 33 et jurisprudence citée).

116    Dès lors, ce grief doit également être rejeté, de même que la troisième branche du moyen unique dans son intégralité.

 Sur les première et deuxième branches du moyen unique, relatives aux différences entre l’aide à l’écologisation et l’aide au boisement

117    Au soutien de la première branche du moyen unique, la Hongrie fait valoir que les aides au boisement et à l’écologisation financent des dépenses de nature différente et poursuivent, par conséquent, des objectifs différents.

118    Ainsi, il résulterait de l’article 22 du règlement no 1305/2013 que l’aide au boisement vise à financer deux groupes de dépenses, à savoir, d’une part, les coûts directs d’installation et, d’autre part, les pertes de revenus agricoles et les coûts d’entretien, lesquels ouvrent droit au paiement d’une aide annuelle par hectare. Ainsi, c’est à tort que la Commission distinguerait, au sein de l’aide annuelle par hectare, une composante qui aurait pour seul objet de compenser la perte des revenus agricoles, alors que l’aide au boisement couvrirait également, et à titre principal, les coûts annuels de conservation et d’entretien des forêts.

119    En particulier, la Hongrie souligne que l’objectif de l’aide au boisement serait de faire naître la valeur inhérente à la forêt par la plantation des surfaces et par leur conservation, tandis que l’objectif de l’aide à l’écologisation se limiterait à la conservation des surfaces boisées dans le respect de l’aire de production agricole, sans nécessairement emporter des moyens de mise en œuvre aussi coûteux que le boisement.

120    Cette interprétation serait confortée par le considérant 28 du règlement no 1305/2013 et par l’article 6 du règlement délégué (UE) no 807/2014 de la Commission, du 11 mars 2014, complétant le règlement no 1305/2013 et introduisant des dispositions transitoires (JO 2014, L 227, p. 1), ainsi que par le point 3.4.2 du document explicatif, dans sa version de février 2017.

121    De même, les considérants 37 à 39 du règlement no 1307/2013 corroboreraient l’intention du législateur de l’Union de conférer à l’aide à l’écologisation un caractère incitatif et non compensatoire, ainsi qu’en attesterait, au demeurant, la circonstance selon laquelle le montant de cette aide est établi par hectare, sans prise en compte des revenus perdus ou des surcoûts encourus.

122    La Hongrie fait également valoir que, selon l’interprétation littérale de l’article 32, paragraphe 2, sous b), ii), et de l’article 46, paragraphe 2, sous h), du règlement no 1307/2013, lesquels se réfèrent aux surfaces boisées au sens de l’article 22 du règlement no 1305/2013, rien ne ferait obstacle à ce qu’une surface boisée bénéficie, en plus de l’aide au boisement, d’une aide à l’écologisation.

123    Au soutien de la deuxième branche du moyen unique, la Hongrie soutient que les aides au boisement et à l’écologisation se caractérisent par des modalités de calcul et des critères d’éligibilité différents.

124    D’une part, la Hongrie se prévaut de l’absence de relation évidente entre l’aide à l’écologisation et la surface boisée. Elle fait ainsi valoir que le montant de l’aide à l’écologisation, qui est calculé sur la base de tous les hectares de l’exploitation, ne serait pas corrélé au nombre d’hectares constituant la surface d’intérêt écologique, de même qu’une surface boisée pourrait ouvrir droit à l’aide à l’écologisation sans pour autant être comptabilisée comme une surface d’intérêt écologique.

125    D’autre part, la Hongrie se prévaut de l’absence de relation directe entre l’aide à l’écologisation et la perte de revenus occasionnée par une surface boisée. Elle fait ainsi valoir que le montant de l’aide à l’écologisation ne tiendrait pas compte de l’ampleur réelle, et variable d’une surface à l’autre, de la perte de revenus résultant de la plantation d’espèces boisées sur une surface donnée, en lieu et place de cultures agricoles productives. Ainsi, il serait impossible de déterminer la proportion de l’aide à l’écologisation qui doit être prise en compte pour apprécier l’existence d’un éventuel double financement.

126    La Commission conteste les arguments avancés au soutien des première et deuxième branches du moyen unique.

127    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il a été constaté au point 99 ci-dessus, l’article 30 du règlement no 1306/2013 et l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution no 809/2014 doivent s’appliquer indépendamment du caractère compensatoire ou incitatif des aides lorsqu’un exploitant agricole perçoit les deux aides simultanément au titre de la même surface boisée.

128    Certes, l’aide à l’écologisation et l’aide au boisement ne visent pas à rembourser le même groupe de coûts éligibles et ne sont pas octroyées sur la base du même critère d’éligibilité, puisque la première constitue, en ce qu’elle participe au système des paiements directs en faveur des agriculteurs, une aide au revenu de l’agriculteur, tandis que la seconde a pour finalité de couvrir les coûts d’installation de la surface boisée et de son entretien ainsi que la perte de revenus agricoles. Toutefois, les deux aides ont une composante qui récompense la même activité, à savoir la décision d’un agriculteur de pratiquer des cultures non agricoles sur une superficie donnée qui implique nécessairement un manque-à-gagner.

129    En effet, une prime annuelle par hectare, prévue à l’article 22, paragraphe 1, du règlement no 1305/2013, qui est destinée, en partie, à couvrir les pertes de revenus agricoles, et l’aide destinée à couvrir un manque-à-gagner qui résulte de la déclaration d’une superficie boisée en tant que surface d’intérêt écologique se chevauchent, puisque, dans les deux hypothèses, la perte de revenus résulte du fait que la superficie déclarée en tant que surface d’intérêt écologique n’est plus soumise à une production agricole plus rentable que l’agriculture « verte ».

130    Par ailleurs, ainsi que le relève la Commission, aux termes de l’article 22 du règlement no 1305/2013, l’aide au boisement se traduit par une prime annuelle par hectare pour une période maximale de douze ans et tant les terres agricoles que non agricoles sont admissibles au bénéfice de cette aide.

131    Or, en application de l’article 46 du règlement no 1307/2013, sous réserve d’une décision de l’État membre en ce sens, une surface boisée peut constituer une surface d’intérêt écologique lorsque les terres arables d’une exploitation couvrent plus de 15 hectares et que cette surface boisée correspond à au moins 5 % des terres arables de l’exploitation.

132    En outre, l’aide à l’écologisation prend la forme d’un paiement annuel par hectare admissible déclaré.

133    Par conséquent, le cumul de l’aide à l’écologisation et de l’aide au boisement relève bien de la clause d’interdiction des doubles financements prévue par l’article 30 du règlement no 1306/2013 dans la mesure où la même surface boisée donne lieu, pour la même période temporelle, au paiement de ces deux aides.

 Sur l’argument relatif au caractère excessif de la période concernée par la correction financière

134    Dans la réplique, la Hongrie indique qu’elle entend également contester le montant des dépenses exclues du Feader fixé par la décision attaquée. Elle estime, à cet égard, qu’il aurait été justifié de réduire ce montant, conformément aux préconisations de l’organe de conciliation, en raison du manque de clarté de la législation de l’Union et de la position de la Commission avant avril 2017.

135    Or, il convient de constater que cette demande n’apparaît pas dans la requête.

136    Interrogée par le Tribunal quant à la question de savoir si cette argumentation constituait un moyen nouveau au sens de l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal et sur sa recevabilité, la Hongrie explique que la requête contenait déjà un argument selon lequel la Commission n’avait pas calculé correctement la période concernée par la correction. D’une part, elle soutient que son argument, selon lequel l’intention du législateur de l’Union n’avait pas la portée que lui donne la Commission en soutenant qu’il peut y avoir un risque de double financement dans le cas des aides à l’écologisation et au boisement, a été étayé par la circonstance selon laquelle des clarifications n’ont été apportées que dans le document explicatif. D’autre part, la Hongrie rappelle que, dans sa requête, elle a indiqué que l’organe de conciliation avait proposé à la Commission de calculer la période de correction uniquement à partir de 2017. Ainsi, cette argumentation ne serait qu’une ampliation des arguments invoqués dans la requête.

137    Quant à la Commission, elle estime, en substance, que l’argumentation en question constitue un moyen nouveau et irrecevable.

138    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite, à moins que ces moyens ne soient fondés sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Selon la jurisprudence, cette disposition est applicable également aux griefs ou aux arguments (voir arrêt du 14 juillet 2021, AQ/eu-LISA, T‑164/19, non publié, EU:T:2021:456, point 59 et jurisprudence citée).

139    Ainsi, un moyen, ou un argument, qui constitue l’ampliation d’un moyen énoncé, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance, et qui présente un lien étroit avec celui-ci doit être déclaré recevable (voir arrêt du 11 novembre 2021, Grèce/Commission, C‑106/20 P, non publié, EU:C:2021:914, point 41 et jurisprudence citée).

140    En l’espèce, dans sa requête, la Hongrie a soutenu que l’article 30 du règlement no 1306/2013 et l’article 28, paragraphe 1, sous b), du règlement d’exécution no 809/2014 ne permettaient pas, à eux seuls, de calculer le montant de la déduction imputable sur le montant de l’aide au boisement, lorsqu’un exploitant agricole percevait, en outre et simultanément, l’aide à l’écologisation au titre de la même parcelle boisée.

141    Cette argumentation, visant à démontrer que les dispositions citées étaient purement et simplement inapplicables, tend à l’annulation de la correction pour l’ensemble de la période en cause.

142    Certes, la Hongrie a mentionné le fait que l’organe de conciliation a proposé de ne calculer la période de correction qu’à partir d’avril 2017, ce que la Commission a rejeté. Toutefois, force est de constater que, ce faisant, la Hongrie s’est limitée à mentionner cet élément, sans l’utiliser dans une argumentation tirée de la violation des dispositions invoquées s’agissant de la détermination de la période couverte par les corrections financières.

143    En revanche, l’argumentation développée dans la réplique consiste à soutenir que l’article 30 du règlement no 1306/2013 n’était pas suffisamment clair jusqu’à ce que la Commission modifie son document explicatif en février 2017 et vise, dès lors, la réduction de la correction au motif du caractère excessif de la période de correction.

144    Par conséquent, il s’agit d’un moyen nouveau au sens de l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure et non d’une ampliation d’un argument soulevé dans la requête. Dans la mesure où il ne se fonde pas sur un élément révélé au cours de la procédure au sens de cette dernière disposition et où il n’est pas d’ordre public, il doit être écarté comme étant tardif et, partant, irrecevable.

145    À la lumière de l’ensemble des considérations qui précèdent, le recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

146    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Hongrie ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La Hongrie est condamnée aux dépens.

Spielmann

Valančius

Gâlea

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 juillet 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : le hongrois.

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